Prolongation de la rétention administrative : enjeux de la régularité procédurale et des droits des étrangers.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de la régularité procédurale et des droits des étrangers.

L’Essentiel : L’affaire débute par un arrêté du 9 janvier 2023, ordonnant à Monsieur X de quitter le territoire national. Placé en rétention administrative le 31 décembre 2024, sa détention est prolongée le 3 janvier 2025 par un magistrat. Monsieur X déclare un appel le 4 janvier, et une audience se tient le même jour. Son avocat conteste la procédure, soulignant un avis tardif du parquet. Le tribunal juge l’appel recevable, mais rejette les arguments concernant la notification des droits. Finalement, il confirme la prolongation de la rétention, estimant que Monsieur X ne présente pas de garanties suffisantes contre un risque de fuite.

Arrêté de Quitter le Territoire

L’affaire débute avec un arrêté du 9 janvier 2023 émis par le préfet de la Loire-Atlantique, imposant à Monsieur X, se disant [E] [F], l’obligation de quitter le territoire national sans délai, accompagné d’une interdiction de retour de deux ans.

Placement en Rétention Administrative

Le 31 décembre 2024, Monsieur X est placé en rétention administrative pour une durée de quatre jours dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, suite à l’arrêté précité.

Prolongation de la Rétention Administrative

Le 3 janvier 2025, un magistrat du tribunal judiciaire de Perpignan prolonge la rétention administrative de Monsieur X pour une durée maximale de vingt-six jours, décision notifiée le même jour à 14h52.

Déclaration d’Appel

Monsieur X déclare un appel le 4 janvier 2025 depuis le centre de rétention administrative de [Localité 2], avec transmission au greffe de la cour d’appel de Montpellier à 10h37.

Organisation de l’Audience

Le même jour, un appel est passé pour désigner un avocat commis d’office pour l’audience prévue à 14h00. Des courriels sont envoyés pour informer les parties concernées de la tenue de l’audience.

Déroulement de l’Audience

L’audience publique commence à 14h07, après que l’avocat et l’appelant se soient entretenus dans la salle de visio-conférence. Monsieur X confirme son identité et exprime son désir de quitter le territoire français, tout en indiquant qu’il n’a pas compris l’obligation de quitter.

Arguments de l’Avocat

L’avocat de Monsieur X, Me Katia Lucas Dublanche, présente les moyens de l’appel, soulignant un avis tardif du parquet. Le représentant du préfet des Pyrénées-Orientales demande la confirmation de l’ordonnance de prolongation de la rétention.

Délibération et Notification

Le conseiller annonce que l’affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée avec l’assistance d’un interprète en arabe, à la demande de l’étranger retenu.

Recevabilité de l’Appel

L’appel est jugé recevable, car Monsieur X a formalisé son appel dans les 24 heures suivant la notification de l’ordonnance de prolongation de la rétention.

Arguments sur la Notification des Droits

Monsieur X soutient que la notification de ses droits lors de la garde à vue a été tardive. Cependant, le tribunal considère que le délai de 30 minutes n’est pas excessif et rejette ce moyen.

Sur la Violation de la Procédure

La requête de prolongation de la rétention doit être accompagnée d’une copie du registre prévu par la loi. Le tribunal constate que la préfecture a bien produit ce document, rendant la requête recevable.

Sur le Fond de l’Affaire

Le tribunal examine les dispositions du Code de l’entrée et du séjour des étrangers. Il conclut que Monsieur X ne présente pas de garanties suffisantes pour prévenir un risque de soustraction à la mesure d’éloignement.

Décision Finale

Le tribunal déclare l’appel recevable, rejette les moyens de nullité, et confirme la décision de prolongation de la rétention administrative de Monsieur X. La décision sera notifiée conformément à la législation en vigueur.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel formé par Monsieur X est jugé recevable en vertu des articles R 743-10 et R 743-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Ces articles stipulent que l’appel doit être interjeté dans un délai de 24 heures suivant la notification de l’ordonnance contestée.

En l’espèce, Monsieur X a formalisé son appel le 04 Janvier 2025 à 10h37, soit dans le délai imparti après la notification de l’ordonnance du 03 Janvier 2025 à 14h52.

Ainsi, la condition de délai est respectée, rendant l’appel recevable.

Sur la notification tardive de ses droits lors de la garde à vue

Monsieur X soutient que l’avis au procureur de la République concernant son placement en garde à vue a été tardif, ce qui constituerait une irrégularité dans la procédure.

L’article L813-4 du CESEDA précise que l’avis doit être donné sans délai.

