L’Essentiel : M. [O] [S] [U], ressortissant irakien, a été placé en rétention administrative par le Préfet d’Ille-et-Vilaine suite à un arrêté d’obligation de quitter le territoire français. Après un recours rejeté par le tribunal de Rennes, il a interjeté appel. M. [O] [S] [U] conteste cette décision, invoquant des troubles psychiatriques et des irrégularités dans la procédure. Le Préfet et le procureur général soutiennent la prolongation de la rétention, arguant d’un manque de garanties de représentation et d’une menace pour l’ordre public. La cour d’appel a confirmé la décision, rejetant le recours et la demande d’aide juridictionnelle.
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Contexte de l’affaireM. [O] [S] [U], un ressortissant irakien né le 22 janvier 1999, a été placé en rétention administrative par le Préfet d’Ille-et-Vilaine suite à un arrêté d’obligation de quitter le territoire français, notifié le 23 décembre 2024. Le placement en rétention a été décidé le 27 décembre 2024 pour une durée initiale de quatre jours. Procédure judiciaireLe 30 décembre 2024, le Préfet a demandé une prolongation de la rétention administrative pour une durée de 26 jours. Le 31 décembre 2024, le magistrat du tribunal judiciaire de Rennes a rejeté le recours de M. [O] [S] [U] contre l’arrêté de placement et a ordonné la prolongation de sa rétention. M. [O] [S] [U] a interjeté appel de cette décision le 2 janvier 2025. Arguments de l’appelantM. [O] [S] [U] conteste la décision de placement en rétention, arguant d’une erreur d’appréciation concernant ses garanties de représentation, son état de vulnérabilité dû à des troubles psychiatriques, et des irrégularités dans la procédure, notamment l’absence de signature sur le registre de rétention. Position du Préfet et du procureur généralLe représentant du Préfet a soutenu la confirmation de la décision, affirmant que M. [O] [S] [U] ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes et qu’il constituait une menace pour l’ordre public en raison de ses antécédents judiciaires. Le procureur général a également recommandé la confirmation de la décision initiale. Analyse de la cour d’appelLa cour a jugé que l’appel était recevable et a examiné les arguments de M. [O] [S] [U]. Elle a constaté que le Préfet avait correctement évalué la situation de l’intéressé, tenant compte de son état de santé et de ses antécédents judiciaires. La cour a également noté que les diligences nécessaires avaient été effectuées par la préfecture. Décision finaleLa cour a confirmé l’ordonnance du magistrat du tribunal judiciaire de Rennes, rejetant le recours de M. [O] [S] [U] contre son placement en rétention administrative. La demande d’aide juridictionnelle a également été rejetée. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de placement en rétention administrative selon le CESEDA ?Le placement en rétention administrative est régi par plusieurs articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Selon l’article L741-1, « L’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision. » Il est également précisé dans l’article L612-3 que « Le risque mentionné au 3° de l’article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : […] 8° L’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu’il ne peut présenter des documents d’identité ou de voyage en cours de validité. » Ainsi, le placement en rétention est justifié lorsque l’étranger ne peut pas justifier d’une entrée régulière sur le territoire français ou lorsqu’il représente une menace pour l’ordre public. Comment l’état de vulnérabilité de l’étranger est-il pris en compte dans la décision de rétention ?L’article L741-4 du CESEDA stipule que « La décision de placement en rétention prend en compte l’état de vulnérabilité et tout handicap de l’étranger. » Cela signifie que l’autorité administrative doit évaluer l’état de santé de l’étranger, y compris les handicaps moteurs, cognitifs ou psychiques, pour déterminer les conditions de son placement en rétention. Il est également mentionné que « les besoins d’accompagnement de l’étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention. » Dans le cas de Monsieur [O] [S] [U], bien que des problèmes de santé aient été évoqués, il n’a pas fourni de preuves suffisantes pour justifier une vulnérabilité qui empêcherait son placement en rétention. Quelles sont les exigences procédurales pour la prolongation de la rétention administrative ?L’article L743-9 du CESEDA précise que « le magistrat du siège du tribunal judiciaire, saisi aux fins de prolongation de la rétention, rappelle à l’étranger les droits