L’Essentiel : M. [P] [Z], né en Algérie en 2003, est en rétention administrative. Représenté par Me Camille DACHARY, il conteste la prolongation de sa rétention demandée par le préfet de la Drôme. Le tribunal, après avoir examiné les plaidoiries et les préoccupations de l’intéressé, conclut à la recevabilité de la requête préfectorale. Malgré les inquiétudes soulevées concernant le suivi médical, le tribunal rappelle que les preuves fournies sont insuffisantes. Finalement, il ordonne la prolongation de la rétention de M. [P] [Z] pour trente jours supplémentaires, confirmant ainsi la régularité de la procédure engagée.
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Contexte de l’affaireM. [P] [Z], né le 17 mai 2003 en Algérie, est actuellement maintenu en rétention administrative. Il est représenté par Me Camille DACHARY, avocat au barreau de Lyon, tandis que le préfet de la Drôme est représenté par Maître Geoffrey GOIRAND. L’audience se déroule en présence d’un interprète assermenté en langue arabe. Déroulement des débatsLors de l’audience, le juge rappelle l’identité des parties et informe [P] [Z] de ses droits en matière de rétention. Après avoir entendu les plaidoiries des avocats et les explications de l’intéressé, l’incident est joint au fond. Le préfet a demandé la prolongation de la rétention administrative de [P] [Z]. Décisions antérieuresLe tribunal judiciaire de Valence a condamné [P] [Z] à une interdiction du territoire français de dix ans, avec exécution provisoire. Par la suite, une décision administrative a ordonné son placement en rétention à partir du 13 décembre 2024, suivie d’une prolongation par le juge de Lyon le 16 décembre 2024. Recevabilité de la requêteLe conseil de [P] [Z] conteste la recevabilité de la requête préfectorale, arguant que le registre de rétention ne mentionne pas correctement l’état civil de l’intéressé. Cependant, le tribunal conclut que la requête est recevable, car elle est motivée et accompagnée des pièces justificatives requises. Régularité de la procédureM. [P] [Z] soulève des préoccupations concernant l’absence de suivi médical adéquat durant sa rétention. Toutefois, le tribunal rappelle que le juge ne peut se substituer aux instances médicales et que l’intéressé n’a pas fourni de preuves suffisantes pour étayer ses allégations. Prolongation de la rétentionLe tribunal examine les conditions de prolongation de la rétention selon le CESEDA. Il constate que la préfecture a effectué des démarches pour obtenir les documents de voyage nécessaires à l’éloignement de [P] [Z], mais que ces démarches n’ont pas abouti. En conséquence, la prolongation de la rétention est justifiée. Conclusion de la décisionLe tribunal rejette les moyens d’irrecevabilité, déclare la requête du préfet recevable, confirme la régularité de la procédure et ordonne la prolongation de la rétention de [P] [Z] pour une durée supplémentaire de trente jours au centre de rétention de [Localité 2]. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de recevabilité de la requête en prolongation de la rétention administrative selon le CESEDA ?La recevabilité de la requête en prolongation de la rétention administrative est régie par plusieurs articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Selon l’article L. 744-2 du CESEDA, il est stipulé que : « Il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l’état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. » De plus, l’article R. 743-2 du CESEDA précise que : « À peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L. 744-2 du CESEDA. » Dans le cas présent, le conseil de M. [P] [Z] a soulevé l’irrecevabilité de la requête en raison d’un état civil incomplet dans le registre. Cependant, le tribunal a constaté que les mentions exigées par l’article L. 744-2 étaient présentes, ce qui a conduit à rejeter le moyen d’irrecevabilité. Quelles sont les irrégularités pouvant être soulevées lors de la prolongation de la rétention administrative ?L’article L. 743-11 du CESEDA stipule que : « À peine d’irrecevabilité prononcée d’office, aucune irrégularité antérieure à l’audience relative à la première prolongation de la rétention ne peut être soulevée lors de l’audience relative à la seconde prolongation. » Cela signifie que les irrégularités qui auraient pu être soulevées lors de la première prolongation ne peuvent pas être invoquées lors de la seconde. Dans cette affaire, M. [P] [Z] a tenté de contester l’absence de suivi médical effectif depuis la dernière prolongation. Toutefois, le tribunal a rappelé que le juge ne dispose d’aucune compétence médicale et ne peut se substituer aux instances médicales qui assurent la prise en charge durant la rétention. Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le CESEDA ?L’article L. 741-3 du CESEDA précise que : « Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet. » De plus, l’article L. 742-4 du CESEDA énonce les conditions dans lesquelles un magistrat peut être saisi pour prolonger la rétention au-delà de trente jours. Ces conditions incluent : 1. En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ; Dans le cas présent, le tribunal a constaté que la Préfecture avait effectué des diligences pour obtenir les documents nécessaires, mais que ceux-ci n’avaient pas été délivrés, ce qui a justifié la prolongation de la rétention pour une durée supplémentaire de trente jours. |
de LYON
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON
N° RG 25/00114 – N° Portalis DB2H-W-B7J-2HIS
ORDONNANCE STATUANT SUR UNE SECONDE DEMANDE DE PROLONGATION D’UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE
Le 12 janvier 2025 à 16 Heures 25,
Nous, Jérôme WITKOWSKI, Juge près le Tribunal judiciaire de LYON, assisté de Ingrid JENDRZEJAK, greffier.
