L’Essentiel : M. [S] [C], par l’intermédiaire de son avocat, conteste l’ordonnance de rétention, tandis que le préfet de police en demande la confirmation. Selon l’article L.742-4, le juge peut prolonger la rétention au-delà de trente jours en cas d’urgence ou d’impossibilité d’éloignement. Le conseil en défense souligne un manque de diligences initiales, arguant qu’aucune perspective d’éloignement n’est envisageable. Malgré les efforts de l’administration, M. [S] [C] a compliqué son identification en utilisant de nombreux alias. En conséquence, la demande de prolongation de la rétention est acceptée et l’ordonnance confirmée. Un pourvoi en cassation est possible.
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Observations des partiesM. [S] [C], représenté par son avocat, demande l’infirmation de l’ordonnance, tandis que le conseil du préfet de police plaide pour la confirmation de celle-ci. Contrôle des diligencesL’article L.742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers stipule que le juge peut être saisi pour prolonger la rétention au-delà de trente jours dans des cas spécifiques, tels que l’urgence ou l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement. L’absence de passeport est considérée comme une perte de documents de voyage. Diligences de l’administrationLe conseil en défense souligne un défaut de diligences durant les 30 premiers jours, arguant que le Préfet ne peut justifier une nouvelle prolongation. Il n’y aurait pas de perspective d’éloignement dans un délai raisonnable, ce qui justifierait la demande de mise en liberté. État des démarches administrativesIl est établi que le consul a été saisi depuis le 18 décembre 2024. M. [S] [C] complique son identification en utilisant 36 alias et en dissimulant son identité, ce qui a conduit la préfecture à solliciter plusieurs consulats. Obligations de l’autorité administrativeDans le cadre de l’article L.742-4, il n’y a pas d’obligation de délai pour lever les obstacles à l’éloignement. L’autorité administrative a effectué les diligences nécessaires, et M. [S] [C] n’a pas remis son passeport, ce qui a retardé le processus. Confirmation de l’ordonnanceLa décision d’éloignement n’ayant pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage, et en l’absence de carence dans les diligences administratives, la demande de prolongation de la rétention est acceptée. L’ordonnance est donc confirmée. Notification et voies de recoursL’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition, mais un pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative et au ministère public, avec un délai de deux mois pour le former. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon l’article L.742-4 ?L’article L.742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile précise les conditions dans lesquelles le juge des libertés et de la détention peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de trente jours. Cet article énonce que la prolongation peut intervenir dans les cas suivants : 1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ; 2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ; 3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison : a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ; b) de l’absence de moyens de transport. Il est également précisé que l’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours. Comment le juge contrôle-t-il les diligences de l’administration en matière de rétention ?Le contrôle des diligences de l’administration est fondamental dans le cadre de la rétention administrative. Selon l’article L.741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, un maintien en rétention doit être aussi bref que possible et ne se justifie que tant que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Le juge doit donc vérifier concrètement les diligences accomplies par l’administration pour s’assurer que l’étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. Cela implique que dès le placement en rétention, il doit y avoir une saisine effective des services compétents pour rendre possible le retour de l’étranger. Dans l’affaire en question, il a été constaté que le consul a été saisi depuis le 18 décembre 2024, mais que M. [S] [C] a complexifié son identification en utilisant 36 alias et en dissimulant son identité. La préfecture a donc dû saisir plusieurs consulats, ce qui a nécessité des diligences supplémentaires. Quelles sont les implications de l’absence de passeport dans le cadre de la rétention ?L’absence de passeport est considérée comme équivalente à la perte ou à la destruction de documents de voyage selon l’article L.742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Cela signifie que si un étranger ne remet pas son passeport à l’autorité préfectorale, cela peut justifier une prolongation de la rétention administrative. Dans le cas de M. [S] [C], son refus de remettre son passeport a compliqué les démarches administratives et a entraîné des délais supplémentaires. Il est donc essentiel que l’étranger collabore avec les autorités pour faciliter le processus d’éloignement. La Cour a noté que le temps nécessaire pour accomplir les actes procéduraux était difficilement compressible et relevait désormais de la diplomatie, ce qui souligne l’importance de la coopération de l’étranger dans ces situations. Quelles sont les voies de recours disponibles après l’ordonnance de prolongation de la rétention ?Après l’ordonnance de prolongation de la rétention, plusieurs voies de recours sont ouvertes. Il est stipulé que l’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition, mais le pourvoi en cassation est accessible à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention, ainsi qu’au ministère public. Le délai pour former un pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance. Le pourvoi doit être formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur. Ces dispositions garantissent un contrôle judiciaire sur les décisions de rétention et permettent à l’étranger de contester la légalité de son maintien en rétention. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
L. 742-1 et suivants du Code de l’entrée et du séjour