qui lui sont reconnus et s’assure, d’après les mentions figurant au registre prévu à l’article L. 744-2 émargé par l’intéressé, que celui-ci a été, dans les meilleurs délais suivant la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits. » De plus, l’article R743-2 indique que « la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention. » Il est donc essentiel que la requête de prolongation soit accompagnée d’une copie actualisée du registre, permettant de vérifier que l’étranger a été informé de ses droits. Dans le cas présent, la requête du Préfet a été jugée recevable car elle était accompagnée de la documentation requise, y compris le registre de rétention. Quels sont les critères pour apprécier le risque de fuite d’un étranger en rétention ?L’article L612-3 du CESEDA énonce plusieurs critères pour évaluer le risque de fuite d’un étranger. Parmi ceux-ci, on trouve : 1. L’étranger ne peut justifier d’une entrée régulière sur le territoire français. Dans le cas de Monsieur [O] [S] [U], le Préfet a considéré qu’il ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes, notamment en raison de son absence de documents d’identité valides et de son comportement antérieur, ce qui a justifié le placement en rétention. Quelles sont les conséquences d’une décision de placement en rétention administrative ?La décision de placement en rétention administrative a pour conséquence de priver l’étranger de sa liberté de circulation. Selon l’article L741-3 du CESEDA, « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. » Cela implique que l’administration doit agir avec diligence pour organiser le départ de l’étranger. Dans le cas de Monsieur [O] [S] [U], la prolongation de sa rétention a été ordonnée pour une durée maximale de 26 jours, ce qui est conforme aux dispositions légales en vigueur. Il est également important de noter que l’étranger a le droit de demander à rencontrer un médecin pendant sa rétention, conformément à l’article L744-4 du CESEDA. |
N° 25/004
N° RG 25/00005 – N° Portalis DBVL-V-B7J-VQH7
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
articles L 741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile
Nous, Sébastien PLANTADE, conseiller à la cour d’appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Eric LOISELEUR, greffier placé,
M. [O] [S] [U]
né le 22 Janvier 1999 à [Localité 2]
de nationalité Irakienne
ayant pour avocat Me Félix JEANMOUGIN, avocat au barreau de RENNES
d’une ordonnance rendue le 31 Décembre 2024 à 18H29 notifiée à 19H00 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a rejeté les exceptions de nullité soulevées, le recours formé à l’encontre de l’arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [O] [S] [U] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-six jours à compter du 31 Décembre 2024 à 24H00;
En présence de Mme [J] [V], membre du Pôle Régional Contentieux de la Préfecture d’Ille et Vilaine, représentant du préfet d’Ille et Vilaine, dûment convoqué,
En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 03 Janvier 2025 lequel a été mis à disposition des parties.
En présence de [O] [S] [U], assisté de Me Félix JEANMOUGIN, avocat,
Après avoir entendu en audience publique le 03 Janvier 2025 à 11H00 l’appelant assisté de M. [M] [B], interprète en langue kurde irakien, et son avocat et le représentant du préfet en leurs observations,
Avons mis l’affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :
Monsieur [O] [S] [U] a fait l’objet d’un arrêté du Préfet d’Ille-et-Vilaine en date du 20 décembre 2024, notifié le 23 décembre 2024, portant obligation d’avoir à quitter le territoire français sans délai.
Le 27 décembre 2024, Monsieur [O] [S] [U] s’est vu notifier par le Préfet d’Ille-et-Vilaine une décision de placement en rétention administrative, au centre de rétention administrative (CRA) de [Localité 3] pour une durée de quatre jours. Monsieur [O] [S] [U] a contesté l’arrêté de placement en rétention administrative.
Par requête motivée en date du 30 décembre 2024, reçue le 30 décembre 2024 à 15h 36 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 26 jours de la rétention administrative de Monsieur [O] [S] [U].
Par ordonnance rendue le 31 décembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a rejeté le recours en annulation de l’arrêté de placement en rétention administrative et ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [O] [S] [U] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 26 jours.
Par déclaration reçue au greffe de la Cour d’Appel de Rennes le 02 janvier 2025 à 17h 11, Monsieur [O] [S] [U] a formé appel de cette ordonnance.
