Prolongation de la rétention administrative : enjeux de régularité et de droits des étrangers.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de régularité et de droits des étrangers.

L’Essentiel : Le Préfet de Meurthe et Moselle a ordonné le placement en rétention de Monsieur [O] [E], de nationalité algérienne, pour quatre jours à partir du 28 décembre 2024. Une demande de prolongation de 26 jours a été formulée, justifiée par l’absence de documents de voyage valides et un risque de fuite. Lors de l’audience, Monsieur [E] a contesté cette prolongation, demandant une assignation à résidence. Le juge a rejeté cette demande, considérant que les droits de l’intéressé avaient été respectés. La prolongation de la rétention a été validée, effective jusqu’au 1er janvier 2025.

Placement en rétention

Le Préfet de Meurthe et Moselle a prononcé le placement en rétention de Monsieur [O] [E], de nationalité algérienne, pour une durée de quatre jours, à compter du 28 décembre 2024. Cette décision a été notifiée à l’intéressé à 07h32.

Demande de prolongation

Le Préfet a ensuite sollicité une prolongation de la rétention administrative pour une période de 26 jours, en se basant sur les articles du Code de l’Entrée et de Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile.

Débats à l’audience

Lors de l’audience, Monsieur [E], assisté de son avocat, a soulevé une exception de procédure et s’est opposé à la prolongation de la rétention, demandant une assignation à résidence judiciaire. Le Préfet a rejeté cette exception et a demandé la prolongation de la rétention.

Examen des exceptions de procédure

Le juge a examiné les exceptions de procédure soulevées par la défense, notamment une irrégularité liée au délai de transfert de l’intéressé. Cependant, il a conclu que cette irrégularité n’avait pas porté atteinte aux droits de Monsieur [E], qui avait été informé de ses droits en rétention dans un délai raisonnable.

Motifs de la prolongation

Monsieur [E] avait fait l’objet d’un arrêté d’expulsion et ne disposait pas de documents de voyage valides, ce qui justifiait la demande de prolongation. De plus, il ne présentait pas de garanties suffisantes pour éviter un risque de fuite, ayant exprimé son intention de rester en France sans justifier d’un domicile stable.

Décision finale

Le tribunal a déclaré la requête préfectorale régulière et recevable, rejeté l’exception de procédure et la demande d’assignation à résidence judiciaire. Il a ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [E] pour une durée maximale de 26 jours, à compter du 1er janvier 2025.

Information sur les recours

L’intéressé a été informé de son droit d’appel contre cette décision dans un délai de 24 heures, sans effet suspensif. Une copie de la décision a été transmise aux autorités compétentes pour information.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de la prolongation de la rétention administrative selon le Code de l’Entrée et de Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile ?

La prolongation de la rétention administrative est régie par plusieurs articles du Code de l’Entrée et de Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA).

Selon l’article L.741-1, la rétention administrative peut être ordonnée pour un étranger en situation irrégulière, lorsque son éloignement est envisagé.

L’article L.742-1 précise que la rétention ne peut excéder 48 heures sans décision du juge des libertés et de la détention.

Pour prolonger cette rétention, l’article L.743-3 stipule que le préfet doit justifier de l’impossibilité de l’éloignement dans le délai initial.

En l’espèce, le préfet a démontré que Monsieur [O] [E] ne disposait pas de documents de voyage valides et que des démarches étaient en cours pour obtenir un laissez-passer, ce qui justifie la prolongation de la rétention.

Quels sont les droits de l’étranger en rétention administrative ?

L’article L.744-4 du CESEDA énonce clairement les droits des étrangers placés en rétention.

Il stipule que l’étranger doit être informé, dans les meilleurs délais, de son droit à l’assistance d’un interprète, d’un avocat et d’un médecin.

De plus, il a le droit de communiquer avec son consulat et toute personne de son choix, et ces informations doivent lui être fournies dans une langue qu’il comprend.

Dans le cas de Monsieur [O] [E], il a été informé de ses droits à son arrivée au Centre de Rétention Administrative, ce qui respecte les dispositions de cet article.

Il est donc essentiel que ces droits soient respectés pour garantir l’effectivité de la procédure de rétention.

Quelles sont les conséquences d’une violation des formes prescrites par la loi en matière de rétention administrative ?

L’article L.743-12 du CESEDA stipule que si les formes prescrites par la loi ne sont pas respectées, le juge ne peut prononcer la mainlevée de la rétention que si cette irrégularité a substantiellement porté atteinte aux droits de l’étranger.

Cela signifie que la partie qui invoque une irrégularité doit prouver à la fois l’irrégularité et l’atteinte aux droits.

En l’espèce, l’exception de procédure soulevée par le conseil de Monsieur [O] [E] concernant le délai de transfert n’a pas été retenue, car il n’a pas été démontré que cela ait porté atteinte à ses droits.

