Prolongation contestée de la détention provisoire malgré l’annulation des auditions.

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Prolongation contestée de la détention provisoire malgré l’annulation des auditions.

L’Essentiel : Le 22 février 2023, M. [X] [Y] a été mis en examen et placé en détention provisoire. Le 19 août 2024, le juge des libertés a prolongé cette détention, décision que M. [Y] a contestée en appel. Ce dernier soutient que la chambre de l’instruction aurait dû tenir compte de l’annulation de ses auditions en garde à vue, ordonnée le 8 avril 2024. La Cour a rappelé que l’article 174, alinéa 3, interdit d’utiliser des actes annulés. En se basant sur des déclarations annulées pour justifier la prolongation, la chambre a violé les droits de la défense, entraînant une cassation.

Contexte de l’affaire

Le 22 février 2023, M. [X] [Y] a été mis en examen et placé en détention provisoire.

Prolongation de la détention

Le 19 août 2024, le juge des libertés et de la détention a décidé de prolonger la détention de M. [Y]. Ce dernier a ensuite interjeté appel de cette décision.

Critique de l’ordonnance

L’appel critique l’ordonnance du 19 août 2024, qui a prolongé la détention provisoire pour six mois. Il est soutenu que la chambre de l’instruction aurait dû tirer les conséquences de l’annulation des auditions de M. [Y] en garde à vue, ordonnée le 8 avril 2024.

Arguments de la Cour

La Cour rappelle que, selon l’article 174, alinéa 3, du code de procédure pénale, il est interdit d’utiliser des actes annulés contre les parties concernées. Malgré cela, l’arrêt attaqué a confirmé la prolongation de la détention en se basant sur des déclarations faites par M. [Y] lors de sa garde à vue, qui avaient été annulées.

Violation des droits de la défense

La chambre de l’instruction a méconnu le principe interdisant de tirer des conséquences d’actes annulés. La Cour de cassation a constaté que les indices de participation de M. [Y] aux faits reprochés étaient fondés sur des déclarations annulées, ce qui constitue une violation des droits de la défense.

Conclusion sur la cassation

En conséquence, la cassation est encourue en raison de cette méprise sur l’utilisation des déclarations annulées dans le cadre de la prolongation de la détention provisoire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences de l’annulation des auditions en garde à vue sur la prolongation de la détention provisoire ?

La question des conséquences de l’annulation des auditions en garde à vue sur la prolongation de la détention provisoire est régie par l’article 174, alinéa 3, du code de procédure pénale.

Cet article stipule que :

« Il est interdit de tirer d’actes ou de pièces annulés dans une procédure antérieure aucun renseignement contre les parties ayant bénéficié de cette annulation. »

Ainsi, lorsque la chambre de l’instruction a annulé les auditions de M. [Y] en garde à vue, cela signifie que toutes les déclarations faites lors de ces auditions ne peuvent pas être utilisées contre lui dans le cadre de la procédure en cours.

En l’espèce, la chambre de l’instruction a confirmé la prolongation de la détention provisoire en se fondant sur des éléments qui incluaient des déclarations annulées.

Cela constitue une violation manifeste de l’article 174, alinéa 3, du code de procédure pénale, car les éléments sur lesquels la chambre s’est appuyée pour justifier la détention ne peuvent pas être pris en compte.

Comment la violation des droits de la défense est-elle liée à l’utilisation d’éléments annulés ?

La violation des droits de la défense est également un point crucial dans cette affaire, en lien avec l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Cet article stipule que :

« Toute personne a droit à un procès équitable, public, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi. »

Dans le cas présent, l’utilisation d’éléments annulés pour justifier la prolongation de la détention de M. [Y] compromet son droit à un procès équitable.

En effet, en se basant sur des déclarations qui ont été annulées, la chambre de l’instruction a non seulement méconnu le principe d’interdiction d’utiliser ces éléments, mais a également porté atteinte aux droits de la défense de M. [Y].

Cela soulève des questions sur l’impartialité et l’indépendance du tribunal, car les décisions prises ne reposent pas sur des éléments valides et légaux.

Ainsi, la confirmation de la prolongation de la détention provisoire, fondée sur des éléments annulés, constitue une violation des droits de la défense, ce qui justifie la cassation de l’arrêt attaqué.

N° F 24-85.983 F-D

N° 00185

LR
21 JANVIER 2025

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 JANVIER 2025

M. [X] [Y] a formé un pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, en date du 10 septembre 2024, qui, dans l’information suivie contre lui des chefs, notamment, d’importation de stupéfiants en bande organisée, blanchiment, infractions à la législation sur les armes, a confirmé l’ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Cavalerie, conseiller, les observations de la SCP Duhamel, avocat de M. [X] [Y], et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 21 janvier 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Cavalerie, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Le Roch, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le 22 février 2023, M. [X] [Y] a été mis en examen des chefs ci-dessus et placé en détention provisoire.

3. Le 19 août 2024, le juge des libertés et de la détention a prolongé sa détention.

4. M. [Y] a relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l’arrêt attaqué pour avoir confirmé l’ordonnance du 19 août 2024 prolongeant la détention provisoire pour une durée de six mois, alors :

« que la chambre de l’instruction devait, au besoin d’office, tirer les conséquences légales de l’arrêt qu’elle a rendu le 8 avril 2024 annulant les auditions de M. [Y] en garde à vue des 18 et 19 février 2023 (D 6449 et D 6472) et ordonnant la cancellation de toute référence à ces auditions ; qu’en affirmant cependant qu’il existait des indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation de M. [Y] aux faits de la prévention (arrêt, p. 14) en se fondant notamment sur la reconnaissance de ces faits lors de sa garde à vue (arrêt, p. 10), pour juger au regard des faits ainsi reconnus que les conditions de l’article 144 du code de procédure pénale étaient réunies, la chambre de l’instruction a violé ce texte et les droits de la défense, ensemble l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 174, alinéa 3, du code de procédure pénale :

6. Il résulte de ce texte qu’il est interdit de tirer d’actes ou de pièces annulés dans une procédure antérieure aucun renseignement contre les parties ayant bénéficié de cette annulation.

7. Pour confirmer l’ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant prolongé la détention provisoire de la personne mise en examen, l’arrêt attaqué, après avoir rappelé les déclarations en garde à vue de celle-ci, puis celles devant le juge d’instruction, constate, en les énumérant, qu’il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable sa participation aux faits reprochés.

8. En se déterminant ainsi, la chambre de l’instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

9. En effet, la Cour de cassation, qui a le contrôle des pièces de la procédure, est en mesure de s’assurer que, pour caractériser les indices précités, la chambre de l’instruction s’est référée à des déclarations de la personne mise en examen faites en garde à vue, relatives aux instructions qu’il aurait reçues de la part d’une autre personne, qui ont été annulées dans la même procédure, par arrêt de la chambre de l’instruction du 8 avril 2024, et qui ne figurent ni dans sa troisième audition en garde à vue, non annulée, ni dans ses interrogatoires devant le juge d’instruction.

10. D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef.


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