Prolongation de la rétention administrative : enjeux de légalité et d’ordre public

·

·

Prolongation de la rétention administrative : enjeux de légalité et d’ordre public

L’Essentiel : Monsieur [L] [M], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative le 30 octobre 2024. Le juge du Tribunal judiciaire d’Orléans a ordonné le maintien de sa rétention pour 26 jours, prolongée par la suite à plusieurs reprises. La Préfecture a justifié ces prolongations par l’obstruction à l’éloignement, mais le juge a noté que l’absence de documents d’identité n’était pas une nouvelle circonstance. De plus, les allégations de menace pour l’ordre public n’étaient pas étayées par des preuves concrètes. Finalement, la prolongation de la rétention a été acceptée pour 15 jours supplémentaires.

Contexte de la rétention administrative

Monsieur [L] [M], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative le 30 octobre 2024. Il a été transféré au Centre de rétention administrative d'[Localité 3] (Loiret). Le juge du Tribunal judiciaire d’Orléans a ordonné le maintien de sa rétention pour une durée maximale de 26 jours à partir du 2 novembre 2024, décision confirmée par la Cour d’appel d’Orléans le 5 novembre 2024.

Prolongations de la rétention

Une deuxième prolongation de la rétention a été décidée le 29 novembre 2024, pour une durée maximale de 30 jours, également confirmée par la Cour d’appel. Le 27 décembre 2024, la Préfecture d’Indre-et-Loire a demandé une troisième prolongation de la rétention administrative de Monsieur [L] [M].

Recevabilité de la requête

La requête de prolongation a été jugée recevable, car elle était signée par le secrétaire général de la Préfecture et accompagnée des pièces justificatives requises. Le juge a souligné l’importance du respect des conditions de légalité dans le cadre de la rétention administrative.

Critères de prolongation

Selon l’article L.742-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers, le juge peut prolonger la rétention administrative dans certaines situations, notamment si l’étranger fait obstruction à l’éloignement ou si la décision d’éloignement ne peut être exécutée. La Préfecture a allégué que Monsieur [L] [M] avait fait obstruction à son éloignement en ne fournissant pas de documents d’identité.

Obstruction à l’éloignement

Le juge a constaté que l’absence de documents d’identité n’était pas une nouvelle circonstance et n’avait pas été observée dans les 15 jours précédents. La Préfecture n’a pas démontré d’autres événements récents justifiant une obstruction volontaire à l’éloignement.

Documents de voyage et consulat

La Préfecture a sollicité le consulat d’Algérie pour obtenir un laissez-passer, mais n’a pas reçu de réponse. Le juge a noté que l’administration n’a pas prouvé que la délivrance des documents de voyage interviendrait à bref délai, rendant ainsi la prolongation de la rétention non justifiée sur ce fondement.

Menace pour l’ordre public

Concernant la menace pour l’ordre public, la Préfecture a évoqué les antécédents criminels de Monsieur [L] [M], mais n’a pas fourni de preuves concrètes, telles que des copies de jugements ou de son casier judiciaire. Le juge a souligné que la simple commission d’infractions pénales ne suffit pas à établir une menace pour l’ordre public.

Décision finale

Malgré les insuffisances dans les justifications fournies par la Préfecture, le juge a reconnu que le comportement délictueux récidiviste de Monsieur [L] [M] pouvait constituer une menace pour l’ordre public. En conséquence, la requête de prolongation de la rétention administrative a été acceptée pour une durée supplémentaire de 15 jours, à compter du 29 décembre 2024.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de la requête aux fins de troisième prolongation de la rétention administrative

La recevabilité de la requête de la Préfecture d’Indre-et-Loire pour la troisième prolongation de la rétention administrative de Monsieur [L] [M] est fondée sur les articles L.741-1 et suivants du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA).

Selon l’article L.742-4 du CESEDA, la demande de prolongation doit être formée dans un délai précis et accompagnée des pièces justificatives nécessaires. En l’espèce, la requête a été signée par un représentant dûment habilité de la Préfecture, et les documents requis, y compris le registre de rétention, ont été fournis.

Ainsi, la requête est déclarée recevable, car elle respecte les conditions de forme et de fond prévues par la législation en vigueur.

