Prolongation de rétention administrative : irrecevabilité pour absence de documents justificatifs.

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Prolongation de rétention administrative : irrecevabilité pour absence de documents justificatifs.

L’Essentiel : Monsieur [F] [D] [V], de nationalité tunisienne, a été placé en rétention administrative le 12 décembre 2024. Le juge du Tribunal judiciaire d’Orléans a décidé de maintenir sa rétention pour 26 jours, décision confirmée par la Cour d’appel d’Orléans. Le 10 janvier 2025, la Préfecture de Seine Maritime a demandé une prolongation, contestée par le conseil de Monsieur [F] [D] [V] pour absence de documents justificatifs. Le tribunal a constaté l’irrecevabilité de la requête, ordonnant la mainlevée immédiate de la rétention. La décision a été rendue publique le 12 janvier 2025, avec possibilité d’appel dans les 24 heures.

Contexte de la rétention administrative

Monsieur [F] [D] [V], de nationalité tunisienne, a été placé en rétention administrative le 12 décembre 2024. Il a été transféré au Centre de rétention administrative d'[Localité 2] (Loiret). Le juge du Tribunal judiciaire d’Orléans a décidé, par une décision écrite en date du 16 décembre 2024, de maintenir sa rétention pour une durée maximale de 26 jours. Cette décision a été confirmée par la Cour d’appel d’Orléans le 18 décembre 2024.

Demande de prolongation de la rétention

Le 10 janvier 2025, la Préfecture de Seine Maritime a demandé une seconde prolongation de la rétention administrative de Monsieur [F] [D] [V]. Cette requête a été soumise en vertu de l’article L.742-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Le conseil de Monsieur [F] [D] [V] a contesté la recevabilité de cette demande, arguant que la Préfecture n’avait pas fourni les documents nécessaires pour évaluer les circonstances de la fouille ayant conduit à la découverte d’un passeport.

Arguments de la défense

Le conseil a souligné l’absence de procès-verbal de fouille et d’un registre actualisé du centre de rétention, ce qui, selon lui, rendait la requête irrecevable. La Préfecture a affirmé qu’un passeport avait été retrouvé lors de la fouille, mais n’a pas fourni de détails supplémentaires. L’article R.743-2 stipule que la requête doit être accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles, ce qui n’a pas été respecté dans ce cas.

Décision du tribunal

Le tribunal a constaté que le registre fourni par la Préfecture ne mentionnait pas la fouille de Monsieur [F] [D] [V]. En l’absence de preuves suffisantes concernant la légalité de la fouille, le tribunal a déclaré la requête de prolongation irrecevable. Par conséquent, il a ordonné la mainlevée immédiate de la mesure de rétention administrative.

Conséquences de la décision

La décision du tribunal a été rendue publique le 12 janvier 2025. Le Procureur de la République a la possibilité de s’opposer à cette décision dans un délai de 24 heures. Il a également été rappelé à Monsieur [F] [D] [V] son obligation de quitter le territoire national. La décision est susceptible d’appel dans les 24 heures suivant son prononcé.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de la requête aux fins de seconde prolongation de la rétention administrative

La question de la recevabilité de la requête de la Préfecture de Seine Maritime pour la seconde prolongation de la rétention administrative de Monsieur [F] [D] [V] est soulevée en raison de l’absence de documents utiles.

Selon l’article L.742-1 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA), « la rétention administrative peut être prolongée par le juge, à la demande de l’autorité administrative, pour une durée qui ne peut excéder 30 jours. »

Il est également précisé dans l’article R.743-2 que « à peine d’irrecevabilité, la requête de l’autorité administrative ayant ordonné le placement en rétention doit être motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles. »

Dans le cas présent, le conseil de Monsieur [F] [D] [V] soutient que la requête est irrecevable car la Préfecture n’a pas produit le procès-verbal de fouille, ce qui est essentiel pour évaluer les circonstances de la découverte du passeport de l’intéressé.

De plus, l’article L.742-4 du CESEDA stipule que « le juge ne peut ordonner la prolongation que sur le fondement des critères limitativement prévus. »

Ainsi, l’absence de documents justificatifs, notamment le registre actualisé du centre de rétention, empêche le juge d’apprécier la légalité de la prolongation demandée.

En conséquence, le tribunal a déclaré la requête irrecevable, mettant fin à la rétention administrative de Monsieur [F] [D] [V].

Sur les obligations de l’autorité préfectorale en matière de rétention administrative

Les obligations de l’autorité préfectorale en matière de rétention administrative sont clairement définies par le CESEDA.

L’article L.744-2 stipule que « dans tous les lieux de rétention, un registre doit être tenu, mentionnant l’état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. »

Cette obligation de tenir un registre actualisé est cruciale pour garantir le respect des droits des personnes retenues.

