L’Essentiel : M. [L] [V], de nationalité guinéenne, a été placé en rétention administrative par le Préfet du Maine et Loire suite à un arrêté du 15 janvier 2025, après un précédent arrêté du 26 décembre 2023. Contestant cette mesure, il a formé appel le 21 janvier 2025, arguant d’une évaluation insuffisante de sa situation personnelle. Le tribunal, après avoir examiné la légalité de la rétention, a confirmé l’ordonnance du 20 janvier 2025, rejetant également sa demande d’indemnisation. La décision a été rendue le 22 janvier 2025, avec possibilité de pourvoi en cassation dans un délai de deux mois.
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Contexte de l’affaireM. [L] [V], de nationalité guinéenne, a été placé en rétention administrative par le Préfet du Maine et Loire suite à un arrêté du 15 janvier 2025. Cette décision fait suite à un précédent arrêté du 26 décembre 2023, qui lui imposait de quitter le territoire français. Procédure judiciaireLe 19 janvier 2025, le Préfet a demandé une prolongation de la rétention, ce qui a conduit M. [V] à contester la régularité de cette mesure. Le 20 janvier 2025, le juge des libertés a validé la prolongation de la rétention pour une durée maximale de vingt-six jours, considérant que le Préfet avait effectué un examen approfondi de la situation de M. [V]. Arguments de l’appelantM. [V] a formé appel de cette décision le 21 janvier 2025, arguant que le Préfet n’avait pas correctement évalué sa situation personnelle, notamment son hébergement chez un ami et la demande d’asile de sa compagne, qui est enceinte. Il a également demandé une indemnisation de 700 euros pour les frais juridiques. Réactions des partiesLe Procureur Général a soutenu la confirmation de l’ordonnance de rétention, tout comme le Préfet du Maine et Loire dans son mémoire. Analyse des motifs de la décisionLe tribunal a examiné la légalité de la rétention en se basant sur les critères du CESEDA, notamment le risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement. Il a été établi que M. [V] avait déjà contourné plusieurs mesures d’éloignement et ne disposait pas de documents d’identité valides. Conclusion du tribunalLe tribunal a confirmé l’ordonnance du 20 janvier 2025, rejetant la demande d’indemnisation de M. [V]. La décision a été rendue le 22 janvier 2025, et les dépens ont été laissés à la charge du Trésor Public. M. [V] a été informé de la possibilité de se pourvoir en cassation dans un délai de deux mois. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le cadre juridique du placement en rétention administrative selon le CESEDA ?Le cadre juridique du placement en rétention administrative est principalement défini par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). L’article L. 741-1 stipule que l’autorité administrative peut placer en rétention un étranger pour une durée de quatre jours, lorsque celui-ci ne présente pas de garanties de représentation effectives. Cette mesure est justifiée par la nécessité de prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement. Il est également précisé que le risque est apprécié selon les critères de l’article L. 612-3, qui énumère les situations dans lesquelles un risque de soustraction peut être établi. Ces situations incluent, par exemple, le fait que l’étranger ne puisse justifier d’une entrée régulière sur le territoire français ou qu’il se soit soustrait à une précédente mesure d’éloignement. De plus, l’article L. 741-4 du CESEDA impose de prendre en compte l’état de vulnérabilité de l’étranger lors de la décision de placement en rétention. Ainsi, le cadre juridique est strict et vise à garantir que les droits des étrangers soient respectés tout en permettant à l’administration de procéder à des mesures d’éloignement lorsque cela est nécessaire. Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative ?La prolongation de la rétention administrative est régie par les articles L. 741-1 et L. 741-4 du CESEDA. L’article L. 741-1 précise que la rétention peut être prolongée au-delà de la durée initiale de quatre jours, sous certaines conditions. La prolongation est justifiée lorsque l’autorité administrative démontre qu’il n’existe pas d’autres mesures suffisantes pour garantir l’exécution de la décision d’éloignement. Il est également essentiel que l’examen de la situation de l’étranger soit approfondi, comme l’indique l’ordonnance du juge des libertés. L’article L. 741-4 impose que l’état de vulnérabilité de l’étranger soit pris en compte lors de la décision de prolongation. Cela signifie que si l’étranger présente des besoins spécifiques, ceux-ci doivent être considérés pour déterminer les conditions de sa rétention. En résumé, la prolongation de la rétention administrative nécessite une évaluation rigoureuse de la situation de l’étranger et doit respecter ses droits fondamentaux. Quels sont les recours possibles contre une décision de placement en rétention ?Les recours contre une décision de placement en rétention sont prévus par le Code de procédure civile et le CESEDA. L’article L. 