L’Essentiel : Le ministre de l’Intérieur, par le biais du préfet de police, a interjeté appel concernant le maintien de Mme [M] [W], ressortissante sénégalaise, en zone d’attente à l’aéroport. Le tribunal de Bobigny avait initialement décidé de ne pas prolonger cette mesure, ordonnant la restitution de ses affaires personnelles. Cependant, le préfet a contesté cette décision, arguant d’un excès de pouvoir du juge. Le tribunal a rappelé que le maintien en zone d’attente peut être prolongé sous certaines conditions. Finalement, il a décidé d’infirmer l’ordonnance initiale, autorisant un maintien supplémentaire de huit jours.
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Contexte de l’affaireLe ministre de l’Intérieur, représenté par le préfet de police, a interjeté appel concernant la situation de Mme [M] [W], une ressortissante sénégalaise née le 10 novembre 1999, qui a été placée en zone d’attente à l’aéroport de [2]. Décision initiale du tribunalLe tribunal judiciaire de Bobigny a rendu une ordonnance le 31 décembre 2024, stipulant qu’il n’y avait pas lieu de prolonger le maintien de Mme [M] [W] en zone d’attente. Cette décision incluait l’instruction de restituer à l’intéressée l’intégralité de ses affaires personnelles, y compris son passeport et ses documents de voyage. Appel du préfet de policeLe 2 janvier 2025, le conseil du préfet de police a interjeté appel de cette ordonnance. L’avis d’audience a été adressé à l’avocat de Mme [M] [W], qui ne s’est pas présenté à l’audience. Arguments du préfet de policeLors de l’audience, le conseil du préfet de police a soutenu que le premier juge avait commis un excès de pouvoir en mettant fin à la mesure de maintien en zone d’attente. Il a été souligné que Mme [M] [W] avait déclaré être en France pour passer les fêtes en famille et qu’elle était en possession d’un passeport, d’un visa, d’une attestation d’assurance, d’un billet retour et d’une attestation d’hébergement. Analyse juridiqueLe tribunal a rappelé que, selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers, le maintien en zone d’attente peut être prolongé au-delà de quatre jours sous certaines conditions. Il a été précisé que le juge judiciaire ne peut pas se substituer au juge administratif dans l’appréciation des conditions d’entrée sur le territoire français. Décision finaleEn conséquence, le tribunal a décidé d’infirmer l’ordonnance initiale et d’autoriser la prolongation du maintien de Mme [M] [W] en zone d’attente pour une durée maximale de huit jours. Une expédition de cette ordonnance a été ordonnée à remettre immédiatement au procureur général. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de prolongation du maintien en zone d’attente selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers ?Le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, notamment à travers les articles L. 342-1 et L. 342-10, précise les conditions de prolongation du maintien en zone d’attente. L’article L. 342-1 stipule que : * »Le maintien en zone d’attente au-delà de quatre jours à compter de la décision initiale peut être autorisé, par le juge des libertés et de la détention statuant sur l’exercice effectif des droits reconnus à l’étranger, pour une durée qui ne peut être supérieure à huit jours. »* Cet article établit donc un cadre temporel strict pour le maintien en zone d’attente, limitant la prolongation à un maximum de huit jours. De plus, l’article L. 342-10 précise que : * »L’existence de garanties de représentation de l’étranger n’est pas à elle seule susceptible de justifier le refus de prolongation de son maintien en zone d’attente. »* Cela signifie que même si l’étranger présente des garanties, cela ne suffit pas à justifier un refus de prolongation. Ainsi, pour qu’une prolongation soit accordée, il est nécessaire que le juge des libertés et de la détention examine l’exercice effectif des droits de l’étranger, et non seulement les garanties de représentation. Quel est le rôle du juge judiciaire dans le maintien en zone d’attente ?Le rôle du juge judiciaire dans le maintien en zone d’attente est crucial, car il dispose d’un pouvoir d’appréciation qui lui permet de décider de la prolongation ou non de cette mesure. Comme mentionné précédemment, le juge doit se prononcer sur l’exercice effectif des droits de l’étranger. Cela implique qu’il doit s’assurer que l’étranger a eu la possibilité d’exercer ses droits, notamment en matière de recours et d’accès à un avocat. Il est important de noter que le juge judiciaire ne peut pas se substituer au juge administratif dans le contentieux du refus d’entrée sur le territoire français. Cela signifie qu’il ne doit pas évaluer la légitimité des raisons pour lesquelles l’étranger se voit refuser l’entrée, mais plutôt se concentrer sur les conditions de maintien en zone d’attente. En l’espèce, le jugement a été critiqué pour avoir mis fin à la mesure sans justifications suffisantes, ce qui a été considéré comme un excès de pouvoir. Le juge aurait dû examiner si les droits de Mme [M] [W] avaient été effectivement exercés avant de décider de mettre fin à son