Prolongation de la rétention administrative : enjeux de diligence et de justification des mesures d’éloignement.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de diligence et de justification des mesures d’éloignement.

L’Essentiel : Le 1er décembre 2024, M. [J] [V] a été placé en rétention par le préfet du Rhône pour exécuter une mesure d’éloignement. Le 5 décembre, le juge des libertés a prolongé cette rétention de vingt-huit jours, décision confirmée en appel. M. [J] [V] a contesté cette prolongation, arguant que la préfecture n’avait pas pris les mesures nécessaires pour organiser son départ. Toutefois, l’appel a été déclaré recevable, sans nouvelles circonstances présentées. L’autorité préfectorale a justifié ses actions, ayant contacté les autorités algériennes pour obtenir un laissez-passer. Finalement, l’appel a été rejeté, confirmant la rétention.

Placement en rétention

Le 1er décembre 2024, le préfet du Rhône a ordonné le placement de M. [J] [V] en rétention dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour permettre l’exécution d’une mesure d’éloignement.

Prolongation de la rétention

Le 5 décembre 2024, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention administrative de M. [J] [V] pour une durée de vingt-huit jours, décision confirmée en appel le 7 décembre 2024. Le 31 décembre 2024, le juge a de nouveau prolongé la rétention pour trente jours supplémentaires.

Appel de M. [J] [V]

M. [J] [V] a interjeté appel de l’ordonnance du 31 décembre 2024, demandant son infirmation et sa mise en liberté, arguant que la préfète du Rhône n’avait pas pris les mesures nécessaires pour organiser son départ durant les deux premiers jours de sa rétention.

Observations des parties

Le 1er janvier 2025, les parties ont été informées que le magistrat délégué envisageait d’appliquer les dispositions du CESEDA concernant l’absence de circonstances nouvelles. L’avocat de la préfecture a soutenu la confirmation de la décision, tandis que l’avocat de M. [J] [V] n’a pas formulé d’observations.

Recevabilité de l’appel

L’appel de M. [J] [V] a été déclaré recevable, conformément aux dispositions légales du CESEDA. Le juge a noté qu’aucune nouvelle circonstance n’avait été présentée depuis le placement en rétention.

Diligences de l’autorité préfectorale

L’autorité préfectorale a justifié ses diligences, ayant contacté les autorités consulaires d’Algérie dès le 1er décembre 2024 pour obtenir un laissez-passer pour M. [J] [V], qui ne disposait pas de documents d’identité valides. Les efforts pour obtenir ce document ont été documentés par des envois recommandés et des relances.

Conclusion de l’appel

Le juge a conclu que les éléments fournis par M. [J] [V] ne justifiaient pas la fin de sa rétention administrative, n’invoquant aucune circonstance nouvelle depuis son placement. L’appel a donc été rejeté sans audience, confirmant l’ordonnance initiale.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de recevabilité de l’appel en matière de rétention administrative selon le CESEDA ?

L’article L. 743-21 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) précise que l’appel formé contre une décision du juge des libertés et de la détention est recevable s’il est interjeté dans les formes et délais légaux.

En l’espèce, l’appel de M. [J] [V] a été jugé recevable car il a été relevé dans les formes et délais prévus par les articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du CESEDA.

Ces articles stipulent que :

– **Article L. 743-21** : « Le recours contre les décisions du juge des libertés et de la détention est formé dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision. »

– **Article R. 743-10** : « La déclaration d’appel est faite par écrit et doit être motivée. »

– **Article R. 743-11** : « Le greffe du tribunal est tenu de transmettre la déclaration d’appel au premier président ou à son délégué. »

Ainsi, le respect de ces dispositions a permis de déclarer l’appel de M. [J] [V] recevable.

Quelles sont les prérogatives du premier président ou de son délégué en matière d’appel contre une décision de rétention administrative ?

L’article L. 743-23 du CESEDA énonce les prérogatives du premier président ou de son délégué lorsqu’il est saisi d’un appel contre une décision rendue par le juge des libertés et de la détention.

