Prolongation de la rétention et enjeux de l’ordre public dans le cadre des mesures d’éloignement.

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Prolongation de la rétention et enjeux de l’ordre public dans le cadre des mesures d’éloignement.

L’Essentiel : Le Tribunal Correctionnel de Grasse a prononcé, le 11 octobre 2021, une interdiction définitive du territoire français à l’encontre de Monsieur [B] [T]. Le 18 octobre 2024, le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé de le placer en rétention. Malgré un appel interjeté le 2 janvier 2025, Monsieur [B] [T] a refusé de comparaître. Son avocat a soulevé des arguments sur la méconnaissance de l’article L742-5 du CESEDA, mais le juge a constaté un ancrage dans la délinquance. Le tribunal a confirmé l’ordonnance, notant un plan de vol pour le 17 janvier 2025, permettant un éloignement rapide.

Contexte Juridique

Les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) encadrent les procédures relatives à l’éloignement des étrangers. Dans ce cadre, le Tribunal Correctionnel de Grasse a prononcé, le 11 octobre 2021, une interdiction définitive du territoire français à l’encontre de Monsieur [B] [T].

Placement en Rétention

Le 18 octobre 2024, le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé de placer Monsieur [B] [T] en rétention, une décision notifiée le lendemain. Le 2 janvier 2025, un magistrat a ordonné le maintien de Monsieur [B] [T] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, suite à un contrôle des mesures d’éloignement.

Appel et Défense

Monsieur [B] [T] a interjeté appel de cette ordonnance le 2 janvier 2025. Il a cependant refusé de comparaître et de s’entretenir avec son avocat, qui a été entendu et a soulevé des arguments concernant la méconnaissance de l’article L742-5 du CESEDA, ainsi que l’absence de menace pour l’ordre public en raison de condamnations anciennes.

Analyse des Motifs de Décision

La recevabilité de l’appel n’est pas contestée, et aucune irrégularité n’est constatée dans le dossier. Selon l’article L742-5 du CESEDA, le magistrat peut prolonger la rétention dans certaines conditions, notamment en cas d’obstruction à l’éloignement ou de menace pour l’ordre public. Le juge a constaté que les condamnations de Monsieur [B] [T], bien que anciennes, témoignent d’un ancrage dans la délinquance.

Confirmation de l’Ordonnance

Le tribunal a confirmé l’ordonnance du magistrat, notant que Monsieur [B] [T] a un plan de vol prévu pour le 17 janvier 2025, ce qui permet un éloignement rapide. La décision a été rendue publiquement, et les parties ont été informées de leur droit de se pourvoir en cassation dans un délai de deux mois.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure de prolongation de la rétention selon l’article L742-5 du CESEDA ?

L’article L742-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) précise les conditions dans lesquelles un magistrat peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention d’un étranger au-delà de la durée maximale prévue à l’article L742-4.

À titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut être saisi pour prolongation de la rétention lorsque l’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :

a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;

b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, et il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.

L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.

Si l’une des circonstances mentionnées survient au cours de la prolongation exceptionnelle, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions, sans que la durée maximale de la rétention n’excède quatre-vingt-dix jours.

Quelles sont les implications de la condamnation de Monsieur [B] [T] sur sa rétention ?

La condamnation de Monsieur [B] [T] à une interdiction définitive du territoire français, prononcée par le Tribunal Correctionnel de Grasse le 11 octobre 2021, a des implications directes sur sa situation de rétention.

En effet, cette condamnation, bien qu’ancienne, témoigne d’un ancrage dans la délinquance, ce qui constitue une menace pour l’ordre public.

Le premier juge a relevé que Monsieur [B] [T] a été condamné à dix reprises, notamment pour des faits de vol aggravé en état de récidive.

Bien qu’il ait fait valoir que ces condamnations étaient antérieures au délai de quinzaine prévu par l’article L742-5, cela ne diminue pas la gravité de son profil délinquant.

De plus, le fait qu’il utilise plusieurs alias complique son identification et renforce la perception d’une menace pour l’ordre public.

Ainsi, la décision de maintenir Monsieur [B] [T] en rétention est justifiée par la nécessité de protéger l’ordre public, conformément aux dispositions du CESEDA.

Quels sont les droits de Monsieur [B] [T] concernant son appel ?

