L’Essentiel : M. [I] [U], né le 29 octobre 1987 à [Localité 4], est l’appelant dans cette affaire, assisté par Me Wilfrid Balatana. Le 17 janvier 2025, le tribunal judiciaire de Meaux a prolongé sa rétention de 26 jours, tout en déclarant son recours recevable mais en rejetant sa demande. Contestant cette décision, M. [I] [U] a soulevé des irrégularités concernant son interpellation et l’absence de base légale pour sa rétention. Finalement, le tribunal a infirmé l’ordonnance initiale, ordonnant son assignation à résidence chez sa sœur, tout en lui rappelant son obligation de quitter le territoire.
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Identité des PartiesM. [I] [U], né le 29 octobre 1987 à [Localité 4], de nationalité sénégalaise, est l’appelant dans cette affaire. Il est retenu au centre de rétention [5] et est assisté par Me Wilfrid Balatana, avocat au barreau de Paris. L’intimé est le préfet de [Localité 3], représenté par Me Nicolas Suarez Pedroza, avocat au barreau de Val-de-Marne. Ordonnance du TribunalLe 17 janvier 2025, le magistrat du tribunal judiciaire de Meaux a ordonné la jonction de plusieurs procédures, déclarant le recours de M. [I] [U] recevable tout en rejetant sa demande. L’ordonnance a prolongé la rétention de M. [I] [U] pour une durée de 26 jours, à compter de cette date. Appel de M. [I] [U]M. [I] [U] a interjeté appel le même jour, contestant l’ordonnance. Il a soulevé des moyens relatifs à l’irrégularité de son interpellation, à la légalité de l’arrêté de placement en rétention, ainsi qu’à l’absence de diligences nécessaires pour son éloignement. Conditions d’InterpellationLe tribunal a constaté que M. [I] [U] avait été interpellé dans le cadre de l’exécution d’un jugement du tribunal correctionnel d’Alberville, et non pour sa situation administrative. Les motifs de nullité soulevés par l’appelant ont été jugés non fondés. Base Légale de la RétentionM. [I] [U] a contesté l’absence de base légale pour son placement en rétention, arguant qu’aucun pays de renvoi n’avait été déterminé. Le tribunal a rappelé que l’absence d’arrêté fixant le pays de renvoi n’affecte pas la régularité de la procédure de rétention, tant que l’administration démontre avoir accompli les diligences nécessaires. Demande d’Assignation à RésidenceM. [I] [U] a présenté des éléments prouvant qu’il remplissait les conditions pour une assignation à résidence, notamment une attestation d’hébergement et un emploi régulier. Le tribunal a conclu qu’il était justifié de lui accorder cette mesure. Décision FinaleLe tribunal a infirmé l’ordonnance de première instance et a ordonné l’assignation à résidence de M. [I] [U] à l’adresse de sa sœur. Il a également été informé de son obligation de quitter le territoire national et des conséquences en cas de non-respect des conditions d’assignation. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de régularité de l’interpellation de M. [I] [U] ?La régularité de l’interpellation de M. [I] [U] est un point central dans cette affaire. Selon l’analyse du tribunal, l’interpellation a été effectuée dans le cadre de l’exécution d’un jugement du tribunal correctionnel d’Alberville, et non en raison de sa situation administrative. L’article 955 du Code de procédure civile stipule que : « Le juge doit motiver sa décision. La motivation doit être précise et répondre aux moyens soulevés par les parties. » Dans ce cas, le premier juge a fourni une analyse circonstanciée et des motifs pertinents, confirmant ainsi la régularité de l’interpellation. Il est donc établi que M. [I] [U] a été régulièrement interpellé, ce qui rejette les moyens de nullité qu’il a soulevés. Quelle est la base légale pour le maintien en rétention de M. [I] [U] ?L’appelant conteste l’absence de base légale pour son maintien en rétention, arguant qu’aucun pays de renvoi n’a été fixé. L’article L. 513-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile précise que : « La décision fixant le pays de renvoi constitue une décision distincte de l’obligation de quitter le territoire français. » En l’absence d’arrêté fixant le pays de destination, l’administration doit prouver qu’elle a accompli toutes les diligences nécessaires pour déterminer ce pays. Le Conseil d’État, dans son avis n° 393591 du 14 décembre 2015, a également souligné que : « L’administration ne peut placer l’étranger en rétention administrative que dans la mesure où cela est strictement nécessaire à son départ. » Ainsi, même sans arrêté fixant le pays de renvoi, la régularité de la procédure de rétention n’est pas affectée, tant que l’administration démontre qu’elle a pris des mesures pour déterminer le pays de renvoi. Quelles sont les conditions