Prolongation de rétention : enjeux de justification et de diligence administrative

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Prolongation de rétention : enjeux de justification et de diligence administrative

L’Essentiel : Monsieur X, identifié comme [J] [R], a été placé en rétention administrative par le tribunal de Toulouse le 23 novembre 2024, avec une prolongation de 30 jours. Son avocat, Me Majouba SAIHI, a interjeté appel le 25 novembre, arguant l’absence de pièces justificatives et l’insuffisance des diligences administratives. Lors de l’audience du 26 novembre, les représentants de la préfecture et du ministère public étaient absents. L’appel a été jugé recevable, mais la prolongation de la rétention a été maintenue, justifiée par le défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat. La décision a été notifiée aux parties.

Contexte de l’affaire

Monsieur X, se présentant sous le nom de [J] [R], a été placé en rétention administrative par une ordonnance du vice-président du tribunal judiciaire de Toulouse, datée du 23 novembre 2024. Cette ordonnance a autorisé la prolongation de son placement au centre de rétention pour une durée de 30 jours.

Appel de la décision

L’appel a été interjeté par Me Majouba SAIHI, avocat de Monsieur X, le 25 novembre 2024. L’avocat a soutenu que l’ordonnance de prolongation devait être infirmée en raison de l’absence de pièces justificatives et de l’insuffisance des diligences effectuées par l’administration.

Absence des représentants

Lors de l’audience du 26 novembre 2024, ni le représentant de la préfecture ni celui du ministère public n’étaient présents, bien qu’ils aient été régulièrement avisés de la date de l’audience. Monsieur X a eu la parole en dernier, assisté d’un interprète.

Recevabilité de l’appel

L’appel a été jugé recevable, car il a été formulé dans les délais et les formes légales.

Prolongation de la rétention

La demande de prolongation de la rétention repose sur l’article L 742-4 du CESEDA, qui permet cette prolongation dans des cas spécifiques, notamment en raison de l’absence de documents de voyage. La préfecture a justifié la prolongation par le défaut de délivrance des documents par le consulat.

Défaut de pièces justificatives

L’avocat de Monsieur X a contesté la requête de la préfecture, arguant qu’elle n’était pas accompagnée de toutes les pièces nécessaires, notamment concernant l’isolement sécuritaire dont a fait l’objet son client. Cependant, il a été établi que le registre de mise en isolement avait été mis à jour et que les raisons de cet isolement étaient spécifiées.

Insuffisance des diligences

Le conseil de Monsieur X a également soulevé l’insuffisance des diligences de l’administration, notant qu’il y avait eu un délai de 25 jours entre la demande d’identification faite aux autorités consulaires algériennes et la relance. Toutefois, il a été précisé que l’administration avait effectué les démarches nécessaires et qu’elle ne pouvait pas contraindre une autorité étrangère à agir plus rapidement.

Conclusion de l’ordonnance

En conséquence, l’ordonnance du vice-président du tribunal judiciaire de Toulouse a été confirmée dans toutes ses dispositions. L’appel a été déclaré recevable, mais la prolongation de la rétention a été maintenue. La décision a été notifiée aux parties concernées.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel interjeté par Monsieur X se disant [J] [R] est jugé recevable car il a été effectué dans les termes et délais légaux.

En effet, selon l’article 905 du Code de procédure civile, « l’appel est formé par déclaration au greffe de la cour d’appel dans un délai de un mois à compter de la notification de la décision ».

Dans cette affaire, l’appel a été reçu au greffe le 25 novembre 2024, soit dans le délai imparti, ce qui confirme sa recevabilité.

Sur la prolongation de la rétention

La prolongation de la rétention de Monsieur X se disant [J] [R] est fondée sur l’article L 742-4 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Cet article stipule que « la prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours peut être ordonnée dans les cas suivants :

1° En cas d’urgence absolue ou de menace d’une particulière gravité pour l’ordre public;

2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement;

3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement;

b) de l’absence de moyens de transport. »

Dans ce cas, la demande de prolongation est justifiée par le défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève M. [J] [R].

Sur le défaut de pièces utiles

Le conseil de Monsieur X soulève que la requête de la préfecture n’est pas accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles, en vertu de l’article R 743-2 du CESEDA.

Cet article précise que « la requête doit être accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu par l’article L. 744-2 ».

Il est essentiel que ces pièces soient fournies pour permettre au juge d’apprécier les éléments de fait et de droit.

Cependant, le premier juge a constaté que le registre de mise en isolement a été actualisé après la première prolongation, et que le motif de l’isolement, à savoir la menace d’atteinte à son intégrité physique, a été spécifié.

Ainsi, ce moyen est écarté.

Sur l’insuffisance des diligences

Le conseil de M. [R] fait valoir que les autorités préfectorales n’ont pas accompli de diligences suffisantes pour permettre l’éloignement de l’intéressé.

Il est mentionné que la préfecture a saisi les autorités consulaires algériennes le 17 octobre 2024, mais n’a effectué qu’une relance le 18 novembre 2024, soit 25 jours après le placement en rétention.

Cependant, il est important de noter que l’administration a adressé tous les documents nécessaires à l’identification de l’intéressé.

L’administration n’a pas de pouvoir de contrainte sur une autorité étrangère et n’est pas tenue de procéder à d’autres relances tant que les diligences effectuées sont en attente de réponse.

De plus, il a été établi que des laissez-passer consulaires sont régulièrement délivrés par les autorités consulaires algériennes, ce qui indique qu’il existe des perspectives d’éloignement pour l’intéressé.

En conséquence, l’ordonnance déférée est confirmée en toutes ses dispositions.