Sur le bien-fondé de la requête aux fins de troisième prolongation de la rétention administrative

Le bien-fondé de la requête de prolongation de la rétention administrative est régi par l’article L.742-5 du CESEDA, qui stipule que le magistrat peut ordonner une nouvelle prolongation dans des cas exceptionnels, notamment si l’étranger a fait obstruction à l’exécution de la décision d’éloignement ou si la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage.

En l’espèce, la Préfecture allègue que Monsieur [L] [M] a fait obstruction à l’éloignement en ne produisant pas de documents d’identité. Cependant, cette situation n’est pas nouvelle et n’a pas été constatée dans les quinze derniers jours, ce qui ne permet pas de justifier la prolongation sur ce fondement.

De plus, la Préfecture n’a pas démontré que la délivrance des documents de voyage par le consulat interviendrait à bref délai, ce qui est une condition essentielle pour justifier la prolongation de la rétention.

Enfin, concernant la menace à l’ordre public, bien que Monsieur [L] [M] ait des antécédents judiciaires, la Préfecture n’a pas fourni de preuves suffisantes pour établir que son comportement actuel constitue une menace imminente.

Ainsi, la prolongation de la rétention administrative ne peut être justifiée sur les bases invoquées par la Préfecture.

COUR D’APPEL
D’ORLEANS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’ORLEANS

Rétention administrative

N° RG 24/06257 – N° Portalis DBYV-W-B7I-G7JE
Minute N°24/1168

ORDONNANCE
ORDONNANCE DE TROISIEME PROLONGATION DE LA RETENTION ADMINISTRATIVE

rendue le 28 Décembre 2024

Le 28 décembre 2024, devant Nous, E.FLAMIGNI, Vice-Présidente au Tribunal judiciaire d’ORLEANS, assistée de J. PICKEL, Greffier, étant en audience publique, au Palais de Justice,

Vu la requête motivée du représentant de la PREFECTURE D’INDRE ET LOIRE en date du 27 décembre 2024, reçue le 27 décembre 2024 à au greffe du Tribunal,

Vu les ordonnances du magistrat du siège du Tribunal judiciaire d’ORLEANS en date des 3 novembre 2024 et 29 novembre 2024 ordonnant la prolongation du maintien en rétention administrative de l’intéressé ;

Vu les ordonnances du Premier Président de la Cour d’Appel d’Orléans en date des 5 novembre 2024 et 3 décembre 2024 ayant respectivement confirmé les décisions susvisées ;

Vu les avis donnés à Monsieur X se disant [L] [M], à PREFECTURE D’INDRE ET LOIRE, au Procureur de la République, à Me Mélodie GASNER, avocate,

Vu notre note d’audience de ce jour,
comparaît ce jour

Monsieur X se disant [L] [M]
né le 15 Juillet 1994 à [Localité 2] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne

Assisté de Maître Mélodie GASNER, avocat commis d’office du barreau d’ORLEANS, qui a pu consulter la procédure, ainsi que l’intéressé.

En présence de Maître [K], représentant de la PREFECTURE D’INDRE ET LOIRE, dûment convoqué.

En présence de Monsieur [O] [N], interprète en langue , inscrit sur la liste de la Cour d’appel d’Orléans.

En l’absence du Procureur de la République, avisé ;

Mentionnons que PREFECTURE D’INDRE ET LOIRE, le Procureur de la République dudit tribunal, l’intéressé et son conseil ont été avisés, dès réception de la requête, de la date et l’heure de la présente audience par le greffier.

Mentionnons que les pièces de la procédure ont été mises à la disposition de l’intéressé et du conseil.

Vu les dispositions des articles L.741-1 et suivants du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile

Après avoir entendu :

Le représentant de la PREFECTURE D’INDRE ET LOIRE en sa demande de prolongation de la rétention administrative,

Me Mélodie GASNER en ses observations.

M. X se disant [L] [M] en ses explications.

MOTIFS DE LA DECISION

Il sera rappelé à titre liminaire que Monsieur [L] [M], né le 15 juillet 1994 à [Localité 2] (Algérie) et de nationalité algérienne a été placé en rétention administrative le 30 octobre 2024 à 16h30 puis transféré au Centre de rétention administrative d’[Localité 3] (Loiret).

Par décision écrite motivée en date du 3 novembre 2024, le juge du Tribunal judiciaire d’Orléans a maintenu Monsieur [L] [M] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 26 jours maximum à compter du 2 novembre 2024.

