Prolongation de la rétention administrative : enjeux de l’obstruction à l’éloignement et de la protection des droits des étrangers.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de l’obstruction à l’éloignement et de la protection des droits des étrangers.

L’Essentiel : Monsieur [D] [G], de nationalité algérienne, a été soumis à une obligation de quitter le territoire français, prononcée par le Préfet du Nord le 24 octobre 2024. En raison de ses refus de se soumettre à la prise d’empreintes et de se présenter à un rendez-vous consulaire, une prolongation de sa rétention administrative a été demandée le 6 janvier 2025. Son avocat a contesté cette prolongation, arguant qu’il n’y avait pas de condamnation à son encontre. Toutefois, le juge a décidé d’accorder une prolongation de quinze jours, considérant les refus de l’intéressé comme des obstructions à l’éloignement.

Contexte Juridique

L’affaire concerne Monsieur [D] [G], de nationalité algérienne, qui a été soumis à une obligation de quitter le territoire français. Cette décision a été prononcée par le Préfet du Nord le 24 octobre 2024, avec une interdiction de retour sur le territoire français et un placement en rétention administrative pour une durée initiale de quatre jours.

Prolongation de la Rétention Administrative

Le 6 janvier 2025, le Préfet du Nord a demandé une prolongation de la rétention administrative de Monsieur [D] [G] au-delà des quatre jours initiaux, en raison de divers refus de sa part, notamment de se soumettre à la prise d’empreintes et de se présenter à un rendez-vous consulaire. Cette demande a été justifiée par des considérations de sécurité publique et d’obstruction à l’exécution de la décision d’éloignement.

Observations de l’Intéressé et de son Avocat

Monsieur [D] [G] a exprimé le souhait d’être assisté par un avocat et a contesté la nécessité de fournir de nouvelles empreintes, affirmant avoir déjà donné les siennes. Son avocat, Me Hervé KRYCH, a plaidé pour sa remise en liberté, arguant qu’il n’y avait pas de condamnation à son encontre et que les refus de l’intéressé ne constituaient pas une obstruction suffisante.

Décision du Juge

Le juge a examiné les circonstances de l’affaire et a noté que les refus de l’intéressé de se présenter à son rendez-vous consulaire et de donner ses empreintes constituaient des obstructions à l’exécution de la décision d’éloignement. En conséquence, le juge a décidé d’accorder la prolongation de la rétention administrative pour une durée maximale de quinze jours, à compter du 7 janvier 2025.

Notification et Appel

L’ordonnance a été notifiée à l’intéressé, qui a été informé de son droit de faire appel de la décision dans les vingt-quatre heures suivant sa notification. Les modalités de l’appel ont été précisées, incluant la possibilité de transmettre la déclaration par mail au greffe de la Cour d’Appel de Douai.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile ?

La prolongation de la rétention administrative est régie par l’article L. 742-5 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile (CESEDA). Cet article stipule que, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de la durée maximale prévue à l’article L. 742-4, lorsque certaines conditions sont remplies dans les quinze derniers jours.

Ces conditions incluent :

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, et il est établi que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.

Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.

Quels sont les droits de l’étranger en rétention administrative ?

Les droits de l’étranger en rétention administrative sont précisés dans les articles L. 743-9 et L. 743-24 du CESEDA. Ces articles stipulent que l’étranger doit être informé de ses droits pendant la rétention, notamment :

– Le droit d’être assisté par un avocat ;
– Le droit d’être informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant.

L’article L. 743-9 précise que l’étranger doit être informé de ses droits dès son placement en rétention, et qu’il a le droit de contester la légalité de sa rétention devant le juge.

De plus, l’article L. 743-24 souligne que l’étranger a le droit d’être entendu et de présenter ses observations concernant sa situation.

Ces droits sont essentiels pour garantir que l’étranger puisse se défendre et contester les décisions qui le concernent, notamment en matière de prolongation de la rétention.

Quels sont les motifs justifiant la prolongation de la rétention administrative dans le cas présent ?

Dans le cas présent, la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [D] [G] alias [N] [K] est justifiée par plusieurs motifs. Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, l’étranger a fait obstruction à l’exécution de la décision d’éloignement.

Les faits établis montrent que :

– L’intéressé a refusé de se présenter à son rendez-vous consulaire le 27 décembre 2024.
– Il a également refusé de se soumettre à la prise d’empreintes au format AFIS le 02 janvier 2025.

Ces refus constituent des obstructions à l’exécution de la décision d’éloignement, ce qui permet à l’autorité administrative de demander la prolongation de la rétention.

De plus, le juge a constaté que l’intéressé ne présentait pas de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière, justifiant ainsi la nécessité de mesures de surveillance.