Dans le cas de Monsieur [F] [D] [V], la Préfecture a produit un registre, mais celui-ci ne comportait aucune mention de la fouille effectuée, ce qui soulève des questions sur la régularité de la procédure.

L’absence de procès-verbal de fouille empêche également de vérifier si les droits individuels du retenu ont été respectés, notamment en vertu de l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), qui protège le droit au respect de la vie privée et familiale.

Ainsi, le tribunal a conclu que la Préfecture n’a pas respecté ses obligations en matière de documentation, ce qui a conduit à l’irrecevabilité de la requête de prolongation de la rétention administrative.

Sur les voies de recours contre la décision de rétention administrative

La décision de mettre fin à la rétention administrative de Monsieur [F] [D] [V] est susceptible de recours.

L’article L.774-1 du CESEDA précise que « les décisions prises en matière de rétention administrative peuvent faire l’objet d’un recours devant le juge des libertés et de la détention. »

Dans le cas présent, le tribunal a notifié que le Procureur de la République a la possibilité de s’opposer à la décision dans un délai de 24 heures à partir de la notification de l’ordonnance.

De plus, l’intéressé a été informé de son droit d’appel, qui doit être interjeté dans les 24 heures suivant le prononcé de la décision, conformément à l’article 10 de la loi du 30 juin 2000 relative à la procédure civile.

Il est important de noter que l’appel n’est pas suspensif, ce qui signifie que la décision de mettre fin à la rétention administrative prend effet immédiatement, sauf opposition du Procureur.

Ainsi, les voies de recours sont clairement établies, permettant à l’intéressé et à l’autorité préfectorale de contester la décision du tribunal.

COUR D’APPEL
D’ORLEANS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’ORLEANS

Rétention administrative

N° RG 25/00138 – N° Portalis DBYV-W-B7J-G7WM
Minute N°25/00054

ORDONNANCE
statuant sur la seconde prolongation d’une mesure de rétention administrative

rendue le 12 Janvier 2025

Le 12 Janvier 2025

Devant Nous, Audrey CABROL, Juge au Tribunal judiciaire d’ORLEANS,

Assistée de Marie-Odile MORGADO, Greffier,

Etant en audience publique, au Palais de Justice,

Vu la requête motivée du représentant de 76- PREFECTURE DE LA SEINE MARITIME en date du 11 Janvier 2025, reçue le 11 Janvier 2025 à 17h19 au greffe du Tribunal,

Vu l’ordonnance du magistrat du siège du Tribunal judiciaire d’Orléans en date du 16 décembre 2024 ordonnant la prolongation du maintien en rétention administrative de l’intéressé.

Vu les avis donnés à Monsieur [F] [D] [V], à 76- PREFECTURE DE LA SEINE MARITIME, au Procureur de la République, à Me Rachid BOUZID, avocat choisi ou de permanence,

Vu notre note d’audience de ce jour,

COMPARAIT CE JOUR :

Monsieur [F] [D] [V]
né le 29 Mai 2000 à [Localité 3] (TUNISIE)
de nationalité Tunisienne

Assisté de Me Rachid BOUZID, avocat commis d’office, qui a pu consulter la procédure, ainsi que l’intéressé.

En l’absence de 76- PREFECTURE DE LA SEINE MARITIME, dûment convoqué.

En présence de M. [P], interprète en langue Arabe, inscrit sur la liste de la Cour d’appel d’Orléans.

En l’absence du Procureur de la République, avisé ;

Mentionnons que 76- PREFECTURE DE LA SEINE MARITIME, le Procureur de la République dudit tribunal, l’intéressé et son conseil ont été avisés, dès réception de la requête, de la date et l’heure de la présente audience par le greffier.

Mentionnons que les pièces de la procédure ont été mises à la disposition de l’intéressé et du conseil.

Vu les dispositions des articles L.741-1 et suivants du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile

Après avoir entendu :

Me Rachid BOUZID en ses observations.

M. [F] [D] [V] en ses explications.

MOTIFS DE LA DECISION

Il sera rappelé à titre liminaire que Monsieur [F] [D] [V], né le 29 mai 2000, à [Localité 3] (Tunisie) et de nationalité Tunisienne a été placé en rétention administrative le 12 décembre 2024 à 11h00 puis transféré au Centre de rétention administrative d’[Localité 2] (Loiret).

Par décision écrite motivée en date du 16 décembre 2024, le juge du Tribunal judiciaire d’Orléans a maintenu Monsieur [F] [D] [V] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 26 jours maximum à compter du 16 décembre 2024.

Cette décision a été confirmée par une ordonnance du Premier Président de la Cour d’appel d’Orléans en date du 18 décembre 2024.