Cette décision a été confirmée par une ordonnance du Premier Président de la Cour d’appel d’Orléans en date du 5 novembre 2024.

Le recours à l’encontre de l’arrêté de placement en rétention administrative formé par Monsieur [L] [M] n’ayant pas été joint à la requête présentée par la Préfecture d’Indre-et-Loire en prolongation de cette mesure, il a été statué sur cette requête en contestation par ordonnance du juge du Tribunal judiciaire d’Orléans du 4 novembre 2024, qui a rejeté ledit recours.

Par décision écrite motivée en date du 29 novembre 2024, le juge du Tribunal judiciaire d’Orléans a maintenu Monsieur [L] [M] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 30 jours maximum à compter du 29 novembre 2024.

Cette décision a été confirmée par une ordonnance du Premier Président de la Cour d’appel d’Orléans en date du 3 décembre 2024.

Par requête en date du 27 décembre 2024, la Préfecture d’Indre-et-Loire a sollicité la troisième prolongation de la rétention administrative de Monsieur [L] [M].

I – Sur la recevabilité de la requête aux fins de troisième prolongation de la rétention administrative

Le contrôle, par une autorité judiciaire, du respect des conditions de légalité de la rétention d’un ressortissant d’un pays tiers qui découlent du droit de l’Union doit conduire cette autorité à relever d’office, sur la base des éléments du dossier portés à sa connaissance, tels que complétés ou éclairés lors de la procédure contradictoire devant elle, l’éventuel non-respect d’une condition de légalité qui n’a pas été invoquée par la personne concernée (voir en ce sens, CJUE 8 novembre 2022, n° C-704/20).

En l’espèce, la requête de la Préfecture d’Indre-et-Loire aux fins de troisième prolongation de la rétention administrative dont fait l’objet Monsieur [L] [M] est signée de Monsieur [Z] [J], secrétaire général de la Préfecture d’Indre-et-Loire, autorité compétente en vertu de la délégation de signature régulièrement produite au dossier, motivée par référence aux textes applicables et à la situation de Monsieur [L] [M], accompagnée des pièces justificatives utiles et notamment le registre de rétention actualisé tel que prévu aux articles L744-2 et R743-2 du CESEDA et formée dans le délai prévu à l’article L742-4 du CESEDA. Elle sera donc déclarée recevable.

II – Sur le bien-fondé de la requête aux fins de troisième prolongation de la rétention administrative

Sur les critères de prolongation de la résidence administrative et les diligences

Aux termes de l’article L.742-5 du code de l’entré et du séjour des étrangers et du droit d’asile, « A titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours:
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours. »

En application de l’article 6 du code de procédure civile, il incombe à la préfecture d’alléguer les faits propres à fonder sa demande.

Le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut ainsi, à titre exceptionnel et dans les seules hypothèses précitées, ordonner une nouvelle prolongation de la rétention pour un délai maximal de 15 jours, renouvelable une fois.

En l’espèce, Monsieur [L] [M] est en rétention administrative depuis le 30 octobre 2024 et a déjà fait l’objet d’une première prolongation de cette rétention pour une durée de 26 jours par décision magistrat du siège du tribunal judiciaire en date du 3 novembre 2024, d’une deuxième prolongation de la rétention pour un délai de 30 jours par une décision en date du 29 novembre 2024.

Ces décisions ont été respectivement confirmées par ordonnances du Premier Président de la Cour d’appel d’Orléans en date des 5 novembre 2024 et 3 décembre 2024.