Quelles sont les conséquences de la décision de prolongation de la rétention administrative ?

La décision de prolongation de la rétention administrative a plusieurs conséquences pour l’intéressé. Selon l’ordonnance rendue, Monsieur [D] [G] alias [N] [K] est autorisé à être retenu dans des locaux ne relevant pas de l’Administration pénitentiaire pour une durée maximale de quinze jours à compter du 7 janvier 2025.

Cette prolongation signifie que :

– L’intéressé reste sous le contrôle des autorités administratives pendant cette période.
– Il a la possibilité de contester cette décision en faisant appel devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué dans les vingt-quatre heures suivant la notification de l’ordonnance.

Il est également informé que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen, y compris par mail.

Enfin, il est précisé que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif, ce qui signifie que la rétention peut continuer jusqu’à ce que le juge statue sur l’appel.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE PROLONGATION DE RETENTION

MINUTE: 25/36
Appel des causes le 07 Janvier 2025 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 25/00045 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76CU2

Nous, Madame Anne DESWARTE, Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assistée de Mme Samira CHAIB, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;

Vu l’article R. 213-12-2 du code de l’organisation judiciaire ;

En présence de [B] [V], interprète en langue arabe, serment préalablement prêté ;

En présence de Maître Roxane GRIZON représentant de M. PREFET DU NORD ;

Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;

Monsieur [D] [G] alias [N] [K]
de nationalité Algérienne
né le 11 Février 1999 à [Localité 3] (ALGERIE), a fait l’objet :

d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français et ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcée le 24 octobre 2024 par M. PREFET DU NORD , qui lui a été notifié le 24 octobre 2024 à 09h30 .

Par requête du 06 Janvier 2025, arrivée par courrier électronique à 10h59 M. PREFET DU NORD invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de QUATRE JOURS, prolongé par un délai de VINGT-SIX JOURS selon l’ordonnance du 28 octobre 2024, prolongé par un délai de TRENTE JOURS selon l’ordonnance du 23 novembre 2024, prolongé par un délai de QUINZE JOURS selon l’ordonnance du 23 décembre 2024 demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de QUINZE JOURS maximum.

En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Hervé KRYCH, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations

L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. J’ai refusé de donner mes empreintes car on m’a dit que c’était pour vérifier si elles étaient connues dans un autre pays. J’ai déjà donné mes empreintes.

L’avocat de la Préfecture entendu en ses observations ; sollicite la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé notamment sur la menace à l’ordre public et l’obstruction de Monsieur en refusant de donner ses empreintes le 02 janvier 2025 et un refus pour la borne SBNA. Il y a aussi un refus d’audition le 27 décembre 2024. Même si Monsieur dit avoir déjà donné ses empreintes, il a déjà donné ses empreintes. Elles ont été utilisées pour le consulat du Maroc. Pour les autres consulats, ce n’est pas le même système et il fallait donc une reprise d’empreintes au format AFIS.

Me Hervé KRYCH entendu en ses observations : Monsieur a reconnu avoir donné ses empreintes l’année dernière. Ses empreintes sont dans les registres administratifs. Vous devez vous demander s’il y a obstruction. Pour la menace à l’ordre public, il n’y a pas de condamnation. Je vous demande sa remise en liberté.

L’intéressé : l’année dernière, je suis allé trois fois au consul. J’ai donné deux fois mes empreintes.

Mise en délibéré.

MOTIFS

Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours:
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.

En l’espèce, il résulte de la procédure que l’intéressé a refusé de se présenter à son rendez-vous consulaire le 27 décembre 2024 et a également refusé le passage à la prise d’empreintes au format AFIS le 02 janvier 2025.

Ces refus sont constitutifs d’obstructions commises dans les quinze derniers jours et justifient de faire droit à la requête de la préfecture.

L’intéressé ne présente pas de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière, des mesures de surveillance sont nécessaires.

Eu égard aux nécessités invoquées par Monsieur le Préfet, il convient d’accorder la prorogation demandée.

PAR CES MOTIFS

Autorisons l’autorité administrative à retenir Monsieur [D] [G] alias [N] [K] dans les locaux ne relevant pas de l’Administration pénitentiaire pour une prolongation de rétention administrative d’une durée maximale de QUINZE JOURS à compter du 7 janvier 2025

NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 2] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI (numéro de FAX du greffe de la Cour d’Appel: [XXXXXXXX01]) ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

L’avocat de la Préfecture, L’avocat, Le Greffier, Le Juge,

décision rendue à 11h30
Ordonnance transmise ce jour à M. PREFET DU NORD
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 25/00045 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76CU2

Décision notifiée à …h…

L’intéressé, L’interprète,


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