Prolongation de rétention : irrecevabilité en raison du dépassement des délais légaux

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Prolongation de rétention : irrecevabilité en raison du dépassement des délais légaux

L’Essentiel : M. [J] [W], de nationalité pakistanaise, a été placé en rétention administrative par la Préfecture de la Seine-Saint-Denis. L’audience s’est déroulée avec son avocat et un interprète en ourdou, en l’absence du procureur. Le juge a rappelé les droits de M. [J] [W] et a examiné la requête de prolongation de la rétention. Cependant, celle-ci a été déclarée irrecevable, car la préfecture avait saisi le juge après l’expiration du délai légal. M. [J] [W] a donc été libéré, tout en étant informé de son obligation de quitter le territoire français et des conséquences légales de sa situation.

Contexte de la Rétention Administrative

M. [J] [W], de nationalité pakistanaise, a été placé en rétention administrative par la Préfecture de la Seine-Saint-Denis. La décision de rétention a été notifiée le 22 décembre 2024 à 18h40, et il a été maintenu en rétention avec l’assistance d’un avocat et d’un interprète en ourdou lors de l’audience.

Déroulement de l’Audience

L’audience s’est tenue en présence de l’avocat de M. [J] [W] et d’un représentant de la préfecture, bien que le procureur de la République n’ait pas été présent. Le juge des libertés et de la détention a rappelé les droits de la personne retenue et a entendu les plaidoiries des avocats ainsi que les explications de M. [J] [W].

Analyse de la Recevabilité de la Requête

La requête de prolongation de la rétention a été examinée à la lumière des articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Il a été établi que le délai de rétention de quatre jours doit être décompté à partir de la notification du placement, ce qui a des implications sur la recevabilité de la demande de prolongation.

Décision du Juge

Le juge a déclaré la requête de prolongation de la rétention administrative irrecevable, car la saisine de la préfecture avait été enregistrée après l’expiration du délai légal. En conséquence, M. [J] [W] a été ordonné de retrouver sa liberté, tout en étant informé de son obligation de quitter le territoire français.

Conséquences de la Décision

M. [J] [W] a été informé des conséquences légales de son maintien irrégulier sur le territoire français, notamment les sanctions pénales potentielles. Il a également été précisé qu’il resterait à la disposition de la justice pendant 24 heures après la notification de la décision, avec la possibilité de contacter son avocat et d’autres services.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la base légale pour le placement en rétention administrative d’un étranger ?

Le placement en rétention administrative d’un étranger est régi par l’article L.741-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Cet article stipule que l’autorité administrative peut placer en rétention un étranger pour une durée de quatre jours, lorsque celui-ci se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L.731-1.

Il est précisé que ce placement est justifié si l’étranger ne présente pas de garanties de représentation effectives, propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement.

Aucune autre mesure ne doit apparaître suffisante pour garantir efficacement l’exécution de cette décision.

Le risque de soustraction est apprécié selon les critères de l’article L.612-3 ou en fonction de la menace pour l’ordre public que représente l’étranger.

Quelles sont les conditions pour prolonger la rétention au-delà de quatre jours ?

L’article L.742-1 du CESEDA précise que le maintien en rétention au-delà de quatre jours peut être autorisé par le juge, saisi à cette fin par l’autorité administrative.

Cette prolongation doit respecter les conditions prévues par le code.

Il est important de noter que le juge doit statuer dans un délai de quarante-huit heures suivant la saisine, conformément à l’article L.743-4.

Cela signifie que l’autorité administrative doit agir rapidement pour obtenir l’autorisation de prolongation, afin de respecter les droits de l’étranger retenu.

Comment se calcule le délai de rétention administrative ?

La computation des délais en matière de rétention administrative est précisée par l’avis rendu par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation.

Il est établi que, conformément aux articles L.742-1 et R.742-1 du CESEDA, le délai de rétention de quatre jours commence à courir à partir de la notification du placement en rétention.

Le premier jour doit être décompté, et le délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures.

Il est également précisé que la prolongation du délai n’est pas applicable si celui-ci expire un dimanche ou un jour férié.

Quelles sont les conséquences d’une saisine tardive du juge pour prolongation de la rétention ?

Dans le cas où la saisine du juge pour prolongation de la rétention est tardive, comme l’indique la décision, la requête préfectorale devient irrecevable.

