L’Essentiel : Monsieur [V] [F], de nationalité tunisienne, a reçu une obligation de quitter le territoire français le 8 novembre 2023, accompagnée d’une interdiction de retour. Placé en rétention administrative, sa situation a été réévaluée le 7 janvier 2025, lorsque le Préfet du Nord a demandé une prolongation de quinze jours, invoquant des démarches pour un laissez-passer. Cependant, le juge a constaté que les conditions légales pour cette prolongation n’étaient pas remplies, notamment en raison du refus des autorités helvétiques de réadmettre Monsieur [F]. En conséquence, la demande de prolongation a été rejetée, ordonnant sa remise en liberté.
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Contexte de l’affaireMonsieur [V] [F], de nationalité tunisienne, a été soumis à une obligation de quitter le territoire français, notifiée le 8 novembre 2023 par le Préfet du Gard. Cette décision a été accompagnée d’une interdiction de retour sur le territoire français. Le même jour, il a également été placé en rétention administrative pour une durée initiale de quatre jours, décision prise par le Préfet du Nord. Prolongation de la rétentionLe 7 janvier 2025, le Préfet du Nord a demandé une prolongation de la rétention administrative de Monsieur [F] au-delà des quatre jours initiaux, en invoquant la nécessité de maintenir l’intéressé en rétention pour une période supplémentaire de quinze jours. Cette demande a été motivée par des démarches administratives en cours pour obtenir un laissez-passer. Observations des partiesMonsieur [F], assisté par son avocat, a exprimé le souhait d’être assisté d’un avocat et n’a pas formulé d’autres observations. L’avocat de Monsieur [F] a contesté la prolongation, arguant que les conditions légales pour une telle mesure n’étaient pas remplies. En revanche, l’avocat de la Préfecture a soutenu que la prolongation était justifiée en raison des démarches en cours pour obtenir un laissez-passer. Analyse juridiqueLe juge a examiné les conditions prévues par l’article L.742-5 du CESEDA pour la prolongation de la rétention. Il a constaté que les conditions requises n’étaient pas réunies, notamment en ce qui concerne l’obstruction à l’éloignement et la menace à l’ordre public. De plus, il a été établi que les autorités helvétiques avaient refusé la réadmission de Monsieur [F] et qu’aucune réponse n’avait été reçue des autorités algériennes concernant la délivrance de documents de voyage. Décision du jugeEn conséquence, le juge a rejeté la demande de prolongation de la rétention administrative formulée par le Préfet du Nord. Il a ordonné la remise en liberté de Monsieur [V] [F] dans un délai de vingt-quatre heures, tout en rappelant à l’intéressé son obligation de quitter le territoire national. Des informations sur les droits de l’intéressé pendant cette période ont également été fournies. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon l’article L.742-5 du CESEDA ?L’article L.742-5 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA) stipule que, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de la durée maximale prévue à l’article L.742-4. Cette prolongation est possible dans les cas suivants : 1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ; 2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement : 3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, et il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai. Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public. Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours. Quels sont les droits de l’étranger pendant la rétention administrative ?Les droits de l’étranger pendant la rétention administrative sont précisés dans les articles L.743-9 et L.743-24 du CESEDA. L’article L.743-9 stipule que l’étranger doit être informé de ses droits, notamment le droit d’être assisté par un avocat. Il est également informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant. L’article L.743-24 précise que l’étranger a le droit de contester la légalité de son maintien en rétention et de demander la remise en liberté. Il est essentiel que l’étranger soit informé de ces droits dès le début de la rétention, afin qu’il puisse exercer ses recours de manière efficace. Quelles sont les conséquences d’un rejet de la demande de prolongation de la rétention administrative ?Le rejet de la demande de prolongation de la rétention administrative entraîne la remise en liberté de l’intéressé. Conformément à l’ordonnance rendue, Monsieur [V] [F] doit être remis en liberté à l’expiration d’un délai de vingt-quatre heures suivant la notification de la décision au Procureur de la République. Cela signifie que, si aucune autre mesure n’est prise par le magistrat, l’intéressé ne peut plus être maintenu en rétention. Il est également informé qu’il est maintenu à la disposition de la justice pendant ce délai, ce qui lui permet de contacter un avocat, un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter. Quelles sont les implications d’une signalisation FAED sur la prolongation de la rétention ?La signalisation FAED (Fichier des personnes recherchées) ne suffit pas à elle seule à justifier une prolongation de la rétention administrative. Dans le cas présent, il a été établi que Monsieur [F] n’avait pas fait obstruction à la mesure d’éloignement, et qu’aucun élément ne démontrait une menace à l’ordre public. L’absence de condamnation pénale et le simple relevé FAED ne caractérisent pas une menace suffisante pour justifier une prolongation de la rétention. Ainsi, la jurisprudence rappelle que les conditions de l’article L.742-5 du CESEDA ne sont pas réunies si la seule justification repose sur une signalisation sans éléments concrets de menace. |
Au nom du Peuple Français
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER
ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE PROLONGATION DE RETENTION
MINUTE: 25/40
Appel des causes le 08 Janvier 2025 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 25/00068 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76CWQ
Nous, Madame PIROTTE Carole, Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assistée de Madame Angèle LOGET, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;
En présence de [R] [B], interprète en langue arabe, serment préalablement prêté ;
En présence de Maître Antoine PATINIER représentant de M. PREFET DU NORD ;
Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;
Monsieur [V] [F]
de nationalité Tunisienne
né le 01 Janvier 2004 à [Localité 2] (TUNISIE), a fait l’objet :
– d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français prononcée le 08 novembre 2023 par M. PREFET DU GARD, qui lui a été notifié le 08 novembre 2023
– d’un arrêté ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcé le 08 novembre 2024 par M. PREFET DU NORD , qui lui a été notifié le 08 novembre 2024 à 15h00 .
