L’Essentiel : L’affaire débute avec un arrêté du 28 février 2023, ordonnant à X de quitter le territoire national dans un délai de trente jours. Le 26 octobre 2024, le Préfet de l’Hérault impose une rétention de quatre jours, prolongée par le tribunal judiciaire de Montpellier. Le 8 janvier 2025, une requête pour prolongation de la rétention est déclarée irrecevable. Le même jour, le Procureur interjette appel, suspendant les effets de la décision. Lors de l’audience, X exprime son souhait de retourner en Syrie. Finalement, le tribunal prolonge la rétention de quinze jours, notifiant la décision conformément à la législation.
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Arrêté de Quitter le TerritoireL’affaire débute avec un arrêté du 28 février 2023 émis par le Préfet du Rhône, imposant à X, se disant [N] [R], l’obligation de quitter le territoire national dans un délai de trente jours, accompagné d’une interdiction de retour d’une durée d’un an. Rétention AdministrativeLe 26 octobre 2024, un nouvel arrêté du Préfet de l’Hérault ordonne la rétention de X pour une durée de quatre jours dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire. Cette mesure est prolongée par plusieurs ordonnances du tribunal judiciaire de Montpellier, d’abord pour vingt-six jours, puis pour trente jours, et enfin pour quinze jours. Requête de ProlongationLe 8 janvier 2025, le Préfet de l’Hérault soumet une requête pour prolonger la rétention de X de quinze jours supplémentaires. Cependant, le 9 janvier 2025, le magistrat du tribunal judiciaire déclare cette requête irrecevable et n’y donne pas suite. Appel et SuspensionLe même jour, le Procureur de la République de Montpellier interjette appel de l’ordonnance, demandant un effet suspensif. L’ordonnance du magistrat délégué suspend les effets de la décision du 9 janvier 2025, et une audience est programmée pour le 10 janvier 2025. Audience et DéclarationsLors de l’audience, X confirme son identité et exprime son désir de retourner en Syrie pour des raisons de santé. Le Procureur et le représentant de la préfecture demandent l’infirmation de l’ordonnance initiale, tandis que l’avocat de X plaide pour la confirmation de la décision de rejet de prolongation de la rétention. Recevabilité de l’AppelL’appel est jugé recevable, car il a été formalisé dans les délais requis. Le tribunal examine la requête de prolongation de la rétention, notant que la première page de la requête initiale était manquante, mais que la version complète a été fournie par le ministère public. Décision FinaleLe tribunal décide d’infirmer l’ordonnance initiale et d’ordonner la prolongation de la rétention de X pour une durée de quinze jours, prenant effet à l’expiration du délai de quatre jours suivant la notification de la décision. La décision est notifiée conformément aux dispositions légales. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la recevabilité de l’appelL’appel formé par Monsieur le Procureur de la République de Montpellier le 9 janvier 2025 est recevable. En effet, selon l’article R 743-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), l’appel doit être interjeté dans un délai de 24 heures suivant la notification de l’ordonnance contestée. Cet article précise que : « L’appel est formé dans les vingt-quatre heures suivant la notification de l’ordonnance. » Dans ce cas, l’appel a été effectué dans le délai imparti, ce qui le rend recevable. De plus, l’article R 743-11 du même code stipule que : « L’appel est suspensif de l’exécution de l’ordonnance. » Ainsi, l’appel interjeté par le Procureur a suspendu les effets de l’ordonnance initiale, permettant une réévaluation de la situation de l’étranger en rétention. Sur la requête de prolongation de la rétentionLa requête de prolongation de la rétention administrative de X se disant [N] [R] doit être examinée à la lumière de l’article R 743-2 du CESEDA, qui impose que la requête soit motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles. Cet article dispose que : « À peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles. » Dans cette affaire, le premier juge a constaté que la requête initiale ne comportait que la première page, ce qui a conduit à une irrecevabilité. Cependant, en appel, le ministère public a produit une version complète de la requête, signée et conforme aux exigences légales. Il est donc établi que, bien que la requête ait été initialement incomplète, elle a été régularisée et était recevable pour examen. Sur les conditions de prolongation de la rétentionL’article L 742-5 du CESEDA, modifié par la loi n° 2024-42, précise les conditions dans lesquelles un magistrat peut être saisi pour prolonger la rétention au-delà