Prolongation de la rétention administrative : enjeux et conditions de mise en œuvre

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux et conditions de mise en œuvre

L’Essentiel : Le 26 novembre 2024, le tribunal judiciaire d’Évry-Courcouronnes a examiné la rétention administrative de M. [Z], ressortissant libyen. Suite à un arrêté préfectoral du 5 mars 2024, M. [Z] devait quitter la France sans délai. Le 20 novembre, sa rétention avait été prolongée de quatre jours, et une demande de 26 jours supplémentaires a été formulée. Le tribunal a jugé la requête recevable, notant que M. [Z] avait été informé de ses droits. En raison de l’impossibilité d’exécuter l’éloignement, la rétention a été prolongée, rappelant à l’intéressé son obligation de quitter le territoire.

Contexte de la procédure

Le 26 novembre 2024, une audience publique a eu lieu au tribunal judiciaire d’Évry-Courcouronnes, présidée par la magistrate Emilie Zuber, concernant la rétention administrative de M. [Z] [P], un ressortissant libyen né le 23 novembre 2001. Cette audience a été convoquée suite à un arrêté du préfet de l’Essonne, daté du 5 mars 2024, qui imposait à M. [Z] de quitter le territoire français sans délai et interdisait son retour pendant dix ans.

Décisions antérieures et demande de prolongation

Le 20 novembre 2024, une décision préfectorale a ordonné le maintien de M. [Z] en rétention pour une durée de quatre jours, notifiée le 21 novembre 2024. Le 25 novembre 2024, l’autorité administrative a déposé une requête pour prolonger cette rétention de 26 jours supplémentaires, justifiant cette demande par l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement dans le délai initial.

Examen de la recevabilité et de la régularité

La requête a été jugée recevable, car elle était motivée, datée, signée et accompagnée des pièces justificatives nécessaires. La procédure a été considérée régulière, l’intéressé ayant eu accès à tous les documents avant l’audience, et ayant été informé de ses droits, conformément aux dispositions du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Éléments de la décision de prolongation

Le tribunal a noté que M. [Z] avait été informé de ses droits et qu’il avait refusé de se présenter à un rendez-vous consulaire. De plus, il ne disposait pas de documents d’identité valides et n’avait pas d’adresse stable en France. Le tribunal a également pris en compte ses antécédents judiciaires, notamment une condamnation pour vol avec violence et une tentative d’escroquerie.

Conclusion de l’audience

En raison de l’impossibilité matérielle d’exécuter la mesure d’éloignement dans le délai imparti et pour permettre l’exécution de cette mesure, le tribunal a décidé de prolonger la rétention de M. [Z] pour une durée maximale de 26 jours à compter du 26 novembre 2024. L’intéressé a été rappelé à son obligation de quitter le territoire français, conformément à la législation en vigueur.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le CESEDA ?

La prolongation de la rétention administrative est régie par plusieurs articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Selon l’article L742-1, le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé par le magistrat du siège du tribunal judiciaire, saisi à cette fin par l’autorité administrative.

Article L742-1 :

« Le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire saisi à cette fin par l’autorité administrative. »

De plus, l’article L742-3 précise que si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-six jours à compter de l’expiration du délai de quatre jours mentionné à l’article L. 741-1.

Article L742-3 :

« Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-six jours à compter de l’expiration du délai de quatre jours mentionné à l’article L. 741-1. »

Ainsi, pour qu’une prolongation soit accordée, il est nécessaire que la requête de l’autorité administrative soit motivée et que les conditions de régularité de la procédure soient respectées.

Quels sont les droits de l’étranger en rétention administrative ?

L’article L742-2 du CESEDA énonce les droits de l’étranger maintenu en rétention administrative.

Article L742-2 :

« L’étranger est maintenu à disposition de la justice, dans des conditions fixées par le procureur de la République, pendant le temps strictement nécessaire à la tenue de l’audience et au prononcé de l’ordonnance. »

L’intéressé doit être informé de ses droits, ce qui inclut le droit d’être assisté d’un avocat, le droit de demander l’assistance d’un interprète, d’un médecin, et de communiquer avec son consulat ou une personne de son choix.