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

Minute 24/1249

N° RG 24/01244 – N° Portalis DBVI-V-B7I-QUDK

O R D O N N A N C E

L’an DEUX MILLE VINGT QUATRE et le 26 novembre à 13h00

Nous F. ALLIEN, Conseillère, magistrate déléguée par ordonnance de la première présidente en date du 16 Septembre 2024 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Vu l’ordonnance rendue le 23 novembre 2024 à 16H48 par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :

[J] [R]

né le 18 Mars 1982 à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Vu l’appel formé le 25 novembre 2024 à 15 h 35 par courriel, par Me Majouba SAIHI, avocat au barreau de TOULOUSE,

A l’audience publique du 26 novembre 2024 à 09h45, assisté de M.QUASHIE, greffier avons entendu :

[J] [R]

assisté de Me Majouba SAIHI, avocat au barreau de TOULOUSE

qui a eu la parole en dernier ;

avec le concours de [F] [P], interprète qui a prêté serment,

En l’absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;

En l’absence du représentant de la PREFECTURE DE LA HAUTE GARONNE régulièrement avisée ;

avons rendu l’ordonnance suivante :

Vu l’ordonnance du vice-président du tribunal judiciaire de Toulouse du 23 novembre 2024, ordonnant la prolongation du placement au centre de rétention de Monsieur X se disant [J] [R] pour une durée de 30 jours,

Vu l’appel interjeté par Me Majouba SAIHI reçu au greffe de la cour d’appel le 25 novembre 2024 à 15h35, soutenu par son conseil oralement à l’audience, auquel il convient de se référer en application de l’article 455 du code de procédure civile et aux termes duquel il sollicite l’infirmation de l’ordonnance dont appel et sa remise en liberté pour les motifs suivants : absence de pièces justificatives utiles, insuffisance des diligences.

Le conseil de l’appelant a été entendu en ses explications à l’audience du 26 novembre 2024,

En l’absence du représentant de la préfecture, dûment avisé,

Le ministère public, avisé de la date d’audience, est absent et n’a pas formulé d’observations.

M. X se disant [J] [R], assisté de l’interprète, a eu la parole en dernier.

SUR CE : 

Sur la recevabilité de l’appel

En l’espèce, l’appel est recevable pour avoir été fait dans les termes et délais légaux.

Sur le fond

Sur la prolongation de la rétention

L’article L 742-4 du CESEDA autorise la saisine du magistrat du siège du tribunal judiciaire, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :

1° En cas d’urgence absolue ou de menace d’une particulière gravité pour l’ordre public;

2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison:

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;

b) de l’absence de moyens de transport.

La demande de prolongation est fondée sur le défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève M. [J] [R].

Sur le défaut de pièces utiles :

Le conseil de X se disant [J] [R] soulève que la requête de la préfecture n’est pas accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles. Il indique notamment que la copie du registre n’est pas actualisée dans la mesure où il n’est pas fait mention de l’isolement sécuritaire dont l’intéressé a fait l’objet et que l’administration ne produit aucun élément pour permettre d’apprécier les raisons médicales ayant conduit à cet isolement sécuritaire ni aucun élément permettant de vérifier qu’il a pu exercer ses droits lors de cet isolement. Elle ajoute par ailleurs qu’aucun certificat médical n’est produit par l’administration.

Aux termes des dispositions de l’article R 743-2 du CESEDA, à peine d’irrecevabilité, la requête doit être accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu par l’article L. 744-2. Il s’agit des pièces nécessaires à l’appréciation par le juge des éléments de fait et de droit dont l’examen lui permet d’exercer pleinement ses pouvoirs.

Or, comme le relève à juste titre le premier juge, le registre de mise en isolement a bien été actualisé après la première prolongation en date du 19 novembre 2024, sachant que la fin de l’isolement dont a été avisé le parquet est en date du 20 novembre 2024 à 15h20

En outre, le motif de l’isolement, à savoir la menace d’atteinte à son intégrité physique est spécifié.

Ce moyen sera donc écarté.

Sur l’insuffisance des diligences :

Le conseil de M. [R] fait valoir que le 17 octobre 2024 les autorités préfectorales ont saisi les autorités consulaires algériennes d’une demande aux fins d’identification de l’intéressé. Une relance a été effectuée le 18 novembre 2024, soit 25 jours après le placement en rétention administrative. Pendant un mois, entre le 17 octobre et le 18 novembre 2024, l’administration n’accomplissait aucune diligence pour permettre l’éloignement de M. [R], ce qui questionne sur les perspectives d’éloignement.

Les diligences effectuées sont utiles en ce que l’administration a adressé tous les documents nécessaires à l’identification de l’intéressé par les autorités consulaires. L’administration ne dispose d’aucun pouvoir de contrainte sur une autorité étrangère et elle n’est pas tenue de procéder à d’autres relances dès lors que les diligences qu’elle a effectuées sont en attente de réponse et qu’aucun élément nouveau ne justifie une actualisation de ses démarches. La préfecture de la Haute-Garonne indique qu’une audition de M. [R] sera prochainement réalisée.

Concernant les perspectives d’éloignement, des laissez-passer consulaires sont désormais régulièrement délivrés par les autorités consulaires algériennes et il n’est pas établi qu’il n’existe pas de perspectives d’éloignement concernant l’intéressé.

En conséquence, l’ordonnance déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,

Déclarons recevable l’appel interjeté par Monsieur X se disant [J] [R] à l’encontre de l’ordonnance du vice-président du tribunal judiciaire de Toulouse du 23 novembre 2024,

Confirmons ladite ordonnance en toutes ses dispositions,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la PREFECTURE DE LA HAUTE GARONNE, service des étrangers, à [J] [R], ainsi qu’à son conseil et communiquée au Ministère Public.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE

M.QUASHIE F. ALLIEN.


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