L’appelant fait valoir, au soutien de sa demande d’infirmation de la décision entreprise, que la décision du Préfet portant placement en rétention est entachée d’une erreur d’appréciation tant au regard des garanties de représentation dont il dispose, avec une adresse déjà connue et toujours valide, qu’eu égard à son état de vulnérabilité, marqué par des troubles psychiatriques nécessitant un suivi et un traitement, et que par ailleurs la requête du Préfet est irrecevable en raison de l’absence de signature par l’autorité du registre de rétention et la procédure marquée par une irrégularité tenant au défaut de diligences du Préfet, qui n’a contacté les autorités consulaires irakiennes que le 27 décembre 2024 et ne prouve pas avoir exercé des diligences durant la détention ni envoyé toutes les pièces justificatives utiles aux autorités consulaires.
Le procureur général, suivant avis écrit du 03 janvier 2025 sollicite la confirmation de la décision entreprise.
Comparant à l’audience, Monsieur [O] [S] [U] déclare avoir interjeté appel aux motifs qu’il souhaite sortir du centre de rétention. Il précise être dépourvu de passeport et pouvoir être hébergé par [K] à [Localité 3]. Son conseil s’en rapporte aux moyens développés dans la déclaration d’appel tant sur le recours en annulation de l’arrêté de placement en rétention administrative que sur les irrégularités de procédure, insistant en particulier sur l’irrecevabilité de la requête faute de registre complet avec la signature du chef de poste, conformément à la décision de la Cour de Cassation du 04 septembre 2024 (n°23-12.550), précisant que s’agissant d’une fin de non-recevoir, il n’y a pas à démontrer l’existence d’un grief. Il est en outre formalisé une demande sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle.
Comparant à l’audience, le représentant du Préfet d’Ille-et-Vilaine demande la confirmation de la décision entreprise, soulignant que le registre a bien été signé par l’étranger, qui a eu connaissance de ses droits en rétention et que la signature du chef de poste figure sur les autres actes, qu’il n’est pas démontré de grief de la part de l’intéressé à ce titre et que Monsieur [S] [U] ne présente pas de garanties de représentation permettant d’envisager une assignation à résidence, ne versant aucune attestation d’hébergement, et il représente une menace à l’ordre public. Il est ajouté que les diligences ont bien été effectuées dès le placement en rétention de l’intéressé.
L’appel est recevable pour avoir été formé dans les formes et délais prescrits.
Sur le recours en annulation de l’arrêté de placement en rétention administrative
Sur les moyens tirés du défaut d’examen complet de la situation et de l’état de vulnérabilité de l’étranger et de l’erreur manifeste d’appréciation :
Il ressort des dispositions de l’article L741-1 du CESEDA que ‘L’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l’article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l’ordre public que l’étranger représente’.
En outre, selon les dispositions de l’article L 612-3, ‘Le risque mentionné au 3° de l’article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L’étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n’a pas sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;
2° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation du visa, à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;
3° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français plus d’un mois après l’expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L’étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L’étranger s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure d’éloignement ;
6° L’étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l’un des États avec lesquels s’applique l’acquis de Schengen, fait l’objet d’une décision d’éloignement exécutoire prise par l’un des États ou s’est maintenu sur le territoire d’un de ces États sans justifier d’un droit de séjour ;
7° L’étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité ou de voyage ou a fait usage d’un tel titre ou document;
8° L’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu’il ne peut présenter des documents d’identité ou de voyage en cours de validité, qu’il a refusé de communiquer les renseignements permettant d’établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu’il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d’empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l’article L. 142-1, qu’il ne justifie pas d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu’il s’est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.’
Par ailleurs, selon les dispositions de l’article L 741-4, ‘La décision de placement en rétention prend en compte l’état de vulnérabilité et tout handicap de l’étranger.
Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d’accompagnement de l’étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention’.
Les dispositions de l’article L 731-1 prévoient en outre que ‘L’autorité administrative peut assigner à résidence l’étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l’éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :
1° L’étranger fait l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n’a pas été accordé’;
Par ailleurs, aux termes de l’article 15-1 de la directive dite retour n° 2008/115/CE du Parlement Européen et du Conseil en date du 16 décembre 2008 « À moins que d’autres mesures suffisantes, mais moins coercitives puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les Etats membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d’un pays tiers qui fait l’objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l’éloignement en particulier lorsque a) il existe un risque de fuite ou b) le ressortissant concerné d’un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement.
