Prolongation de la rétention administrative : enjeux de diligence et de nationalité.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de diligence et de nationalité.

L’Essentiel : Monsieur [Z] [R], né le 1er janvier 1984 en Côte d’Ivoire, est retenu au Centre de Rétention Administrative de [Localité 2]. Il fait l’objet d’un arrêté d’expulsion du préfet des Bouches-du-Rhône, suivi d’une rétention prolongée par le préfet des Yvelines. Le 7 janvier 2025, il interjette appel de cette prolongation, arguant de l’insuffisance des diligences administratives. L’avocat de M. [Z] [R] souligne les retards de la préfecture, tandis que le préfet défend l’absence de documents de voyage valides. Le tribunal, après examen, confirme la légitimité de la prolongation de la rétention. La décision est notifiée avec possibilité de pourvoi.

Identification des Parties

Monsieur [Z] [R], né le 1er janvier 1984 à [Localité 1] en Côte d’Ivoire, se déclare de nationalité malienne et est actuellement retenu au Centre de Rétention Administrative (CRA) de [Localité 2]. Il est assisté par Me Perrine Wallois, avocat au barreau de Versailles, et Mme [Y] [T], interprète en langue bambara.

Arrêtés d’Expulsion et de Rétention

Le préfet des Bouches-du-Rhône a pris un arrêté d’expulsion à l’encontre de M. [Z] [R] le 17 mars 2022, notifié le 18 mars 2022. Par la suite, un arrêté du préfet des Yvelines en date du 7 décembre 2024 a ordonné son placement en rétention pour une durée de quatre jours, notifié le même jour. Le 12 décembre 2024, un magistrat a prolongé cette rétention pour vingt-six jours supplémentaires.

Prolongation de la Rétention Administrative

Le 14 décembre 2024, la cour d’appel de Paris a confirmé la prolongation de la rétention. Le 6 janvier 2025, le préfet des Yvelines a demandé une deuxième prolongation, qui a été déclarée recevable par le tribunal judiciaire de Versailles le 7 janvier 2025, prolongeant la rétention de M. [Z] [R] pour trente jours supplémentaires.

Appel de M. [Z] [R]

Le 7 janvier 2025, M. [Z] [R] a interjeté appel de l’ordonnance de prolongation, demandant son annulation ou, à titre subsidiaire, sa réformation et la fin de sa rétention. Il a soulevé l’insuffisance des diligences de l’administration.

Arguments des Parties

Lors de l’audience, l’avocat de M. [Z] [R] a soutenu que les diligences de la préfecture étaient tardives. Le préfet, bien que non présent, a fait parvenir des observations écrites s’opposant aux arguments de M. [Z] [R], affirmant qu’il n’avait pas de passeport valide ni d’hébergement stable, et qu’il ne souhaitait pas repartir volontairement.

Recevabilité de l’Appel

L’appel a été jugé recevable, car interjeté dans les délais légaux et motivé. Le tribunal a confirmé que l’ordonnance du magistrat était susceptible d’appel dans les 24 heures suivant sa notification.

Diligences de l’Administration

Le tribunal a examiné les diligences de l’administration, notant que la mesure d’éloignement n’avait pas pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat. Le préfet a sollicité l’audition consulaire des autorités ivoiriennes, qui a révélé que M. [R] était de nationalité malienne.

Conclusion du Tribunal

Le tribunal a constaté que les autorités étrangères avaient été requises de manière effective et que le délai entre l’audition et la demande de laissez-passer était raisonnable. Il a rejeté les moyens soulevés par M. [Z] [R] et a confirmé l’ordonnance de prolongation de la rétention.

Notification de la Décision

La décision a été notifiée à M. [Z] [R], à son interprète et à son avocat, avec indication de la possibilité de pourvoi en cassation dans un délai de deux mois.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de la culpabilité en matière de violences volontaires ?

La culpabilité en matière de violences volontaires est régie par plusieurs articles du Code pénal, notamment les articles 121-3 et 222-11.

L’article 121-3 du Code pénal stipule que :

« Il n’y a pas de crime ou de délit sans intention de le commettre. »

Cela signifie que pour qu’une personne soit déclarée coupable de violences volontaires, il faut établir l’intention de nuire ou de commettre l’infraction.

De plus, l’article 222-11 précise que :

« Les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) de plus de huit jours sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. »

Dans le cas présent, M. [Y] a été reconnu coupable de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours, ce qui justifie la sévérité de la peine.

Il est également essentiel que les faits soient clairement établis et que les éléments constitutifs de l’infraction soient constatés, comme le souligne l’article 591 du Code de procédure pénale :

« La cour d’appel doit statuer sur les faits qui lui sont soumis. »

Ainsi, la cour d’appel a dû apprécier les éléments de preuve pour établir la culpabilité de M. [Y].

Quels sont les effets de la condamnation sur les droits de M. [Y] ?

La condamnation de M. [Y] a des conséquences significatives sur ses droits, notamment en ce qui concerne l’interdiction de détenir ou de porter une arme et la privation de son droit d’éligibilité.

