Prolongation de la rétention administrative : enjeux de conformité aux droits individuels et aux procédures légales.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de conformité aux droits individuels et aux procédures légales.

L’Essentiel : M. le Préfet du Pas-de-Calais a demandé, par une requête du 29 décembre 2024, la prolongation de la rétention de l’intéressé au-delà de quatre jours, pour une durée maximale de vingt-six jours. Assisté par Me Amélie Delattre, l’intéressé a été informé de ses droits et a exprimé son souhait d’être assisté d’un avocat. Me Delattre a plaidé pour la nullité de la procédure, soulignant une irrégularité dans le placement en rétention. Cependant, l’avocat de la Préfecture a soutenu que la rétention n’avait pas excédé 24 heures. Le recours a été rejeté, et la prolongation accordée jusqu’au 25 janvier 2025.

Demande de prolongation de rétention

Par une requête datée du 29 décembre 2024, M. le Préfet du Pas-de-Calais a sollicité l’autorisation de prolonger la rétention de l’intéressé au-delà de quatre jours, pour une durée maximale de vingt-six jours.

Assistance juridique et droits de l’intéressé

L’intéressé, assisté par Me Amélie Delattre, a été informé de ses droits durant la rétention et des possibilités de recours. Il a exprimé son souhait d’être assisté d’un avocat et a expliqué sa situation, mentionnant qu’il était coiffeur à domicile et qu’il avait l’intention de quitter la France pour l’Italie où il avait demandé l’asile.

Arguments de l’avocat de l’intéressé

Me Amélie Delattre a plaidé pour la nullité de la procédure, arguant que l’intéressé avait été placé en rétention administrative juste avant la fin de sa garde à vue, ce qui constituerait une irrégularité.

Réponse de l’avocat de la Préfecture

L’avocat de la Préfecture a demandé le rejet du recours en annulation, soutenant que la rétention n’avait pas duré plus de 24 heures et que les mesures nécessaires avaient été prises, l’intéressé ne présentant pas de garanties de représentation.

Motifs de la décision

La décision a été fondée sur le fait que la mesure de rétention administrative a été notifiée alors que l’intéressé était encore sous garde à vue. Toutefois, il a été jugé que cette situation n’avait pas porté atteinte à ses droits. De plus, l’intéressé ne disposait pas de garanties suffisantes pour la mise en œuvre de la mesure de reconduite à la frontière.

Conclusion de la décision

Le recours en annulation a été rejeté, et la prolongation de la rétention administrative a été accordée pour une durée maximale de vingt-six jours, jusqu’au 25 janvier 2025. L’ordonnance a été notifiée à l’intéressé, qui a été informé de son droit d’appel.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile ?

La prolongation de la rétention administrative est régie par les articles L.743-9 et L.743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA).

L’article L.743-9 stipule que :

« La rétention administrative ne peut excéder quarante-huit heures, sauf si l’autorité administrative demande une prolongation. Cette prolongation ne peut être accordée que par le juge des libertés et de la détention, qui statue dans un délai de quarante-huit heures. »

De plus, l’article L.743-24 précise que :

« La prolongation de la rétention administrative peut être autorisée pour une durée maximale de vingt-six jours, lorsque les conditions de reconduite à la frontière ne peuvent être réalisées dans le délai initial. »

Dans le cas présent, M. le Préfet du Pas-de-Calais a demandé une prolongation de la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-six jours, ce qui est conforme aux dispositions légales.

Il est donc essentiel que la demande de prolongation soit justifiée par des raisons valables, telles que l’absence de garanties de représentation de l’intéressé, ce qui a été souligné dans la décision rendue.

Quels sont les droits de l’intéressé pendant la rétention administrative ?

Les droits de l’intéressé pendant la rétention administrative sont clairement énoncés dans le CESEDA, notamment dans l’article L.743-12.

Cet article stipule que :

« L’intéressé doit être informé de ses droits, notamment du droit d’être assisté par un avocat, du droit de contester la mesure de rétention et du droit d’être informé des possibilités de recours. »

Il est également précisé que :

« La nullité de la procédure ne peut être prononcée qu’en cas de grief porté aux droits de la personne par l’irrégularité qui est invoquée. »

Dans le cas présent, l’intéressé a été assisté par un avocat, Me Amélie DELATTRE, et a été informé de ses droits. Il a également eu l’opportunité de faire valoir ses observations concernant sa situation.

Il est important de noter que l’irrégularité alléguée par l’avocat de l’intéressé, à savoir la coexistence de la garde à vue et de la rétention administrative, n’a pas été jugée suffisante pour entraîner la nullité de la procédure, car aucune atteinte aux droits de l’intéressé n’a été démontrée.

Quelles sont les conséquences d’une irrégularité dans la procédure de rétention administrative ?

Les conséquences d’une irrégularité dans la procédure de rétention administrative sont abordées dans l’article L.743-12 du CESEDA.

Cet article indique que :

« La nullité de la procédure ne peut être prononcée qu’en cas de grief porté aux droits de la personne par l’irrégularité qui est invoquée. »

Cela signifie que pour qu’une irrégularité entraîne la nullité de la procédure, il doit être prouvé que cette irrégularité a causé un préjudice aux droits de l’intéressé.