Monsieur [B] [T] a exercé son droit d’appel contre l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention, ce qui est conforme aux dispositions légales.

La recevabilité de cet appel n’est pas contestée, et les éléments du dossier ne révèlent aucune irrégularité.

Il est important de noter que, selon le droit français, les parties ont le droit de se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi doit être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, et il doit être signé par un avocat au Conseil d’État ou de la Cour de cassation.

Cela garantit à Monsieur [B] [T] un accès à la justice et la possibilité de contester la décision de maintien en rétention, même s’il a refusé de comparaître et de s’entretenir avec son avocat lors de la procédure.

Cette situation souligne l’importance de la représentation légale dans les procédures de rétention administrative.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 03 JANVIER 2025

N° RG 25/00011 – N° Portalis DBVB-V-B7J-BOFRM

Copie conforme

délivrée le 03 Janvier 2025 par courriel à :

-l’avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention de Marseille en date du 02 Janvier 2025 à 11H02.

APPELANT

Monsieur [B] [T]

né le 10 Janvier 1992 à [Localité 1] (ALGÉRIE)

de nationalité Algérienne

 

Non comparant, à refusé la visio-conférence depuis le centre de rétention administrative de [Localité 2] en application des dispositions de la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024.

Assisté de Maître Domnine ANDRE, avocate au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, commise d’office et de Madame [U] [Z], interprète en langue arabe , inscrite sur la liste des experts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

INTIMÉ

Monsieur le PRÉFET DES BOUCHES-DU-RHÔNE

Domicilié Direction des Migrations, de l’Intégration et de la Nationalité

[Adresse 3]

Non comparant, valablement avisé

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé, non représenté

******

DÉBATS

L’affaire a été débattue en audience publique le 03 Janvier 2025 devant Madame Joëlle TORMOS, Conseiller à la cour d’appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Monsieur Nicolas FAVARD, Greffier,

ORDONNANCE

Par décision réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 03 Janvier 2025 à 18h45 ,

Signée par Madame Joëlle TORMOS, Conseiller et Monsieur Nicolas FAVARD, Greffier,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;

Vu la condamnation prononcée par le Tribunal Correctionnel de Grasse en date du 11 octobre 2021 ordonnant une interdiction définitive du territoire français ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 18 octobre 2024 par le préfet des Bouches-du-Rhône notifiée le 19 octobre 2024 à 10h33 ;

Vu l’ordonnance du 02 Janvier 2025 rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention décidant le maintien de Monsieur [B] [T] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;

Vu l’appel interjeté le 02 Janvier 2025 à 14H52 par Monsieur [B] [T] ;

Monsieur [B] [T] a refusé de comparaître et de s’entretenir avec son avocat.

Son avocat a été régulièrement entendu ; il conclut à la méconnaissance de l’article L742-5 du CESEDA et à l’absence de menace pour l’ordre public en raison de condamnations anciennes mais non comprises dans les quinze derniers jours.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention n’est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité.

L’article L742-5 du CESEDA dispose :

A titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours:

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :

a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;

b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.

L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.

Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.

Comme l’a justement relevé le premier juge [B] [T] a été condamné le 11 octobre 2021 et a fait l’objet d’une interdiction définitive du territoire français. Il a été placé en centre d erétention administrative le 19 octobre 2024 et a fait l’objet d eprolongations pour la dernière fois par ordonnance du 18 décembre 2024 confirmée par la cour le 19 décembre 2024.

Il a été condamné à 10 reprises notamment pour des faits de vol aggravé en état de récidive, si [B] [T] indique que ces condamnations sont antérieures au délai de quinzaine prévu par le texte sus visé, il n’en demeure pas moins qu’elles traduisent un ancrage certain de [B] [T] dans la délinquance, étant en outre observé qu’il use de plusieurs alias faisant ainsi obstacle à son identification. La menace à l’ordre public est donc établie.

Il est en outre justifié que [B] [T] bénéficie d’un plan de vol pour le 17 janvier 2025 à destination d'[Localité 1], qu’ainsi son éloignement peut être réalisé dans un bref délai.

En conséquence l’ordonnance déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision Par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Confirmons l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention en date du 02 Janvier 2025.

Les parties sont avisées qu’elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [B] [T]

Assisté d’un interprète


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