maintien. Quelles sont les voies de recours possibles contre l’ordonnance de maintien en zone d’attente ?Les voies de recours contre l’ordonnance de maintien en zone d’attente sont clairement définies dans le cadre législatif. Selon les informations fournies, l’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition, mais le pourvoi en cassation est ouvert. Cela signifie que les parties concernées peuvent contester la décision devant la Cour de cassation. Le texte précise que : * »Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public. »* Le délai pour former un pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance. Le pourvoi doit être formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur. Ces dispositions garantissent un recours effectif pour les étrangers maintenus en zone d’attente, leur permettant de contester les décisions qui les concernent. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
L. 340-1 et suivants du Code de l’entrée et du séjour
des étrangers et du droit d’asile
ORDONNANCE DU 04 JANVIER 2025
(3 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général et de décision : Q N° RG 25/00032 – N° Portalis 35L7-V-B7J-CKRXO
Décision déférée : ordonnance rendue le 31 décembre 2024, à 16h49, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Bobigny
Nous, Stéphanie Dupont, conseillère à la cour d’appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Fanny Marcel, greffier aux débats et au prononcé de l’ordonnance
LE MINISTRE DE L’INTÉRIEUR REPRÉSENTÉ PAR LE PRÉFET DE POLICE
représenté par Me FAUGERAS Thibault du cabinet Actis Avocats, avocats au barreau du Val-de-Marne
INTIMÉE
Mme [M] [W]
née le 10 Novembre 1999 à [Localité 1], de nationalité sénégalaise
Libre, non comparant, non représenté, convoqué en zone d’attente à l’aéroport de [2], dernier domicile connu
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l’heure de l’audience
ORDONNANCE :
– réputée contradictoire
– prononcée en audience publique
-Vu l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Bobigny du 31 décembre 2024 à 16h49 disant n’y avoir lieu de prolonger le maintien de Mme [M] [W], en zone d’attente de l’aéroport de [2] et rappelant que l’administration doit restituer à l’intéressé l’intégralité de ses affaires personnelles, y compris son passeport et ses documents de voyage ;
– Vu l’appel motivé interjeté le 02 janvier 2025, à 14h42, par le conseil du préfet de Police ;
– Vu l’avis d’audience, adressée par télécopie le 3 janvier 2025 à 11h28 à Me Lin Banoukepa, avocat au barreau de Paris, qui ne se présente pas ;
– Après avoir entendu les observations du conseil du préfet de Police tendant à l’infirmation de l’ordonnance ;
Il convient de rappeler qu’il résulte des articles L. 342-1 et L. 342-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que ‘le maintien en zone d’attente au-delà de quatre jours à compter de la décision initiale peut être autorisé, par le juge des libertés et de la détention statuant sur l’exercice effectif des droits reconnus à l’étranger, pour une durée qui ne peut être supérieure à huit jours’, et que ‘l’existence de garanties de représentation de l’étranger n’est pas à elle seule susceptible de justifier le refus de prolongation de son maintien en zone d’attente’.
En l’espèce il s’avère qu’en l’absence de moyens tirés d’un défaut d’exercice effectif des droits en zone d’attente, qu’il aurait accueilli en première instance, ce qu’il n’a pas été conduit à faire en l’espèce, le premier juge ne pouvait mettre fin à la mesure sans commettre un excès de pouvoir, ainsi qu’il l’a fait, en considérant que Mme [M] [W] déclarait être venue en France pour passer les fêtes en famille, était munie d’un passeport revêtu d’un visa et justifiait d’une attestation d’assurance, un billet retour et une attestation d’hébergement.
Il convient de préciser que le juge judiciaire dispose d’un pouvoir effectif d’appréciation qui lui permet de ne pas autoriser la prolongation du maintien en zone d’attente lorsqu’il retient qu’un défaut d’exercice effectif des droits est démontré mais que ce pouvoir ne peut le conduire à se substituer au juge administratif dans le contentieux du refus d’entrer sur le territoire français et, ainsi qu’il a été fait en l’espèce, à apprécier le bien fondé des éléments de régularisation de sa situation afin de remplir les conditions d’entrée sur le territoire français
Il convient, en conséquence, d’infirmer l’ordonnance querellée et, statuant à nouveau, d’autoriser la prolongation du maintien de Mme [M] [W] en zone d’attente de l’aéroport de [2] pour une durée maximale de huit jours.
INFIRMONS l’ordonnance,
Statuant à nouveau,
AUTORISONS la prolongation du maintien de Mme [M] [W] en zone d’attente de l’aéroport de [2] pour une durée maximale de huit jours.
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d’une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris, le 04 janvier 2025 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
Pour information :
L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant
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