Dans son arrêté de placement en rétention administrative en date du 27 décembre 2024, le Préfet d’Ille-et-Vilaine expose que faisant l’objet d’un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai édicté le 20 décembre 2024, Monsieur [O] [S] [U] est séparé et père de deux enfants qui seraient placés en famille d’accueil depuis deux ans, sans pouvoir en justifier, ne démontre pas avoir noué en France des liens dont l’intensité serait exclusive de tout autre qu’il conserve encore dans son pays d’origine, qu’il fait état de problèmes de santé avec un suivi psychiatrique mensuel et deux précédentes hospitalisations à l’UHSA de [Localité 3] mais n’a jamais entrepris de démarches visant à obtenir un titre de séjour pour raison médicale et peut bénéficier d’un accès à un médecin en rétention et n’invoque aucun élément de nature à considérer qu’une vulnérabilité ou un handicap quelconque ferait obstacle au placement en rétention, que l’intéressé est dépourvu de tout document d’identité ou de voyage valide, n’a pas remis préalablement son passeport, déclare ne pas avoir de domicile à son nom en France et a évoqué une domiciliation possible [Adresse 1] à [Localité 3] sans être en mesure d’en justifier, empêchant d’envisager une éventuelle assignation à résidence, si bien que l’intéressé ne présente pas des garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque de fuite. Le Préfet ajoute que Monsieur [S] [U] est défavorablement connu des services de police et de la justice, ayant été incarcéré à compter du 09 septembre 2024 suite à sa condamnation pour des faits de violation d’une interdiction de contact, que l’intéressé avait déjà été condamné antérieurement par la Cour d’Appel de Rennes à une peine de 12 mois d’emprisonnement pour ne pas avoir respecté les obligations et interdictions imposées par le juge aux affaires familiales dans le cadre d’une ordonnance de protection d’une victime de violences conjugales, que le 11 juillet 2023, le Tribunal correctionnel de Rennes avait déjà condamné l’intéressé à une peine de 6 mois d’emprisonnement pour des faits similaires, de sorte que l’intéressé constitue au regard de la nature et de la répétition des infractions commises une menace pour l’ordre public.
Il ressort de l’examen de la procédure et des pièces produites à l’audience devant le premier juge que la situation de Monsieur [O] [S] [U] a été examinée de manière suffisamment approfondie par le Préfet d’Ille et Vilaine, qui n’a pas commis d’erreur d’appréciation dans la mesure où le Préfet a bien examiné la situation de l’intéressé tant lors de l’édiction de la mesure d’éloignement en date du 20 décembre 2024 que dans le cadre de la décision querellée et a légitimement considéré que l’intéressé ne présentait pas des garanties de représentation suffisantes pour prévenir le risque de fuite, conformément aux dispositions 1), 4) et 8) de l’article L 612-3 précité selon la motivation de la décision querellée de placement en rétention administrative, dans la mesure où l’intéressé n’a pas justifié d’une entrée régulière sur le territoire national, a fait expressément part dans son audition du 03 décembre 2024 de son refus d’être éloigné vers son pays d’origine, a évoqué une domiciliation à [Localité 3] à une adresse figurant déjà en procédure mais qui ne correspond pas à un lieu de résidence propre, et qui ne peut être considérée comme pérenne et effective, alors que l’intéressé a indiqué être sans domicile en France et qu’il ne verse aucune attestation d’hébergement. Le Préfet a également considéré qu’au regard de son comportement et de ses antécédents judiciaires, s’agissant des condamnations prononcées par le Tribunal correctionnel de Rennes le 09 septembre 2024 à une peine de 18 mois d’emprisonnement dont 12 mois assortis d’un sursis probatoire, pour des faits de rencontre d’une personne malgré une interdiction judiciaire prononcée, en état de récidive, le 06 octobre 2023 par la Chambre des Appels correctionnels de la Cour d’Appel de Rennes à une peine de 12 mois d’emprisonnement pour des faits similaires et le 11 juillet 2023 par le tribunal correctionnel de Rennes à une peine de 6 mois d’emprisonnement pour des faits de non- respect des obligations ou interdictions imposées par le juge aux affaires familiales dans le cadre d’une ordonnance de protection d’une victime de violences conjugales ou de menace de mariage forcé, Monsieur [S] [U] représentait par sa présence sur le sol français une menace pour l’ordre public, réelle et actuelle, pouvant ainsi justifier une décision de placement en rétention administrative conformément aux dispositions de l’article L 741-1 précité.
