Prolongation de la rétention administrative : enjeux de sécurité et droits des étrangers.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de sécurité et droits des étrangers.

L’Essentiel : Monsieur [H] [M], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative suite à une obligation de quitter le territoire français. Le 29 décembre 2024, le Préfet du Nord a demandé une prolongation de cette rétention, invoquant des préoccupations d’ordre public liées à une condamnation pour apologie du terrorisme. Son avocate a contesté cette demande, soulignant l’incertitude quant à l’identification et aux documents nécessaires pour son éloignement. Toutefois, le juge a jugé que la menace à l’ordre public justifiait la prolongation, autorisant ainsi une rétention supplémentaire de quinze jours à compter du 31 décembre 2024.

Contexte de l’affaire

Monsieur [H] [M], de nationalité algérienne, a été soumis à une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire. Cette décision a été prononcée par le Préfet du Nord le 1er novembre 2024, accompagnée d’une interdiction de retour sur le territoire français et d’un placement en rétention administrative pour une durée initiale de quatre jours.

Prolongation de la rétention

Le 29 décembre 2024, le Préfet du Nord a demandé une prolongation de la rétention administrative de Monsieur [H] [M] au-delà des quatre jours initiaux, en raison de la nécessité de maintenir l’intéressé en rétention pour une durée maximale de quinze jours supplémentaires. Cette demande a été motivée par des préoccupations concernant l’ordre public, notamment en raison d’une condamnation pour apologie du terrorisme et de plusieurs signalements pour des délits.

Observations des parties

Monsieur [H] [M] a exprimé son souhait d’être assisté par un avocat, affirmant son attachement à la France. Son avocate, Me Amélie DELATTRE, s’est opposée à la demande de prolongation, soulignant que l’enquête d’identification était toujours en cours et qu’il existait une incertitude quant à la délivrance des documents nécessaires pour son éloignement. L’avocat de la Préfecture a, quant à lui, insisté sur la menace à l’ordre public que représentait l’intéressé.

Motifs de la décision

Le juge a rappelé que, selon le Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile, la prolongation de la rétention peut être ordonnée en cas de menace pour l’ordre public. Bien que la délivrance des documents de voyage ne soit pas assurée, la condamnation de Monsieur [H] [M] pour apologie du terrorisme a été considérée comme une menace suffisante pour justifier la prolongation de sa rétention.

Décision finale

En conséquence, le juge a autorisé la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [H] [M] pour une durée maximale de quinze jours, à compter du 31 décembre 2024. L’ordonnance a été notifiée à l’intéressé, qui a été informé de son droit de faire appel de cette décision dans les vingt-quatre heures.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile ?

La prolongation de la rétention administrative est régie par l’article L. 742-5 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA). Cet article stipule que, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de la durée maximale prévue à l’article L. 742-4, dans certaines situations.

Ces situations incluent :

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté une demande de protection contre l’éloignement ou une demande d’asile dans le but de faire échec à la décision d’éloignement ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.

Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période maximale de quinze jours.

Il est important de noter que si l’une des circonstances mentionnées survient au cours de la prolongation, celle-ci peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions, sans que la durée maximale de la rétention n’excède quatre-vingt-dix jours.

Quels sont les droits de l’étranger en rétention administrative ?

Les droits de l’étranger en rétention administrative sont précisés dans les articles L. 743-9 et L. 743-24 du CESEDA. Ces articles stipulent que l’étranger doit être informé de ses droits pendant la rétention, notamment le droit d’être assisté par un avocat.

L’article L. 743-9 précise que l’étranger doit être informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant. Cela inclut le droit de contester la décision de rétention et d’éloignement.

De plus, l’article L. 743-24 souligne que l’étranger a le droit d’être assisté d’un avocat, ce qui est crucial pour garantir un procès équitable et le respect des droits fondamentaux.

Il est également important de noter que l’étranger peut faire appel de la décision de prolongation de la rétention dans un délai de vingt-quatre heures, et que cette déclaration d’appel doit être motivée.

Quelles sont les implications de la condamnation pour apologie du terrorisme sur la rétention administrative ?

La condamnation pour apologie du terrorisme a des implications significatives sur la rétention administrative, comme le souligne l’ordonnance rendue dans cette affaire. En effet, la jurisprudence indique que de telles condamnations constituent une menace pour l’ordre public.

L’article L. 742-5 du CESEDA permet au juge de prolonger la rétention en cas de menace pour l’ordre public. Dans le cas présent, l’intéressé a été condamné pour délit d’apologie publique d’un acte de terrorisme, ce qui a été considéré comme une menace récente et grave pour l’ordre public.

