L’Essentiel : Monsieur [U] [S], né le 10 février 2002 à Lagos, a contesté le refus d’enregistrement de sa déclaration de nationalité française devant le tribunal judiciaire de Nancy. Le 12 septembre 2023, ce tribunal a annulé le refus, reconnaissant la nationalité française de Monsieur [S] et ordonnant la transcription de son acte de naissance. Cependant, le 20 octobre 2023, le ministère public a interjeté appel, arguant que le jugement avait été rendu par un juge unique. La cour d’appel a finalement annulé la décision, concluant que Monsieur [S] n’avait pas justifié d’un état civil certain, le privant ainsi de sa nationalité française.
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Contexte de l’AffaireMonsieur [U] [S], né le 10 février 2002 à Lagos (Nigeria), a assigné le ministère public devant le tribunal judiciaire de Nancy le 4 février 2021. Il contestait le refus d’enregistrement de sa déclaration de nationalité française, faite le 9 août 2019, et demandait la reconnaissance de sa nationalité française ainsi que la transcription de son acte de naissance. Décision du Tribunal Judiciaire de NancyLe 12 septembre 2023, le tribunal judiciaire de Nancy a annulé la décision de refus d’enregistrement de la déclaration de nationalité française. Il a reconnu que Monsieur [S] avait acquis la nationalité française par sa déclaration et a ordonné la transcription de son acte de naissance dans les registres de l’état civil. Le tribunal a également condamné le trésor public à verser des frais d’avocat à Maître [N] [L]. Arguments du TribunalLe tribunal a constaté que Monsieur [S] avait été confié aux services de l’aide sociale à l’enfance depuis au moins trois ans au moment de sa déclaration. Il a également jugé que l’acte de naissance nigérian produit par Monsieur [S] était présumé régulier, car le ministère public n’avait pas prouvé son irrégularité. L’acte avait été légalisé par un officier consulaire, ce qui respectait les exigences de la coutume internationale. Appel du Ministère PublicLe 20 octobre 2023, le ministère public a interjeté appel du jugement, demandant l’annulation de la décision du tribunal et contestant la nationalité française de Monsieur [S]. Il a soutenu que le jugement avait été rendu par un juge unique, ce qui était contraire aux règles de procédure. Arguments de Monsieur [S] en AppelMonsieur [S] a demandé à la cour d’appel de confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Nancy. Il a réaffirmé que sa déclaration de nationalité française était recevable et bien fondée, et a contesté le refus d’enregistrement de sa nationalité française. Décision de la Cour d’AppelLa cour d’appel a annulé le jugement du tribunal judiciaire de Nancy, considérant que celui-ci avait été rendu par un juge unique alors qu’il aurait dû être statué en formation collégiale. Elle a également constaté que Monsieur [S] n’avait pas justifié d’un état civil certain, ce qui a conduit à la conclusion qu’il n’était pas de nationalité française. Conséquences de la DécisionLa cour a ordonné la mention de la décision dans les registres de l’état civil et a condamné Monsieur [S] aux dépens de la procédure d’appel. La décision a été signée par les magistrats de la cour d’appel, marquant ainsi la fin de cette affaire judiciaire. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la recevabilité de la déclaration de nationalité française souscrite par Monsieur [S] ?La recevabilité de la déclaration de nationalité française de Monsieur [S] est régie par l’article 21-12 du Code civil. Cet article stipule que : « L’enfant qui a fait l’objet d’une adoption simple par une personne de nationalité française peut, jusqu’à sa majorité, déclarer, dans les conditions prévues aux articles 26 et suivants, qu’il réclame la qualité de Français, pourvu qu’à l’époque de sa déclaration il réside en France. Toutefois, l’obligation de résidence est supprimée lorsque l’enfant a été adopté par une personne de nationalité française n’ayant pas sa résidence habituelle en France. Peut, dans les mêmes conditions, réclamer la nationalité française : 1° L’enfant qui, depuis au moins trois années, est recueilli sur décision de justice et élevé par une personne de nationalité française ou est confié au service de l’aide sociale à l’enfance ; 2° L’enfant recueilli en France et élevé dans des conditions lui ayant permis de recevoir, pendant cinq années au moins, une formation française, soit par