Ainsi, l’absence d’atteinte aux droits de l’intéressé a conduit au rejet de l’exception de procédure.

Quelles sont les implications de l’absence de garanties de représentation pour l’étranger en rétention ?

L’article L.612-3 du CESEDA précise que l’absence de garanties de représentation peut justifier le maintien en rétention d’un étranger.

Dans le cas de Monsieur [O] [E], il a été constaté qu’il ne justifiait pas d’un domicile stable en France et qu’il avait exprimé son intention de rester sur le territoire.

Cela a conduit à la conclusion que le risque de fuite était avéré, justifiant ainsi la prolongation de sa rétention.

Les articles L.743-13 et L.743-15 stipulent également que l’étranger doit satisfaire à certaines conditions pour bénéficier d’une assignation à résidence, ce qui n’était pas le cas ici.

Ainsi, l’absence de garanties a eu un impact direct sur la décision de prolongation de la rétention administrative.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE METZ

Doris BREIT

service du juge des libertes et de la detention

N° RG 25/00002 – N° Portalis DBZJ-W-B7J-LDDR

ORDONNANCE DE
PROLONGATION DE LA RÉTENTION

1ère SAISINE : 26 JOURS
Le 02 Janvier 2025,

Nous, Doris BREIT, magistrat du siège au Tribunal judiciaire de METZ, assistée de Tanya PIOT, greffier, statuant en audience publique au Palais de Justice,

Vu la décision du PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE prononçant le placement en rétention pour une durée de quatre jours de la personne identifiée en l’état comme étant :

[O] [E]
né le 03 Avril 1975 à [Localité 4] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne

Notifiée à l’intéressé(e) le :
28 décembre 2024
à
07:32

Vu la requête du PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE en prolongation de la rétention administrative de la personne pour une période de 26 jours ;

Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.742-3, L.742-10, L.743-3 à L.743-17, R.743-1 et suivants du Code de l’Entrée et de Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile ;

Vu les débats qui se sont tenus à l’audience de ce jour et au cours de laquelle :

– la personne retenue, assistée de Me Nedjoua HALIL, avocat, a soulevé 1 exception de procédure et s’est opposée à la demande de prolongation de la rétention administrative, sollicitant, à titre subsidiaire, une assignation à résidence judiciaire ;

– le Préfet, représenté par son avocat, a conclu au rejet de l’exception de procédure soulevée pour le compte de la personne retenue, au rejet de l’assignation à résidence judiciaire et a sollicité la prolongation de la rétention administrative ;

– le Procureur de la République n’était pas présent malgré avis régulier ;

Vu les pièces versées aux débats ;

MOTIFS

Attendu que la requête de la Préfecture de Meurthe et Moselle est datée, accompagnée de toutes les pièces utiles et signée par M. [J] [U] régulièrement délégué par arrêté du 2024 publié le même jour ;

Qu’il y a donc lieu de la déclarer régulière et recevable ;

I. Sur les exceptions de procédure

Attendu qu’aux termes de l’article L.743-12 du Code de l’Entrée et de Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d’une demande sur ce motif ou qui relève d’office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l’étranger dont l’effectivité n’a pu être rétablie par une régularisation intervenue avant la clôture des débats ;

Que s’agissant d’une procédure soumise aux règles de la procédure civile, il incombe à la partie qui invoque une exception de nullité de faire la démonstration de l’irrégularité alléguée mais aussi de l’atteinte causée par cette irrégularité aux droits de l’étranger ;

Attendu qu’aux termes de l’article 73 du Code de Procédure Civile,  » constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours  » ;

Qu’en application de l’article 74 alinéa 1er du même code,  » les exceptions doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir  » ; qu’ » il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l’exception seraient d’ordre public » ;

Que constituent des exceptions de procédure, au sens de l’article précédent, les exceptions prises de la violation des dispositions liées à la procédure préalable au placement en rétention, et notamment les critiques visant les conditions d’un contrôle d’identité, les droits en garde à vue ou en retenue, ainsi que le déroulement de ces mesures privatives de liberté ;

Attendu qu’en l’espèce, le Conseil de Monsieur [E] invoque une exception de procédure tirée du délai excessif de transfert suite à la notification du placement en rétention, le trajet ayant duré 1h45 ;

Attendu que l’irrégularité invoquée est intervenue après le placement en rétention de Monsieur [E]; que ce moyen ne constitue donc pas une exception de procédure au sens de l’article 74 du Code de Procédure Civile ;

Qu’il peut néanmoins être requalifié en moyen d’atteinte aux droits en rétention;

Attendu qu’aux termes de l’article L.744-4 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile, l’étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu’il bénéficie, dans le lieu de rétention, du droit de demander l’assistance d’un interprète, d’un conseil et d’un médecin, et qu’il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu’il comprend ;

