L’Essentiel : Le Tribunal Judiciaire de Marseille a prolongé la rétention de M. [B] [C], un Cambodgien, pour quinze jours supplémentaires, en raison de sa condamnation et de l’impossibilité d’exécuter son éloignement rapidement. Lors de l’audience, il a exprimé ses craintes de retourner au Cambodge, où il n’a plus de liens depuis 1978, et a évoqué des problèmes de santé. Son avocat a plaidé pour sa libération, arguant qu’il n’y avait pas de preuves suffisantes de menace à l’ordre public. M. [B] [C] a été informé de son droit d’appel dans les vingt-quatre heures suivant la décision.
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Ordonnances de prolongation de rétentionLe Tribunal Judiciaire de Marseille a émis plusieurs ordonnances concernant le maintien d’une personne dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire. La première ordonnance, datée du 12 novembre 2024, a prolongé la rétention pour une période de vingt-six jours. Une seconde ordonnance, en date du 8 décembre 2024, a prolongé cette rétention pour une période supplémentaire de trente jours. Requête du PréfetLe 6 janvier 2025, une requête a été déposée par le Préfet des Bouches-du-Rhône, représenté par un avocat assermenté. La personne concernée a été informée de son droit à l’assistance d’un avocat et a choisi d’être assistée par Me Diallo Aly, qui a pris connaissance de la procédure. Situation de la personne concernéeLa personne concernée, M. [B] [C], de nationalité cambodgienne, a été placée en rétention suite à une ordonnance préfectorale lui imposant de quitter le territoire français, assortie d’une interdiction de retour de dix ans. Cette décision a été notifiée le 8 novembre 2024, moins de trois ans avant le placement en rétention. Droits de la personne retenueIl a été rappelé à M. [B] [C] ses droits pendant la rétention, notamment le droit d’être assisté par un avocat et d’être informé de ses droits. La procédure a été conduite en français, langue que la personne retenue a déclarée comprendre. Arguments présentés lors de l’audienceLors de l’audience, M. [B] [C] a exprimé ses craintes concernant un éventuel retour au Cambodge, affirmant ne plus avoir de liens avec ce pays depuis son départ en 1978. Il a également mentionné des problèmes de santé, notamment son diabète. Le représentant du Préfet a demandé la prolongation de la rétention en raison d’une menace à l’ordre public, citant une condamnation antérieure. Observations de l’avocatL’avocat de M. [B] [C] a souligné le contexte historique de son départ du Cambodge et a plaidé pour sa libération, arguant qu’il n’y avait pas de preuves suffisantes pour justifier une menace à l’ordre public. Il a également noté que la préfecture n’avait pas démontré que l’éloignement serait imminent. Décision du jugeLe juge a décidé de prolonger la rétention de M. [B] [C] pour une période exceptionnelle de quinze jours, en raison de sa condamnation pour des faits graves et de l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement à court terme. La décision a été motivée par la nécessité de garantir l’ordre public et de permettre à l’administration de poursuivre les démarches nécessaires à son éloignement. Notification et droits d’appelLa décision a été notifiée à M. [B] [C], qui a été informé de son droit d’interjeter appel dans les vingt-quatre heures suivant la notification. Le juge a également rappelé à la personne retenue ses droits pendant la période de rétention. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ?La prolongation de la rétention administrative est régie par plusieurs articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Selon l’article L. 742-4, le juge des libertés et de la détention peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de trente jours dans les cas suivants : 1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ; 2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation de son identité ou de l’obstruction volontaire à son éloignement ; 3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison : a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance est intervenue trop tardivement ; b) de l’absence de moyens de transport. Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention pour une nouvelle durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention ne doit pas excéder soixante jours. Quels sont les droits de l’étranger pendant la rétention administrative ?L’article L. 743-9 du CESEDA stipule que le juge des libertés et de la détention, lors de la prolongation de la rétention, rappelle à l’étranger les droits qui lui sont reconnus. Il doit s’assurer que l’étranger a été informé de ses droits dans les meilleurs délais après la notification de la décision de placement en rétention. Ces droits incluent notamment : – Le droit de demander l’assistance d’un interprète, d’un avocat, ainsi que d’un médecin ; L’article L. 743-25 précise également que durant la période de rétention, l’étranger est mis en mesure de contacter son avocat et un tiers, de rencontrer un médecin et de s’alimenter. Quelles sont les conséquences d’une condamnation pénale sur la rétention administrative ?L’article L. 742-6 du CESEDA prévoit que le juge des libertés et de la détention peut être saisi pour prolonger la rétention au-delà de trente jours si l’étranger a été condamné à une peine d’interdiction du territoire pour des actes de terrorisme ou s’il fait l’objet d’une décision d’expulsion pour des comportements liés à des activités terroristes. Dans ce cas, l’éloignement doit rester une perspective raisonnable et aucune décision d’assignation à résidence ne doit permettre un contrôle suffisant de l’étranger. La prolongation de la rétention peut alors être ordonnée pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours, renouvelable, avec une durée maximale de rétention pouvant atteindre cent quatre-vingts jours. Comment le juge évalue-t-il la menace à l’ordre public dans le cadre de la rétention ?La menace à l’ordre public est un critère essentiel pour justifier la prolongation de la rétention. L’article L. 742-5 du CESEDA stipule que le juge peut être saisi pour prolonger la rétention si l’étranger a fait obstruction à l’exécution de la décision d’éloignement ou s’il a présenté une demande d’asile dans le but de faire échec à cette décision. De plus, la jurisprudence constante de la cour d’appel d’Aix-en-Provence indique que la menace à l’ordre public peut être caractérisée par des condamnations pénales antérieures, même si ces circonstances ne sont pas survenues dans les quinze derniers jours. Ainsi, la lourde condamnation criminelle de l’intéressé peut justifier la prolongation de la rétention, car elle constitue une menace réelle et actuelle pour l’ordre public. |
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MARSEILLE
[Adresse 2]
ORDONNANCE N° RC 25/00036
SUR TROISIEME DEMANDE DE PROLONGATION
DE RETENTION ADMINISTRATIVE
(articles L. 742-4 à L. 742-7, L. 743-4, L. 743-6, L. 743-7, L. 743-9, L. 743-19, L. 743-25 et R. 743-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile modifié par la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018,
l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020, loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024)
Nous, Caroline CHARPENTIER, magistrat du siège au Tribunal Judiciaire de Marseille, assisté de Anaïs MARSOT, greffière et de Mathilde BILLOT, greffière placée,
siégeant publiquement, dans la salle d’audience aménagée au [Adresse 4] à proximité du Centre de Rétention administrative du [Localité 5] en application des articles L. 742-1, L. 743-4, L.743-6, L. 743-7, L; 743-20 et L. 743-24 du CESEDA.
Vu les articles L.742-1, L. 742-2, L. 742-4 à L. 742-7, L. 743-4, L. 743-6, L. 743-7, L. 743-9, L. 743-11, L. 743-19 à L. 743-25 et R. 743-1 ensemble les articles R. 742-1, R.743-1 à R. 743-8 et R. 743-21 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
Les avis prévus par l’article R 743-3 du CESEDA ayant été donnés par le Greffier
Vu l’ordonnance en date du 8 décembre 2024 n°24/1825 de BERGER-GENTIL Blandine, magistrat du siège au Tribunal Judiciaire de Marseille, portant prolongation du maintien dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire de la personne désignée dans la requête visée ci-dessous, pour une période supplémentaire de trente jours ;
Vu la requête reçue au greffe le 06 Janvier 2025 à 14 heures 18, présentée par Monsieur le Préfet du département PREFET DES BOUCHES DU RHONE,
Attendu que Monsieur le Préfet requérant, régulièrement avisé, est représenté par [A] [H] dûment assermenté
Attendu que la personne concernée par la requête, avisée de la possibilité de faire choix d’un Avocat ou de solliciter la désignation d’un Avocat commis d’office, déclare vouloir l’assistance d’un Conseil ;
Attendu que la personne concernée par la requête est assistée de Me DIALLO Aly, avocat désigné qui a pris connaissance de la procédure et s’est entretenu librement avec son client ;
Attendu qu’en application de l’article l’article L. 141-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile la personne étrangère présentée a déclaré au début de la procédure comprendre la langue française et a donc été entendue en cette langue ;