Vu la loi n°2018-778 du 10 septembre 2018 ;
Vu le décret d’application n°2018-1159 du 14 décembre 2018 ;
Vu les anciens articles L. 552-1, L. 552-2, L. 552-7, et R. 552-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;
Vu les articles L. 742-1 à L. 742-10 et notamment les articles L. 742-1, L. 742-2, L. 742-4, L. 742-5, L. 742-6, L. 742-7, les articles L. 743-3 à L. 743-18 et notamment les articles L. 743-4, L. 743-6, L. 743-7, L. 743-9, les articles L. 743-19, L. 743-20, L. 743-24, L. 743-25, et R. 743-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;
Vu la décision de placement en rétention de l’autorité administrative prise le 13 décembre 2024 par LE PREFET DE LA DROME à l’encontre de [P] [Z] ;
Vu l’ordonnance rendue le 16/12/2024 par le juge du tribunal judiciaire de LYON prolongeant la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-six jours ;
Vu la requête de l’autorité administrative en date du 10 Janvier 2025 reçue et enregistrée le 11 Janvier 2025 à 14 heures 49 (cf. timbre du greffe) tendant à la prolongation de la rétention de [P] [Z] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée supplémentaire de trente jours ;
PARTIES
M. LE PREFET DE LA DROME préalablement avisé, représenté par Maître Geoffrey GOIRAND, avocat au barreau de VILLEFRANCHE SUR SAONE, susbtituant Maître Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON
[P] [Z]
né le 17 Mai 2003 à [Localité 1] – ALGERIE
préalablement avisé,
actuellement maintenu en rétention administrative
présent à l’audience, assisté de son conseil Me Camille DACHARY, avocat au barreau de LYON, de permanence,
en présence de Mme [Y] [I], interprète assermentée en langue arabe, déclarée comprise par la personne retenue à l’inverse du français interprète inscrit sur la liste de la cour d’appel de LYON,
LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE n’est ni présent ni représenté,
DEROULEMENT DES DEBATS
A l’audience publique, le juge a procédé au rappel de l’identité des parties ;
Après avoir rappelé à la personne retenue les droits qui lui sont reconnus par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pendant sa rétention et l’avoir informée des possibilités et des délais de recours contre toutes décisions le concernant ;
Après dépôt de conclusions par le conseil de l’intéressé, jointes au dossier et évoquées in limine litis, et après avoir entendu les parties, le défendeur ayant eu la parole en dernier, l’incident est joint au fond ;
Maître Geoffrey GOIRAND, avocat au barreau de VILLEFRANCHE SUR SAONE, susbtituant Maître Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON représentant le préfet a été entendu en sa plaidoirie ;
[P] [Z] a été entendu en ses explications ;
Me Camille DACHARY, avocat au barreau de LYON, avocat de [P] [Z], a été entendu en sa plaidoirie ;
Attendu qu’une décision du tribunal judiciaire de VALENCE en date du 22 août 2024 a condamné [P] [Z] à une interdiction du territoire français de 10 ans, cette mesure étant assortie de l’exécution provisoire conformément aux dispositions de l’article 471 du code de procédure pénale ;
Attendu que par décision en date du 13 décembre 2024 notifiée le 13 décembre 2024, l’autorité administrative a ordonné le placement de [P] [Z] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire à compter du 13 décembre 2024;
Attendu que par décision en date du 16/12/2024, le juge de LYON a ordonné la prolongation de la rétention administrative de [P] [Z] pour une durée maximale de vingt-six jours ;
Attendu que, par requête en date du 11 Janvier 2025 , reçue le 11 Janvier 2025, l’autorité administrative nous a saisi aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de trente jours ;
RECEVABILITE DE LA REQUETE
Attendu que selon l’article L.744-2 du CESEDA, il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l’état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention.
Attendu que selon l’article R.743-2 du CESEDA, à peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L.744-2 du CESEDA ;
Attendu que le conseil de monsieur [Z] soulève l’irrecevabilité de la requête de l’autorité administrative au motif que la copie du registre prévu à l’article L.744-2 du CESEDA qui l’accompagne mentionne un état civil incomplet de l’intéressé (aucune mention de la date et du lieu de naissance) et n’a pas été actualisé en ce qu’il ne comporte aucune observation relative aux conditions du placement et du maintien en rétention, en particulier s’agissant de la saisine du médecin aux fins de vérification de la compatibilité de l’état de santé avec la rétention suggérée par le juge des libertés de la détention lors de l’audience de première prolongation.
