Prolongation de la rétention administrative : enjeux de régularité et de droits fondamentaux.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de régularité et de droits fondamentaux.

L’Essentiel : M. [P] [V] [F] a reçu une obligation de quitter le territoire français le 22 février 2024, suivie d’une interdiction de retour de trois ans. Placé en rétention administrative le 24 décembre 2024, il a vu sa rétention prolongée de vingt-six jours par le juge des libertés le 28 décembre. M. [P] [V] [F] a interjeté appel le 30 décembre, contestant la régularité de la procédure. L’audience du 31 décembre a permis de confirmer la recevabilité de son appel et celle de la requête du préfet, tout en rejetant les arguments d’irrégularité soulevés par M. [P] [V] [F].

Notification d’une Obligation de Quitter le Territoire

Une obligation de quitter le territoire français sans délai, accompagnée d’une interdiction de retour de trois ans, a été notifiée à M. [P] [V] [F] le 22 février 2024.

Placement en Rétention Administrative

Le 24 décembre 2024, l’autorité administrative a ordonné le placement de M. [P] [V] [F] en rétention dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire.

Demande de Prolongation de Rétention

Le 27 décembre 2024, le préfet de l’Isère a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon pour demander la prolongation de la rétention de M. [P] [V] [F] pour une durée de vingt-six jours.

Ordonnance du Juge des Libertés

Dans son ordonnance du 28 décembre 2024, le juge a rejeté les moyens d’irrecevabilité, déclaré la requête recevable, confirmé la régularité de la procédure et ordonné la prolongation de la rétention de M. [P] [V] [F] pour vingt-six jours.

Appel de M. [P] [V] [F]

M. [P] [V] [F] a interjeté appel de cette ordonnance le 30 décembre 2024, arguant de l’irrecevabilité de la requête pour défaut de pièces justificatives et de l’irrégularité de la procédure.

Audience et Plaidoirie

Les parties ont été convoquées à l’audience du 31 décembre 2024, où M. [P] [V] [F] a comparu avec un interprète et son avocat, tandis que le préfet a demandé la confirmation de l’ordonnance.

Recevabilité de l’Appel

L’appel de M. [P] [V] [F] a été déclaré recevable, respectant les formes et délais légaux prévus par le code de l’entrée et du séjour des étrangers.

Recevabilité de la Requête du Préfet

La requête du préfet a été jugée recevable, bien que des éléments concernant une audition aient été contestés, la préfecture ayant démenti l’existence d’une telle audition.

Irrégularité de Procédure

M. [P] [V] [F] a soutenu qu’il n’y avait pas d’identification de la personne ayant accédé au fichier TAJ, mais cette argumentation a été rejetée, la procédure étant considérée comme régulière.

Justification de la Prolongation de Rétention

Le juge a justifié la prolongation de la rétention par l’absence d’effectivité de la mesure d’assignation à résidence, M. [P] [V] [F] étant sans domicile fixe.

Conclusion

L’appel formé par M. [P] [V] [F] a été déclaré recevable et l’ordonnance déférée a été confirmée dans toutes ses dispositions.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de M. [P] [V] [F] est déclaré recevable en vertu des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Ces articles stipulent que :

– **Article L. 743-21** : « Les décisions de placement en rétention administrative peuvent faire l’objet d’un recours devant le juge des libertés et de la détention. »

– **Article R. 743-10** : « Le recours est formé dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la décision. »

– **Article R. 743-11** : « Le recours est instruit selon les règles de la procédure contradictoire. »

Dans le cas présent, M. [P] [V] [F] a interjeté appel dans les formes et délais légaux, ce qui rend son appel recevable.

Sur la recevabilité de la requête du préfet de l’Isère

La requête du préfet de l’Isère est régie par l’article R. 743-2 du CESEDA, qui impose que la requête soit motivée, datée et signée, accompagnée de toutes pièces justificatives utiles.

Cet article précise que :

– **Article R. 743-2** : « La requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention. »

En l’espèce, il est reproché à la préfecture l’absence d’une audition mentionnée dans la requête. Cependant, la préfecture a indiqué qu’il ne s’agissait que d’éléments du dossier.

La requête mentionne une audition de l’intéressé, mais celle-ci a eu lieu pendant son incarcération et le même jour que l’évaluation de sa vulnérabilité.

Malgré cela, les nombreuses pièces au dossier montrent que cette audition n’était pas essentielle pour soutenir la requête.

Ainsi, la requête sera déclarée recevable.

Sur l’irrégularité de procédure

M. [P] [V] [F] soutient que l’absence d’identification de la personne ayant accédé au fichier TAJ constitue une atteinte à ses droits.

Il fait valoir que même si le matricule permet d’identifier l’auteur, il n’est pas certain qu’il s’agisse de la personne ayant procédé à la recherche.

Cependant, l’identification par le matricule est possible et, de plus, la fiche pénale justifie une condamnation récente.

Il n’apparaît donc pas de grief suffisant pour remettre en cause la consultation du TAJ ni l’ensemble de la procédure.

La procédure sera donc déclarée régulière, et le juge des libertés et de la détention a justifié la prolongation de la rétention en raison de l’absence d’effectivité de la mesure d’assignation à résidence, M. [P] [V] [F] étant sans domicile fixe.

