Prolongation de la rétention administrative : enjeux de la mise en œuvre des mesures d’éloignement.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de la mise en œuvre des mesures d’éloignement.

L’Essentiel : Monsieur [V] [M], de nationalité marocaine, a été placé en rétention administrative le 26 septembre 2024, avec une obligation de quitter le territoire français. Le 24 novembre, le Préfet du Nord a demandé une prolongation de cette rétention pour obtenir un laissez-passer consulaire. Son avocate a contesté cette prolongation, arguant que le délai n’était pas respecté. Cependant, le juge a jugé que les conditions étaient remplies, notamment grâce à la reconnaissance par les autorités marocaines et la réservation d’un vol pour le 5 décembre. La prolongation a été autorisée pour quinze jours supplémentaires.

Contexte de l’affaire

Monsieur [V] [M], de nationalité marocaine, a été soumis à une obligation de quitter le territoire français, avec interdiction de retour et placement en rétention administrative pour quatre jours, le 26 septembre 2024. Cette décision a été notifiée le même jour.

Prolongation de la rétention

Le 24 novembre 2024, le Préfet du Nord a demandé une prolongation de la rétention administrative de l’intéressé, initialement fixée à quatre jours, pour une durée maximale de quinze jours. Cette demande a été motivée par la nécessité de maintenir l’intéressé en rétention jusqu’à l’obtention d’un laissez-passer consulaire (LPC) pour son retour au Maroc.

Observations de l’intéressé et de son avocat

Monsieur [V] [M] a exprimé le souhait d’être assisté par un avocat, sans faire d’autres déclarations. Son avocate, Me Anne-Sophie CADART, a contesté la prolongation, arguant que la condition de délai n’était pas remplie, malgré un vol prévu pour le 5 décembre.

Arguments de la Préfecture

L’avocat de la Préfecture a soutenu que la prolongation était justifiée, affirmant que le LPC serait délivré 48 heures avant le vol, et que les autorités marocaines avaient déjà reconnu l’intéressé comme leur ressortissant.

Décision du juge

Le juge a constaté que les conditions pour prolonger la rétention étaient remplies, notamment en raison de la reconnaissance par les autorités marocaines et de la réservation d’un vol pour le 5 décembre. Il a donc autorisé la prolongation de la rétention administrative pour une durée maximale de quinze jours à compter du 25 novembre 2024.

Notification de la décision

La décision a été notifiée à l’intéressé, qui a été informé de son droit de faire appel dans les vingt-quatre heures suivant le prononcé de l’ordonnance. Les modalités de l’appel ont également été précisées.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile ?

La prolongation de la rétention administrative est régie par l’article L. 742-5 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA). Cet article stipule que, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de la durée maximale prévue à l’article L. 742-4, dans certaines situations.

Ces situations incluent :

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, et il est établi que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.

Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.

Quels sont les droits de l’étranger pendant la rétention administrative ?

Les droits de l’étranger pendant la rétention administrative sont précisés dans les articles L. 743-9 et L. 743-24 du CESEDA. Ces articles stipulent que l’étranger doit être informé de ses droits, notamment le droit d’être assisté par un avocat.

L’article L. 743-9 précise que l’étranger, assisté d’un avocat, doit être informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant.

De plus, l’article L. 743-24 souligne que l’étranger a le droit de contester la légalité de sa rétention et de demander la mise en liberté.

Il est également important de noter que l’étranger doit être informé de la possibilité de faire appel de la décision de prolongation de la rétention dans un délai de vingt-quatre heures, et que cette déclaration d’appel doit être motivée.

Quelles sont les implications de la reconnaissance de la nationalité marocaine dans le cadre de la rétention administrative ?

La reconnaissance de la nationalité marocaine de l’intéressé a des implications significatives dans le cadre de la rétention administrative. Selon les éléments de la jurisprudence, lorsque les autorités marocaines reconnaissent un individu comme leur ressortissant, cela ouvre la voie à la délivrance d’un laissez-passer consulaire (LPC).

L’article L. 742-5 du CESEDA stipule que la délivrance du LPC doit intervenir à bref délai, ce qui est essentiel pour l’exécution de la mesure d’éloignement. Dans le cas présent, les autorités marocaines ont confirmé leur disposition à délivrer le LPC, ce qui est un facteur favorable pour la prolongation de la rétention.

Il est également mentionné que la délivrance effective du LPC nécessite que les coordonnées du vol soient communiquées aux autorités marocaines. Cela souligne l’importance de la coopération entre les autorités françaises et marocaines pour faciliter le processus d’éloignement.

Quels recours sont disponibles pour l’étranger en cas de prolongation de la rétention administrative ?

L’étranger a plusieurs recours disponibles en cas de prolongation de la rétention administrative, comme le stipulent les articles L. 743-9 et L. 743-24 du CESEDA.