Par requête en date du 10 janvier 2025, la Préfecture de Seine Maritime a sollicité la seconde prolongation de la rétention administrative de Monsieur [F] [D] [V].

I – Sur la recevabilité de la requête aux fins de seconde prolongation de la rétention administrative

Sur le moyen tiré de l’absence de documents utiles

Le magistrat du siège du tribunal judiciaire a été saisi d’une requête aux fins de prolongation de la mesure de rétention, en application de l’article L.742-1 du code de l’entrée et de séjour des étrangers et du droit d’asile.

Le conseil de Monsieur [F] [D] [V] allègue que la requête de la préfecture est irrecevable au motif que l’autorité préfectorale n’a pas produit, à l’appui de sa requête, le procès-verbal de fouille permettant au juge d’évaluer les circonstances exactes de la découverte de la photocopie du passeport de l’intéressé ainsi que le registre actualisé du centre de rétention dès lors que ledit registre ne fait pas mention de la fouille invoquée dans la saisine.

Dans sa requête, la Préfecture soutient qu’un passeport a été retrouvé sur le retenu lors de sa fouille en CRA sans autre précision.

Aux termes de l’articles R.743-2, « à peine d’irrecevabilité, la requête de l’autorité administrative ayant ordonné le placement en rétention doit être motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles. »

Il sera rappelé que dans le cadre d’une deuxième demande de prolongation, le magistrat du siège du tribunal judiciaire saisi en ce sens ne peut ordonner la prolongation que sur le fondement des critères limitativement prévus par l’article L.742-4 du CESEDA.

A ce stade, l’office du magistrat du siège du tribunal judiciaire n’est plus d’apprécier ni la régularité, ni la légalité du placement en rétention administrative. Ces considérations ont été traité et ainsi purgé lors de l’examen de la première demande de prolongation.

En application de l’article L 744-2 du CESEDA, « il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l’état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. »

La Préfecture justifie avoir transmis l’ordonnance autorisant une première prolongation, l’ordonnance d’appel relative à cette deuxième prolongation et le registre du centre de rétention d’[Localité 2]. Toutefois, contrairement aux allégations de la Préfecture, le registre transmis ne comporte aucune mention concernant la fouille de l’intéressé mentionnée dans sa requête. En l’absence de tout procès-verbal permettant d’établir le cadre juridique de ladite fouille et de contrôler si cette fouille a été effectuée dans le respect des droits individuels du retenu, en particulier de l’article 8 de la CEDH invoqué par le conseil de Monsieur [F] [D] [V], le tribunal considère que le registre produit en procédure n’est pas actualisé.

En conséquence, la requête sera déclarée irrecevable et il y a lieu de prononcer la mainlevée immédiate de la mesure de rétention administrative dont fait l’objet Monsieur [F] [D] [V] sans qu’il soit besoin de statuer sur les moyens pouvant être soulevés.

PAR CES MOTIFS

Déclarons la requête de la Préfecture de la Seine Maritime en date du 10 janvier 2025 irrecevable

Mettons fin à la rétention administrative de Monsieur [F] [D] [V]

Disons que le Procureur de la République a la possibilité dans un délai de 24 heures à partir de la notification de la présente ordonnance de s’y opposer et d’en suspendre les effets.

Notifions que la présente décision est susceptible d’être contestée par la voie de l’appel interjeté dans les 24 heures du prononcé de la présente ordonnance, devant le Premier Président de la Cour d’Appel d’ORLEANS ([Courriel 1]).

Rappelons à l’intéressé son obligation de quitter le territoire national.

Décision rendue en audience publique le 12 Janvier 2025 à

Le Greffier Le Juge

Reçu notification et copie de la présente ordonnance le 12 Janvier 2025 à ‘ORLEANS

L’INTERESSE L’AVOCAT L’INTERPRETE

REPRESENTANT de 76- PREFECTURE DE LA SEINE MARITIME

Copie de la présente décision est transmise par courriel au procureur de la République, au Tribunal Administratif d’Orléans, à la Préfecture de76- PREFECTURE DE LA SEINE MARITIME et au CRA d’[Localité 2].

RECEPISSE DE LA DELIVRANCE D’UNE COPIE DE L’ORDONNANCE A L’INTERESSE
(à retourner au greffe de la chambre du contentieux des libertés)

Je soussigné(e), M. [F] [D] [V] atteste :

– avoir reçu copie de l’ordonnance du juge judiciaire en date du 12 Janvier 2025 ;

– avoir été avisé(e), dans une langue que je comprends, de la possibilité de faire appel, devant le Premier président de la cour d’appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt-quatre heures de son prononcé, appel non suspensif ;

– avoir été informé(e), dans une langue que je comprends, que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel d’Orléans.

L’INTERESSE L’INTERPRETE
M. [F] [D] [V] M. [P]


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