La Préfecture d’Indre-et-Loire sollicite une troisième prolongation de la mesure de rétention alléguant que Monsieur [L] [M]
a fait obstruction à l’exécution de la décision d’éloignement en ne produisant pas de document d’identité ; que la décision d’éloignement n’a pu être exécutée, malgré de nombreuses relances, en raison du défaut de délivrance des documents nécessaire à son éloignement par le consulat dont il relève et dont la délivrance devrait intervenir à bref délai ; constituerait une menace pour l’ordre public, l’intéressé ayant été condamné à de multiples reprises et s’étant inscrit de façon récurrente dans la délinquance, encore en avril 2024 brisant la vitre d’un véhicule pour y voler un ordinateur.
S’agissant de l’obstruction à la mesure d’éloignement, il est établi que Monsieur [L] [M] ne dispose d’aucun document d’identité ou de voyage. Cela était déjà relevé par le juge du Tribunal judiciaire ayant ordonné la première prolongation de la mesure de rétention administrative dans sa décision du 3 novembre 2024. Cette circonstance n’est donc pas nouvelle et ne s’est pas manifestée dans les 15 derniers jours au sens de l’article L742-5 précité du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. La Préfecture d’Indre-et-Loire n’allègue ni ne démontre d’aucun autre évènement survenu dans les 15 derniers jours susceptibles de caractériser une obstruction volontaire par Monsieur [M] à l’exécution d’office de la mesure d’éloignement. La prolongation de la mesure de rétention administrative pour une troisième période de 15 jours ne peut donc être justifiée sur ce fondement.

S’agissant de l’absence de possibilité d’exécution de la mesure d’éloignement en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, il sera rappelé que l’administration doit justifier que la délivrance d’un document de voyage par le consulat intervienne à bref délai.

En l’espèce, depuis le placement en rétention administrative de Monsieur [L] [M], la Préfecture d’Indre-et-Loire a sollicité le consulat d’Algérie en vue de l’identification et de la délivrance d’un laissez-passer à deux reprises :
le 30 octobre 2024 par courrier transmis par e-mail le 31 octobre 2024 à 10h04, dont il a été justifié de la bonne réception ; le 25 novembre 2024, par courrier transmis par e-mail le jour même à 12h01, dont il a, là encore, été justifié de la bonne réception.
La Préfecture d’Indre-et-Loire est toujours dans l’attente du retour des autorités consulaires algériennes.

Force est donc de constater que l’identification de Monsieur [L] [M] n’a, à ce stade, pas été rendue possible en raison de l’absence de réponse des autorités algériennes aux saisines et relances de l’administration française.

La Préfecture d’Indre-et-Loire n’établit pas en quoi elle pourrait obtenir, à bref délai et en toute hypothèse dans les 15 prochains jours, l’identification de l’intéressé et la délivrance de documents de voyage.

Une troisième prolongation de la rétention administrative dont fait l’objet Monsieur [L] [M] ne peut donc être ordonnée sur ce fondement.

S’agissant enfin de la menace à l’ordre public, il appartient à l’administration de caractériser l’urgence absolue ou la menace pour l’ordre public.

La notion de menace pour l’ordre public, compte tenu de son détachement des autres critères, peut préexister à une situation apparue dans les quinze derniers jours. Ainsi, la notion de menace pour l’ordre public a pour objectif manifeste de prévenir, pour l’avenir, les agissements dangereux commis par des personnes en situation irrégulières sur le territoire national.

La qualification de menace pour l’ordre public donne lieu à un contrôle normal du juge administratif (CE, Sect., 17 octobre 2003, n° 249183 : CE, 12 février 2014, ministre de l’intérieur, n° 365644, A) et il y a lieu de procéder à ce même contrôle de l’erreur d’appréciation (ni contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation, ni contrôle de proportionnalité) lors de l’examen des conditions de troisième et quatrième prolongation telles que résultant de la loi n° 2024-42 précitée (voir en ce sens, CA d’Orléans, 14 mai 2024, n° 24/01057).

Le juge apprécie in concreto la caractérisation de la menace pour l’ordre public, au regard d’un faisceau d’indices permettant, ou non, d’établir la réalité des faits, la gravité, la récurrence ou la réitération, et l’actualité de la menace selon le comportement de l’intéressé.

Ces éléments doivent être mis en balance avec l’attitude positive de l’intéressé, traduisible notamment par son positionnement sur les faits, son comportement en détention, sa volonté d’indemniser les victimes ou encore ses projets de réinsertion ou de réhabilitation.

Dans ce contexte, l’appréciation de cette menace doit prendre en considération les risques objectifs que l’étranger en situation irrégulière fait peser sur l’ordre public et il y a lieu de considérer, à l’instar du juge administratif, que la commission d’une infraction pénale n’est pas de nature, à elle seule, à établir que le comportement de l’intéressé présenterait une menace pour l’ordre public (CE, 16 mars 2005, n° 269313, Mme X., A ; CE, 12 février 2014, ministre de l’intérieur, n° 365644, A).