Tout d’abord, l’étranger a le droit de contester la légalité de sa rétention. Il peut faire appel de la décision de prolongation devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué dans un délai de vingt-quatre heures suivant le prononcé de l’ordonnance.

La déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen, y compris par courrier électronique. Il est important de noter que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

Ces recours garantissent que l’étranger a la possibilité de faire valoir ses droits et de contester les décisions qui le concernent, assurant ainsi une protection juridique adéquate pendant la période de rétention.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE PROLONGATION DE RETENTION

MINUTE: 24/1860
Appel des causes le 25 Novembre 2024 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 24/05297 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-76BMI

Nous, Monsieur MARLIERE Maurice, Premier Vice-Président au Tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assisté de Madame Marie TIMMERMAN, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;

Vu l’article R. 213-12-2 du code de l’organisation judiciaire ;

En présence de [F] [U], interprète en langue arabe, serment préalablement prêté ;

En présence de Maître Antoine PATINIER représentant de M. LE PREFET DU NORD ;

Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;

Monsieur [V] [M]
de nationalité Marocaine
né le 06 Juillet 1990 à [Localité 2] (MAROC), a fait l’objet :

d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français et ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcée le 26 septembre 2024 par M. PREFET DU NORD , qui lui a été notifié le 26 septembre 2024 à 07h30 .

Par requête du 24 Novembre 2024, arrivée par courrier électronique à 11h09 M. LE PREFET DU NORD invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de QUATRE JOURS, prolongé par un délai de VINGT-SIX JOURS selon l’ordonnance du 30 septembre 2024, prolongé par un délai de TRENTE JOURS selon l’ordonnance du 27 octobre 2024, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de QUINZE JOURS maximum.

En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Anne-Sophie CADART, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations

L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. Je n’ai rien à dire.

Me Anne-Sophie CADART entendu en ses observations ; je considère qu’on est dans une situation exceptionnelle. On a une reconnaissance de la qualité de ressortissant marocain. On a un accord sur le fait qu’on va avoir un LPC. La demande a été faite le 29 octobre. On a certes un vol prévu le 5 décembre mais je n’ai pas la certitude que le LPC va être effectivement être donné. La condition du bref délai n’est pas remplie. Je vous demande de ne pas faire droit à la demande de prolongation.

L’avocat de la Préfecture entendu en ses observations ; sollicite la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé : on a la reconnaissance de Monsieur et la certitude que le LPC sera délivré. Ils ne sont jamais délivrés avant un vol. Pour le Maroc, ils sont délivré 48 heures avant le vol. On a un vol le 5 décembre.

MOTIFS

Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours:
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.

Attendu qu’il résulte de la procédure que par courrier du 29 octobre 2024 les autorités marocaines ont fait savoir que l’intéressé a été reconnu comme un de leur ressortissant et qu’elles étaient disposées en conséquence à délivrer le laissez-passer consulaire sollicité depuis le 26 septembre 2024 ; attendu que la délivrance effective du LPC nécessite que les coordonnées du vol par lequel la mesure d’éloignement sera exécutée soient préalablement communiquées aux autorités marocaines ; qu’en l’espèce, le routing joint à la procédure établit qu’à la suite de la demande présentée le 26 septembre 2024, c’est-à-dire dès le début de la mesure de rétention, une place a été réservée pour l’intéressé sur un vol à destination de Casablanca fixé au 5 décembre prochain ; que cette information a été portée à la connaissance de la préfecture du Nord par le PCE le 20 novembre 2024 et que le jour même le routing a été transmis par mail au consulat du Maroc à [Localité 4] ; qu’au bénéfice de ces observations, il apparaît d’une part que la condition de délivrance “à bref délai” du LPC posée par l’article L. 742-5 du CESEDA est remplie et d’autre part que la préfecture a satisfait depuis le début de la mesure de rétention administrative à l’obligation de diligence qui lui incombe en application de l’article L. 741-3 du même code ;

L’intéressé ne présente pas de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière, des mesures de surveillance sont nécessaires.

Eu égard aux nécessités invoquées par Monsieur le Préfet, il convient d’accorder la prorogation demandée.

PAR CES MOTIFS

Autorisons l’autorité administrative à retenir Monsieur [V] [M] dans les locaux ne relevant pas de l’Administration pénitentiaire pour une prolongation de rétention administrative d’une durée maximale de QUINZE JOURS à compter du 25 novembre 2024

NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 3] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI (numéro de FAX du greffe de la Cour d’Appel: [XXXXXXXX01].) ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

L’avocat de la Préfecture, L’avocat, Le Greffier, Le Juge,

décision rendue à 10h58
Ordonnance transmise ce jour à M. LE PREFET DU NORD
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 24/05297 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-76BMI
En cas de remise en liberté : Ordonnance notifiée à Monsieur le procureur de la République à

Décision notifiée à …h…

L’intéressé, L’interprète,


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