L’article 131-6 du Code pénal prévoit que :

« Les peines complémentaires peuvent être prononcées en même temps que la peine principale. »

Dans ce cas, M. [Y] a été condamné à une interdiction de détenir ou de porter une arme pour une durée de cinq ans, ce qui est une peine complémentaire.

De plus, l’article 131-26 du Code pénal stipule que :

« La peine d’inéligibilité peut être prononcée à l’égard de toute personne condamnée pour un crime ou un délit. »

M. [Y] a également été condamné à deux ans d’inéligibilité, ce qui signifie qu’il ne pourra pas se présenter à des élections ou exercer des fonctions publiques durant cette période.

Ces mesures visent à protéger la société et à prévenir la récidive, en tenant compte de la gravité des faits commis.

Comment la cour d’appel a-t-elle justifié sa décision ?

La cour d’appel a justifié sa décision en se fondant sur l’appréciation souveraine des éléments de preuve présentés lors du procès.

L’article 593 du Code de procédure pénale stipule que :

« La cour d’appel statue sur les faits qui lui sont soumis et sur les preuves qui en résultent. »

Dans le cas de M. [Y], la cour a constaté que, bien qu’il ait nié avoir commis des actes de violence, il a admis avoir repoussé sa compagne en réponse à une agression préalable.

Les juges ont également noté que certaines lésions constatées sur la plaignante étaient antérieures aux faits reprochés, mais que plusieurs traces correspondaient aux déclarations de la victime concernant les violences subies le 30 mars 2022.

Ainsi, la cour a conclu que les faits reprochés étaient établis, ce qui a permis de justifier la déclaration de culpabilité.

En conséquence, la cour d’appel a agi conformément aux dispositions légales et a écarté le moyen soulevé par M. [Y].

COUR D’APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7

Code nac : 14H

N° RG 25/00080 – N° Portalis DBV3-V-B7J-W57A

Du 08 Janvier 2025

ORDONNANCE

LE HUIT JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ

A notre audience publique,

Nous, Odile CRIQ, Conseillère à la cour d’appel de Versailles, déléguée par ordonnance de monsieur le premier président afin de statuer dans les termes de l’article L 743-21 et suivants du code de l’entrée et de séjour des étrangers et du droit d’asile, assistée de [J] [M], Greffière stagiaire en préaffectation, avons rendu l’ordonnance suivante :

ENTRE :

Monsieur [Z] [R]

né le 01 Janvier 1984 à [Localité 1] (COTE D’IVOIRE)

se dit de nationalité Malienne

Actuellement retenu au CRA de [Localité 2]

comparant par visioconférence assisté de Me Perrine WALLOIS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 16, commis d’office et de Mme [Y] [T], mandatée par la STI, interprète en langue bambara, ayant prêté serment à l’audience

DEMANDEUR

ET :

PREFECTURE DES YVELINES

représenté par Me Jean-Alexandre CANO de la SELARL CENTAURE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0500, non présent

DEFENDERESSE

Et comme partie jointe le ministère public absent

Vu l’extrait individualisé du registre prévu par l’article L.744-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu l’arrêté d’expulsion pris le 17 mars 2022 par le préfet des Bouches-du-Rhône à l’encontre de M. [Z] [R] notifiée par le préfet des Bouches-du-Rhône à ce dernier le 18 mars 2022 ;

Vu l’arrêté du préfet des Yvelines en date du 07 décembre 2024 portant placement en rétention de M. [Z] [R] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 4 jours, notifiée le 07 décembre 2024 ;

Vu la décision du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Meaux du 12 décembre 2024 qui a prolongé la rétention de M. [Z] [R] pour une durée de vingt-six jours à compter du 11 décembre 2024 ;

Vu l’ordonnance du premier président de la cour d’appel de Paris en date du 14 décembre 2024 qui a confirmé cette décision ;

Vu la requête du préfet des Yvelines pour une deuxième prolongation de la rétention administrative de M. [Z] [R] en date du 6 janvier 2025 et enregistrée le même jour à 9h17 ;

Vu la décision du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Versailles du 7 janvier 2025 qui a déclaré la requête en prolongation de la rétention administrative recevable, a déclaré la procédure diligentée à l’encontre de M. [Z] [R] régulière, et a prolongé la rétention de M. [Z] [R] pour une durée supplémentaire de 30 jours à compter du 6 janvier 2025 ;

Le 7 janvier 2025 à 15 h 59, M. [Z] [R] a relevé appel de cette ordonnance prononcée en sa présence, à distance à l’aide d’un moyen de télécommunication audiovisuelle par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Versailles le 7 janvier 2025 à 11h30 qui lui a été notifiée le même jour à 12h58.

Il sollicite, dans sa déclaration d’appel, l’annulation de l’ordonnance, à titre subsidiaire la réformation de l’ordonnance et la fin de la rétention. A cette fin, il soulève :

– L’insuffisance de diligences nécessaires de l’administration

Les parties ont été convoquées en vue de l’audience.

A l’audience, le conseil de M. [Z] [R] a soutenu que les diligences de la préfecture effectuées le 2 janvier 2025 avaient été tardives.