512-1 du CESEDA permet à l’étranger de contester la décision de placement en rétention devant le juge des libertés et de la détention. Ce recours doit être exercé dans un délai de 48 heures suivant la notification de la décision. De plus, l’article 973 du Code de procédure civile stipule que les décisions rendues par le juge des libertés peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation dans un délai de deux mois. Il est important de noter que l’étranger a le droit d’être assisté par un avocat lors de ces procédures. Ainsi, les recours sont encadrés par des délais stricts et garantissent le droit à un procès équitable pour les étrangers placés en rétention. En conclusion, les voies de recours sont essentielles pour assurer la protection des droits des étrangers face aux décisions administratives. Quelles sont les implications de l’absence de documents d’identité pour un étranger en rétention ?L’absence de documents d’identité a des implications significatives pour un étranger en rétention, comme le stipule l’article L. 612-3 du CESEDA. Cet article énumère plusieurs situations dans lesquelles un risque de soustraction à l’exécution d’une décision d’éloignement peut être établi. Parmi ces situations, l’absence de documents d’identité ou de voyage en cours de validité est un facteur déterminant. Cela signifie que l’étranger ne peut pas prouver son identité, ce qui complique son retour dans son pays d’origine. De plus, l’article L. 612-3 mentionne que l’absence de garanties de représentation suffisantes peut justifier le placement en rétention. Ainsi, l’absence de documents d’identité peut être interprétée comme un manque de coopération de l’étranger, renforçant la décision de le maintenir en rétention. En somme, l’absence de documents d’identité constitue un obstacle majeur à la régularisation de la situation de l’étranger et à l’exécution de la décision d’éloignement. Quels sont les critères d’appréciation du risque de soustraction à l’exécution d’une décision d’éloignement ?Les critères d’appréciation du risque de soustraction à l’exécution d’une décision d’éloignement sont définis par l’article L. 612-3 du CESEDA. Cet article énonce plusieurs situations dans lesquelles le risque peut être considéré comme établi. Par exemple, un étranger qui ne peut justifier d’une entrée régulière sur le territoire français ou qui s’est maintenu au-delà de la durée de validité de son visa est susceptible d’être considéré comme présentant un risque. De même, si l’étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français, cela renforce l’évaluation du risque. L’article mentionne également que le fait de s’être soustrait à une précédente mesure d’éloignement est un critère pertinent. Enfin, l’absence de garanties de représentation, comme le refus de communiquer des informations sur son identité, est également un facteur déterminant. Ces critères permettent à l’autorité administrative d’évaluer de manière objective le risque que représente un étranger en matière d’éloignement. |
N° 25/26
N° RG 25/00043 – N° Portalis DBVL-V-B7J-VSMV
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
articles L 741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile
Nous, Jean-Denis BRUN, conseiller à la cour d’appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Eric LOISELEUR, greffier placé,
M. [L] [V]
né le 26 Avril 1991 à [Localité 1] (GUINEE)
de nationalité Guinéenne
ayant pour avocat Me Léo-paul BERTHAUT, avocat au barreau de RENNES
d’une ordonnance rendue le 20 Janvier 2025 à 17H31 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a rejeté le recours formé à l’encontre de l’arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [L] [V] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-six jours à compter du 19 Janvier 2025 à 24H00;
En l’absence de représentant de la PREFECTURE DE MAINE ET LOIRE, dûment convoqué, ayant adressé un mémoire le 21 Janvier 2025, lequel a été mis à disposition des parties,
En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur FICHOT, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 21 Janvier 2025 lequel a été mis à disposition des parties.
En présence de [L] [V], assisté de Me Léo-paul BERTHAUT, avocat,
Après avoir entendu en audience publique le 22 Janvier 2025 à 10H30 l’appelant assisté de son avocat en leurs observations,
Avons mis l’affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :
Par arrêté du 26 décembre 2023 le Préfet du Maine et Loire a fait obligation à Monsieur [L] [V] de quitter le territoire français.
Par arrêté du 15 janvier 2025 notifié le 16 janvier 2025 Nle Préfet du Maine et Loire a placé Monsieur [V] en rétention dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire.
Par requête du 19 janvier 2025 le Préfet du Maine et Loire a saisi le magistrat du siège chargé du contrôle des mesures restrictives de liberté du Tribunal Judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation de la rétention.
Par requête du même jour Monsieur [V] a contesté la régularité de l’arrêté de placement en rétention.