Il est également important de noter que l’étranger doit être informé de l’obligation de quitter le territoire français, conformément à l’article L744-11 al 1 du CESEDA.

Article L744-11 al 1 :

« L’étranger qui fait l’objet d’une mesure d’éloignement a l’obligation de quitter le territoire français. »

Ces droits doivent être respectés tout au long de la procédure de rétention, garantissant ainsi le respect des droits fondamentaux de l’individu.

Quelles sont les conséquences d’une décision de prolongation de la rétention administrative ?

La décision de prolongation de la rétention administrative a des conséquences directes sur la situation de l’étranger concerné.

En vertu de l’article L743-4 du CESEDA, la prolongation de la rétention permet à l’administration de préparer l’éloignement de l’étranger dans un délai déterminé.

Article L743-4 :

« La prolongation de la rétention est de nature à permettre l’exécution de la mesure d’éloignement. »

Cela signifie que la prolongation vise à garantir que l’étranger puisse être reconduit à la frontière dans un délai raisonnable, en tenant compte des circonstances de chaque cas.

Il est également précisé que l’étranger a la possibilité de faire appel de la décision de prolongation, ce qui peut avoir un impact sur la mise en œuvre de la mesure d’éloignement.

En résumé, la prolongation de la rétention administrative est un outil permettant à l’administration de gérer les situations d’éloignement, tout en respectant les droits de l’étranger et en lui offrant des voies de recours.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’EVRY-COURCOURONNES

Emilie ZUBER

LE MAGISTRAT DU SIEGE EN CHARGE DU CONTROLE DES MESURES DE RETENTION ADMINISTRATIVE

PROCÉDURE DE RECONDUITE
A LA FRONTIÈRE

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE PREMIÈRE DEMANDE DE PROLONGATION D’UNE MESURE DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE
(article L 743-6 et 7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile)

MAINTIEN EN RÉTENTION
Dossier N° RG 24/00655 – N° Portalis DB3Q-W-B7I-QRTJ

Le 26 Novembre 2024

Devant Nous, Emilie ZUBER, magistrat du siège du tribunal judiciaire d’ÉVRY – COURCOURONNES chargé du contrôle des mesures privatives et restriction de liberté prévues par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assistée de Clarisse DURAGRIN, Greffier,

Etant en notre cabinet en audience publique, au palais de justice,

Vu les dispositions des articles L.741-1 à 7 à 744-4 al 1 et 2 et R.744-5 à 744-6-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA),

Vu l’arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ et portant interdiction de retour pendant une durée de 10 ans de Monsieur le PREFET DE L’ESSONNE en date du 05 mars 2024, notifié le 22 mars 2024, à l’encontre de

M. [Z] [P]
fils de [Z] [W] et de [I] [T],
né le 23 Novembre 2001 à [Localité 3] (LIBYE)
Demeurant :
Nationalité : Libyenne

Vu la décision préfectorale en date du 20 novembre 2024 ordonnant que l’intéressé soit maintenu pendant le temps nécessaire à son départ dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 4 jours,

Notifiée à l’intéressé le : 21 novembre 2024 à 10 h 45,

Vu la requête de l’autorité administrative enregistrée au greffe le 25 Novembre 2024 à 08 h 32 tendant à la prolongation de la rétention administrative dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 26 jours,

Vu l’extrait individualisé du registre prévu à l’article  L 744-9 al 1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) émargé par l’intéressé ;

Le représentant de la préfecture, préalablement avisé, est présent à l’audience ;

Le Procureur de la République, préalablement avisé, n’est pas présent à l’audience ;

Avisons l’intéressé de son droit d’être assisté d’un avocat ;

L’intéressé, entendu en ses observations, assisté de Me Joseph NSIMBA avocat de permanence ;

RECEVABILITE DE LA REQUETE :

Attendu que la requête de l’autorité administrative est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles dont la copie du registre prévu à l’article L 744-9 al 1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;

REGULARITE DE LA PROCEDURE :

Attendu que la requête et les pièces qui y sont jointes ont, dès leur arrivée au greffe, été mises à disposition de l’avocat de l’intéressé et ont pu être consultées avant l’ouverture des débats par l’étranger lui-même, assisté le cas échéant par un interprète ;