En l’espèce, la préfecture a enregistré sa saisine au-delà du délai de quatre jours, ce qui a conduit à la déclaration d’irrecevabilité de la demande de prolongation.

Cela signifie que l’étranger doit être remis en liberté, car la prolongation de la rétention n’a pas été validée par le juge dans les délais impartis.

Cette situation souligne l’importance du respect des délais légaux pour garantir les droits des personnes retenues.

Quelles sont les implications légales pour un étranger en situation irrégulière après une mesure de rétention ?

L’article L.824-3 du CESEDA stipule que tout étranger qui se maintient irrégulièrement sur le territoire français, après avoir fait l’objet d’une mesure régulière de placement en rétention, sera puni d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 3 750 euros.

Cette disposition vise à dissuader les étrangers de rester sur le territoire sans autorisation légale après une mesure d’éloignement.

Il est donc crucial pour l’étranger de respecter les décisions administratives et judiciaires concernant son séjour en France.

En cas de non-respect, des sanctions pénales peuvent être appliquées, ce qui peut avoir des conséquences graves sur sa situation juridique.

TJ VERSAILLES – JLD (rétentions administratives)
N° RG 25/00158 – N° Portalis DB22-W-B7J-SW4E Page
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
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Cabinet de Agnès BELGHAZI
Dossier n° N° RG 25/00158 – N° Portalis DB22-W-B7J-SW4E
N° minute : 25/162

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEUXIÈME DEMANDE DE PROLONGATION D’UNE MESURE DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE
Articles L.742-4 et suivants, L.743-1 et suivants, R.743-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Nous, Agnès BELGHAZI, Vice-Présidente, au tribunal judiciaire de Versailles statuant en application du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté(e) de Juline LEPAGE, greffier ;

Vu les articles L.742-1 et suivants, L.743-4 et suivants, et R.743-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu l’obligation de quitter le territoire français en date du 1er juin 2023 notifiée par le préfet de Seine-et-Marne à M. [J] [W] le même jour ;

Vu la décision de placement en rétention administrative dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire prise le 22 décembre 2024 et notifiée par l’autorité administrative à l’intéressé le même jour ;

Vu l’ordonnance rendue le 27 décembre 2024 par le magistrat statuant en application du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile au tribunal judiciaire de Versailles prolongeant la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-six jours ;

Vu la requête de l’autorité administrative en date du 21 Janvier 2025 reçue et enregistrée le 21 Janvier 2025 à 8h30 (cf. Timbre du greffe) tendant à la prolongation de la rétention de M. [J] [W] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée supplémentaire de trente jours ;

Vu l’extrait individualisé du registre prévu à l’article L.744-2 du CESEDA émargé par l’intéressé ;

PARTIES

AUTORITÉ ADMINISTRATIVE QUI A ORDONNE LE PLACEMENT EN RÉTENTION

TJ VERSAILLES – JLD (rétentions administratives)
N° RG 25/00158 – N° Portalis DB22-W-B7J-SW4E Page

PRÉFECTURE DE LA SEINE SAINT DENIS
préalablement avisée, n’est pas présente à l’audience,
représentée par Maître BENZINA

PERSONNE RETENUE

M. [J] [W]
né le 22 Février 1995 à [Localité 1]
de nationalité Pakistanaise
préalablement avisé,
actuellement maintenu en rétention administrative

a assisté à l’audience avec l’utilisation d’un moyen de télécommunication audiovisuelle garantissant la confidentialité de la transmission (article L.743-8 du CESEDA), sur proposition de la préfecture ;

assisté de Maître GARCIA Ruben substitué par Maître LE HAÏK Guillaume avocat au barreau de Versailles , avocat choisi,

en présence de Madame [X] [K], interprète en langue ourdou , déclarée comprise par la personne retenue à l’inverse du français :
interprète qui prête serment à l’audience conformément à la loi,

LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE, préalablement avisé, n’est pas présent à l’audience.

DÉROULEMENT DES DÉBATS

A l’audience publique, le juge des libertés et de la détention a procédé au rappel de l’identité des parties ;

Après avoir rappelé à la personne retenue les droits qui lui sont reconnus par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pendant sa rétention et l’avoir informée des possibilités et des délais de recours contre toutes décisions le concernant ;

Après dépôt de conclusions par le conseil de l’intéressé, jointes au dossier et évoquées in limine litis, et après avoir entendu les parties, le défendeur ayant eu la parole en dernier, l’incident est joint au fond;

Maître BENZINA , représentant le préfet a été entendu en sa plaidoirie ;

Maître EL HAÏK Guillaume , avocat de M. [J] [W], a été entendu en sa plaidoirie;

M. [J] [W] a été entendu en ses explications ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LA RECEVABILITÉ DE LA REQUÊTE

Il ressort de la lecture de l’article L.741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l’ étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l’article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l’ordre public que l’étranger représente.

L’article L.742-1 du même code ajoute que le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le juge saisi à cette fin par l’autorité administrative.

L’article L.743-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile énonce, enfin, que le juge statue, par ordonnance, dans les quarante-huit heures suivant l’expiration du délai fixé au premier alinéa de l’article L. 741-10 ou sa saisine en application des articles L. 742-1 et L. 742-4 à L. 742-7.

Le 7 janvier 2025, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a rendu l’avis suivant sur la computation des délais en matière de rétention administrative et de saisine du magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté aux fins de prolongation:

« – d’une part, que, conformément aux articles L. 742-1 et R. 742-1 du CESEDA et les articles 641 et 642 du code de procédure civile n’étant pas applicables, le délai de rétention de quatre jours court à compter de la notification du placement en rétention, de sorte que le premier jour doit être décompté;

– d’autre part, qu’exprimé en jours, ce délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures, sans que ne soit applicable la prolongation du délai expirant un dimanche ou un jour férié.

Ainsi, pour un placement en rétention notifié le 1er janvier à quinze heures, le délai de quatre jours s’achèvera le 4 janvier à vingt-quatre heures. »

En l’espèce, l’arrêté de placement en rétention concernant M. [J] [W] a été notifié le 22 décembre 2024 à 18h40. Sa rétention a été prolongée pour une durée de 26 jours suivant ordonnance du juge du 27 décembre 2024, confirmée par un arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 28 décembre 2024.

Au vu de l’avis susvisé et dans la mesure où le premier jour de rétention doit dorénavant être décompté, cette période de 26 jours prenait fin le 20 janvier 2025 à minuit.

Il s’ensuit que le délai de saisine du juge en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté expirait donc le 20 janvier 2025 à 24 heures alors que la saisine de la préfecture a été enregistrée, par le greffe, le 21 janvier 2025 à 8h30, soit au-delà du délai de quatre jours, de sorte que la requête préfectorale est irrecevable.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement en premier ressort, par décision assortie de l’exécution provisoire,

DÉCLARONS irrecevable la requête en prolongation de la rétention administrative de la PRÉFECTURE DE LA SEINE SAINT DENIS.

DISONS en conséquence n’y avoir lieu à statuer sur la demande de prolongation de la rétention administrative de M. [J] [W].

ORDONNONS la remise en liberté de M. [J] [W] ;

RAPPELONS à M. [J] [W] qu’il doit néanmoins quitter le territoire français.

Informons en application de l’article L.824-3 du CESEDA, que tout étranger qui, faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion, d’une mesure de reconduite à la frontière, d’une obligation de quitter le territoire français, d’une interdiction administrative ou judiciaire du territoire, se sera maintenu irrégulièrement sur le territoire français sans motif légitime, après avoir fait l’objet d’une mesure régulière de placement en rétention ou d’assignation à résidence ayant pris fin sans qu’il ait pu être procédé à son éloignement, sera puni d’un an d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende.

Information est donnée à M. [J] [W] qu’il est maintenu à disposition de la justice pendant un délai de 24 heures à compter de la notification de la présente ordonnance au procureur de la République, lorsqu’il est mis fin à sa rétention ou lors d’une assignation à résidence.

Il est informé qu’il peut, s’il le souhaite, au cours de cette période, puis ensuite au cas d’appel suspensif, contacter son avocat et un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter.

Fait à Versailles, le 22 Janvier 2025 à _____ H ______

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Lecture faite,
L’interprète

Reçu notification de la teneur de la décision et copie le 22 Janvier 2025
L’intéressé
(En visioconférence)

Copie de la présente décision a été notifiée par courriel au tribunal administratif, à la préfecture, à Maître GARCIA par PLEX le 22 Janvier 2025
Le greffier,


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