pour ordonner une assignation à résidence ?L’article L. 743-13 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile énonce les conditions dans lesquelles un juge peut ordonner l’assignation à résidence d’un étranger. Cet article stipule que : « Le juge peut ordonner l’assignation à résidence de l’étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives. » Dans le cas de M. [I] [U], il a produit une attestation d’hébergement, a un emploi régulier depuis 2021, et a remis son passeport au centre de rétention, valide jusqu’en 2029. Ces éléments démontrent qu’il remplit les conditions nécessaires pour être placé sous assignation à résidence. Ainsi, le tribunal a décidé d’infirmer la décision de première instance et d’ordonner l’assignation à résidence de M. [I] [U]. Quelles sont les conséquences d’un non-respect des obligations d’assignation à résidence ?L’article L. 824-4 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit des sanctions en cas de non-respect des obligations d’assignation à résidence. Cet article stipule que : « En cas de défaut de respect des obligations d’assignation à résidence, l’intéressé encourt une peine de trois ans d’emprisonnement. » M. [I] [U] a été informé de son obligation de quitter le territoire national et des conditions de son assignation à résidence, notamment la nécessité de se présenter hebdomadairement aux services de police. Le non-respect de ces obligations pourrait donc entraîner des conséquences pénales significatives pour lui. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
L. 742-1 et suivants du Code de l’entrée et du séjour
des étrangers et du droit d’asile
ORDONNANCE DU 20 JANVIER 2025
(1 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 25/00289 – N° Portalis 35L7-V-B7J-CKUP2
Décision déférée : ordonnance rendue le 17 janvier 2025, à 15h30, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Meaux
Nous, Pascal Latournald, magistrat à la cour d’appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Ophanie Kerloc’h, greffière aux débats et au prononcé de l’ordonnance,
M. [I] [U]
né le 29 octobre 1987 à [Localité 4], de nationalité sénégalaise
RETENU au centre de rétention : [5]
assisté de Me Wilfrid Balatana, avocat de permanence, avocat au barreau de Paris, présent en salle d’audience de la Cour d’appel de Paris
INTIMÉ
LE PREFET DE [Localité 3]
représenté par Me Nicolas Suarez Pedroza, du cabinet Actis, avocat au barreau de Val-de-Marne, présent en salle d’audience de la Cour d’appel de Paris
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l’heure de l’audience
ORDONNANCE :
– contradictoire
– prononcée en audience publique
– Vu l’ordonnance du 17 janvier 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Meaux ordonnant la jonction de la procédure introduite par le recours de M. [I] [U] enregistré sous le n° RG 25/00198 et celle introduite par la requête du préfet de [Localité 3] et celle introduite par la requête du préfet de [Localité 3] enregistrée sous le n° RG 25/00192, rejetant les moyens d’irrecevabilité et d’irrégularité soulevés par M. [I] [U], déclarant le recours de M. [I] [U] recevable, rejetant le recours de M. [I] [U], déclarant la requête du préfet de [Localité 3] recevable et la procédure régulière, rejetant la demande subsidiaire d’assignation à résidence de M. [I] [U] et ordonnant la prolongation de la rétention de M. [I] [U] au centre de rétention administrative [5], ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l’administration pénitentiaire, pour une durée de vingt six jours à compter du 17 janvier 2025 ;
– Vu l’appel motivé interjeté le 17 janvier 2025 , à 17h35 , par M. [I] [U] ;
– Après avoir entendu les observations :
– par visioconférence, de M. [I] [U], assisté de son avocat, qui demande l’infirmation de l’ordonnance ;
– du conseil du préfet de [Localité 3] tendant à la confirmation de l’ordonnance ;
Saisi par le préfet de [Localité 3] par ordonnance du 16 janvier 2025, le magistrat du siège du le tribunal judiciaire de Meaux a rejeté les moyens de nullité soulevés par M. [I] [U], déclaré la requête du préfet recevable et ordonné la prolongation de la mesure de rétention pour une durée de 26 jours à compter du 17 janvier 2025.
A hauteur d’appel, M. [I] [U] réitère les mêmes moyens que ceux soulevés en vain devant le premier juge et tendant à titre principal, in limine litis, à invoquer l’irrégularité des conditions de son interpellation,
Il conteste également en cause d’appel la régularité de l’arrêté de placement en rétention, selon un tiré d’un défaut de base légale, de l’absence de menace pour l’ordre public, de l’erreur manifeste d’appréciation et du défaut d’examen sérieux de l’assignation à résidence.