Par requête du 07 Janvier 2025, arrivée par courrier électronique à 11h18 M. PREFET DU NORD invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de QUATRE JOURS, prolongé par un délai de VINGT-SIX JOURS selon l’ordonnance du 13 novembre 2024, prolongé par un délai de TRENTE JOURS selon l’ordonnance du 8 décembre 2024, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de QUINZE JOURS maximum.
En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Pauline PERDIEU, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations
L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. Je n’ai rien à dire.
Me Pauline PERDIEU entendu en ses observations : Nous ne sommes pas dans les conditions de l’article L.742-5 du CESEDA pour permettre une troisième prolongation. Je vous demande donc de remettre Monsieur en liberté. Monsieur n’a pas fait obstruction. On n’a pas d’information pouvant laisser penser qu’un LPC interviendra à bref délai. Il n’y a pas d’élément dans les 15 jours qui caractère la menace à l’ordre public et une simple signalisation FAED ne le caractérise pas non plus.
L’avocat de la Préfecture entendu en ses observations ; sollicite la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé : On a eu un rejet des autorités helvétiques. L’administration a fait toutes les diligences pour obtenir le LPC et dans les quinze jours nous pouvons avoir une audition et la délivrance d’un LPC. Je vous demande donc de prolonger la rétention.
Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours:
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.
Monsieur [F] fait l’objet de deux prolongations les 13 novembre 2024 et 08 décembre 2024. Il est établi que les autorités helvétiques ont refusé sa réadmission par décision du 13 décembre 2024. L’administration a immédiatement sollicité les autorités algériennes pour la délivrance d’un laissez-passer. Toutefois aucune réponse n’a été donné à cette demande, aucune date n’est fixée pour un rendez-vous consulaire et il y a lieu de considérer qu’il n’y aura aucune délivrance à bref délai des documents de voyage.
Par ailleurs, il n’est pas établi que Monsieur [F] aurait fait une obstruction à la mesure d’éloignement dans les quinze derniers jours de la demande de prolongation.
Enfin, s’agissant de la mesure à l’ordre public il y a lieu de relever que l’intéressé n’a jamais été condamné ou qu’en tout état de cause cela n’est pas démontré, le simple relevé FAED ne suffisant pas à caractériser une telle menace.
Il y a lieu de relever que les conditions de l’article L.742-5 du CESEDA ne sont donc pas réunies et la demande de prolongation sera rejetée.
REJETONS la demande de prolongation de maintien en rétention administrative de M. PREFET DU NORD
ORDONNONS que Monsieur [V] [F] soit remis en liberté à l’expiration d’un délai de vingt quatre heures suivant la Notification à Monsieur le Procureur de la République de BOULOGNE SUR MER de la présente ordonnance sauf dispositions contraires prises par ce magistrat.
INFORMONS Monsieur [V] [F] qu’il est maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de vingt quatre heures à compter de la notification de la présente ordonnance au procureur de la République et le cas échéant, jusqu’à ce qu’il soit statué sur l’effet suspensif de l’appel ou la décision au fond, que pendant ce délai il peut contacter un avocat, un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter.
RAPPELONS à l’intéressé qu’il a l’obligation de quitter le territoire national.
NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 3] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI (numéro de FAX du greffe de la Cour d’Appel: [XXXXXXXX01]) ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.
L’avocat de la Préfecture, L’avocat, Le Greffier, Le Juge,
décision rendue à 11 heures 28
Ordonnance transmise ce jour à M. PREFET DU NORD
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 25/00068 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76CWQ
Ordonnance notifiée à Monsieur le procureur de la République à 11 heures 35
Décision notifiée à …h…
L’intéressé, L’interprète,
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