Prolongation exceptionnelle de la rétention administrative pour raisons d’ordre public.

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Prolongation exceptionnelle de la rétention administrative pour raisons d’ordre public.

L’Essentiel : Monsieur [P] [B], ressortissant soudanais, fait l’objet d’un arrêté d’expulsion et d’une rétention administrative. Le Préfet de [Localité 6] a demandé le 13 janvier 2025 une prolongation de cette rétention pour quinze jours, invoquant des raisons de sécurité et des antécédents judiciaires. Son avocat, Me Adrien MARCOURT, a plaidé contre cette prolongation, soulignant l’absence de perspectives d’éloignement et les difficultés personnelles de Monsieur [B]. Malgré ces arguments, le tribunal a décidé d’accorder la prolongation, considérant les menaces à l’ordre public et l’absence de garanties pour son éloignement. La décision a été notifiée à l’intéressé.

Contexte Juridique

L’affaire concerne Monsieur [P] [B], un ressortissant soudanais, qui fait l’objet d’un arrêté d’expulsion prononcé par le Préfet de [Localité 4] le 28 avril 2022, ainsi que d’un placement en rétention administrative décidé le 14 novembre 2024 par le Préfet de [Localité 6]. La rétention a été initialement fixée à quatre jours, mais des demandes de prolongation ont été formulées par l’administration.

Demande de Prolongation de Rétention

Le 13 janvier 2025, le Préfet de [Localité 6] a sollicité une prolongation de la rétention administrative de Monsieur [B] pour une durée maximale de quinze jours, invoquant des raisons de sécurité et l’absence de garanties de représentation de l’intéressé. Cette demande a été justifiée par des antécédents judiciaires de Monsieur [B], qui a été condamné pour des faits de violence et de menaces à l’encontre de représentants de l’autorité publique.

Observations de l’Intéressé et de son Avocat

Monsieur [B] a exprimé le souhait d’être assisté par un avocat, évoquant des circonstances personnelles difficiles, notamment la séparation de ses enfants en France. Son avocat, Me Adrien MARCOURT, a plaidé contre la prolongation de la rétention, soulignant l’absence de perspectives réelles d’éloignement vers le Soudan et la nécessité de prendre en compte les éléments de sa situation personnelle.

Arguments de la Préfecture

L’avocat de la Préfecture a soutenu que la prolongation de la rétention était justifiée par des considérations d’ordre public, citant les condamnations passées de Monsieur [B] et son non-respect des mesures d’assignation à résidence. Il a également mentionné que l’administration avait pris des mesures diligentes pour organiser son éloignement.

Décision du Tribunal

Le tribunal a décidé d’accorder la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [B] pour une durée maximale de quinze jours, en raison des menaces qu’il représente pour l’ordre public et de l’absence de garanties suffisantes pour son éloignement. La décision a été notifiée à l’intéressé, qui a été informé de ses droits d’appel.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le CESEDA ?

La prolongation de la rétention administrative est régie par l’article L. 742-5 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA). Cet article stipule que, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de la durée maximale prévue à l’article L. 742-4.

Les conditions de prolongation sont les suivantes :

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.

Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.

Quels sont les droits de l’étranger en rétention administrative ?

Les droits de l’étranger en rétention administrative sont précisés dans les articles L. 743-9 et L. 743-24 du CESEDA. Ces articles stipulent que l’étranger a le droit d’être informé de ses droits pendant la rétention, ainsi que des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant.

L’article L. 743-9 précise que l’étranger doit être informé de la possibilité de faire appel de la décision de rétention. Il doit également être assisté d’un avocat, ce qui a été respecté dans le cas de Monsieur [B], qui a exprimé le souhait d’être assisté d’un avocat.

De plus, l’article L. 743-24 souligne que l’étranger a le droit d’être entendu et de présenter ses observations. Dans cette affaire, Monsieur [B] a été entendu en ses observations, ce qui témoigne du respect de ses droits.

Comment le juge évalue-t-il la menace à l’ordre public dans le cadre de la rétention ?

L’évaluation de la menace à l’ordre public est une prérogative du juge, qui se base sur les éléments fournis par l’administration. Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, l’étranger peut être considéré comme représentant une menace pour l’ordre public s’il a été condamné pour des faits graves.

Dans le cas de Monsieur [B], il a été condamné en 2021 pour des faits de violence sur une personne dépositaire de l’autorité publique, et en janvier 2023 pour une récidive de ces mêmes faits, ainsi que pour des menaces de mort. Ces éléments ont conduit le juge à conclure qu’il continue de représenter une menace pour l’ordre public.

Le juge doit donc prendre en compte ces condamnations et les circonstances entourant l’affaire pour décider de la prolongation de la rétention administrative.

Quelles sont les implications de l’avis de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) sur la décision de rétention ?

L’avis de la CNDA, bien qu’important, n’est pas déterminant pour le juge judiciaire dans le cadre de la rétention administrative. En effet, le juge n’est pas compétent pour se prononcer sur la question du pays de destination de l’étranger.

Dans cette affaire, l’administration a produit un avis de la CNDA favorable à l’annulation de l’arrêté fixant le pays de destination. Cependant, le juge a rappelé qu’il ne pouvait pas se prononcer sur cette question, mais devait se concentrer sur les éléments relatifs à la rétention.