Attendu cependant que les informations complémentaires de l’état civil tenant à la date et au lieu de naissance de l’intéressé, ainsi que la mention des consultations médicales éventuellement intervenues en cours de rétention, si elles constituent des données à caractère personnel et des informations relevant du traitement automatisé autorisé par l’arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention et du traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative » (LOGICRA), elles ne sont en revanche pas des mentions expressément exigées par l’article L.744-2 du CESEDA.
Attendu que la requête de l’autorité administrative est motivée, datée, signée mais qu’en l’état, de toutes les pièces justificatives utiles dont la copie du registre prévu à l’article L. 744-2 du CESEDA, qui comporte les mentions exigées par cette disposition ;
Qu’en conséquence, le moyen tiré de l’irrecevabilité de la requête préfectorale sera rejeté.
REGULARITE DE LA PROCEDURE
Attendu qu’en application de l’article L. 743-11 du CESEDA, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, aucune irrégularité antérieure à l’audience relative à la première prolongation de la rétention ne peut être soulevée lors de l’audience relative à la seconde prolongation ;
Attendu que monsieur [P] [Z] invoque l’absence de suivi médical effectif et de traitement sérieux de ses problèmes de santé au centre de rétention depuis la dernière prolongation du 16 décembre 2024, confirmée par la cour d’appel le 18 décembre 2024 ;
Attendu que les étrangers placés en rétention peuvent demander tout examen au médecin du centre de rétention administrative qui est habilité à prendre en charge l’étranger selon les dispositions de l’article R.744-18 du CESEDA;
Attendu que monsieur [P] [Z] considère qu’il doit bénéficier de soins et indique à l’audience qu’il conteste l’avis médical du médecin du centre de rétention administrative qui lui a dit que ses troubles étaient bénins et lui a prescrit un traitement qui ne calme pas ses douleurs.
Attendu cependant que s’il appartient au juge de vérifier que les droits liés à l’accès aux soins sont respectés au sein du centre de rétention, le juge ne dispose d’aucune compétence médicale et ne saurait se substituer aux instances médicales et administratives qui seules assurent la prise en charge médicale durant la rétention administrative et apprécient les actes à accomplir.
Attendu que l’intéressé n’a joint à sa contestation aucune pièce de nature à démontrer une atteinte à son accès effectif aux soins et qu’il se borne plutôt à contester un avis médical intervenu en début de rétention ;
Attendu enfin que la personne retenue, pleinement informée de ses droits lors la notification de son placement, n’a cessé d’être placée en état de les faire valoir depuis son arrivée au lieu de rétention, la régularité de la procédure doit être constatée.
PROLONGATION DE LA RETENTION
Attendu qu’aux termes de l’article L.741-3 du CESEDA, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet.
Attendu qu’aux termes de l’article L742-4 du CESEDA, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ;
2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;
b) de l’absence de moyens de transport.
L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours.
Attendu qu’en l’espèce, il résulte de la procédure que la Préfecture a saisi les autorités consulaires algériennes le 21 novembre 2024 aux fins d’identification ; qu’après trois relances en date du 12 décembre 2024, 27 décembre 2024 et 30 décembre 2024, les autorités algériennes l’ont informé le 9 janvier 2025 que les recherches effectuées ne permettaient pas d’établir que l’intéressé fait partie de leurs ressortissants ; qu’à la suite et dès le 10 janvier 2025, elle a saisi les autorités consulaires tunisiennes pour une éventuelle reconnaissance ; qu’il est donc établi, ce qui n’est pas contesté à l’audience par Monsieur [Z], que le défaut de délivrance des documents de voyage n’est pas imputable à l’autorité préfectorale qui justifie de ses diligences ; qu’en raison de ce défaut de délivrance, la décision d’éloignement exécutoire à l’encontre de Monsieur [Z] n’a pu être exécutée ; que la condition prévue à l’article L742-4 du CESEDA est donc réunie sans qu’il soit nécessaire d’examiner celle tirée de la menace à l’ordre public ;
Attendu que la seconde prolongation de la rétention étant de nature à permettre l’exécution de la mesure d’éloignement, il convient, par conséquent, de faire droit à la requête en date du 11 Janvier 2025 du PREFET DE LA DROME et de prolonger la rétention de [P] [Z] pour une durée supplémentaire de trente jours ;
Statuant par mise à disposition au greffe en premier ressort, par décision assortie de l’exécution provisoire ;
REJETONS les moyens d’irrecevabilité ;
DECLARONS la requête en prolongation de la rétention administrative du préfet du PREFET DE LA DROME à l’égard de [P] [Z] recevable ;
DÉCLARONS la procédure diligentée à l’encontre de [P] [Z] régulière ;
ORDONNONS LA PROLONGATION DE LA RÉTENTION de [P] [Z] au centre de rétention de [Localité 2] pour une durée de trente jours supplémentaires ;
LE GREFFIER LE JUGE
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