Le préfet n’a pas comparu mais a fait adresser des observations écrites selon lesquelles il s’est opposé aux moyens soulevés et a demandé la confirmation de la décision entreprise, en faisant valoir que M. [Z] [R] n’avait pas de passeport valide, n’avait pas d’hébergement stable et effectif, que ce dernier déclarait en audition ne pas vouloir repartir volontairement, qu’il n’avait fait aucune démarche en ce sens et que l’assignation à résidence dont l’objectif est le retour volontaire serait détournée de sa finalité.

M. [Z] [R] a indiqué ne pas supporter sa période de rétention, qu’il se sentait agressé et était en difficulté avec les autres personnes retenues. Il a acquiescé à la défense soutenue par son avocat.

SUR CE

Sur la recevabilité de l’appel

En vertu de l’article R 743-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire est susceptible d’appel dans les 24 heures de son prononcé, ce délai courant à compter de sa notification à l’étranger lorsque celui-ci n’assiste pas à l’audience. L’article R 743-11 du même code prévoit que le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d’appel motivée. Le délai ainsi prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.

En l’espèce, l’appel (dont le délai a été prorogé au jour ouvrable suivant dès lors qu’il a expiré un samedi, un dimanche ou un jour férié), a été interjeté dans les délais légaux et il est motivé. Il doit être déclaré recevable.

Sur la deuxième prolongation et les diligences de l’administration

En vertu de l’article L. 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, quand un délai de vingt-six jours s’est écoulé depuis l’expiration du délai de rétention de 4 jours, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :

1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ;

2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité, ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3° Lorsque, la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;

b) de l’absence de moyens de transport ;

L’étranger peut être maintenu à la disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L.742-2.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours.

En l’espèce, malgré les diligences de l’administration, la mesure d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé,

S’il appartient au juge, en application de l’article L. 741-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, de rechercher concrètement les diligences accomplies par l’administration pour permettre que l’étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ (ce qui requiert dès le placement en rétention, une saisine effective des services consulaires étrangers compétents pour rendre possible le retour), en revanche les démarches liées à l’organisation interne de l’administration centrale française (telles que les saisines de l’Unité Centrale d’Identification) ne constituent pas une diligence suffisante en vue de l’exécution de la mesure d’éloignement (1re Civ., 12 juillet 2017, pourvoi n° 16-23.458, Bull. 2017, I, n° 175).

S’il n’y a pas lieu d’imposer la réalisation d’actes sans véritable effectivité, tels que des relances auprès des consulats, dès lors que celle-ci ne dispose d’aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires (1re Civ., 9 juin 2010, pourvoi n° 09-12.165, Bull. 2010, I, n° 129), en revanche le juge est tenu de vérifier que les autorités étrangères ont été requises de manière effective.

En l’espèce, le Préfet des Yvelines a saisi le 9 décembre 2024 l’Unité Centrale de l’Identification (UCI) aux fins d’obtenir une audition consulaire des autorités ivoiriennes, laquelle a eu lieu le 26 décembre 2024.

A l’issue de son audition, il est apparu que M. [R] serait de nationalité malienne et non comme étant de nationalité ivoirienne.

Les autorités consulaires maliennes exigeant aussi le recours à un représentant de l’UCI, il est établi que le préfet a sollicité celles-ci par courrier du 02 janvier 2025 en vue de l’audition de M. [R] et a demandé la délivrance d’un laissez-passer. En conséquence, il y a lieu de constater que les autorités étrangères ont été requises de manière effective, et que le délai compris entre l’audition de M. [R] le 26 décembre 2024 et le courrier adressé le 02 janvier 2025 au consulat malien, délai qui comprend un jour férié est raisonnable.

Le fait que la délivrance d’un laissez-passer permettant la mise en ‘uvre immédiate du retour ne soit pas intervenue lors de la première période de rétention n’est pas un obstacle à la poursuite de la rétention dès lors que l’éloignement demeure une perspective et qu’en l’espèce c’est l’absence de document de voyage qui est à l’origine du retard dans la mise en ‘uvre du départ.

Le moyen sera rejeté.

En conséquence, il y a lieu de confirmer l’ordonnance entreprise.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare le recours recevable en la forme,

Rejette le moyen soulevé

Confirme l’ordonnance entreprise.

Fait à VERSAILLES le 8 décembre 2025 à h

La Greffière, La Conseillère,

Reçu copie de la présente décision et notification de ce qu’elle est susceptible de pourvoi en cassation dans un délai de 2 mois selon les modalités laissée ci-dessous.

l’intéressé, l’interprète, l’avocat

POUR INFORMATION : le délai de pourvoi en cassation est de DEUX MOIS à compter de la présente notification.

Article R 743-20 du CESEDA :

‘ L’ordonnance du premier président de la cour d’appel ou de son délégué n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui l’a placé en rétention et au ministère public. ‘.

Articles 973 à 976 du code de procédure civile :

Le pourvoi en cassation est formé par déclaration au greffe de la Cour de Cassation, qui est signée par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation ;

La déclaration est remise au secrétariat-greffe en autant d’exemplaires qu’il y a de défendeurs, plus deux ;


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