Cependant, le délai de 30 minutes entre le placement en garde à vue à 16h45 et l’information du procureur à 17h16 n’est pas considéré comme excessif.

Par conséquent, ce moyen sera rejeté, car il ne constitue pas une violation substantielle des droits de l’intéressé.

Sur la violation de l’obligation de présenter une copie du registre actualisée

Selon l’article R. 743-2 du CESEDA, toute requête en prolongation de la rétention administrative doit être accompagnée d’une copie du registre prévu à l’article 744-2.

Monsieur X allègue qu’une copie actualisée de ce registre n’a pas été fournie.

Cependant, il est établi que la préfecture a bien produit une copie du registre actualisée, ce qui rend la requête recevable.

Ainsi, le moyen d’irrecevabilité sera rejeté.

Sur l’irrecevabilité de la requête préfectorale pour défaut de pièce utile

La déclaration d’appel de Monsieur X ne mentionne pas de pièces justificatives manquantes.

De plus, toutes les pièces nécessaires figurent dans le dossier.

Ainsi, le moyen de nullité pour défaut de pièce utile sera également rejeté, confirmant la validité de la procédure.

Sur le fond de l’affaire

L’article L742-3 du CESEDA stipule que si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-six jours à compter de l’expiration du délai de quatre jours mentionné à l’article L. 741-1.

En l’espèce, la prolongation de la rétention de Monsieur X a été ordonnée conformément à cette disposition.

De plus, l’article L612-2 du CESEDA permet à l’autorité administrative de refuser un délai de départ volontaire dans certains cas, notamment si l’étranger constitue une menace pour l’ordre public ou s’il existe un risque de soustraction à la décision d’éloignement.

Monsieur X ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, ce qui justifie la décision de prolongation de sa rétention.

Ainsi, l’ordonnance déférée sera confirmée.

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 25/00005 – N° Portalis DBVK-V-B7J-QQA2

O R D O N N A N C E N° 2025 – 6

du 04 Janvier 2025

SUR PROLONGATION DE RETENTION D’UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L’ADMINISTRATION PENITENTIAIRE

dans l’affaire entre,

D’UNE PART :

Monsieur X se disant [E] [F]

né le 07 Novembre 1990 à [Localité 3] ( ALGERIE )

de nationalité Algérienne

alias [F] [N] né le 5 juin 2000 à [Localité 4] ( ALGERIE )

retenu au centre de rétention de [Localité 2] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire,

Comparant par visio conférence et assisté de Maître Katia LUCAS DUBLANCHE, avocat commis d’office

Appelant,

et en présence de [B] [Z], interprète assermenté en langue arabe,

D’AUTRE PART :

1°) MONSIEUR LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Monsieur [M] [D] dûment habilité,

2°) MINISTERE PUBLIC :

Non représenté

Nous, Anne MONNINI-MICHEL conseiller à la cour d’appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Béatrice MARQUES, greffière,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu l’arrêté du 9 janvier 2023 de MONSIEUR LE PREFET DE LA LOIRE ATLANTIQUE portant obligation de quitter le territoire national sans délai pris à l’encontre de Monsieur X se disant [E] [F] assortie d’une interdiction de retour d’une durée de deux ans

Vu la décision de placement en rétention administrative du 31 décembre 2024 de Monsieur X se disant [E] [F], pendant 4 jours dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire.

Vu l’ordonnance du 03 Janvier 2025 à 14h52 notifiée le même jour à la même heure, du magistrat du siège du tribunal judiciaire de PERPIGNAN chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-six jours.

Vu la déclaration d’appel faite le 04 Janvier 2025 par Monsieur X se disant [E] [F], du centre de rétention administrative de [Localité 2], transmise au greffe de la cour d’appel de Montpellier le même jour à 10h37.

Vu l’appel téléphonique du 04 Janvier 2025 à la coordination pénale afin de désignation d’un avocat commis d’office pour l’audience 04 Janvier 2025 à 14 H 00.

Vu les courriels adressés le 04 Janvier 2025 à MONSIEUR LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES, à l’intéressé, à son conseil, et au Ministère Public les informant que l’audience sera tenue le 04 Janvier 2025 à 14 H 00.

L’avocat et l’appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans la salle de visio conférence du centre de rétention administrative de [Localité 2], et ce, sur le temps de l’audience fixée, avec l’accord du délégué du premier président de la cour d’appel de Montpellier

L’audience publique initialement fixée à 14 H 00 a commencé à 14h07

PRETENTIONS DES PARTIES

Assisté de [B] [Z], interprète, Monsieur X se disant [E] [F] confirme son identité telle que mentionnée dans l’ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l’audience : ‘ [E] [F] né le 07 Novembre 1990 à [Localité 3] ( ALGERIE ) de nationalité Algérienne . J’ai envie de sortir du territoire français. Je n’ai pas respecté l’obligation de quitter le territoire parce que je ne savais pas . On ne m’ a pas expliqué . Je partirais éventuellement en Espagne . Je ne sais pas lire et ni écrire. ‘

L’avocat Me Katia LUCAS DUBLANCHE développe les moyens de l’appel formé contre l’ordonnance magistrat du siège du tribunal judiciaire de PERPIGNAN chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés qui a prolongé le maintien en rétention de l’étranger. Je maintiens tous les moyens

– Avis tardif du parquet à 17h16, or placement en garde à vue 16h35

Monsieur le représentant de MONSIEUR LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES demande de confirmer l’ordonnance déférée.

Monsieur a fait l’objet d’un mandat de dépôt avant le placement en rétention ; l’avis à parquet à 17h16 , procés verbal de fin de garde à vue 16h55,

Assisté de [B] [Z], interprète, Monsieur X se disant [E] [F] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l’audience : ‘ Je n’ai rien à ajouter ‘

Le conseiller indique que l’affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 2] avec l’assistance d’un interprète en langue arabe à la demande de l’étranger retenu.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l’appel :

Le 04 Janvier 2025, à 10h37, Monsieur X se disant [E] [F] a formalisé appel motivé de l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de PERPIGNAN chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés du 03 Janvier 2025 notifiée à 14h52, soit dans les 24 heures de la notification de l’ordonnance querellée, qu’ainsi l’appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

Sur l’appel :

Sur la notification tardive de ses droits lors de la garde à vue

Au visa de l’article L813-4 du Ceseda, Monsieur [E] soutient que l’avis au procureur de la république de son placement en garde à vue est tardif en ce qu’il a été placé en garde à vue à 16h45 et que l’information du procureur a été faite à 17h16 de sorte qu’il a subi un grief et que la procédure est irrégulière.

Cependant, ce délai de 30 minutes n’apparait pas excessif. Ce moyen sera donc rejeté.

Sur la violation de l’obligation de présenter une copie du registre actualisée

La requête doit, à peine d’irrecevabilité (article R. 743-2), être motivée, datée, signée, et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article 744-2 du CESEDA.

Toute requête en prolongation de la rétention administrative d’un étranger doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée d’une copie de ce registre.

En l’espèce, contrairement à ce qu’allègue l’appelant, une copie du registre actualisée est bien produite par la préfecture.

La requête est recevable.

Sur l’irrecevabilité de la requête préfectorale pour défaut de pièce utile

La déclaration d’appel ne fait pas état des pièces justificatives qui seraient manquantes.

En tout état de cause, toutes les pièces utiles figurent au dossier.

Le moyen de nullité sera donc rejeté.

SUR LE FOND

L’article L742-3 du ceseda : ‘Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-six jours à compter de l’expiration du délai de quatre jours mentionné à l’article L. 741-1.’

En application des dispositions de l’article L612-2 du ceseda: ‘Par dérogation à l’article L. 612-1, l’autorité administrative peut refuser d’accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :

1° Le comportement de l’étranger constitue une menace pour l’ordre public ;

2° L’étranger s’est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ;

3° Il existe un risque que l’étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l’objet.’

Et selon l’article L 612-3 du ceseda: ‘Le risque mentionné au 3° de l’article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

1° L’étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n’a pas sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;

2° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation du visa, à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;

3° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français plus d’un mois après l’expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L’étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L’étranger s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure d’éloignement ;

6° L’étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l’un des États avec lesquels s’applique l’acquis de Schengen, fait l’objet d’une décision d’éloignement exécutoire prise par l’un des États ou s’est maintenu sur le territoire d’un de ces États sans justifier d’un droit de séjour ;

7° L’étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité ou de voyage ou a fait usage d’un tel titre ou document ;

8° L’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu’il ne peut présenter des documents d’identité ou de voyage en cours de validité, qu’il a refusé de communiquer les renseignements permettant d’établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu’il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d’empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l’article L. 142-1, qu’il ne justifie pas d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu’il s’est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.’

En l’espèce, l’intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure d’éloignement en l’absence de toute adresse stable et certaine sur le territoire national.

Il y a lieu en conséquence de confirmer l’ordonnance déférée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Vu l’article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile,

Déclarons l’appel recevable,

Rejetons les moyens de nullité,

Confirmons la décision déférée,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l’article R743-19 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 04 Janvier 2025 à 15h20

Le greffier, Le magistrat délégué,


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