un organisme public, soit par un organisme privé présentant les caractères déterminés par un décret en Conseil d’État. » Dans le cas présent, le tribunal a constaté que Monsieur [S] avait été confié aux services de l’aide sociale à l’enfance depuis au moins trois ans avant sa déclaration, ce qui remplit les conditions requises par cet article. Cependant, le jugement a été annulé en appel, car le tribunal de première instance a statué à juge unique, ce qui est contraire à l’article L 212-1 du Code de l’organisation judiciaire, qui impose une formation collégiale pour les affaires relatives à l’état des personnes. Quelles sont les exigences relatives à l’état civil pour l’acquisition de la nationalité française ?L’article 47 du Code civil précise les exigences relatives à l’état civil pour l’acquisition de la nationalité française. Il dispose que : « Tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. » Dans le cas de Monsieur [S], il a produit un acte de naissance nigérian et une attestation de naissance. Toutefois, l’acte de naissance n’était pas légalisé, ce qui est requis pour les actes émanant d’un pays avec lequel la France n’a pas de convention. De plus, l’attestation de naissance ne constitue pas un acte de naissance au sens de la loi nigériane, ce qui a conduit la cour à conclure que Monsieur [S] n’avait pas justifié d’un état civil certain, rendant ainsi sa déclaration de nationalité irrecevable. Quelles sont les conséquences de la nullité du jugement en première instance ?La nullité du jugement en première instance a des conséquences importantes, notamment en ce qui concerne l’effet dévolutif de l’appel. L’article 562 al.2 du Code de procédure civile stipule que : « La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible. » Dans cette affaire, l’appel a été interjeté pour annuler le jugement, ce qui signifie que la cour d’appel doit statuer sur l’ensemble du litige. En conséquence, la cour a annulé le jugement du tribunal judiciaire de Nancy et a statué à nouveau, déclarant que Monsieur [S] n’est pas de nationalité française. Cela souligne l’importance de la régularité des procédures judiciaires et le respect des règles de compétence. Quelles sont les implications de l’article 28 du Code civil dans ce litige ?L’article 28 du Code civil prévoit que : « Les actes de l’état civil sont tenus à jour par les officiers de l’état civil. Ils doivent être transcrits sur les registres de l’état civil. » Dans le cadre de ce litige, la cour a ordonné la mention prévue par cet article, ce qui implique que toute décision relative à l’état civil de Monsieur [S] doit être consignée dans les registres de l’état civil. Cela signifie que, même si Monsieur [S] a été débouté de sa demande de nationalité française, la mention de cette décision doit être effectuée pour assurer la transparence et la traçabilité des actes d’état civil. Cette mention est essentielle pour éviter toute ambiguïté future concernant l’état civil de l’intéressé. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D’APPEL DE NANCY
Première Chambre Civile
ARRÊT N° /2024 DU 25 NOVEMBRE 2024
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/02242 – N° Portalis DBVR-V-B7H-FIGG
Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de NANCY,
R.G.n° 21/00320, en date du 12 septembre 2023
APPELANT :
MINISTERE PUBLIC
[Adresse 2]
Représenté par Madame Béatrice BOSSARD, Avocat Général près la Cour d’appel de NANCY
INTIMÉ :
Monsieur [U] [S]
né le 10 Février 2002 à [Localité 4] (NIGERIA)
domicilié [Adresse 1]
Bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro C-54395-2024-01105 du 19/02/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de NANCY
Représenté par Me Brigitte JEANNOT, avocat au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Présidente et Madame Claude OLIVIER-VALLET, Magistrat honoraire, chargée du rapport,
Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Président de Chambre,
Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller,
Madame Claude OLIVIER-VALLET, Magistrat honoraire,
A l’issue des débats, le Président a annoncé que l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 25 Novembre 2024, en application de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 25 Novembre 2024, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
signé par Madame CUNIN-WEBER, Président, et par Madame PERRIN, Greffier ;