REGULARITE DE LA RETENTION :

Attendu que l’intéressé s’est vu notifier les droits qui lui sont reconnus conformément aux dispositions de l’article L. 742-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA)

Attendu que l’intéressé a été pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir à compter de son arrivée au lieu de rétention ;

PROLONGATION DU PLACEMENT EN RETENTION :

Le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose:

Chapitre II : MAINTIEN EN RÉTENTION PAR LE MAGISTRAT DU SIEGE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE

Section 1 : Première prolongation
Article L742-1

Le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire saisi à cette fin par l’autorité administrative.

Article L742-2

L’étranger est maintenu à disposition de la justice, dans des conditions fixées par le procureur de la République, pendant le temps strictement nécessaire à la tenue de l’audience et au prononcé de l’ordonnance.

Article L742-3

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-six jours à compter de l’expiration du délai de quatre jours mentionné à l’article L. 741-1.

Attendu que le préfet n’est pas tenu dans sa motivation de faire état de tous les éléments de la situation personnelle de l’intéressé, dès lors que les motifs positifs qu’il retient suffisent à justifier le placement en rétention ;
Attendu qu’il ressort des éléments de la procédure des diligences utiles suffisantes de l’administration effectuées depuis le placement en rétention de M. [Z] [P] , à savoir avoir saisi les autorités libyennes,

Qu’il a refusé de se présenter au rendez-vous consulaires prévu le 3 avril 2024, alors qu’il était incarcéré, pour les raison suivantes :  » pas envie  » ;

Attendu que les mesures de surveillance et de contrôle (assignation à résidence et remise de documents) apparaissent, au vu des renseignements recueillis insuffisantes pour assurer le départ de l’intéressé du territoire français en ce que l’intéressé ne dispose pas de documents d’identité valides et ne justifie pas d’une adresse stable sur le territoire français ;

Attendu qu’il convient également de constater que l’intéressé a été condamné le 12 octobre 2023 à une peine de 12 mois d’emprisonnement pour des faits de vol avec violence (sans ITT) et de tentative d’escroquerie en récidive le 21 septembre 2020, qu’il est sorti de détention le 21 novembre 2024 ;

Attendu que la préfecture se trouve dans l’impossibilité matérielle d’exécuter la mesure de reconduite dans le délai de 4 jours ;
Attendu que la prolongation de la rétention étant de nature à permettre l’exécution de la mesure d’éloignement, il convient, par conséquent, de faire droit à la requête du préfet de l’Essonne et de prolonger la rétention de M. [Z] [P] pour une durée supplémentaire de vingt-six jours ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement en premier ressort, par décision assortie de l’exécution provisoire,

DECLARONS la requête en prolongation de la rétention administrative recevable ;

DÉCLARONS la procédure diligentée à l’encontre de M. [P] [Z] régulière ;

ORDONNONS la prolongation du maintien de M. [P] [Z] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, pour une durée maximale de vingt six jours à compter du 26 novembre 2024 ;

RAPPELONS que l’intéressé a l’obligation de quitter le territoire français en application de l’article L. 744-11 al 1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Le 26 Novembre 2024 à 11h46

Le greffier Le juge

Clarisse DURAGRIN Emilie ZUBER

En application des articles L741-1 à 7 à L744-6 et L743-4 à 7 à L742-4 à 7 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, nous avisons l’intéressé que :

– il a obligation de quitter le territoire français,
– il peut demander l’assistance d’un interprète, d’un médecin, d’un conseil et peut, s’il le désire, communiquer avec son Consulat et avec une personne de son choix.
– cette ordonnance est susceptible d’appel devant le Premier Président de la cour d’Appel de Paris, dans le délai de 24 heures de la présente ordonnance, par requête motivée.
– la déclaration d’appel doit être transmise au Greffe du Service des Etrangers du Premier Président de la Cour d’Appel de Paris – n° de télécopieur : [XXXXXXXX01] ou par mail : [Courriel 2]
– l’appel n’est pas suspensif.

Reçu notification et copie de la présente ordonnance

L’intéressé, Le représentant de la préfecture, L’avocat.


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