Par ordonnance du 20 janvier 2025 le juge des libertés a dit que le Préfet du Maine et Loire avait procédé à un examen approfondi de la situation de l’intéressé et n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation, et a autorisé la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-six jours à compter du 19 janvier 2025 à 24 heures.
Par déclaration du 21 janvier 2025 Monsieur [V] a formé appel de cette décision en faisant
grief au Préfet de ne pas avoir procédé à un examen approfondi de sa situation et avoir commis une erreur manifeste d’appréciation en ne retenant pas qu’il habitait chez un ami avec sa compagne et que cette dernière avait fait une demande d’asile et était enceinte.
A l’audience, Monsieur [V], assisté de son Avocat, fait développer oralement les termes de sa déclaration d’appel et sollicite la condamnation du Préfet à lui payer la somme de 700,00 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle.
Selon avis du 21 janvier 2025 le Procureur Général a sollicité la confirmation de l’ordonnance attaquée.
Dans son mémoire du 21 janvier 2025 Le Préfet du Maine et Loire conclut à la confirmation de l’ordonnance attaquée.
L’appel, formé dans les formes et délais légaux, est recevable.
Sur le défaut d’examen approfondi de la situation et l’erreur manifeste d’appréciation,
L’article L. 741-1 prévoit que l’autorité administrative peut placer en rétention, pour une du-rée de quatre jours, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l’ar-ticle L. 612-3 ou au regard de la menace pour l’ordre public que l’étranger représente.
Aux termes de l’article L. 612-3 du CESEDA, le risque mentionné au 3° de l’article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L’étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n’a pas sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;
2° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation du visa, à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;
3° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français plus d’un mois après l’expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son auto-risation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L’étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L’étranger s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure d’éloignement ;
6° L’étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l’un des États avec lesquels s’applique l’acquis de Schengen, fait l’objet d’une décision d’éloignement exécutoire prise par l’un des États ou s’est maintenu sur le territoire d’un de ces États sans justifier d’un droit de séjour ;
7° L’étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité ou de voyage ou a fait usage d’un tel titre ou document;
8° L’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu’il ne peut présenter des documents d’identité ou de voyage en cours de validité, qu’il a refusé de commu-niquer les renseignements permettant d’établir son identité ou sa situation au regard du droit de cir-culation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu’il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d’empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l’article L. 142-1, qu’il ne justifie pas d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu’il s’est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5 « .
Enfin, aux termes de l’article L741-4 du CESEDA la décision de placement en rétention prend en compte l’état de vulnérabilité et tout handicap de l’étranger. Le handicap moteur, cognitif ou psy-chique et les besoins d’accompagnement de l’étranger sont pris en compte pour déterminer les condi-tions de son placement en rétention.
Il résulte des termes de la décision de placement en rétention que cette dernière est motivée par la soustraction de Monsieur [V] à trois mesures d’éloignement du 25 mai 2020, 1er septembre 2021 et 26 décembre 2023 et à mesure d’assignation à résidence du 1er juillet 2021, l’absence de docu-ment d’identité ou de voyage en cours de validité et d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale.
Les pièces de la procédure débattues contradictoirement montrent qu’il s’est soustrait effectivement aux mesures d’éloignement précitées et à la mesure d’assignation à résidence, qu’il ne dispose d’aucun document de voyage ou d’identité et que lors de son audition datant de trois mois et demi (08 octobre 2024), il avait déclaré d’une part qu’il vivait chez des amis, ou dans sa voiture ou dans des logements mis à disposition par le 115, d’autre part qu’il était seul, sans famille en France et qu’il se débrouillait avec des amis.
A la date de la décision de placement en rétention le Préfet avait donc bien procédé à un examen approfondi de sa situation et n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.
Les pièces produites devant le premier juge sont en contradiction avec la réalité qu’il décrivait il y a trois mois et demi et ne sont en conséquence pas probantes, étant en outre souligné que l’attestation de l’ami qui l’héberge évoque cet hébergement au présent et n’en précise pas la date.
Il en résulte que sa situation correspond aux 5° et 8° de l’article L612-3 du CESEDA.
L’ordonnance sera confirmée et la demande au titre des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sera rejetée.
Déclarons l’appel recevable,
Confirmons l’ordonnance du magistrat du siège chargé du contrôle des mesures restrictives de liberté du Tribunal Judiciaire de Rennes du 20 janvier 2025,
Rejetons la demande au titre des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991,
Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi jugé le 22 janvier 2025 à 15 heures 45 minutes.
LE GREFFIER LE CONSEILLER DELEGUE
Jean-Denis BRUN
Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [L] [V], à son avocat et au préfet
Le Greffier,
Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.
Le Greffier
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