Selon le deuxième alinéa de cet article :

« Le premier président ou son délégué peut, lorsqu’il est saisi d’un appel contre une décision rendue par le juge des libertés et de la détention dans les cas prévus aux articles L. 741-10 et L. 742-8, rejeter la déclaration d’appel sans avoir préalablement convoqué les parties s’il apparaît qu’aucune circonstance nouvelle de fait ou de droit n’est intervenue depuis le placement en rétention administrative ou son renouvellement, ou que les éléments fournis à l’appui de la demande ne permettent manifestement pas de justifier qu’il soit mis fin à la rétention. »

Dans le cas de M. [J] [V], le juge a constaté qu’aucune circonstance nouvelle n’était intervenue depuis le placement en rétention, ce qui a conduit à la confirmation de l’ordonnance initiale.

Comment la carence de l’autorité administrative peut-elle être invoquée dans le cadre d’une rétention administrative ?

La question de la carence de l’autorité administrative dans les diligences pour organiser l’éloignement d’un étranger en rétention est abordée dans le cadre des articles L. 741-10 et L. 742-8 du CESEDA.

Ces articles stipulent que :

– **Article L. 741-10** : « La rétention administrative ne peut excéder un délai de 45 jours, sauf si des diligences ont été engagées pour organiser l’éloignement. »

– **Article L. 742-8** : « Le juge des libertés et de la détention peut prolonger la rétention administrative si l’autorité administrative justifie des diligences effectuées. »

Dans le cas présent, M. [J] [V] n’a pas soulevé de moyen relatif à une carence de l’autorité administrative lors de son audience devant le juge des libertés et de la détention.

Il a seulement évoqué cette carence pour la première fois en appel, ce qui a été jugé insuffisant pour justifier une mise en liberté.

Quelles sont les conséquences de l’absence de circonstances nouvelles dans le cadre d’un appel de rétention administrative ?

L’absence de circonstances nouvelles est un élément déterminant dans le cadre de l’article L. 743-23 du CESEDA, qui permet au premier président ou à son délégué de rejeter un appel sans audience.

Comme mentionné précédemment, cet article stipule que :

« Le premier président ou son délégué peut… rejeter la déclaration d’appel sans avoir préalablement convoqué les parties s’il apparaît qu’aucune circonstance nouvelle de fait ou de droit n’est intervenue depuis le placement en rétention administrative. »

Dans le cas de M. [J] [V], il n’a pas fourni d’éléments justifiant une circonstance nouvelle depuis son placement en rétention.

Par conséquent, son appel a été rejeté, et l’ordonnance initiale a été confirmée, illustrant ainsi l’importance de la démonstration de circonstances nouvelles pour contester une décision de rétention.

N° RG 25/00005 – N° Portalis DBVX-V-B7J-QC6Z

Nom du ressortissant :

[V] [J]

[J] C/ PREFETE DU RHÔNE

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 02 JANVIER 2025

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Evelyne ALLAIS, conseillère à la cour d’appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 16 décembre 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d’entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d’asile,

Assistée de Céline DESPLANCHES, greffier,

En l’absence du ministère public,

Statuant en notre cabinet dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [V] [J]

né le 13 Octobre 1989 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Actuellement eu centre de rétention administrative de [4]

Ayant pour conseil Maître Valentin CARRERAS, avocat au barreau de LYON, commis d’office

ET

INTIMEE :

Mme PREFETE DU RHÔNE

[Adresse 1]

[Localité 2] (RHÔNE)

Ayant pour conseil

Avons mis l’affaire en délibéré au 02 Janvier 2025 à 12 heures et à cette date et heure prononcé l’ordonnance dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Le 1er décembre 2024, le préfet du Rhône a ordonné le placement de M. [J] [V] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire afin de permettre l’exécution de la mesure d’éloignement.

Par ordonnance du 5 décembre 2024, confirmée en appel le 7 décembre 2024 , le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention administrative de M. [J] [V] pour une durée de vingt-huit jours.

Dans son ordonnance du 31 décembre 2024 à 15 heures 59, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a fait droit à la requête déposée par le préfet du Rhône et a ordonné la prolongation de la rétention de M. [J] [V] dans les locaux du centre de rétention administrative de [4] pour une durée de trente jours.