Il sera enfin rappelé que la préfecture qui saisit le magistrat du siège du tribunal judiciaire aux fins de prolongation de la mesure de rétention administrative doit fournir l’ensemble des pièces justificatives utiles pour que le juge puisse apprécier de sa demande. Il ne peut être fait référence à des pièces qui auraient été produites devant le juge lors de précédentes requêtes aux fins de prolongation de la rétention administrative, une requête ne valant que pour elle-même.

En l’espèce, si l’administration allègue que Monsieur [L] [M] constitue une menace à l’ordre public, il lui incombe de justifier de la réalité de ces allégations. En outre, il est rappelé qu’en application de l’article R.743-2 du CESEDA, la requête formée par l’autorité administrative doit être accompagnée de toutes pièces justificatives utiles.

Les dispositions de cet article ne précisent pas quelles pièces doivent accompagner la requête préfectorale sollicitant la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé, à l’exception de la copie du registre prévu à l’article L.744-2 du CESEDA.

Ainsi, le juge se livre à une appréciation in concreto du caractère utile des pièces devant être jointes à ladite requête.

Il s’en déduit que dans le cadre d’une prolongation fondée sur la menace que représente le comportement du retenu pour l’ordre public, il appartient à la préfecture de joindre les justificatifs portant sur les antécédents de l’intéressé, notamment sa fiche pénale, une copie de son casier judiciaire, ou des copies de ses actes de condamnations (voir en ce sens CA d’Orléans, 22 mai 2024, n° 24/01106).

La Préfecture d’Indre-et-Loire fait état de nombreuses condamnations de Monsieur [M] pour justifier que ce dernier représenterait une menace à l’ordre public mais ne produit aucune copie de jugement de condamnation, de casier judiciaire ou encore de fiche pénale pour appuyer et justifier ses dires.

Néanmoins, elle joint à l’appui de sa requête la copie des ordonnances rendues par le juge judiciaire et le Premier Président de la Cour d’appel d’Orléans ayant prolongé la mesure de rétention administrative dont fait actuellement l’objet Monsieur [L] [M].

Il peut y être lu que la fiche pénale de Monsieur [M] consultée lors de l’étude des précédentes requêtes en prolongation révélait que l’intéressé s’était inscrit dans une délinquance régulière en commettant des faits de vols aggravés pour lesquels il a été condamné le 1er février 2022, 18 novembre 2022, 2 août 2023 et 26 avril 2024, soit de manière très récente.

Il en résulte qu’il est établi que Monsieur [L] [M] présente un comportement délictueux récidiviste pouvant constituer une menace pour l’ordre public, de sorte qu’il se situe dans une des hypothèses permettant de prolonger, pour une durée supplémentaire de 15 jours, la mesure de rétention administrative.

En conséquence, il y a lieu de faire droit à la requête et d’ordonner la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [L] [M] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire sur le fondement de l’article L.742-5 du CESEDA, et pour une durée de 15 jours supplémentaires à compter du 29 décembre 2024.

PAR CES MOTIFS

Ordonnons la prolongation du maintien de Monsieur X se disant [L] [M] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de QUINZE JOURS à compter du 29 décembre 2024 .

Notifions que la présente décision est susceptible d’être contestée par la voie de l’appel interjeté dans les 24 heures du prononcé de la présente ordonnance, devant le Premier Président de la Cour d’Appel d’ORLEANS ([Courriel 1]), et par requête motivée.

Rappelons à Monsieur X se disant [L] [M] que dès le début du maintien en rétention, il peut demander l’assistance d’un interprète, d’un médecin, d’un conseil et peut, s’il le désire, communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix.

Décision rendue en audience publique le 28 Décembre 2024 à

Le Greffier Le Juge

Reçu notification et copie de la présente ordonnance le 28 Décembre 2024 à ORLEANS

L’INTERESSE L’AVOCAT L’INTERPRETE

REPRESENTANT de PREFECTURE D’INDRE ET LOIRE
envoi par mail et par Plex le 28/12/2024
le greffier

Copie de la présente décision est transmise par courriel au procureur de la République, au Tribunal Administratif d’Orléans, à la Préfecture dePREFECTURE D’INDRE ET LOIRE et au CRA d’Olivet.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon