Prolongation de rétention : irrecevabilité due au non-respect des délais légaux

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Prolongation de rétention : irrecevabilité due au non-respect des délais légaux

L’Essentiel : M. X, né le 09 janvier 1983 à [Localité 2], de nationalité moldave, est retenu au centre de rétention de [Localité 3]. Il a interjeté appel le 09 janvier 2025, contestant la prolongation de sa rétention administrative, arguant que la saisine du magistrat avait dépassé le délai légal de quatre jours. La cour, après avoir examiné les délais de notification et de saisine, a constaté que la requête de la préfecture était irrecevable, déclarant ainsi qu’il n’y avait pas lieu à prolongation de la mesure de rétention. M. X doit quitter le territoire français.

Identité de l’Appelant

M. X, se présentant sous le nom de [P] [T], est né le 09 janvier 1983 à [Localité 2] et est de nationalité moldave. Il est actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 3], assisté par Me Sabrina Scolari, avocat au barreau de Paris, et Mme [L] [S], interprète en moldave.

Identité de l’Intimé

L’intimé dans cette affaire est le Préfet de la Seine-Saint-Denis, représenté par Me Nicolas Suarez Pedroza, avocat au barreau de Val-de-Marne. Le ministère public a également été avisé de la date et de l’heure de l’audience.

Contexte de l’Ordonnance

L’ordonnance a été prononcée en audience publique et est contradictoire. Elle fait référence au décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024, qui vise à contrôler l’immigration et à améliorer l’intégration. Il est noté qu’aucune salle d’audience n’était disponible près du lieu de rétention pour cette audience.

Prolongation de la Rétention Administrative

Le 09 janvier 2025, un magistrat a ordonné la prolongation de la rétention administrative de M. [T] [P] pour une durée de vingt-six jours, à compter du 08 janvier 2025. Cette décision a été prise en raison de l’obligation de l’intéressé de quitter le territoire français, conformément à l’article L. 744-11 al 1er du code de l’entrée et du séjour des étrangers.

Appel de M. X

M. X a interjeté appel le 09 janvier 2025, à 15h15, demandant l’infirmation de l’ordonnance. Il soutient que le premier juge aurait été saisi au-delà du délai de quatre jours prévu par l’article L.742-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers.

Arguments de la Cour

La cour rappelle que les moyens nouveaux sont recevables en appel, sauf exceptions de procédure. Elle précise que le délai d’action peut être invoqué à tout stade de la procédure. Selon l’article L.741-1, l’autorité administrative peut placer un étranger en rétention pour quatre jours, et le maintien au-delà de ce délai doit être autorisé par un magistrat.

Calcul du Délai de Rétention

La cour se réfère à un avis de la Cour de cassation concernant la computation des délais en matière de rétention administrative. Le délai de quatre jours court à partir de la notification du placement en rétention, et le magistrat doit être saisi dans ce délai.

Décision de la Cour

Dans cette affaire, l’arrêté de placement en rétention a été notifié le 04 janvier 2025. Le délai pour saisir le magistrat expirait le 07 janvier à 24h00, mais la saisine a eu lieu le 08 janvier à 8h28, dépassant ainsi le délai. Par conséquent, la cour déclare la requête irrecevable et infirme l’ordonnance.

Conclusion de l’Ordonnance

La cour déclare irrecevable la requête de la préfecture de Seine-Saint-Denis et indique qu’il n’y a pas lieu à prolongation de la mesure de rétention administrative de M. [T] [P]. Elle rappelle à l’intéressé son obligation de quitter le territoire français et ordonne la remise immédiate de l’ordonnance au procureur général.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure de prolongation de la rétention administrative selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ?

La procédure de prolongation de la rétention administrative est régie par plusieurs articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

L’article L. 742-1 stipule que le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé par le magistrat du siège, saisi à cette fin par l’autorité administrative.

Il est précisé que le magistrat statue par ordonnance dans les quarante-huit heures suivant l’expiration du délai de quatre jours, conformément à l’article L. 743-4.

Ainsi, la procédure exige que l’autorité administrative saisisse le magistrat dans le délai imparti, et que ce dernier rende sa décision rapidement pour garantir le respect des droits de l’étranger concerné.

Quels sont les délais applicables à la rétention administrative ?

Les délais applicables à la rétention administrative sont clairement définis dans le CESEDA.

L’article L. 741-1 précise que l’autorité administrative peut placer un étranger en rétention pour une durée de quatre jours.

Ce délai commence à courir à partir de la notification du placement en rétention, comme l’indique l’avis de la Cour de cassation du 07 janvier 2025.

Il est important de noter que le premier jour doit être décompté, et que le délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures, sans prolongation pour les week-ends ou jours fériés.

Dans le cas présent, le placement en rétention a été notifié le 04 janvier 2025, et le délai de saisine du magistrat expirait donc le 07 janvier à 24h00.

Quelles sont les conséquences d’une saisine tardive du magistrat du siège ?

La saisine tardive du magistrat du siège a des conséquences juridiques significatives.

Selon l’article L. 742-1, si l’autorité administrative ne saisit pas le magistrat dans le délai de quatre jours, la requête pour prolongation de la rétention devient irrecevable.

Dans l’affaire en question, le magistrat a été saisi le 08 janvier 2025, soit après l’expiration du délai, ce qui a conduit la cour à déclarer la requête irrecevable.

Cela signifie que la prolongation de la mesure de rétention administrative ne peut pas être accordée, et l’étranger doit être remis en liberté, tout en étant rappelé à son obligation de quitter le territoire français.

Quels recours sont ouverts à l’étranger en matière de rétention administrative ?

L’étranger en matière de rétention administrative dispose de plusieurs voies de recours.

Selon les dispositions applicables, l’ordonnance rendue par le magistrat n’est pas susceptible d’opposition, mais un pourvoi en cassation est ouvert.

Ce pourvoi peut être formé par l’étranger, l’autorité administrative ayant prononcé la rétention, ou le ministère public.

Le délai pour former ce pourvoi est de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance, et il doit être effectué par déclaration écrite remise au greffe de la Cour de cassation par un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation.

Ces recours permettent de garantir un contrôle juridictionnel sur les décisions de rétention administrative.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

L. 742-1 et suivants du Code de l’entrée et du séjour

des étrangers et du droit d’asile

ORDONNANCE DU 11 JANVIER 2025

(1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 25/00141 – N° Portalis 35L7-V-B7J-CKS7X

Décision déférée : ordonnance rendue le 09 janvier 2025, à 11h30, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Evry

Nous, Elise Thevenin-Scott, conseillère à la cour d’appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Camille Besson, greffière aux débats et au prononcé de l’ordonnance,

APPELANT :

M. X se disant [P] [T]

né le 09 janvier 1983 à [Localité 2], de nationalité moldave

RETENU au centre de rétention : [Localité 3]

assisté de Me Sabrina Scolari avocat de permanence, avocat au barreau de Paris – Mme [L] [S] (interprète en moldave) tout au long de la procédure devant la cour et lors de la notification de la présente ordonnance, serment préalablement prêté

INTIMÉ :

LE PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS

représenté par Me Nicolas Suarez Pedroza, du cabinet Actis, avocat au barreau de Val-de-Marne

MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l’heure de l’audience

ORDONNANCE :

– contradictoire

– prononcée en audience publique

– Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l’application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;

Constatant qu’aucune salle d’audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n’est disponible pour l’audience de ce jour ;