Par déclaration au greffe le 31 décembre 2024 à 17 heures 10, M. [J] [V] a interjeté appel de cette ordonnance dont il demande l’infirmation outre sa mise en liberté au visa de l’article L. 741-3 du CESEDA. M. [J] [V] motive sa requête d’appel comme suit : « J’estime que Mme la préfète du Rhône n’a pas effectué les diligences nécessaires afin d’organiser mon départ pendant deux premiers jours de ma rétention. »

Par courriel adressé le 1er janvier 2025 à 15 heures 28, les parties ont été informées que le magistrat délégué par le premier président envisageait de faire application des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 743-23  du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) et les a invitées à faire part, le 2 janvier 2015 à 9 heures au plus tard, de leurs observations éventuelles sur l’absence de circonstance nouvelle de fait ou de droit depuis le placement en rétention administrative, ou sur l’absence d’éléments fournis à l’appui de la requête d’appel permettant de justifier qu’il soit mis fin à la rétention.

Vu les observations de l’avocat de la préfecture reçues par courriel le 1er janvier 2025 à 17 heures 43 tendant à la confirmation de la décision entreprise compte tenu des diligences déjà accomplies et justifiées.

Vu l’absence d’observations formées par l’avocat de la personne retenue.

MOTIVATION

Attendu que l’appel deM. [J] [V] relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) est déclaré recevable ; 

Attendu qu’aux termes de l’alinéa 2 de l’article L. 743-23 du CESEDA, le premier président ou son délégué peut, lorsqu’il est saisi d’un appel contre une décision rendue par le juge des libertés et de la détention dans les cas prévus aux articles L. 741-10 et L. 742-8, rejeter la déclaration d’appel sans avoir préalablement convoqué les parties s’il apparaît qu’aucune circonstance nouvelle de fait ou de droit n’est intervenue depuis le placement en rétention administrative ou son renouvellement, ou que les éléments fournis à l’appui de la demande ne permettent manifestement pas de justifier qu’il soit mis fin à la rétention ;

Attendu qu’en l’espèce devant le juge des libertés et de la détention, M. [J] [V] n’a fait valoir aucun moyen relatif à une carence de l’autorité administrative dans les diligences faites pour organiser son éloignement ; que ce moyen est soutenu pour la première fois en appel pour solliciter sa mise en liberté ;

Attendu que dans sa requête en prolongation de la rétention de M. [J] [V], l’autorité préfectorale fait valoir que:

-elle a saisi dès le 1er décembre 2024 les autorités consulaires d’Algérie afin d’obtenir la délivrance d’un laissez-passer pour M. [J] [V] qui circulait sans document d’identité ou de voyage en cours de validité ;

-elle a adressé au consulat les empreintes et les photographies de l’intéressé par envoi recommandé du 6 décembre 2024 ainsi que des courriers de relance les 16 et 23 décembre 2024 ;

que la réalité de ces diligences n’est pas contestée ;

Qu’il ressort de ces éléments que l’autorité administrative a engagé des diligences dès le placement en rétention administrative afin d’obtenir la délivrance d’un laissez-passer consulaire; qu’en tout état de cause, M. [J] [V] ne précise pas l’insuffisance particulière qui aurait été commise par l’autorité préfectorale dans les diligences susceptibles d’être utilement engagées durant le mois suivant son placement en rétention administrative ;

Attendu qu’il en résulte que le moyen tiré de l’absence de diligences ainsi que la prétention qui lui est associée tendent uniquement à solliciter une mise en liberté et à obtenir de manière claire la mainlevée de la rétention administrative ce qui relève manifestement des prévisions de l’article L. 743-23 alinéa 2 du CESEDA ;

Attendu qu’il y a lieu de considérer que les éléments invoqués par M. [J] [V] ne permettent pas de justifier qu’il soit mis à sa rétention administrative tandis qu’il n’invoque ni ne justifie d’aucune circonstance nouvelle de droit ou de fait depuis son placement en rétention ;

Attendu que son appel doit dès lors être rejeté sans audience et l’ordonnance entreprise est confirmée ;

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l’appel formé par M. [J] [V],

Confirmons l’ordonnance déférée.

Le greffier, Le conseiller délégué,

Céline DESPLANCHES Evelyne ALLAIS


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