L’Essentiel : M. [X] [U], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative par le préfet d’Ille-et-Vilaine suite à un arrêté du 15 mai 2022. Le 28 novembre 2024, sa rétention a été prolongée pour vingt-six jours supplémentaires. M. [X] [U] a interjeté appel, arguant qu’il n’existait pas de perspective d’éloignement vers l’Algérie en raison de l’absence de communication du consulat. Le tribunal a jugé l’appel recevable, confirmant l’ordonnance du magistrat et notant l’absence de documents d’identité de M. [X] [U], compliquant ainsi la situation. Les dépens ont été laissés à la charge du Trésor public.
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Contexte de l’affaireM. [X] [U], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative par le préfet d’Ille-et-Vilaine suite à un arrêté du 15 mai 2022, lui ordonnant de quitter le territoire français avec interdiction de retour pendant trois ans. Prolongation de la rétentionLe 28 novembre 2024, le préfet a décidé de placer M. [X] [U] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de quatre jours. Par la suite, une demande de prolongation de la rétention a été formulée, entraînant une décision du magistrat le 2 décembre 2024, qui a prolongé la rétention pour vingt-six jours supplémentaires. Appel de la décisionM. [X] [U] a interjeté appel de l’ordonnance du 28 décembre 2024, qui prolongeait sa rétention pour une durée maximale de trente jours. Il conteste cette décision, arguant qu’il n’existe pas de perspective raisonnable d’éloignement vers l’Algérie en raison de l’absence de communication du consulat algérien. Arguments des partiesLors de l’audience, M. [X] [U] a soutenu que les conditions d’éloignement étaient inexistantes, tandis que le représentant du préfet a affirmé que des laissez-passer avaient été délivrés par les autorités consulaires algériennes, justifiant ainsi la prolongation de la rétention. Décision du tribunalLe tribunal a jugé l’appel recevable et a confirmé l’ordonnance du magistrat, considérant que l’administration avait agi avec diligence en attendant une réponse des autorités algériennes. Le tribunal a noté que M. [X] [U] n’avait pas présenté de documents d’identité, ce qui compliquait davantage la situation. ConclusionL’ordonnance a été confirmée, et les dépens ont été laissés à la charge du Trésor public. M. [X] [U] a été informé de la possibilité de se pourvoir en cassation dans un délai de deux mois suivant la notification de la décision. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de maintien en rétention administrative selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ?Le maintien en rétention administrative d’un étranger est strictement encadré par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Selon l’article L.741-3, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration doit exercer toute diligence à cet effet. Il est donc impératif que la rétention ne dépasse pas le délai nécessaire pour organiser l’éloignement de l’individu concerné. De plus, l’article L.742-4 précise que le magistrat peut être saisi pour prolonger la rétention au-delà de trente jours dans certaines conditions, notamment si l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, ou si la délivrance des documents de voyage par le consulat a été tardive. Ainsi, la législation impose une évaluation continue de la nécessité de la rétention, en tenant compte des circonstances entourant l’éloignement de l’étranger. Comment le juge apprécie-t-il l’existence d’une perspective raisonnable d’éloignement ?L’appréciation de l’existence d’une perspective raisonnable d’éloignement incombe au juge judiciaire à chaque stade de la procédure. L’article 15§4 de la directive « retour » stipule que lorsque les conditions d’éloignement ne sont plus réunies, la rétention ne se justifie plus et la personne concernée doit être remise en liberté. Cela signifie que le juge doit examiner si des considérations d’ordre juridique ou d’autres facteurs rendent l’éloignement impossible. Dans le cas présent, M. [X] [U] a soutenu qu’il n’existait pas de perspective raisonnable d’éloignement en raison de l’absence de réponse du consulat algérien. Cependant, le juge a constaté que l’administration avait fait preuve de diligence en sollicitant les autorités algériennes et en attendant une réponse, ce qui a conduit à la confirmation de la prolongation de la rétention. Quelles sont les conséquences de l’absence de documents d’identité pour un étranger en rétention ?L’absence de documents d’identité a des conséquences significatives sur la situation d’un étranger en rétention. L’article L.742-4 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile stipule que si une seconde prolongation de la rétention est sollicitée alors que l’étranger ne justifie pas d’un passeport en cours de validité, cela est assimilé à de l’obstruction. Dans ce cas, le juge n’est pas tenu d’examiner s’il existe des perspectives raisonnables d’éloignement. Dans l’affaire de M. [X] [U], il a été constaté qu’il ne pouvait présenter aucun document d’identité, ce qui a permis au juge de ne pas considérer les arguments relatifs à l’absence de perspectives d’éloignement. Ainsi, l’absence de documents d’identité peut justifier le maintien en rétention, même en l’absence de perspectives d’éloignement claires. Quels sont les recours possibles contre une ordonnance de prolongation de rétention administrative ?Les recours contre une ordonnance de prolongation de rétention administrative sont prévus par le Code de procédure civile. L’article 973 et suivants stipulent que les décisions rendues en matière de rétention administrative peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation. Le délai pour introduire ce pourvoi est de deux mois suivant la notification de l’ordonnance. Dans le cas de M. [X] [U], il a interjeté appel de l’ordonnance du 28 décembre 2024, ce qui est conforme aux délais et formes prescrits par la loi. Il est donc essentiel pour les étrangers en rétention de connaître leurs droits et les voies de recours disponibles pour contester les décisions qui les concernent. Le respect des procédures légales est crucial pour garantir la protection des droits des individus en situation de rétention administrative. |
N° 24/345
N° RG 24/00688 – N° Portalis DBVL-V-B7I-VQBH
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
articles L 741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile
Nous, Nathalie MALARDEL, conseillère à la cour d’appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assistée de Eric LOISELEUR, greffier placé,
M. [X] [U]
né le 06 Février 1981 à [Localité 2] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
ayant pour avocat Me Justine COSNARD, avocat au barreau de RENNES
d’une ordonnance rendue le 28 Décembre 2024 à 17H10 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a ordonné la prolongation du maintien de M. [X] [U] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de trente jours à compter du 28 Décembre 2024 à 24H00;
En présence de M. [C] [O], attaché principal d’administration de l’Etat, membre du Pôle Régional Contentieux de la Préfecture d’Ille et Vilaine, représentant du préfet d’ILLE ET VILAINE, dûment convoqué,
En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Madame LEINGRE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 30 Décembre 2024 lequel a été mis à disposition des parties.