Attendu qu’il est constant que M. [B] [C]
né le 06 Novembre 1966 à [Localité 7] (CAMBODGE)
de nationalité Cambodgienne
a fait l’objet d’une des sept mesures prévues aux articles L. 722-2, L. 731-1, L. 731-2, L. 732-3, L. 733-8 à L. 733-12, 741-1, L. 741-4; L. 741-5, L. 741-7, L. 743-16, L. 744-1, L. 751-2 à L. 751-4, L. 751-9 et L. 751-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile , et en l’espèce :
d’une ordonnance
en date du arrêté préféctoral portant obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d’une interdiction de retour d’une durée de 10 ans, n°24/132365M, en date du 7 novembre 2024 et notifiée le 8 novembre 2024 à 09h37
édicté moins de 3 ans avant la décision de placement en rétention en date du 7 novembre 2024 notifiée le 8 novembre 2024 à 09h37,
Attendu qu’il est rappelé à la personne intéressée, ainsi que dit au dispositif , les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention ;
Attendu que suivant l’article L. 742-4 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ;
2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;
b) de l’absence de moyens de transport.
L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours.
Attendu que suivant l’article L. 742-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.
Attendu que suivant l’article L. 742-6 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
Par dérogation à l’article L. 742-4, le juge des libertés et de la détention peut également être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours si l’étranger a été condamné à une peine d’interdiction du territoire pour des actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV du code pénal ou s’il fait l’objet d’une décision d’expulsion édictée pour un comportement lié à des activités à caractère terroriste pénalement constatées, dès lors que son éloignement demeure une perspective raisonnable et qu’aucune décision d’assignation à résidence ne permettrait un contrôle suffisant de cet étranger.
L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours qui peut être renouvelée. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas cent quatre-vingts jours.
Attendu que suivant l’article L. 742-7 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-6, dans les conditions prévues à l’article L. 742-5. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas deux cent dix jours.
Attendu que suivant l’article L. 743-4 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
Le juge des libertés et de la détention statue, par ordonnance, dans les quarante-huit heures suivant sa saisine.
Attendu que suivant l’article L. 743-6 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
Le juge des libertés et de la détention statue après audition du représentant de l’administration, si celui-ci, dûment convoqué, est présent, et de l’intéressé ou de son conseil, s’il en a un.
Attendu que suivant l’article L. 743-7 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
Le juge des libertés et de la détention statue au siège du tribunal judiciaire dans le ressort duquel se situe le lieu de rétention de l’étranger, sauf exception prévue par voie réglementaire. Si une salle d’audience attribuée au ministère de la justice lui permettant de statuer publiquement a été spécialement aménagée à proximité immédiate de ce lieu de rétention, il statue dans cette salle.
Attendu que suivant l’article L. 743-9 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
Le juge des libertés et de la détention, saisi aux fins de prolongation de la rétention, rappelle à l’étranger les droits qui lui sont reconnus et s’assure, d’après les mentions figurant au registre prévu à l’article L. 744-2 émargé par l’intéressé, que celui-ci a été, dans les meilleurs délais suivant la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir à compter de son arrivée au lieu de rétention.
Le juge tient compte des circonstances particulières liées notamment au placement en rétention simultané d’un nombre important d’étrangers pour l’appréciation des délais relatifs à la notification de la décision, à l’information des droits et à leur prise d’effet.
Attendu que suivant l’article L. 743-19 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
Lorsqu’une ordonnance du juge des libertés et de la détention met fin à la rétention d’un étranger ou l’assigne à résidence, elle est immédiatement notifiée au procureur de la République. L’étranger est maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de dix heures à compter de cette notification, à moins que le procureur de la République n’en dispose autrement.