Ainsi, même si l’avis de la CNDA peut influencer la situation de l’étranger, il ne constitue pas un obstacle à la prolongation de la rétention si d’autres éléments, tels que la menace à l’ordre public, sont établis.

Quels recours sont disponibles pour l’étranger en rétention administrative ?

L’étranger en rétention administrative dispose de plusieurs recours, comme le stipule l’article L. 743-9 du CESEDA. Il a le droit de faire appel de la décision de rétention devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

La déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen, y compris par mail. L’étranger doit être informé de cette possibilité, ainsi que des délais pour faire appel, qui sont généralement de vingt-quatre heures après le prononcé de la décision.

Il est également important de noter que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué. Cela signifie que, dans la plupart des cas, la rétention se poursuit jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur l’appel.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE PROLONGATION DE RETENTION

MINUTE: 25/ 72
Appel des causes le 14 Janvier 2025 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 25/00157 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76C3Y

Nous, Madame PIROTTE Carole, Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assistée de Madame Marie TIMMERMAN, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;

Vu l’article R. 213-12-2 du code de l’organisation judiciaire ;

En présence de [T] [E], interprète en langue arabe, serment préalablement prêté ;

En présence de Maître Elif ISCEN représentant de M. PREFET DU [Localité 6] ;

Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;

Monsieur [P] [B]
Alias [W] [Z]
de nationalité Soudanaise
né le 01 Janvier 1996 à [Localité 3] (SOUDAN), a fait l’objet :

– d’un arrêté d’expulsion prononcé le 28 avril 2022 oar M. PREFET DE [Localité 4] qui lui a été notifié le même jour
– d’un arrêté ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcée le 14 novembre 2024 par M. PREFET DU [Localité 6] , qui lui a été notifié le 14 novembre 2024 à 09h50 .

Par requête du 13 Janvier 2025, arrivée par courrier électronique à 15h29 M. PREFET DU [Localité 6] invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de QUATRE JOURS, prolongé par un délai de VINGT-SIX JOURS selon l’ordonnance du 18 novembre 2024, prolongé par un délai de TRENTE JOURS selon l’ordonnance du 13 décembre 2024, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de QUINZE JOURS maximum.

En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Adrien MARCOURT, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations

L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. J’ai quitté le Soudan par rapport à la guerre. Les nations unis m’ont ramené en France. Mes enfants sont en France. Ca fait 3 ans que je leur parle plus. Ils sont à [Localité 2].

Me Adrien MARCOURT entendu en ses observations ; il m’a été communiqué par FTA un avis de la Cour national du droit d’asile. Je sais que vous n’êtes pas juge du pays de destination. Cela pose la question de la possibilité des perspectives réelles d’éloignement de Monsieur vers le Soudan. On est sur une prolongation exceptionnelle. Je pense que vous devez tenir compte de cet élément pour prendre votre décision. Je vous demande de ne pas faire droit à la demande de la préfecture.

L’avocat de la Préfecture entendu en ses observations ; sollicite la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé sur le fondement de L. 742-5 du CESEDA. On vous soutient qu’il n’y a pas de perspective d’éloignement en vertu de l’avis évoqué concernant le renvoi vers le soudan. Vous n’êtes pas le juge du pays de renvoi. Le TA est saisi sur l’arrêté d’expulsion. Une des conditions de L. 742-5 suffit pour demande la prolongation exceptionnelle. Monsieur constitue une menace à l’ordre public. Il a fait l’objet de condamnation en 2021 et 2023. Il était assigné à résidence et n’a pas respecté son assignation. Il ne présente aucune garantie de représentation. L’administration a été diligente puisqu’il y a un LPC au dossier et une demande de vol.

MOTIFS

Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours:
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai. Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public. L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.

Monsieur [B] a fait l’objet de deux prolongations le 18 novembre 2024 et le 13 décembre 2024. L’administration justifie de diligences en vue de son éloignement. Elle produit aussi l’avis de la CNDA qui est favorable à l’annulation de l’arrêté fixant le pays de destination. Toutefois le juge judiciaire n’est pas compétent sur la question du pays de destination. Par ailleurs, il est établi que Monsieur [B] a été condamné en 2021 pour notamment des faits de violence sur personne dépositaire de l’autorité publique puis en janvier 2023 pour une récidive des mêmes faits outre des menaces de mort sur personne dépositaire de l’autorité publique. Il y a lieu de considérer qu’il continue à ce titre de représenter, au sens de l’article L. 742-5 du CESEDA, une menace pour l’ordre public.

L’intéressé ne présente toujours pas de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière, des mesures de surveillance sont nécessaires.

Eu égard aux nécessités invoquées par Monsieur le Préfet, il convient d’accorder la prorogation demandée.

PAR CES MOTIFS

Autorisons l’autorité administrative à retenir Monsieur [P] [B] dans les locaux ne relevant pas de l’Administration pénitentiaire pour une prolongation de rétention administrative d’une durée maximale de QUINZE JOURS à compter du 13 janvier 2025

NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 5] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI (numéro de FAX du greffe de la Cour d’Appel: [XXXXXXXX01].) ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

L’avocat de la Préfecture, L’avocat, Le Greffier, Le Juge,
en visio

décision rendue à 10h46
Ordonnance transmise ce jour à M. PREFET DU [Localité 6]
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 25/00157 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76C3Y
Décision notifiée à …h…
L’intéressé, L’interprète,


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