de la durée maximale. Cet article énonce que : « À titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours… » Les situations énumérées incluent l’obstruction à l’exécution de la décision d’éloignement ou l’absence de délivrance des documents de voyage par le consulat. Dans le cas présent, la préfecture a justifié sa demande de prolongation par l’absence de délivrance d’un laissez-passer consulaire, ce qui constitue une des conditions prévues par la loi pour prolonger la rétention. Sur la décision de prolongation de la rétentionLa décision de prolongation de la rétention de X se disant [N] [R] a été fondée sur les éléments présentés par la préfecture et la régularité de la requête. L’article L 742-5 précise que : « Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours. » Ainsi, la cour a ordonné la prolongation de la mesure de rétention pour une durée de 15 jours, prenant effet à l’expiration du délai de 4 jours suivant la notification de la décision. Cette décision est conforme aux dispositions légales et garantit le respect des droits de l’étranger tout en permettant à l’administration de poursuivre les démarches nécessaires à son éloignement. |
N° RG 25/00025 – N° Portalis DBVK-V-B7J-QQJP
O R D O N N A N C E N° 2025 – 29
du 10 Janvier 2025
SUR LA QUATRIEME PROLONGATION DE RETENTION D’UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L’ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
dans l’affaire entre,
D’UNE PART :
Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Damien KINCHER avocat général
Appelant,
D’AUTRE PART :
X se disant [N] [R]
né le 16 mai 2002 à [Localité 2] ( SYRIE )
retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire,
Comparant, assisté par Maître Dieudonné GHIAMAMA MOUELET , avocat commis d’office
Monsieur le Préfet de de l’Hérault
Représenté par [S] [M] dûment habilité,
Nous, conseiller à la cour d’appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Johanna CAZAUTET, greffière des services judiciaires,
Vu l’arrêté du 28 février 2023, de Monsieur le Préfet du Rhône portant obligation de quitter le territoire national avec délai de trente jours assortie d’une interdcition de retour d’une durée de un an pris à l’encontre de X se disant [N] [R],
Vu l’arrêté du 26 octobre 2024 de Monsieur le Préfet de l’Hérault ordonnant la rétention de X se disant [N] [R], pendant 4 jours dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire,
Vu l’ordonnance du 30 octobre 2024 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de MONTPELLIER chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés prolongeant la rétention administrative de X se disant [N] [R] pour une durée de vingt six jours,
Vu l’ordonnance du 25 novembre 2024 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de MONTPELLIER chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés prolongeant la rétention administrative de X se disant [N] [R] pour une durée de trente jours,
Vu l’ordonnance du 25 décembre 2024 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de MONTPELLIER chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés prolongeant la rétention administrative de X se disant [N] [R] pour une durée de quinze jours,
Vu la requête de Monsieur le Préfet de l’Hérault en date du 8 janvier 2025 tendant à la prolongation de la rétention de X se disant [N] [R] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée quinze jours ;
Vu l’ordonnance du 9 Janvier 2025 à 11h25 notifiée le même jour à la même heure, du magistrat du siège du tribunal judiciaire de MONTPELLIER chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés qui a :
– déclaré irrecevable la requête de Monsieur le Préfet de l’Hérault
– et dit en conséquence n’y avoir lieu à statuer sur la demande de prolongation de la rétention administrative de X se disant [N] [R] ,
Vu la déclaration d’appel assortie d’une demande tendant à donner un effet suspensif à l’ordonnance du 09 Janvier 2025 par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de MONTPELLIER chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés , faite le 09 Janvier 2025 par Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER, transmise au greffe de la cour d’appel de Montpellier le même jour à 14h40,
Vu l’ordonnance du magistrat délégué par le premier président en date 09 janvier 2025 qui a suspendu les effets de l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de MONTPELLIER chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés en date du 09 Janvier 2025 ;
Vu les courriels adressés le 09 Janvier 2025 au Ministère Public, à Monsieur le Préfet de de l’Hérault, à X se disant [N] [R] et à son conseil, les informant que l’audience sera tenue le 10 Janvier 2025 à 09 H 00.