Attendu que suivant l’article L. 743-25 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
Durant la période pendant laquelle il est maintenu à la disposition de la justice, dans les conditions prévues à l’article L. 742-2, l’étranger est mis en mesure, s’il le souhaite, de contacter son avocat et un tiers, de rencontrer un médecin et de s’alimenter.
Attendu que suivant l’article R. 743-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
Pour l’application des articles L. 743-3 à L. 743-18, le juge des libertés et de la détention compétent est celui du tribunal judiciaire dans le ressort duquel l’étranger est maintenu en rétention ou assigné à résidence.
Toutefois, le juge des libertés et de la détention compétent pour statuer sur le maintien en rétention d’un étranger dans le cas prévu à l’article L. 742-6 est celui du tribunal judiciaire de Paris. Ce juge reste compétent jusqu’au terme de la procédure.
DEROULEMENT DES DEBATS
La personne étrangère présentée déclare : J’ai besoin de vous dire comment j’ai quitté mon pays en 1978 comme réfugié politique. Je ne connais plus personne au Cambodge, si vous me renvoyiez là-bas, cela va être compliqué pour moi, en plus je suis malade, je prends de l’insuline.
Je ne connaissais personne au Cambodge, mes enfants, ma famille mes frères, mes soeurs ils sont là, j’aimerais rester ici. Je n’ai pas de passeport en cours de validité, je ne suis plus Cambodgien maintenant. J’ai quitté le Cambodge en 1978, je suis allé en Thaïlande, en tant que réfugié politique. Je n’ai plus de papiers cambodgiens; je suis en France en 1981.
le représentant du Préfet : je demande qu’il soit fait droit à la requête de M. le Préfet. Nous avons effectué de multiples diligences, nous sommes dans l’attente de leur réponse. Je vous demande de prolonger la rétention au regard de la menace à l’OP, eu égard à sa condamnation de 2018.
Observations de l’avocat : entre 1975 et 1979, le Cambodge a connu un contexte génocidaire; c’est dans ce contexte qu’ils ont quitté le Cambodge. Depuis 1981, ils sont en France, il est père de 6 enfants français, ils résident en France; ses frères et soeurs sont ici aussi; ils n’ont aucun lien avec le Cambodge. Vous avez des témoignages de ses proches de ses enfants, qui indiquent qu’il est ici depuis 1981. Il a été condamné pour des faits graves. Il a fait 6 ans au lieu de 12 ans. Monsieur a fait 7 ans de détention, il a purgé sa peine; il n’y a pas lieu de l’expulser du Cambodge. La prolongation peut être ordonnée lorsqu’il est établi que la préfecture prouve que l’éloignement aura lieu à bref délai. Ou qu’elle constitue une menace à L’OP. Si monsieur était une menace à l’OP;
depuis qu’il est en rétention, il n’y a eu aucun retour du Cambodge, il n’est même pas identifié, alors que la rétention doit durer le temps strictement nécessaire à l’éloignement. Ce n’est qu’hier que le consulat a été relancé. Vu qu’il est sur le territoire depuis 44 ans, j’ai fais une demande à la préfecture; je ne peux que vous demander d’ordonner sa mise en liberté. Et sinon je vous demande une assignation à résidence, j’ai une attestation d’hébergement. Il n’a aucun document du Cambodge, il veut juste reprendre une vie normale avec sa famille. Je vous demande, vous êtes souveraine, vous pouvez estimer que les diligences ne sont pas suffisantes.
La personne étrangère présentée déclare : j’ai fais un an de DP. Faites que je sorte le plus rapidement du CRA, c’est très difficile pour moi, j’ai perdu 5-6 kilos, je ne mange pas bien, j’arrive pas à dormir, je m’endors à 3 h et me lève à 6h. Je suis fatigué; j’ai mal au genou, je ne peux pas marcher. Ici je ne peux rien faire alors qu’en prison je pouvais travailler.