Ainsi, même si la condition de délivrance à bref délai d’un des LPC (laisser-passer consulaire) n’est pas remplie, la condamnation pour apologie du terrorisme justifie la prolongation de la rétention. Cela montre que les autorités administratives peuvent agir pour protéger l’ordre public, même en l’absence de documents de voyage.

Comment se déroule la notification de la décision de prolongation de la rétention ?

La notification de la décision de prolongation de la rétention administrative est régie par les procédures établies dans le CESEDA. Selon l’ordonnance, la décision doit être notifiée sur le champ à l’intéressé par mail au Centre de Rétention Administrative (CRA).

L’intéressé doit recevoir une copie de l’ordonnance et être informé de la possibilité de faire appel devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

Il est précisé que l’appel doit être formé dans les vingt-quatre heures suivant le prononcé de l’ordonnance et qu’il doit être motivé.

L’appel peut être transmis par tout moyen, y compris par mail, au greffe de la Cour d’Appel. Il est également important de noter que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

Cette procédure vise à garantir que l’intéressé soit pleinement informé de ses droits et des voies de recours disponibles.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE PROLONGATION DE RETENTION

MINUTE: 24/2037
Appel des causes le 30 Décembre 2024 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 24/05836 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-76CRI

Nous, Monsieur MARLIERE Maurice, Premier Vice-Président au Tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assisté de Madame Angèle LOGET, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;

Vu l’article R. 213-12-2 du code de l’organisation judiciaire ;

En présence de Maître Tarik EL ASSAAD représentant de M. LE PREFET DU NORD ;

Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;

Monsieur [H] [M]
de nationalité Algérienne
né le 11 Juillet 1999 à [Localité 3] (ALGERIE), a fait l’objet :

d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français et ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcée le 1er novembre 2024 par M. PREFET DU NORD , qui lui a été notifié le 1er novembre 2024 à 19 heures 10 .

Par requête du 29 Décembre 2024, arrivée par courrier électronique à 09h08 M. LE PREFET DU NORD invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de QUATRE JOURS, prolongé par un délai de VINGT-SIX JOURS selon l’ordonnance du 06 novembre 2024, prolongé par un délai de TRENTE JOURS selon l’ordonnance du 1er décembre 2024, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de QUINZE JOURS maximum.

En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Amélie DELATTRE, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations

L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. Ca fait 10 fois au CRA, comme vous voulez, rajoutez moi un mois. Je reste 3 mois à chaque fois et puis je sors. J’aime bien la France, je ne la quitterais jamais.

Me Amélie DELATTRE entendu en ses observations : Je m’oppose à la demande de la préfecture. L’enquête d’identification est encore en cours donc il y a une grande incertitude sur la délivrance du LPC. In ne sait même pas de quel état elle interviendra.

L’avocat de la Préfecture entendu en ses observations ; sollicite la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé : Monsieur dit qu’il est l’Algérien, l’Algérie dit que non. On a saisi, la Tunisie, le Maroc et la Libye. Je n’exclue pas qu’une des autorités puissent répondre et donner un LPC. C’est sur la menace à l’ordre public que la demande est fondée, il y a une condamnation pour un acte d’apologie du terrorisme. En outre il y a neuf signalisations pour vol et vol à l’étalage. Il y a une utilisation d’alias. Quand on prend le faisceau d’indices on peut dire qu”il y a une menace à l’ordre public récente et grave. Je vous demande donc de prolonger la rétention de Monsieur.

MOTIFS

Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours:
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.

Attendu que si la condition de délivrance à bref délai d’un des LPC sollicités auprès de quatre consulats étrangers depuis le 2 novembre dernier n’est pas remplie il n’en demeure pas moins que l’intéressé a été condamné pour délit d’apologie publique d’un acte de terrorisme constitue une menace à l’ordre public et qu’en conséquence il convient de faire droit à la requête

L’intéressé ne présente pas de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière, des mesures de surveillance sont nécessaires.

Eu égard aux nécessités invoquées par Monsieur le Préfet, il convient d’accorder la prorogation demandée.

PAR CES MOTIFS

Autorisons l’autorité administrative à retenir Monsieur [H] [M] dans les locaux ne relevant pas de l’Administration pénitentiaire pour une prolongation de rétention administrative d’une durée maximale de QUINZE JOURS à compter du 31 décembre 2024

NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 2] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI (numéro de FAX du greffe de la Cour d’Appel: [XXXXXXXX01].) ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

L’avocat de la Préfecture, L’avocat, Le Greffier, Le Juge,

décision rendue à 12 heures 22
Ordonnance transmise ce jour à M. LE PREFET DU NORD
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 24/05836 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-76CRI

Décision notifiée à …h…

L’intéressé,


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