À cet égard le Préfet a donc ainsi justifié sa décision sans commettre d’erreur d’appréciation quant à l’opportunité de la mesure puisque le risque de fuite est caractérisé, alors que le Préfet a examiné par ailleurs de manière précise la situation de l’intéressé au titre de son état de santé, ayant apprécié au vu des déclarations de Monsieur [S] [U], qui n’a pas fait valoir d’élément autre qu’une attestation de suivi du SMPR au mois d’octobre 2024, permettant de le considérer comme une personne vulnérable, et en l’absence de toute autre pièce produite, que l’état de l’intéressé en fonction des éléments dont il disposait ne s’opposait pas à un placement en rétention administrative, étant précisé qu’un éventuel suivi médical ou psychiatrique peut intervenir au centre de rétention administrative et qu’en tout état de cause, en vertu des dispositions de l’article L 744-4 du CESEDA, l’intéressé bénéficie dans le lieu de rétention du droit de demander à rencontrer un médecin. Il est d’ailleurs précisé que dans sa décision du 09 septembre 2024, le Tribunal correctionnel avait rejeté une demande d’expertise psychiatrique avant-dire droit, considérant disposer d’éléments suffisants pour apprécier le discernement de l’intéressé, à supposer établies les difficultés de santé alléguées.
À cet égard le Préfet a donc ainsi justifié sa décision sans commettre d’erreur d’appréciation quant à l’opportunité de la mesure et en tenant compte de la situation de l’intéressé en fonction des éléments portés à sa connaissance.
Le recours en annulation contre l’arrêté de placement sera ainsi rejeté.
Sur la régularité de la procédure
Sur le moyen tiré de l’irrecevabilité de la requête du Préfet tenant à l’absence de signature du registre de rétention :
Aux termes de l’article L.743-9 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), « le magistrat du siège du tribunal judiciaire, saisi aux fins de prolongation de la rétention, rappelle à l’étranger les droits qui lui sont reconnus et s’assure, d’après les mentions figurant au registre prévu à l’article L. 744-2 émargé par l’intéressé, que celui-ci a été, dans les meilleurs délais suivant la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir à compter de son arrivée au lieu de rétention. Le juge tient compte des circonstances particulières liées notamment au placement en rétention simultané d’un nombre important d’étrangers pour l’appréciation des délais relatifs à la notification de la décision, à l’information des droits et à leur prise d’effet ».
Selon l’article R 743-2 du CESEDA, « à peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.
Lorsque la requête est formée par l’autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L. 744-2.
Lorsque la requête est formée par l’étranger ou son représentant, la décision attaquée est produite par l’administration. Il en est de même, sur la demande du juge des libertés et de la détention, de la copie du registre. »
Il appartient au Juge Judiciaire, en application de l’article 66 de la Constitution, de contrôler par voie d’exception la chaîne des privations de liberté précédant la rétention administrative.
Exceptée la copie du registre, la Loi ne précise pas le contenu des pièces justificatives qui doivent comprendre les pièces nécessaires à l’appréciation par le juge judiciaire des éléments de fait et de droit permettant d’apprécier la régularité de la procédure servant de fondement à la rétention. Il résulte de ces dispositions que toute requête en prolongation de la rétention administrative d’un étranger doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée d’une copie actualisée du registre permettant un contrôle de l’effectivité de l’exercice des droits reconnus à l’étranger au cours de la mesure de rétention (Civ. 1ère, 15 décembre 2021, arrêt n° 791 FS-D, pourvoi n° T 20-50.034).