– Vu l’ordonnance du 09 janvier 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Evry ordonnant la jonction de la procédure introduite par M. Le préfèt de la Seine-Saint-Denis enregistrée sous le N° RG 25/00006 et celle introduite par M. [T] [P] enregistrée sous le N° RG 25/0007, déclarant la requête en prolongation de la rétention administrative de M. Le préfèt de la Seine-Saint-Denis recevable, déclarant la procédure diligenté à l’encontre de M. [T] [P] régulière, ordonnant la prolongation de la rétention de M. [T] [P] pour une durée de vingt-six jours à compter du 08 janvier 2025 dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire et rappelant que l’intéressé a l’obligation de quitter le territoire français en application de l’article L. 744-11 al 1er du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

– Vu l’appel motivé interjeté le 09 janvier 2025, à 15h15, par M. X se disant [P] [T] ;

– Après avoir entendu les observations :

– de M. X se disant [P] [T], assisté de son avocat, qui demande l’infirmation de l’ordonnance ;

– du conseil du préfet de la Seine-Saint-Denis tendant à la confirmation de l’ordonnance ;

SUR QUOI,

Monsieur [T] [P], né le 09 février 1983 à [Localité 1] (Moldavie), a été placé en rétention administrative par arrêté préfectoral en date du 04 janvier 2025 sur la base d’un arrêté préfectoral portant OQTF du même jour.

La mesure a été prolongée pour la première fois le 09 janvier 2025 par le magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté de Evry-Courcouronnes.

Monsieur [T] [P] a interjeté appel et demande à la cour de déclarer la requête de l’administration irrecevable au motif que le premier juge aurait été saisi au-delà du délai de quatre jours, prévu par l’article L.742-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Réponse de la cour :

Rappelons que, sauf s’ils constituent des exceptions de procédure, au sens de l’article 74 du code de procédure civile, les moyens nouveaux sont recevables en cause d’appel (article 563 du CPC)

Le délai d’action constitue une fin de non-recevoir pouvant être invoquée à tout stade de la procédure.

Il ressort de la lecture de l’article L.741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l’article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l’ordre public que l’étranger représente.

L’article L.742-1 du même code ajoute que le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le magistrat du siège saisi à cette fin par l’autorité administrative.

L’article L.743-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile énonce, enfin, que le magistrat du siège statue, par ordonnance, dans les quarante-huit heures suivant l’expiration du délai fixé au premier alinéa de l’article L. 741-10 ou sa saisine en application des articles L. 742-1 et L. 742-4 à L. 742-7.

Le 07 janvier 2025, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a rendu l’avis suivant sur la computation des délais en matière de rétention administrative et de saisine du magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté aux fins de prolongation :

« – d’une part, que, conformément aux articles L. 742-1 et R. 742-1 du CESEDA et les articles 641 et 642 du code de procédure civile n’étant pas applicables, le délai de rétention de quatre jours court à compter de la notification du placement en rétention, de sorte que le premier jour doit être décompté;

– d’autre part, qu’exprimé en jours, ce délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures, sans que ne soit applicable la prolongation du délai expirant un dimanche ou un jour férié.

Ainsi, pour un placement en rétention notifié le 1er janvier à quinze heures, le délai de quatre jours s’achèvera le 4 janvier à vingt-quatre heures. »

En l’espèce, l’arrêté de placement en rétention concernant Monsieur [T] [P] a été notifié le 04 janvier 2025 à 17h21. Le délai de saisine du magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté expirait donc le 07 janvier à 24h00.

Or, le magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté a été saisi le 08 janvier 2025 à 8h28, au-delà du délai de quatre jours. La requête est donc irrecevable et la décision sera infirmée.

PAR CES MOTIFS

INFIRMONS l’ordonnance

Statuant à nouveau,

DECLARONS irrecevable la requête de la préfecture de Seine-Saint-Denis,

DISONS n’y a voir lieu à prolongation de la mesure de rétention administrative de Monsieur [T] [P]

RAPPELONS à Monsieur [T] [P] qu’il a l’obligation de quitter le territoire français

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d’une expédition de la présente ordonnance.

Fait à Paris le 11 janvier 2025 à

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS : Pour information : L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Le préfet ou son représentant L’intéressé L’avocat de l’intéressé

L’interprète


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