Enfin, il estime que l’administration n’a pas accompli toutes les diligences nécessaires pour procéder à son éloignement et le maintien donc en rétention pendant un délai non strictement nécessaire.
Sur les conditions d’interpellation
Force est de constater que c’est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qu’il convient d’adopter au visa de l’article 955 du code de procédure civile que le premier juge a parfaitement répondu au moyen de nullité développé par M. [I] [U], ce dernier ayant été régulièrement interpellé non pas pour sa situation administrative mais dans le cadre de l’exécution d’un jugement du tribunal correctionnel d’Alberville rendu le 18 octobre 2021, décision rendue contradictoirement à signifier.
Sur la base légale
L’appelant soutient qu’aucune base légale n’existe pour défaut du pays de renvoi.
Il convient de rappeler qu’en l’absence d’arrêté fixant le pays destination, il appartient à l’administration, pour justifier de la nécessité du maintien en rétention, de rapporter la preuve de l’accomplissement de diligences utiles afin de déterminer le pays de destination (CE Avis, 14 déc.2015, n°393591), ce qui peut prendre la forme de la saisine d’un consulat.
L’avis Avis n° 393591 du 14 décembre 2015 du Conseil d’Etat énonce que : » La décision fixant le pays de renvoi constitue, en vertu des dispositions du premier alinéa de l’article L. 513-3, une décision distincte de l’obligation de quitter le territoire français, qui fait d’ailleurs l’objet d’une motivation spécifique. La décision fixant le pays de renvoi est ainsi sans incidence sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. L’adoption de la décision fixant le pays de renvoi conditionne, en revanche, la possibilité pour l’administration d’exécuter d’office l’obligation de quitter le territoire, dans les conditions prévues à l’article L. 513-1.
Dès lors, la circonstance que l’administration n’édicte pas dans un même acte l’obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays de renvoi de l’intéressé est sans incidence sur la légalité de la mesure d’éloignement, mais fait obstacle à ce qu’elle puisse être exécutée d’office « ‘ » Toutefois, au regard tant de l’objet de la mesure de placement en rétention administrative que des dispositions de l’article L. 554-1 citées ci-dessus, l’administration ne peut placer l’étranger en rétention administrative que dans la mesure où cela est strictement nécessaire à son départ et en vue d’accomplir les diligences visant à permettre une exécution d’office de l’obligation de quitter le territoire français, notamment celles qui doivent permettre la détermination du pays de renvoi. Il appartient au juge administratif, saisi sur le fondement du III de l’article L. 512-1, lorsque le caractère strictement nécessaire du placement en rétention est contesté devant lui, de contrôler que l’administration met en ‘uvre de telles diligences « .
Ainsi, l’arrêté fixant le pays de destination n’est pas un préalable obligatoire à la décision de placement en rétention administrative et son absence au dossier n’affecte pas la régularité de la procédure.
Le moyen sera rejeté.
Sur la demande d’assignation à résidence
Aux termes de l’article L. 743-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le juge peut ordonner l’assignation à résidence de l’étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives, après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d’un récépissé valant justification de l’identité et sur lequel est portée la mention de la mesure d’éloignement en instance d’exécution.
En l’espèce l’intéressé a produit une attestation d’hébergement chez sa s’ur Mme [S] [M] à [Localité 6], il démontre travailler régulièrement depuis 2021, avoir déposé un dossier pour régularisation exceptionnelle du séjour pour cause de travail. Il a de surcroît remis son passeport au centre de rétention administrative, lequel est valable jusqu’à 2029.
Il remplit donc les conditions pour être mis sous assignation à résidence.
En ce sens il conviendra d’infirmer la décision de première instance et de placer M. [I] [U] sous assignation à résidence.
INFIRMONS l’ordonnance,
STATUANT A NOUVEAU,
ORDONNONS l’assignation à résidence de M. [I] [U], à l’adresse suivante : chez Mme [S] [M] au [Adresse 2] ;
INFORMONS M. [I] [U] qu’il a l’obligation de quitter le territoire national et qu’il est astreint à résider à l’adresse sus-indiquée et doit se présenter hebdomadairement aux services de police sis [Adresse 1] en vue de l’exécution de la mesure d’éloignement et qu’en cas de défaut de respect des obligations d’assignation à résidence et qu’il encourt une peine de trois ans d’emprisonnement conformément aux dispositions du premier alinéa de l’article L 824-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile,
DISONS que la présente ordonnance sera notifiée à l’intéressé par l’intermédiaire du chef du centre de rétention administrative,
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d’une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 20 janvier 2025 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS : Pour information : L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L’avocat de l’intéressé
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