Par ailleurs, selon les dispositions de l’article L 744-2 précité, il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l’état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Le registre mentionne également l’état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil.
L’autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d’information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.
En l’espèce, il ressort de l’examen de la procédure que la requête du Préfet est bien accompagnée conformément à la loi de la copie du registre du centre de rétention administrative de [4] de la Lande dans lequel Monsieur [O] [S] [U] a été placé à sa levée d’écrou le 27 décembre 2024 à 09h 40. Cette copie est bien actualisée en ce qu’elle vise l’identité revendiquée par l’intéressé, comporte les mentions utiles relatives aux droits de l’intéressé en rétention, comme exigé par l’article L.743-9 du CESEDA, avec en observation la précision que le règlement intérieur du centre de rétention a été notifié à l’intéressé après lecture faite par l’agent notificateur, et que s’il est établi (Civ 1ère du 04 septembre 2024 n°23-12.550) que le registre doit être actualisé et émargé et joint à chaque requête en prolongation de la rétention administrative, la loi prévoit un émargement du registre par l’intéressé, ce qui est le cas en l’espèce, alors qu’en tout état de cause, les autres mentions et signatures tant de l’étranger que de l’agent notificateur et du greffier sur les différents procès-verbaux de notification des droits en rétention permettent de s’assurer que Monsieur [S] [U] a été en mesure de faire valoir ses droits en rétention, notamment à l’examen du procès-verbal de rappel de notification des droits en rétention, établi à l’arrivée au centre de rétention le 27 décembre 2024 à 10h 20, émargé.
Par conséquent, aucune pièce utile ne faisant défaut, il s’ensuit que la requête du Préfet est bien recevable et que le moyen d’irrecevabilité invoqué ne saurait par conséquent prospérer.
Sur le moyen tiré de l’insuffisance des diligences de la préfecture
L’article L.741-3 du CESEDA dispose qu’un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet et par décisions en du 9 juin 2010, la Cour de cassation a souligné que l’autorité préfectorale se devait de justifier de l’accomplissement de ces diligences dès le placement en rétention, ou, au plus tard, dès le premier jour ouvrable suivant l’organisation de la rétention.
En l’espèce, Monsieur [O] [S] [U] a été placé en rétention administrative le 27 décembre 2024 à sa levée d’écrou, à 09h 40, sur le fondement d’une obligation de quitter le territoire français sans délai. Il ressort de la procédure, conformément aux exigences jurisprudentielles (Civ. 1ère 17/10/2019) selon lesquelles la préfecture devait justifier de diligences uniquement à compter du placement en rétention, et non lors de l’incarcération, que dès le 27 décembre 2024 à 11h 17, la Préfecture a saisi directement les autorités consulaires irakiennes d’une demande de reconnaissance de l’intéressé et partant de délivrance éventuelle de laissez-passer consulaire, avec transmission de pièces justificatives.
Il s’ensuit que toutes les diligences ont bien été effectuées par la Préfecture dans la mise en ‘uvre de la mesure d’éloignement. En effet, une demande d’identification de l’intéressé a été opérée dès le placement en rétention administrative de Monsieur [S] [U], étant rappelé que les modalités pratiques des échanges consécutifs à la saisine des autorités consulaires peuvent ensuite différer selon les situations et les pays selon les accords en vigueur.
Dans ces circonstances, conformément aux prescriptions de l’article L 741-3, toutes les diligences nécessaires ont été réalisées par l’autorité préfectorale.
Ce moyen ne saurait ainsi prospérer.
En conséquence, c’est à bon droit que la requête entreprise a été accueillie par le premier juge et il y a lieu d’ordonner la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [O] [S] [U], à compter du 31 décembre 2024, pour une période d’un délai maximum de 26 jours dans des locaux non pénitentiaires.
La décision dont appel est donc confirmée.
La demande sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle sera rejetée.
Statuant publiquement,
Déclarons l’appel recevable,
Confirmons l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes en date du 31 décembre 2024,
Rejetons la demande titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle,
Laissons les dépens à la charge du trésor public,
Fait à Rennes, le 03 Janvier 2025 à 14H30
LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,
Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [O] [S] [U], à son avocat et au préfet
Le Greffier,
Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.
Le Greffier
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