Attendu qu’au terme de l’article L 742-5 du CESEDA dans sa version issue de la loi n° 2024 – 42 du 26 janvier 2024 “ A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Qu’il est prévu que le juge peut être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public
Attendu que l’intéressé fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire depuis le 07 novembre 2024 avec une interdiction de retour pendant 10 ans ; il a été placé au centre de rétention administrative le 08 novembre 2024, décision notifiée le même jour; cette mesure a été prolongée à deux reprises jusqu’au 07 janvier 2025, confirmée par la cour d’appel d’Aix en Provence le 09 décembre 2024 ;
Attendu que la mesure d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ;
Attendu que la préfecture établit qu’elle ne peut mettre à exécution à bref délai la mesure d’éloignement ;
Attendu en outre que l’intéressé a été condamné par la cour d’assises des bouches du Rhône le 07 février 2018 à 12 ans de réclusion criminelle pour vil incestueux constituant dès lors une menace à l’ordre public justifiant dès lors la demande de maintien en rétention au sens de l’article L 742-5 du CESEDA.
A l’audience, le retenu indique être parti du Cambodge depuis 1978 et ne plus connaitre personne au pays ; il indique être en France depuis 1981 ; il indique être diabétique ; il indique avoir toute sa famille en France; il n’a pas de passeport ; son conseil indique que toute la famille de l’intéressé est en France;
Attendu qu’il est de jurisprudence constante de la cour d’appel d’Aix en Provence ( CA 28 juin 2024 RG 24/00925) que s’il n’est pas démontré à ce stade que des documents de voyage seront délivrés à bref délai par l’autorité étrangère, il est démontré que le retenu constitue une menace grave à l’ordre public. La rédaction de l’article L. 742-5 du CESEDA alors que la menace à l’ordre public n’est pas numérotée dans les circonstances impliquant d’être caractérisées dans les 15 derniers jours, cette référence peut être antérieure dès lors qu’actuelle.
Il convient de faire droit à la requête exceptionnelle de maintien en rétention pour une nouvelle période de 15 jours dans l’attente de son identification afin de permettre à l’autorité administrative d’exécuter la mesure d’éloignement, étant précisé que la présence de l’intéressé sur le territoire constitue une menace réelle et caractérisée à l’ordre public eu égard à sa lourde condamnation criminelle par la cour d’assise des Bouches du Rhône du 07 février 2018 ; par ailleurs, les diligences nécessaires ont été effectuées en ce que l’administration a demandé un laisser passer consulaire à l’égard de l’individu aux autorités consulaires du Cambodge dès le 08 novembre 2024 ; l’autorité administrative a relancé les autorités du Cambodge le 06 janvier 2025 restée vaine au moment de l’audience ;
FAISONS DROIT à titre exceptionnel à la requête du Préfet ;
RAPPELONS à la personne étrangère que, pendant toute la période de la rétention, elle peut demander l’assistance d’un interprète, d’un conseil ainsi que d’un médecin, et communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix et qu’un espace permettant aux avocats de s’entretenir confidentiellement avec les étrangers retenus est prévu au Centre de Rétention du [Localité 5] ;
ORDONNONS, pour une durée maximale de quinze jours commençant à l’expiration du précédent délai de trente jours déjà accordé , le maintien dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, de M. [B] [C]
et DISONS que la mesure de rétention prendra fin au plus tard le 22 janvier 2025 à 09h37 ;
INFORMONS l’intéressé verbalement de la possibilité d’interjeter appel à l’encontre de la présente ordonnance dans les 24 heures suivant la notification de cette décision, par déclaration motivée transmise par tout moyen (article R.743-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) au greffe du service des rétentions administratives de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, [Adresse 3], et notamment par télécopie au [XXXXXXXX01] ou par voie électronique à l’adresse structurelle suivante : [Courriel 6], ainsi que la possibilité offerte au Préfet et au Ministère public d’interjeter appel sauf pour le Procureur de la République, dans les 24 heures de la notification, à saisir Monsieur le Premier Président de la Cour d’appel ou son délégué d’une demande tendant à faire déclarer son recours suspensif ;
FAIT A MARSEILLE
en audience publique, le 07 Janvier 2025 À 11 h 35
Le Greffier Le Magistrat du siège du tribunal judiciaire
Reçu notification le 7 janvier 2025
L’intéressé
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