En présence de [X] [U], assisté de Me Justine COSNARD, avocat,
Après avoir entendu en audience publique le 31 Décembre 2024 à 10H00 l’appelant assisté de M. [B] [I], interprète en langue arabe, ayant préalablement prêté serment et son avocat et le représentant du préfet en leurs observations,
Avons mis l’affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :
Par arrêté en date du 15 mai 2022, notifié le même jour, le préfet d’Ille-et-Vilaine a fait obligation à M. [X] [U], né le 6 février 1981 à [Localité 2] (Algérie), de nationalité algérienne, de quitter le territoire français avec interdiction de retour durant trois ans.
Par arrêté du 28 novembre 2024, notifié le même jour à 11h25, le préfet d’Ille-et-Vilaine a placé M. [X] [U] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximum de quatre jours.
Par requête motivée du 1er décembre 2024 , le préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le le magistrat en charge des rétentions administratives du tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de vingt-six jours de la rétention administrative de M. [X] [U].
Par ordonnance rendue le 2 décembre 2024 à 17h56, le magistrat en charge des rétentions administratives a rejeté le recours dirigé contre l’arrêté de placement en rétention administrative, rejeté les exceptions de nullité soulevées et prolongé la rétention de M. [X] [U] pour une durée maximale de vingt-six jours à compter du 2 décembre 2024 à 24h.
Par un arrêt du 4 décembre 2024, l’ordonnance a été confirmée par la cour d’appel.
Par requête motivée en date du 27 décembre 2024, reçue le 28 décembre 2024 à 11 heures au greffe du tribunal, le représentant de M. le préfet d’Ille-et-Vilaine a sollicité le magistrat en charge des rétentions administratives une seconde prolongation du maintien de l’intéressé dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de trente jours.
Par ordonnance du 28 décembre 2024, le magistrat en charge des rétentions administratives a fait droit à la demande à compter du jour même à 24 heures. Cette décision a été notifiée le jour même à M. [X] [U] à 17h10, lequel en a interjeté appel par déclaration reçue au greffe de la cour le 30 décembre 2024 à 15 heures 27.
M. [X] [U] conteste la décision en l’absence de perspective raisonnable d’éloignement. Il fait valoir que les liaisons diplomatiques entre la France et l’Algérie sont très compliquées, qu’il a peu de perspectives d’éloignement vers ce pays et que le consulat algérien n’a donné aucune nouvelle depuis le 28 novembre 2024.
Le parquet général, suivant avis écrit du 30 décembre 2024 a sollicité confirmation de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention.
L’avis susvisé a été mis à disposition des parties avant l’audience.
A l’audience M. [X] [U], assisté de son avocate, a soutenu oralement les termes de sa déclaration d’appel, soulignant que les perspectives d’éloignement sont inexistantes.
Le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine demande la confirmation de la décision entreprise précisant que les autorités consulaires algériennes ont délivré trois laissez-passer à [Localité 1].
L’appel est recevable, pour avoir été formé dans les formes et délais prescrits.
Aux termes de l’article L.741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l’administration devant exercer toute diligence à cet effet.
Aux termes des dispositions de de l’article L.742-4 2° et 3°a) du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
-lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;
-lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement.
Ainsi que le rappelle l’appelant, l’article 15§4 de la directive « retour » précise que « lorsqu’il apparaît qu’il n’existe plus de perspective raisonnable d’éloignement pour des considérations d’ordre juridique ou autres ou que les conditions énoncées au paragraphe ne sont plus réunies, la rétention ne se justifie plus et la personne concernée est immédiatement remise en liberté ».
Il appartient en conséquence au juge judiciaire d’apprécier, à chaque stade de la procédure, l’existence ou non d’une perspective raisonnable d’éloignement.
Il s’évince toutefois de l’article L 742-4 précité que si une seconde prolongation est sollicitée alors que la personne de nationalité étrangère ne justifie pas d’un passeport en cours de validité, (ce qui est assimilable à de l’obstruction) le juge n’a pas à examiner qu’il existe des perspectives raisonnables d’éloignement.
En l’espèce, il ressort des pièces de la procédure que M. [U] s’est présenté comme étant de nationalité algérienne, mais n’a pu présenter aucun document d’identité.
Les autorités algériennes ont été saisies le 28 novembre 2024 dans l’attente d’un rendez-vous consulaire puis relancées le 26 décembre 2024.
L’administration ayant fait toute diligence, étant en attente d’une réponse, et n’ayant aucun pouvoir de contrainte envers les autorités consulaires, le moyen développé par l’appelant n’est pas fondé et il y a lieu de confirmer l’ordonnance déférée.
Disons l’appel recevable en la forme,
Confirmons l’ordonnance du magistrat en charge des rétentions administratives du tribunal judiciaire de Rennes en date du 28 décembre 2024,
Laissons les dépens à la charge du Trésor public.
Fait à Rennes, le 31 Décembre 2024 à 15H00
LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,
Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [X] [U], à son avocat et au préfet
Le Greffier,
Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.
Le Greffier
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