Prolongation de rétention administrative : conditions et obligations de l’administration

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Prolongation de rétention administrative : conditions et obligations de l’administration

L’Essentiel : M. [O] [H], né le 13 septembre 1995 en Tunisie, est actuellement en rétention administrative à [Localité 2]. L’audience publique, tenue le 10 janvier 2025, a été réalisée par visioconférence en raison de l’absence de salle disponible. Le tribunal d’Orléans a ordonné la jonction des procédures et a prolongé sa rétention de vingt-six jours. Bien que M. [O] [H] ait interjeté appel, l’ordonnance a été confirmée. Le juge a souligné que les droits de l’étranger en rétention doivent être respectés, mais a rejeté les exceptions soulevées par l’appelant pour non-respect des délais.

Identité de l’Appelant

M. [O] [H], né le 13 septembre 1995 à [Localité 1] en Tunisie, est de nationalité tunisienne. Il se trouve actuellement en rétention administrative au centre de rétention d'[Localité 2], dans des locaux qui ne relèvent pas de l’administration pénitentiaire. Il a comparu par visioconférence, assisté de son avocat, Me Christiane DIOP, et d’un interprète en langue arabe.

Contexte de l’Audience

L’audience publique s’est tenue le 10 janvier 2025 à 14h00 au Palais de Justice d’Orléans, conformément aux dispositions du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Aucune salle d’audience spécialement aménagée n’étant disponible à proximité du lieu de rétention, l’audience a été réalisée par visioconférence.

Ordonnance du Tribunal Judiciaire

Le tribunal judiciaire d’Orléans a rendu une ordonnance le 8 janvier 2025, ordonnant la jonction des procédures de demande de prolongation par la préfecture et de recours contre l’arrêté de placement en rétention administrative. Il a rejeté le recours de M. [O] [H] et a prolongé sa rétention administrative pour une durée de vingt-six jours à compter du 8 janvier 2025.

Appel de l’Ordonnance

M. [O] [H] a interjeté appel de cette ordonnance le 9 janvier 2025. L’audience a permis d’entendre les plaidoiries de son avocat et les observations de l’intéressé, qui a eu la parole en dernier.

Analyse Juridique

Le juge a rappelé que l’étranger doit être informé de ses droits en rétention administrative. Selon le CESEDA, un étranger ne peut être maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. Les exceptions de procédure soulevées par M. [O] [H] ont été déclarées irrecevables, car non soulevées en temps utile.

Diligences de l’Administration

Le juge a examiné les diligences de l’administration concernant l’organisation du départ de M. [O] [H]. Il a constaté que les autorités consulaires tunisiennes avaient été saisies le jour même de son placement en rétention, ce qui a été jugé suffisant. La préfecture a agi sans retard, et le moyen soulevé par l’appelant a été rejeté.

Décision Finale

L’appel de M. [O] [H] a été déclaré recevable, mais l’ordonnance du tribunal judiciaire d’Orléans a été confirmée, maintenant la prolongation de sa rétention administrative pour une durée de vingt-six jours. Les dépens ont été laissés à la charge du Trésor, et des notifications ont été effectuées aux parties concernées.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les obligations du juge en matière de rétention administrative selon le CESEDA ?

Le juge doit s’assurer que l’étranger est pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir lorsqu’il se trouve en rétention administrative.

Cela est stipulé dans l’article L. 743-9 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), qui précise que :

« Le juge doit s’assurer que l’étranger est informé de ses droits et placé en état de les faire valoir. »

De plus, l’article 66 de la Constitution française renforce cette obligation en affirmant que :

« Nul ne peut être arbitrairement détenu. »

Ainsi, le respect des droits de l’étranger est fondamental dans le cadre de la rétention administrative, et le juge a un rôle actif à jouer pour garantir cette protection.

Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le CESEDA ?

La prolongation de la rétention administrative est strictement encadrée par le CESEDA. Selon l’article L. 741-3, il est stipulé que :

« Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet. »

Cela signifie que la rétention ne doit pas excéder le temps nécessaire pour organiser le départ de l’étranger.

En outre, l’article L. 743-12 précise que :

« En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, le magistrat ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l’étranger. »

Ainsi, pour qu’une demande de prolongation soit acceptée, le juge doit vérifier que l’administration a agi avec diligence pour organiser le départ de l’étranger.

