Prolongation du maintien en zone d’attente : enjeux de l’exercice des droits des étrangers.

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Prolongation du maintien en zone d’attente : enjeux de l’exercice des droits des étrangers.

L’Essentiel : L’affaire concerne M. [T] [I] [O], un ressortissant péruvien, placé en zone d’attente à l’aéroport de [2]. Le tribunal de Bobigny a initialement ordonné la restitution de ses affaires, estimant qu’il n’y avait pas de justification pour prolonger son maintien. Cependant, le préfet de police a interjeté appel, arguant que M. [T] [I] [O] disposait de documents valides pour son séjour. Le tribunal a rappelé que le maintien en zone d’attente peut être prolongé sous certaines conditions. Finalement, le 4 janvier 2025, il a décidé d’infirmer l’ordonnance initiale, autorisant un maintien supplémentaire de huit jours.

Contexte de l’affaire

L’affaire concerne M. [T] [I] [O], un ressortissant péruvien, qui a été placé en zone d’attente à l’aéroport de [2]. Le ministre de l’Intérieur, représenté par le préfet de police, a interjeté appel d’une ordonnance du tribunal judiciaire de Bobigny qui avait décidé de ne pas prolonger le maintien de M. [T] [I] [O] en zone d’attente.

Décision initiale du tribunal

Le 2 janvier 2025, le tribunal a ordonné la restitution des affaires personnelles de M. [T] [I] [O], y compris son passeport et ses documents de voyage, en considérant qu’il n’y avait pas lieu de prolonger son maintien en zone d’attente. Cette décision a été motivée par l’absence de preuves d’un défaut d’exercice effectif des droits de l’intéressé.

Appel du préfet de police

Le 3 janvier 2025, le conseil du préfet de police a interjeté appel de cette ordonnance, soutenant que le premier juge avait commis un excès de pouvoir en mettant fin à la mesure de maintien. Le préfet a fait valoir que M. [T] [I] [O] disposait d’un passeport, d’un billet de retour, ainsi que d’une attestation d’hébergement et de preuves de moyens financiers suffisants pour son séjour.

Analyse juridique

Le tribunal a rappelé que, selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers, le maintien en zone d’attente peut être prolongé au-delà de quatre jours sous certaines conditions. Il a souligné que le juge judiciaire ne peut pas se substituer au juge administratif dans l’appréciation des conditions d’entrée sur le territoire français, mais qu’il a le pouvoir d’apprécier l’exercice effectif des droits de l’étranger.

Décision finale

En conséquence, le tribunal a décidé d’infirmer l’ordonnance initiale et d’autoriser la prolongation du maintien de M. [T] [I] [O] en zone d’attente pour une durée maximale de huit jours. Cette décision a été prononcée le 4 janvier 2025, avec des instructions pour la remise immédiate d’une expédition de l’ordonnance au procureur général.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de prolongation du maintien en zone d’attente selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers ?

La prolongation du maintien en zone d’attente est régie par les articles L. 342-1 et L. 342-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Selon l’article L. 342-1 :

* »Le maintien en zone d’attente au-delà de quatre jours à compter de la décision initiale peut être autorisé, par le juge des libertés et de la détention statuant sur l’exercice effectif des droits reconnus à l’étranger, pour une durée qui ne peut être supérieure à huit jours. »*

Cet article précise que le juge doit examiner l’exercice effectif des droits de l’étranger avant de décider d’une prolongation.

De plus, l’article L. 342-10 stipule que :

* »L’existence de garanties de représentation de l’étranger n’est pas à elle seule susceptible de justifier le refus de prolongation de son maintien en zone d’attente. »*

Cela signifie que même si l’étranger présente des garanties, cela ne suffit pas à justifier un refus de prolongation.

Ainsi, pour prolonger le maintien, le juge doit s’assurer que les droits de l’étranger ont été respectés et que les conditions de prolongation sont remplies.

Quel est le rôle du juge judiciaire dans le cadre du maintien en zone d’attente ?

Le juge judiciaire joue un rôle crucial dans l’évaluation des demandes de prolongation du maintien en zone d’attente.

Il dispose d’un pouvoir d’appréciation qui lui permet de décider de la prolongation en fonction des éléments présentés par l’étranger.

En effet, le juge doit s’assurer que l’exercice effectif des droits de l’étranger a été respecté.

Il ne peut pas se substituer au juge administratif dans le contentieux du refus d’entrée sur le territoire français.

Cela est précisé dans la jurisprudence, où il est indiqué que :

* »le pouvoir ne peut le conduire à se substituer au juge administratif dans le contentieux du refus d’entrer sur le territoire français. »*

Ainsi, le juge judiciaire doit se concentrer sur les éléments qui justifient la prolongation et ne pas évaluer la régularité de la situation de l’étranger.