Qu’il est également précisé qu’en cas de placement simultané en rétention d’un nombre important d’étrangers, la notification des droits mentionnés au premier alinéa s’effectue dans les meilleurs délais;

Attendu qu’en l’espèce, Monsieur [E] a reçu notification de son placement en rétention à sa levée d’écrou au Centre de semi liberté de [Localité 3]-[Localité 1] à 7h32, la levée d’écrou étant effective à 7h37 ; qu’il a ensuite été transféré au Centre de Rétention Administrative de [Localité 2] ; qu’il a été informé de ses droits à son arrivée au Centre à 09h30 suite à son arrivée à 9h25 ;

Que quand bien même il n’est pas précisé les motifs expliquant le délai de 1h45 qui s’est écoulé entre ses deux actes, il convient de relever qu’il n’en est résulté aucune atteinte aux droits de l’intéressé dans la mesure où celui-ci a été informé de ses droits en rétention dès 09h30 et qu’il avait ainsi la possibilité de les exercer à son arrivée au Centre une heure quarante cinq plus tard ; qu’il n’est fait état d’aucune atteinte à ses droits ; que le délai de route n’apparait pas excessif compte tenu de la distance parcourue;

Qu’en l’absence d’atteinte aux droits de l’intéressé, ce moyen doit être rejeté ;

II. Sur la demande de prolongation

Attendu que Monsieur [O] [E], de nationalité algérienne, a fait l’objet d’un arrrêté d’expulsion en date du 19 décembre 2024 notifié le 20 décembre 2024, d’un arrêté fixant le pays de renvoi du 28 décembre 2024 et d’un arrêté de placement en rétention administrative du 28 décembre 2024, notifiés le même jour, à sa levée d’écrou;

Que des contraintes matérielles ne permettent pas à la personne retenue de quitter le territoire dans les 4 jours suivant la notification de la décision de placement la concernant ;

Qu’en effet, il ne dispose pas d’un document de voyage en cours de validité ; qu’une demande de laissez-passer a été faite dès le 20 décembre 2024 accompagnée de la copie de son passeport périmé ; qu’une relance est justifiée en date du 30 décembre 2024 ;

Que les diligences effectuées par l’administration sont ainsi justifiées conformément aux dispositions de l’article L 741-3 du CESEDA ;

Attendu en l’espèce que Monsieur [O] [E] ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de le voir se soustraire à son obligation consistant à quitter le territoire en ce qu’il est en situation irrégulière sur le territoire français ; qu’il a indiqué vouloir rester en France ; qu’il ne justifie pas d’un domicile stable en France, ne produisant aucune attestation d’hébergement ni de documents de voyage en cours de validité ; que le risque de fuite est ainsi avéré conformément aux dispositions de l’article L.612-3 du ceseda ;

Qu’ il ne justifie pas avoir remis son passeport aux services de police contre récépissé ;

Qu’il ne satisfait donc pas aux conditions prévues par les articles L.743-13 et L.743-15 du Code de l’Entrée et de Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile, de sorte qu’il ne peut bénéficier d’une assignation à résidence judiciaire ;

Qu’il a par ailleurs affirmé lors de son audition et réaffirmé à cette audience ne pas vouloir quitter le territoire national ;

Que dès lors, il est à craindre que Monsieur [O] [E] ne se soustraie à la mesure d’éloignement dont il fait l’objet s’il devait être livré à lui-même hors de tout cadre contraint ;

Qu’en conséquence, il y a lieu de faire droit à la demande en ordonnant la prolongation de la mesure de placement en rétention administrative pour une durée de 26 jours ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et en premier ressort, par ordonnance réputée contradictoire et assortie de l’exécution provisoire,

DÉCLARONS régulière et recevable la requête préfectorale ;

REJETONS l’exception de procédure soulevée par le Conseil de Monsieur [O] [E] ;

REJETONS la demande d’assignation à résidence judiciaire présentée pour le compte de Monsieur [O] [E] ;

ORDONNONS la prolongation du maintien de Monsieur [O] [E] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, pour une durée maximale de 26 jours :

à compter du
1 janvier 2025
inclus

jusqu’au
26 janvier 2025
inclus

INFORMONS l’intéressé(e) que la présente décision est susceptible d’appel dans le délai de 24 heures à compter de ce jour par acte motivé devant le Premier Président de la Cour d’Appel de Metz et que le recours n’est pas suspensif.

LE GREFFIER
LE PRESIDENT

Reçu notification et copie de la présente ordonnance le 02 Janvier 2025 à 11h29.

L’INTÉRESSÉ(E) L’AVOCAT LE REPRÉSENTANT DE LA PRÉFECTURE

Copie de la présente décision est transmise au procureur de la République, au Tribunal Administratif de Nancy et à la Cour d’Appel de Metz, service JLD, pour information.


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