Quelles sont les conséquences d’une irrégularité dans la procédure de rétention administrative ?

L’article L. 743-12 du CESEDA stipule que :

« En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, le magistrat ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l’étranger. »

Cela signifie qu’une irrégularité dans la procédure peut entraîner la nullité de la rétention, mais seulement si cette irrégularité a eu un impact substantiel sur les droits de l’étranger.

Le juge doit donc examiner si les droits de l’étranger ont été affectés par l’irrégularité et si une régularisation a pu intervenir avant la clôture des débats.

Comment le juge évalue-t-il les diligences de l’administration en matière de rétention ?

Le juge doit contrôler le caractère suffisant des diligences de l’administration pour organiser le départ de l’étranger.

L’article L. 741-3 du CESEDA précise que :

« L’administration exerce toute diligence à cet effet. »

Cela implique que l’administration doit agir rapidement et efficacement pour obtenir les documents nécessaires au départ de l’étranger.

En cas de retard, le juge doit évaluer si ce retard est dû à des circonstances imprévisibles et insurmontables.

La jurisprudence, notamment l’arrêt de la 1ère Civ. du 9 novembre 2016, souligne que :

« Seules des circonstances imprévisibles, insurmontables et extérieures empêchant l’administration d’agir peuvent justifier qu’elle n’ait accompli la première diligence en vue d’obtenir l’éloignement de la personne que plusieurs jours après son placement en rétention. »

Ainsi, le juge doit examiner les actions de l’administration et leur conformité avec les exigences de diligence.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers

ORDONNANCE du 10 JANVIER 2025

Minute N° 35

N° RG 25/00096 – N° Portalis DBVN-V-B7J-HEJV

(1 pages)

Décision déférée : ordonnance du tribunal judiciaire d’Orléans en date du 08 janvier 2025 à 12h12

Nous, Cécile DUGENET, juge placée auprès de la Première présidente de la Cour d’appel d’Orléans, déléguée à la cour d’appel d’Orléans pour y exercer les fonctions de conseillère affectée à la chambre des urgences, par ordonnance n° 439/2024 de Madame la Première Présidente de la cour d’appel d’Orléans, en date du 18 décembre 2024 assistée de Odalene DE AZEVEDO ALCANTARA, greffier aux débats et au prononcé de l’ordonnance,

APPELANT :

M. [O] [H]

né le 13 Septembre 1995 à [Localité 1] (TUNISIE), de nationalité tunisienne,

actuellement en rétention administrative au centre de rétention administrative d'[Localité 2] dans des locaux ne dépendant pas de l’administration pénitentiaire,

comparant par visioconférence, assisté de Me Christiane DIOP, avocat au barreau d’ORLEANS,

assisté de Mme [L] [T], interprète en langue Arabe, expert près la cour d’appel d’Orléans, qui a prêté son concours lors de l’audience et du prononcé ;

INTIMÉE :

LA PRÉFECTURE D’ILLE-ET-VILAINE

non comparante, non représentée ;

MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l’heure de l’audience ;

À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d’Orléans le 10 janvier 2025 à 14 H 00, conformément à l’article L. 743-7 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), aucune salle d’audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n’étant disponible pour l’audience de ce jour ;

Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;

Vu l’ordonnance rendue le 08 janvier 2025 à 12h12 par le tribunal judiciaire d’Orléans ordonnant la jonction des procédures de demande de prolongation par la préfecture et de recours contre l’arrêté de placement en rétention administrative par le retenu, rejetant le recours formé contre l’arrêté de placement en rétention administrative, et ordonnant la prolongation du maintien de M. [O] [H] dans les locaux non pénitentiaires pour une durée de vingt six jours à compter du 08/01/2025 ;

Vu l’appel de ladite ordonnance interjeté le 09 janvier 2025 à 9h22 par M. [O] [H] ;

Après avoir entendu :

– Me Christiane DIOP, en sa plaidoirie,

– M. [O] [H], en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;

AVONS RENDU ce jour l’ordonnance publique et contradictoire suivante :

Il résulte de l’article 66 de la Constitution et de l’article L. 743-9 du CESEDA que le juge doit s’assurer que l’étranger est pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir lorsqu’il se trouve placé en rétention administrative.

