Prolongation contestée de la rétention administrative et respect des droits individuels

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Prolongation contestée de la rétention administrative et respect des droits individuels

L’Essentiel : Monsieur le Préfet a demandé, par une requête du 11 janvier 2025, une prolongation de la rétention de l’intéressé au-delà de quatre jours. Assisté par Me Isabelle Girard, l’intéressé a été informé de ses droits et a exprimé des préoccupations concernant son statut de locataire et sa paternité d’enfants français. L’avocat a contesté la légitimité de la rétention, soulignant l’absence de menace à l’ordre public et a demandé sa remise en liberté. Le tribunal a finalement rejeté la demande de maintien en rétention et ordonné la libération de l’intéressé dans les vingt-quatre heures.

Demande de prolongation de rétention

Par une requête datée du 11 janvier 2025, Monsieur le Préfet sollicite l’autorisation de prolonger la rétention de l’intéressé au-delà de quatre jours, pour une durée maximale de vingt-six jours.

Assistance juridique et droits de l’intéressé

L’intéressé, assisté par Me Isabelle Girard, avocat commis d’office, a été informé de ses droits durant la rétention et des recours possibles. Il a exprimé son souhait d’être assisté d’un avocat et a soulevé des préoccupations concernant sa situation, notamment son statut de locataire et sa paternité d’enfants français.

Observations de l’avocat

Me Isabelle Girard a contesté la légitimité de la rétention, arguant que l’intéressé n’était pas sans domicile fixe, mais avait une adresse stable. Elle a également souligné son absence de menace à l’ordre public, son casier judiciaire vierge, et a demandé sa remise en liberté ou, à tout le moins, un placement sous assignation à résidence.

Déclarations de l’intéressé

L’intéressé a affirmé son engagement à respecter la loi et a partagé son parcours, mentionnant son ancien emploi en tant que policier aux frontières dans son pays d’origine. Il a exprimé son désir de mener une vie normale en France, malgré les difficultés rencontrées en tant que sans-papiers.

Nullité de la procédure pénale

Il a été constaté que la garde à vue de l’intéressé a été prolongée de manière excessive, avec un délai de deux heures et vingt minutes entre l’instruction du procureur et la levée de la garde à vue. Cette situation a été jugée comme une privation de liberté sans titre, entraînant un grief pour l’intéressé.

Décision du tribunal

Le tribunal a décidé de rejeter la demande de maintien en rétention administrative et a ordonné la remise en liberté de l’intéressé dans un délai de vingt-quatre heures, tout en lui rappelant son obligation de quitter le territoire national. Des informations sur la possibilité d’appel ont également été fournies.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le cadre légal pour la prolongation de la rétention administrative ?

La demande de prolongation de la rétention administrative est régie par les articles L.743-9 et L.743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile.

L’article L.743-9 stipule que :

« La rétention administrative d’un étranger ne peut excéder quatre-vingt-dix jours. Toutefois, lorsque l’étranger fait l’objet d’une mesure d’éloignement, cette durée peut être prolongée dans la limite de vingt jours supplémentaires. »

De plus, l’article L.743-24 précise que :

« L’étranger placé en rétention administrative doit être informé de ses droits, notamment du droit d’être assisté par un avocat, ainsi que des possibilités de recours contre la décision de rétention. »

Dans le cas présent, le Préfet a demandé une prolongation de la rétention pour une durée de vingt-six jours, ce qui dépasse le cadre légal prévu par ces articles.

Il est donc essentiel de vérifier si cette demande est justifiée par des éléments concrets et si elle respecte les droits de l’intéressé.

Quels sont les droits de l’intéressé pendant la rétention administrative ?

Les droits de l’intéressé pendant la rétention administrative sont clairement énoncés dans l’article L.743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile.

Cet article stipule que :

« L’étranger placé en rétention administrative doit être informé de ses droits, notamment du droit d’être assisté par un avocat, ainsi que des possibilités de recours contre la décision de rétention. »

Il est également précisé que l’intéressé a le droit d’être entendu et de faire valoir ses observations.