des étrangers et du droit d’asile
ORDONNANCE DU 20 JANVIER 2025
(1 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 25/00285 – N° Portalis 35L7-V-B7J-CKUPW
Décision déférée : ordonnance rendue le 16 janvier 2025, à 12h13, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris
Nous, Pascal Latournald, magistrat à la cour d’appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Ophanie Kerloc’h, greffière aux débats et au prononcé de l’ordonnance,
APPELANT
M. [S] [C]
né le 07 janvier 1983, ville non précisée, de nationalité ivoirienne
RETENU au centre de rétention : [1] 1
représenté de Me Wilfrid Balatana, avocat de permanence, avocat au barreau de Paris
INTIMÉ
LE PREFET DE POLICE
représenté par Me Nicolas Suarez Pedroza, du cabinet Actis, avocat au barreau de Val-de-Marne
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l’heure de l’audience
ORDONNANCE :
– contradictoire
– prononcée en audience publique
– Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l’application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;
Constatant qu’aucune salle d’audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n’est disponible pour l’audience de ce jour ;
– Vu l’ordonnance du 16 janvier 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris ordonnant la prolongation du maintien de M. [S] [C] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, pour une durée maximale de 30 jours, à compter du 15 janvier 2025 soit jusqu’au 14 février 2025 et disant que la présente ordonnance sera notifiée à l’intéressé par l’intermédiaire du chef de rétention administrative de Paris ;
– Vu l’appel motivé interjeté le 17 janvier 2025, à 14h52, par M. [S] [C] ;
– Vu le message reçu le 20 janvier 2025 à 10h00 par le greffe du centre de rétention administrative nous informant du refus de M. [S] [C] de se présenter à l’audience ;
– de M. [S] [C], représenté de son avocat, qui demande l’infirmation de l’ordonnance ;
– du conseil du préfet de police tendant à la confirmation de l’ordonnance ;
Sur le contrôle des diligences
L’article L.742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose : » Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ;
2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement
b) de l’absence de moyens de transport.
L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours « .
Il convient de préciser que l’absence de passeport équivaut à la perte ou à la destruction de documents de voyage au sens de l’article L 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Le conseil en défense, régulièrement entendu, conclut sur le défaut de diligences pendant les 30 premiers jours estimant ainsi que le Préfet ne peut obtenir une nouvelle prolongation sur le fondement de l’article L. 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, estimant qu’il n’apparaît aucune diligence de l’administration de nature à démontrer la possibilité d’un éloignement du territoire français ni même qu’il ne résulte aucune perspective d’éloignement dans un délai convenable. Il sollicite donc l’infirmation de l’ordonnance du premier juge avec mise en liberté du retenu.
Sur ce,
Sur les diligences de l’administration
Il résulte de l’article L. 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile qu’une deuxième prolongation de la rétention pour une durée de 30 jours peut intervenir notamment lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat (art. 742-4, 3°).
Il résulte des dispositions de l’article L. 741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et des termes de l’article 15.1 alinéa 4 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 qu’un maintien en rétention administrative doit être aussi bref que possible et ne se justifie qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise.
Il appartient au juge en application des dispositions précitées de contrôler concrètement les diligences accomplies par l’administration pour permettre que l’étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, ce qui requiert dès le placement en rétention, une saisine effective des services compétents pour rendre possible le retour.
En l’espèce il n’est pas contesté que le consul a été saisi depuis le 18 décembre 2024. La Cour relève que M. [S] [C] complexifie son identification puisqu’il dispose de 36 alias, se revendique de divers pays et dissimule donc son identité. La préfecture ayant déjà saisie le consultat du Burkina, de la Moritanie et du Sénégal.
Il convient de rappeler que lorsque la procédure se situe dans le cadre de l’article L.742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et concerne une demande de seconde prolongation du placement en rétention administrative, il n’existe aucune obligation de « bref délai » concernant la levée des obstacles.
Ainsi, l’autorité administrative a effectué des diligences nécessaires et suffisantes, et a répondu à l’obligation de moyens lui incombant en vertu des dispositions de l’article L. 741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et de l’article 15.1 alinéa 4 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008.
La Cour relève à cet égard que M. [S] [C] s’est abstenu de remettre son passeport à l’autorité préfectorale, ce ne qui ne facilite pas le travail de cette administration et y ajoute des délais.
Le temps critiqué, difficilement compressible, correspond donc aux diligences nécessaires pour accomplir les actes procéduraux de façon régulière d’autant que ceux-ci relèvent dorénavant de la diplomatie et non plus du prisme juridique.
Dans la mesure où la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et en l’absence de carence dans les diligences de l’administration, il sera fait droit à la deuxième demande de prolongation de la rétention administrative.
Il y a lieu donc lieu de confirmer l’ordonnance critiquée.
CONFIRMONS l’ordonnance,
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d’une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 20 janvier 2025 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS : Pour information : L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L’intéressé L’avocat de l’intéressé
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