Aux termes de l’article L. 743-12 du CESEDA, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, le magistrat du siège du tribunal judiciaire saisi d’une demande sur ce motif ou qui relève d’office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l’étranger dont l’effectivité n’a pu être rétablie par une régularisation intervenue avant la clôture des débats.

Selon l’article L. 741-3 du CESEDA, « Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet ».

Il convient de considérer que c’est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qu’il y a lieu d’adopter que le premier juge a statué sur l’ensemble des moyens de nullité et de fond soulevés devant lui et repris devant la cour, étant observé, au vu des termes de la déclaration d’appel du retenu du 9 janvier 2025 et des moyens repris lors des débats de ce jour :

1. Sur la régularité de la procédure ayant immédiatement précédé le placement en rétention administrative

Les exceptions de procédure sont irrecevables, en application de l’article 74 du code de procédure civile, lorsqu’elles n’ont pas été soulevées in limine litis.

En l’espèce, le moyen tiré de l’irrégularité des conditions d’interpellation, qui n’a pas été soulevé avant d’aborder les débats au fond devant le premier juge, doit être déclaré irrecevable.

2. Sur la requête en prolongation

Sur les diligences de l’administration, il résulte des dispositions de l’article L. 741-3 du CESEDA et des termes de l’article 15.1 alinéa 4 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 qu’un maintien en rétention administrative doit être aussi bref que possible et ne se justifie qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. L’administration est, à ce titre, tenue au respect d’une obligation de moyens.

Pour accueillir une demande de première prolongation, le juge doit contrôler le caractère suffisant des diligences de l’administration en vue d’organiser le départ de l’étranger. Lorsque l’intéressé est dépourvu de document de voyage, les diligences se traduisent par la saisine rapide des autorités consulaires.

Seules des circonstances imprévisibles, insurmontables et extérieures empêchant l’administration d’agir peuvent justifier qu’elle n’ait accompli la première diligence en vue d’obtenir l’éloignement de la personne que plusieurs jours après son placement en rétention (1ère Civ. 9 novembre 2016, pourvoi n° 15-28.793).

Il n’y a cependant pas lieu d’imposer à l’administration de réaliser des démarches consulaires durant la période d’incarcération ayant précédé le placement en rétention (1ère Civ. 17 octobre 2019, pourvoi n° 19-50.002).

En l’espèce, la cour constate que l’intéressé a été placé en rétention administrative le 4 janvier 2025 à 12h15 et que les autorités consulaires tunisiennes ont été saisies d’une demande de laissez-passer par courriel du même jour à 14h14.

Ainsi, la préfecture a réalisé, sans accuser le moindre retard, des diligences nécessaires et suffisantes à ce stade de la procédure administrative de rétention, s’agissant d’une première demande de prolongation. Il est également rappelé qu’elle ne détient aucun pouvoir de contrainte ou d’instruction sur les autorités consulaires, de sorte qu’il ne peut lui être reproché le défaut de réponse du consulat. Le moyen est rejeté.

En l’absence de toute illégalité susceptible d’affecter les conditions découlant du droit de l’Union, de la légalité de la rétention et à défaut d’autres moyens présentés en appel, il y a lieu de confirmer l’ordonnance attaquée.

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARONS recevable l’appel de M. [O] [H] ;

CONFIRMONS l’ordonnance du tribunal judiciaire d’Orléans du 8 janvier 2025 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé pour une durée de vingt-six jours à compter du 8 janvier 2025.

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;

ORDONNONS la remise immédiate d’une expédition de la présente ordonnance à LA PRÉFECTURE D’ILLE-ET-VILAINE, à M. [O] [H] et son conseil, et au procureur général près la cour d’appel d’Orléans ;

Et la présente ordonnance a été signée par Cécile DUGENET, juge placée, et Odalene DE AZEVEDO ALCANTARA, greffier, présent lors du prononcé.

Fait à Orléans le DIX JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ, à heures

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Odalene DE AZEVEDO ALCANTARA Cécile DUGENET

Pour information : l’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

NOTIFICATIONS, le 10 janvier 2025 :

LA PRÉFECTURE D’ILLE-ET-VILAINE, par courriel

M. le procureur général près la cour d’appel d’Orléans, par courriel

M. [O] [H] , copie remise par transmission au greffe du CRA

Me Christiane DIOP, avocat au barreau d’ORLEANS, copie remise en main propre contre récépissé / par PLEX

L’interprète L’avocat de l’intéressé


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