Dans le cas présent, l’intéressé a été assisté par un avocat et a exprimé son souhait d’être assisté tout au long de la procédure.

Il a également été informé de ses droits, ce qui est conforme aux exigences légales.

Quelles sont les conséquences d’une garde à vue prolongée sans justification ?

La question de la garde à vue prolongée sans justification est abordée dans le cadre des droits fondamentaux de l’individu, notamment en ce qui concerne la privation de liberté.

Selon le Code de procédure pénale, l’article 63-4 précise que :

« La garde à vue ne peut excéder 24 heures, renouvelable une fois, sauf dans les cas prévus par la loi. »

Dans le cas présent, la garde à vue a été prolongée de manière excessive, puisque la levée de celle-ci a eu lieu deux heures et vingt minutes après l’instruction donnée par le procureur.

Cette situation constitue une privation de liberté sans titre, ce qui entraîne un grief pour l’intéressé.

Il est donc justifié d’ordonner la remise en liberté de l’intéressé, car cette prolongation excessive de la garde à vue est contraire aux dispositions légales.

Quels recours sont possibles pour l’intéressé après la décision de rétention ?

L’article L.743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile prévoit des recours possibles pour l’intéressé.

Il stipule que :

« L’étranger a le droit de contester la décision de rétention devant le juge administratif. »

L’intéressé a également la possibilité de faire appel de la décision de rétention dans un délai de vingt-quatre heures suivant la notification de l’ordonnance.

Il est important de noter que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen, y compris par mail.

Dans ce cas, l’intéressé a été informé de ses droits et des procédures à suivre pour contester la décision de rétention, ce qui est conforme aux exigences légales.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE MAINTIEN EN RÉTENTION ET SUR LE CONTRÔLE DE LA RÉGULARITÉ D’UNE DÉCISION DE PLACEMENT EN RÉTENTION

MINUTE : 25/70
Appel des causes le 12 Janvier 2025 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 25/00126 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76C2M

Nous, Monsieur [B] [F], Président au Tribunal Judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assisté de Madame LOGET Angèle, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;

Vu l’article R. 213-12-2 du code de l’organisation judiciaire ;

Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;

Vu les dispositions des articles L.741-10, L743-3 à L743-20, L743-24, R. 741-3 et R743-1 à 743-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Monsieur [P] [M]
de nationalité Afghane
né le 18 Février 1994 à [Localité 5] (AFGHANISTAN), a fait l’objet :

– d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français prononcée le25 mars 2022 par M. LE PREFET DE [Localité 2] , qui lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception le 30 mars 2022.
– d’un arrêté de placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcée le le 8 janvier 2025 par Mme PREFETE DE [Localité 2] , qui lui a été notifié le même jour à 14h00.

Vu la requête de Monsieur [P] [M] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative en date du 10Janvier 2025 réceptionnée par le greffe du juge des libertés et de la détention le 10Janvier 2025 à 18h40 ;

Par requête du 11 Janvier 2025 reçue au greffe à 09h25, Monsieur le Préfet invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de quatre jours, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de VINGT-SIX jours maximum.

En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Isabelle GIRARD, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations.

L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. Le problème est que je n’ai pas compris ce que vous m’avez dit concernant les 26 jours, c’est que je dois rester ici ? Ils ont écrit SDF mais j’ai un bail et un logement à mon nom avec une facture. Je suis parent d’enfant français. Je suis allé à toutes les convocations. J’ai respecté l’assignation à résidence où je devais signer. J’ai donné l’adresse, mon livret de famille, à l’assistant social. Je veux bien que si c’est possible de signer à résidence, je serais toujours là-bas et je vais bien respecter.