Dans l’affaire en question, l’argument de l’avocat de l’intéressé concernant la simultanéité de la garde à vue et de la rétention administrative a été rejeté. Le tribunal a estimé que cette situation n’avait pas porté atteinte aux droits de l’intéressé, car la notification de la mesure de rétention a eu lieu peu avant la levée de la garde à vue.

Ainsi, en l’absence de preuve d’un préjudice, la procédure de rétention administrative a été jugée valide, et la demande de prolongation a été acceptée.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE MAINTIEN EN RÉTENTION ET SUR LE CONTRÔLE DE LA RÉGULARITÉ D’UNE DÉCISION DE PLACEMENT EN RÉTENTION

MINUTE : 24/2033
Appel des causes le 30 Décembre 2024 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 24/05831 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-76CRD

Nous, Monsieur MARLIERE Maurice, Premier Vice Président au Tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assisté de Madame LOGET Angèle, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;

Vu l’article R. 213-12-2 du code de l’organisation judiciaire ;

En présence de [W] [B], interprète en langue arabe, serment préalablement prêté ;

En présence de Maître Margaux CHIKAOUI représentant M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS;

Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;

Monsieur [L] [P]
de nationalité Tunisienne
né le 24 Août 1999 à [Localité 2] (TUNISIE), a fait l’objet :

d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français et ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcée le 26 décembre 2024 par M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS , qui lui a été notifié le 26 décembre 2024 à 17h25 .

Vu la requête de Monsieur [L] [P] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative en date du 30 Décembre 2024 réceptionnée par le greffe du juge des libertés et de la détention le 30 Décembre 2024 à 10h27 ;

Par requête du 29 Décembre 2024 reçue au greffe à 11h41, M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de quatre jours, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de VINGT SIX jours maximum.

En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Amélie DELATTRE, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations.

L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. J’étais à [Localité 3] parce que je suis coiffeur à domicile. Je comptais quitter la France pour partir en Italie parce que j’y ai fait une demande d’asile. Je l’avais dit à la police et ils ont dit qu’on allait me renvoyer dans mon pays. Je suis venue en bateau et je suis arrivé en Italie. Je suis prêt a donner mes empreintes, j’ai même une caret délivrée par une association italienne. La carte est chez moi je peux demander à un ami de me la ramener.

Me Amélie DELATTRE entendu en ses observations : Je sollicite la nullité de la procédure, Monsieur a été placé en rétention administrative à 16 heures 35 ainsi c’est 30 min avant la fin de la garde à vue (17 heures 05), ces deux régimes ne pouvant cohabiter, il y a une irrégularité entraînant la nullité de la procédure et donc la mainlevée de la mesure de rétention. Je ne soulève pas les autres moyens évoqués. 

L’avocat de la Préfecture entendu en ses observations ; sollicite le rejet du recours en annulation et la prolongation de la rétention administrative au CRA de [Localité 1] : Je vous demande de ne pas faire droit au moyen, à partir du moment où la retenue n’a pas durée 24 heures le moyen ne devrait pas être retenu. Les diligences ont été faites, Monsieur n’a pas de garanties de représentation. Monsieur ne peux pas encore être reconduit je vous demande donc de prolonger la rétention administrative de Monsieur. 

MOTIFS

Attendu que la mesure de garde à vue dont l’intéressé a fait l’objet à compter du 25 décembre 2024 à 09 heures 25 a été levée le lendemain à 17 heures 05 après avoir fait l’objet d’une prolongation ; que sur instruction de la préfecture du Nord l’intéressé a été placé en retenue administrative à l’issue de la mesure de garde à vue étant précisé que la mesure de rétention administrative lui a été notifiée à partir de 16 heures 35 c’est-à-dire à un moment où il était toujours placé sous le régime de la garde à vue ;

Attendu qu’aux termes de l’article L.743-12 du CESEDA la nullité de la procédure ne peut être prononcée qu’en cas de grief porté aux droits de la personne par l’irrégularité qui est invoquée ; qu’en l’espèce aucune irrégularité ne résulte de la notification de la mesure de rétention administrative environ trente minutes avant la levée de la garde à vue, en effet la “coexistence” de ces deux régimes privatifs de liberté n’est pas de nature à avoir porté atteinte aux droits de l’intéressé contrairement à la situation qui aurait résulté de l’inverse ; qu’il convient en conséquence de rejeter le moyen de nullité qui n’apparaît pas pertinent ;

L’intéressé ne présente pas de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière, des mesures de surveillance sont nécessaires.

Eu égard aux nécessités invoquées par M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS, il convient de rejeter le recours en annulation formé par l’intéressé et d’accorder la prolongation demandée.

PAR CES MOTIFS

PRONONÇONS la jonction avec l’affaire n°24/05843

REJETONS le recours en annulation de Monsieur [L] [P]

AUTORISONS l’autorité administrative à retenir : Monsieur [L] [P] dans les locaux ne relevant pas de l’Administration pénitentiaire pour une prolongation de rétention administrative d’une durée maximale de VINGT-SIX JOURS soit jusqu’au 25 janvier 2025

NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et l’avisons de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 4] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

L’avocat de la Préfecture, L’Avocat, Le Greffier, Le Juge,

décision rendue à 11 h 10
L’ordonnance a été transmise ce jour par mail à M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS et au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 24/05831 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-76CRD

Décision notifiée à …h…

L’intéressé, L’interprète,


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