N° RG 24/09899 – N° Portalis DBVX-V-B7I-QC32

Nom du ressortissant :

[P] [V] [F]

[V] [F]

C/

PREFETE DE L’ISERE

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 31 DECEMBRE 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Emmanuelle SCHOLL, conseillère à la cour d’appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 16 décembre 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d’entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d’asile,

Assistée de Céline DESPLANCHES, greffier,

En l’absence du ministère public,

En audience publique du 31 Décembre 2024 dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [P] [V] [F]

né le 11 Novembre 2002 à [Localité 4] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention administrative de [6]

Comparant et assisté de Maître Marie GUILLAUME, avocat au barreau de LYON, commis d’office et avec le concours de Monsieur [U] [I], interprète en langue arabe inscrit sur la liste CESEDA et ayant prêté serment à l’audience

ET

INTIMEE :

Mme PREFETE DE L’ISERE

[Adresse 1]

[Adresse 3]

[Localité 2]

‘non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître Eddy PERRIN, avocat au barreau de LYON substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON

Avons mis l’affaire en délibéré au 31 Décembre 2024 à 18 heures et à cette date et heure prononcé l’ordonnance dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Une obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d’une interdiction de retour de trois an a été notifiée à M. [P] [V] [F] le 22 février 2024.

Par décision en date du 24 décembre 2024, l’autorité administrative a ordonné le placement de M. [P] [V] [F] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire à compter du 24 décembre 2024.

Suivant requête du 27 décembre 2024, reçue le 27 décembre 2024 à 14 heures 15, le préfet de l’Isère a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-six jours.

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon, dans son ordonnance du 28 décembre 2024 à 13heures 42 a :

‘ rejeté les moyens d’irrecevabilité,

‘ déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative,

‘ déclaré régulière la procédure diligentée à l’encontre de M. [P] [V] [F] ,

‘ ordonné la prolongation de la rétention de M. [P] [V] [F] dans les locaux du centre de rétention administrative de [Localité 5] pour une durée de vingt-six jours.

M. [P] [V] [F] a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration au greffe le 30 décembre 2024 à 9 heures 59 en faisant valoir l’irrecevabilité de la requête pour défaut de production de l’ensemble des pièces justificatives, subsidiairement l’irrégularité de la procédure au regard de l’absence d’identification et de mention de l’habilitation de la personne ayant accédé au TAJ, outre l’absence de fondement à une telle consultation dudit fichier.

M. [P] [V] [F] a demandé l’infirmation de l’ordonnance déférée, de dire n’y avoir lieu à la prolongation de la rétention de M. [P] [V] [F] et d’ordonner sa remise en liberté.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience du 31 décembre 2024 à 10 heures 30.

M. [P] [V] [F] a comparu et a été assisté d’un interprète en langue arabe et de son avocat.

Le conseil de M. [P] [V] [F] a été entendu en sa plaidoirie pour soutenir les termes de la requête d’appel.

Le préfet de l’Isère, représenté par son conseil, a demandé la confirmation de l’ordonnance déférée.

M. [P] [V] [F] a eu la parole en dernier.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de M. [P] [V] [F] relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) est déclaré recevable. 

Sur la recevabilité de la requête du préfet de l’Isère

Aux termes de l’article R 743-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, A peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.

Lorsque la requête est formée par l’autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L744-2 du même code.

En l’espèce, il est reproché l’absence de l’audition dont il est fait état dans la requête. La préfecture dément l’existence d’une audition, indiquant qu’il ne s’agit que d’éléments du dossier faisant suite à des déclarations du retenu.

La requête de la préfecture mentionne dans le moyen relatif à la menace pour l’ordre public et le risque de soustraction une audition de l’intéressé du 27 novembre 2024. Au regard de sa fiche pénale, celle-ci a eu lieu pendant son incarcération et le même jour que l’évaluation de sa vulnérabilité.

Toutefois au regard des nombreuses pièces au dossier, il n’apparaît pas que cette pièce était utile au soutien de la requête de le préfecture. En effet, elle développe cette audition dans le moyen relatif au risque de soustraction qui est étayé par d’autres éléments tels que la fiche pénale, le procès-verbal de carence d’assignation à résidence.

Quant à l’argument selon lequel cette audition aurait permis un examen entier du dossier, il ne peut être retenu, cela relevant de l’examen au fond.

En conséquence, la requête sera déclarée recevable.

Sur l’irrégularité de procédure

L’appelant soutient que rien ne permet d’identifier la personne ayant accédé au fichier TAJ et que cela constitue ue atteinte à ses droits lui faisant grief. Il développe en indiquant que quand bien même le matricule permettrait d’identifier son auteur, rien ne permettrait de s’assurer qu’il s’agit bien de la personne qui a procédé à la recherche.

Toutefois, outre le fait que la prise du matricule d’un tiers est une hypothèse non étayée, l’identification est possible par le matricule. Au surplus, en l’état d’une condamnation pénale récente justifiée par la fiche pénale, il n’apparaît pas de grief permettant de remettre en cause non seulement cette consultation du TAJ mais également l’ensemble de la procédure.

La procédure sera donc déclarée régulière.

Le juge des libertés et de la détention a parfaitement justifié la prolongation de la rétention au regard de l’absence d’effectivité de la mesure d’assignation à résidence, étant précisé qu’il est aujourd’hui sans domicile fixe.

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l’appel formé par M. [P] [V] [F],

Confirmons en toutes ses dispositions l’ordonnance déférée.

Le greffier, Le conseiller délégué,

Céline DESPLANCHES Emmanuelle SCHOLL


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