L’avocat et l’appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, entre la salle d’audience de la cour d’appel de Montpellier et la salle de visio conférence du centre de rétention administrative de [Localité 4], les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l’entretien, en la seule présence de l’interprète , et ce, sur le temps de l’audience fixée, avec l’accord du délégué du premier président de la cour d’appel de Montpellier.
L’audience publique initialement fixée à 9 H 00 a commencé à 9 H 10.
PRETENTIONS DES PARTIES
X se disant [N] [R] confirme son identité telle que mentionnée dans l’ordonnance entreprise et déclare : « Je suis arrivé en France en 2019, je viens pour chercher une vie stable, avec mon fils de 3 ans. Je vis actuellement chez ma cousine, je n’ai jamais eu de papier. Je voudrai rentrer par mes propres moyens, j’ai des problèmes de santé. Je veux rentrer en Syrie. ».
Le représentant de Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER sollicite l’infirmation de l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de MONTPELLIER chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés qui a rejeté la demande de prolongation en rétention de l’étranger.
Monsieur le représentant de la préfecture [Localité 1], demande l’infirmation de l’ordonnance déférée. Il indique que la requête de la Préfecture est duement signée. La pièce manquante est fournie aujourd’hui. L’irrecevabilité doit donc être levée.
L’avocat, Me Dieudonné michel GHIAMAMA MOUELET sollicite la confirmation de l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de MONTPELLIER chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés qui a rejeté la demande de prolongation en rétention de l’étranger. ART L743-2 du CESADA, la requête doit être signée avec le nom de la personne qui l’adresse, le défaut entraine l’irrecevabilité et la Cour de cassation l’a précisé. La régularisation lors de l’audience n’est pas possible, ici cela fausse les débats. Je vous demande de confirmer le jugement de première instance et de lever la rétention de Monsieur [N] qui veut repartir dans son pays par ses propres moyens.
X se disant [N] [R] a eu la parole en dernier et déclare : « Je veux vraiment rentrer par mes propres moyens, j’ai des problèmes de santé. »
Le conseiller indique que l’affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 4].
Sur la recevabilité de l’appel :
Le 9 Janvier 2025, à 14h40, Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER a formalisé appel motivé de l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de MONTPELLIER chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés du 09 Janvier 2025 notifiée à 12h09, soit dans les 24 heures de la notification de l’ordonnance querellée, qu’ainsi l’appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.
Sur la requête:
L’article R.743-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose qu’à peine d’irrecevabilité la requête est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles ;
Le premier juge a constaté que la requête ne comportait que la première page.
En cause d’appel, le ministère public produit la requête qui a été déposée en vue de la demande de la 4ème prolongation, fondée sur l’absence de délivrance d’un laissez-passer consulaire par les autorités du pays dont l’intéressé a la nationalité, qui est signée.
Si la requête a été déposée sans être complète, il ne peut se déduire de ce fait que celle-ci était incomplète à l’origine, laquelle était signée selon ce qu’indique le ministère public.
Dès lors, la requête était recevable et devait faire l’objet d’un examen.
L’article L 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile modifié par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 articles 37 et 40 dispose que :
« A titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours. »
L’autorité préfectorale a joint à l’appui de sa requête le jugement du tribunal correctionnel de Toulouse du 30 septembre 2020 portant interdiction judiciaire du territoire français pour 5 ans ainsi que la décision fixant le pays de renvoi du 5 mars 2021, la décision de placement en rétention, la procédure de retenue dont le procès-verbal d’audition de l’intéressé du 22 novembre 2024, les diligences consulaires effectuées, la délégation de signature ainsi qu’une copie du registre actualisé.
Eu égard à ce qui précède, la requête initiale est fondée et il y a lieu d’ordonner la prolongation de la mesure de rétention pour une durée de 15 jours.
Statuant publiquement,
Vu l’article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile,
Déclarons l’appel recevable,
Infirmons la décision déférée,
Et statuant à nouveau,
Ordonnons la prolongation pour une durée de 15 jours, de la mesure de placement en rétention de X se disant [N] [R], dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire et disons que la prolongation de la mesure de rétention prendra effet à l’expiration du délai de 4 jours suivant notification de la décision de placement en rétention.
Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l’article R 743-19 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile.
Fait à Montpellier, au palais de justice, le 10 Janvier 2025 à 14 heures 44.
La greffière, Le magistrat délégué,
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