Me Isabelle GIRARD entendu en ses observations :
Le parquet donne les instructions de levée de garde à vue le 8 janvier à 11h55 mais les services enquêteurs ne lèvent la garde à vue qu’à 14h il n’y a pas de justification du délai, c’est une rétention arbitraire.
Sur le recours : insuffisance de motivation de l’arrêté : on indique que Monsieur est SDF alors qu’il a une adresse stable qui figure bien dans la procédure. Monsieur est en France depuis des années, deux enfants nés en France. Il est fiché par les talibans et travaillait la police aux frontières dans son pays pendant 7 ans mais il y a eu un changement de régime. On a une absence de possibilité d’éloignement. Il a un casier judiciaire vierge, il n’est pas connu au TAJ. Il y a une procédure criminelle en cours mais on ne sait pas ce que la victime prétend avoir subit. Le seul fait d’être connu par les services de gendarmerie ne caractérise pas une menace à l’ordre public. Je vous demande d’ordonner la remise en liberté de Monsieur, à tout le moins un placement sous assignation à résidence;

L’intéressé déclare : faites moi confiance, je vais faire bien les démarches et comme depuis que je suis rentrée en France je vais respecté la loi. Moi aussi j’étais policier aux frontières. Je vais bien respecter la loi. J’ai du quitter ma femme et mes enfants dans mon pays. Je me suis marié en 2020 et j’ai eu une OQTF en 2022. J’ai trouvé une vie et j’ai des enfants et tout. Je veux juste une vie normale. L’état ne m’a jamais aidé en France, j’ai travaillé pour nourrir mes enfants. Ce n’est pas facile de payer les factures, … alors qu’on est sans papier. J’ai fais le ménage chez les gens. J’ai fait pour mes enfants mais je n’ai rien fait contre la loi.

MOTIFS

Sur la nullité de la procédure pénale :

Il ressort du procès-verbal de déroulement de la garde à vue de l’intéressé qu’il a été mis fin à la mesure le 8 janvier 2025 à 14 heures 00, or il ressort du procès-verbal du 8 janvier 2025 à 11 heures 55 que le procureur de la République de [Localité 3] contacté à 11 heures 40 le 8 janvier 2025 a alors donné instruction de lever la mesure de garde à vue. Ce procès-verbal ne comporte aucune mention de diligences que le procureur aurait demandé aux services d’enquête d’effectuer avant de lever la mesure de garde à vue, le procureur donnant comme instruction de réaliser l’environnement du couple puis de lui transmettre la procédure pour appréciation. Il s’en déduit que la garde à vue devait être levée dans les plus brefs délais.

Or la levée de la grade à vue est intervenue deux heures et vingt minutes après que l’instruction en a été donnée par le procureur de la République. Cette durée est excessive et l’intéressé a donc été privé de liberté sans titre avant d’être placé en rétention administrative. Cela cause nécessairement grief et il convient donc d’ordonner la remise en liberté de l’intéressé.

PAR CES MOTIFS

PRONONÇONS la jonction avec l’affaire n°25/00127

REJETONS la demande de maintien en rétention administrative de Mme PREFETE DE [Localité 2]

ORDONNONS que Monsieur [P] [M] soit remis en liberté à l’expiration d’un délai de vingt quatre heures suivant la Notification à Monsieur le Procureur de la République de [Localité 1] de la présente ordonnance sauf dispositions contraires prises par ce magistrat.

INFORMONS Monsieur [P] [M] qu’il est maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de vingt quatre heures à compter de la notification de la présente ordonnance au procureur de la République et le cas échéant, jusqu’à ce qu’il soit statué sur l’effet suspensif de l’appel ou la décision au fond, que pendant ce délai il peut contacter un avocat, un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter.

RAPPELONS à l’intéressé qu’il a l’obligation de quitter le territoire national.

NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 4] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

L’Avocat, Le Greffier, Le Juge,

décision rendue à h
L’ordonnance a été transmise ce jour à Mme PREFETE DE [Localité 2]
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 25/00126 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76C2M
Ordonnance notifiée à Monsieur le procureur de la République à

Décision notifiée à …h…

L’intéressé, L’interprète,


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