Quelles sont les voies de recours possibles contre l’ordonnance de maintien en zone d’attente ?

L’ordonnance de maintien en zone d’attente n’est pas susceptible d’opposition, mais elle ouvre la voie à un pourvoi en cassation.

Le pourvoi en cassation peut être formé par :

– L’étranger concerné,
– L’autorité administrative ayant prononcé le maintien,
– Le ministère public.

Le délai pour former ce pourvoi est de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance.

La procédure de pourvoi est précisée comme suit :

* »Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur. »*

Cela signifie que l’étranger doit être assisté par un avocat pour contester la décision devant la Cour de cassation.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

L. 340-1 et suivants du Code de l’entrée et du séjour

des étrangers et du droit d’asile

ORDONNANCE DU 04 JANVIER 2025

(1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général et de décision : Q N° RG 25/00030 – N° Portalis 35L7-V-B7J-CKRW4

Décision déférée : ordonnance rendue le 02 janvier 2025, à 14h09, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Bobigny

Nous, Stéphanie Dupont, conseillère à la cour d’appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Fanny Marcel, greffieraux débats et au prononcé de l’ordonnance

APPELANT

LE MINISTRE DE L’INTÉRIEUR REPRÉSENTÉ PAR LE PRÉFET DE POLICE

représenté par Me FAUGERAS Thibault du cabinet Actis Avocats, avocats au barreau du Val-de-Marne

INTIMÉ

M. [T] [I] [O]

né le 09 Février 1979 à [Localité 1], de nationalité Péruvienne

Libre, non comparant, non représenté, convoqué en zone d’attente à l’aéroport de [2], dernier domicile connu

MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l’heure de l’audience

ORDONNANCE :

– réputée contradictoire

– prononcée en audience publique

-Vu l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Bobigny du 02 janvier 2025 à 14h09, disant n’y avoir lieu de prolonger le maintien de M. [T] [I] [O], en zone d’attente de l’aéroport de [2] et rappelant que l’administration doit restituer à l’intéressé l’intégralité de ses affaires personnelles, y compris son passeport et ses documents de voyage;

– Vu l’appel motivé interjeté le 03 janvier 2025, à 08h50, par le conseil du préfet de Police ;

– Après avoir entendu les observations du conseil du préfet de la Police tendant à l’infirmation de l’ordonnance ;

SUR QUOI,

Il convient de rappeler qu’il résulte des articles L. 342-1 et L. 342-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que ‘le maintien en zone d’attente au-delà de quatre jours à compter de la décision initiale peut être autorisé, par le juge des libertés et de la détention statuant sur l’exercice effectif des droits reconnus à l’étranger, pour une durée qui ne peut être supérieure à huit jours’, et que ‘l’existence de garanties de représentation de l’étranger n’est pas à elle seule susceptible de justifier le refus de prolongation de son maintien en zone d’attente’.

En l’espèce il s’avère qu’en l’absence de moyens tirés d’un défaut d’exercice effectif des droits en zone d’attente, qu’il aurait accueilli en première instance, ce qu’il n’a pas été conduit à faire en l’espèce, le premier juge ne pouvait mettre fin à la mesure sans commettre un excès de pouvoir, ainsi qu’il l’a fait, en considérant que M. [T] [I] [O], qui dispose d’un passeport et d’un billet de retour, produisait lors de l’audience des éléments justifiant qu’il disposait des moyens d’assurer sa subsistance le temps de son séjour, à savoir une attestation d’hébergement et la preuve que son viatique est désormais supérieur à ce qui est exigé.

Il convient de préciser que le juge judiciaire dispose d’un pouvoir effectif d’appréciation qui lui permet de ne pas autoriser la prolongation du maintien en zone d’attente lorsqu’il retient qu’un défaut d’exercice effectif des droits est démontré mais que ce pouvoir ne peut le conduire à se substituer au juge administratif dans le contentieux du refus d’entrer sur le territoire français et, ainsi qu’il a été fait en l’espèce, à apprécier le bien fondé des éléments de régularisation de sa situation afin de remplir les conditions d’entrée sur le territoire français

Il convient, en conséquence, d’infirmer l’ordonnance querellée et, statuant à nouveau, d’autoriser la prolongation du maintien de M. [T] [I] [O] en zone d’attente de l’aéroport de [2] pour une durée maximale de huit jours.

PAR CES MOTIFS

INFIRMONS l’ordonnance,

Statuant à nouveau,

AUTORISONS la prolongation du maintien de M. [T] [I] [O] en zone d’attente de l’aéroport de [2] pour une durée maximale de huit jours.

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d’une expédition de la présente ordonnance.

Fait à Paris, le 04 janvier 2025 à

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

Pour information :

L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Le préfet ou son représentant


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