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte d’huissier délivré le 4 février 2021, Monsieur [U] [S] se disant né le 10 février 2002 à Lagos (Nigeria), a assigné le ministère public devant le tribunal judiciaire de Nancy, aux fins de :
– voir dire que la déclaration de nationalité française qu’il a souscrite le 9 août 2019 en application de l’article 21-12 du code civil est recevable et bien fondée ;
– dire qu’il est né le 10 février 2002 à [Localité 4] (Nigeria) de Monsieur [Z] [S] et Madame [W] [S] ;
– que le jugement à intervenir lui tiendra lieu d’acte de naissance ;
– ordonner la transcription du dispositif du jugement sur les registres de l’état civil du Ministère des affaires étrangères à [Localité 5] et dire que mention sommaire en sera portée en marge desdits registres à la date de la naissance ;
En tout état de cause,
– annuler la décision rendue le 16 octobre 2019 par le greffier en chef du tribunal d’instance de Dijon portant refus d’enregistrement de sa déclaration de nationalité française ;
– dire que Monsieur [S] a acquis de plein droit la nationalité française par l’effet de la déclaration qu’il a souscrite le 9 août 2019 en application de l’article 21-12 du code civil ;
– ordonner la mention prévue à l’article 28 du code civil ;
– condamner le trésor public à payer à Maître [L] la somme de 2400 euros TTC, soit 2000 euros HT en application de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle et de l’article 700 du code de procédure civile, laquelle s’engage à renoncer à percevoir la part contributive de l’Etat correspondant à sa mission et aux entiers dépens.
Par jugement contradictoire du 12 septembre 2023, le tribunal judiciaire de Nancy a :
– constaté que le récépissé prévu par l’article 1040 du code de procédure civile a été délivré,
– débouté le ministère public de ses demandes,
– annulé la décision n° DnhM 99/2019 de la directrice des services de greffe judiciaires du tribunal judiciaire de Dijon du 16 octobre 2019, refusant l’enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite le 9 août 2019 par Monsieur [S],
– dit que Monsieur [S], né le 10 février 2002 à [Localité 4] (Nigeria), a acquis la nationalité française par déclaration du 09 août 2019 en application des dispositions de l’article 21-12 du code civil,
– invité le service central de l’état civil de [Localité 5] à effectuer la transcription de l’acte de naissance de Monsieur [S] dans ses registres avec effet au jour de la déclaration en date du 9 août 2019,
– condamné le trésor public à verser à Maître [N] [L] la somme de 1500 euros en application des dispositions combinées de l’article 700 du code de procédure civile et de l’article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991,
– ordonné la mention prévue à l’article 28 du code civil,
– laissé les dépens à la charge de l’État.
Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que Monsieur [S] démontrait avoir été confié aux services de l’aide sociale à l’enfance depuis au moins trois ans à la date de la déclaration de nationalité, soit le 9 août 2019, qu’ainsi les conditions fixées par l’article 21-12 du code civil étaient remplies.
Par ailleurs, il a considéré qu’il ressortait de la copie de l’acte de naissance nigérian n°0069980 de Monsieur [S], délivrée le 8 mai 2002, ainsi que de l’attestation de naissance en anglais délivrée le 3 mai 2019 par Monsieur [C] [V] [P] suite à une déclaration sous serment le 2 mai 2019, que Monsieur [S] était né à [Localité 4] le 10 février 2002 de Monsieur [Z] [S] et Madame [W] [S]. Le tribunal a relevé que le ministère public ne démontrait pas que la copie d’acte de naissance produite ne respectait pas les règles du droit nigérian, de sorte que l’acte de naissance était présumé régulier en application de l’article 47 du code civil dès lors qu’il fournissait les informations essentielles à l’établissement de l’état civil de Monsieur [S].
En l’absence de convention entre la France et le Nigéria, l’acte de naissance devait être légalisé. Le tribunal a retenu que l’acte de naissance de Monsieur [S] avait été certifié conforme par un officier consulaire de l’ambassade du Nigéria à Paris et a estimé que ce sceau respectait la formalité de légalisation des actes imposée par la coutume internationale, de sorte que le demandeur, disposant d’un état civil probant au sens de l’article 47 susvisé, avait acquis la nationalité française du fait de la déclaration souscrite sur le fondement de l’article 21-12 du code civil.
Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique, le 20 octobre 2023, le ministère public a relevé appel de ce jugement.
Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d’appel sous la forme électronique le 29 janvier 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, le ministère public demande à la cour de :
– dire la procédure régulière au regard des dispositions de l’article 1040 du code de procédure civile,
– annuler le jugement contesté,
Et statuant à nouveau,
– débouter Monsieur [S] de l’intégralité de ses demandes,
– dire et juger que Monsieur [S], se disant ne le 10 février 2002 à [Localité 4] (Nigeria), n’est pas de nationalité française,
– ordonner la mention prévue par l’article 28 du code civil,
– statuer ce que de droit quant aux dépens.
Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d’appel sous la forme électronique le 26 avril 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [S] demande à la cour de :
– confirmer les termes du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy en date du 12 septembre 2023,
En tout état de cause,
– dire et juger que la déclaration de nationalité française faite par lui le 9 août 2019 en application de l’article 21-12 du code civil est recevable et bien fondée,
– annuler la décision en date du 16 octobre 2019 portant refus d’enregistrement de la nationalité française du greffier en chef du tribunal d’instance de Dijon,
– dire et juger que Monsieur [S] a acquis de plein droit la nationalité française par l’effet de la déclaration souscrite le 9 août 2019 en application de l’article 21-12 du code civil,
– constater l’acquisition de la nationalité française par Monsieur [S],
– inviter le service central de l’état civil de [Localité 5] à effectuer la transcription de l’acte de naissance de l’intéressé dans ses registres avec effet au jour de la déclaration en date du 9 août 2019,
– ordonner la mention prévue à l’article 28 du code civil,
– condamner le trésor public à payer à Maître [L] la somme de 2400 euros TTC (soit 2000 euros HT outre 400 euros de TVA à 20 %) en application de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle et de l’article 700 du code de procédure civile, laquelle s’engage, dans cette hypothèse, à renoncer à percevoir la part contributive de l’État correspondant à la mission au titre de l’aide juridictionnelle et aux entiers dépens.
La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 18 juin 2024.
L’audience de plaidoirie a été fixée le 24 septembre 2024 et le délibéré au 25 novembre 2024.
Vu les dernières conclusions déposées par Monsieur [S] le 26 avril 2024 et par le ministère public le 29 janvier 2024 et visées par le greffe auxquelles il convient de se référer expressément en application de l’article 455 du code de procédure civile,
Vu la clôture de l’instruction prononcée par ordonnance du 18 juin 2024,
Sur l’article 1040 du code de procédure civile
Le récépissé prévu par ce texte a été délivré par le Ministère de la justice le 23 octobre 2023.
La cour est donc en mesure de statuer.
Sur la régularité du jugement
Le ministère public a soulevé la nullité du jugement faute pour le tribunal d’avoir statué en formation collégiale dans une matière relevant de l’état des personnes et a demandé à la cour de statuer, la dévolution opérant sur le tout.
L’intimé n’a pas conclu sur ce point.
L’article L 212-1 du code de l’organisation judiciaire dispose que ‘ Le tribunal judiciaire statue en formation collégiale, sous réserve des exceptions tenant à l’objet du litige ou à la nature des questions à juger. Dans les matières disciplinaires ou relatives à l’état des personnes, sous réserve des dispositions particulières aux matières de la compétence du juge aux affaires familiales et du juge des contentieux de la protection mentionnés à l’article L 213-4-1, le tribunal judiciaire ne peut statuer à juge unique.’
Selon l’article 447 du code de procédure civile ‘ Il appartient aux juges devant lesquels l’affaire a été débattue d’en délibérer. Ils doivent être d’un nombre égal à celui que prescrivent les règles relatives à l’organisation judiciaire.’
Le non-respect de la prescription de ce dernier texte est sanctionné par la nullité du jugement ainsi qu’en dispose l’article 458 du même code.
En l’espèce, le jugement contesté précise que le juge a statué en application des dispositions des articles 812 à 816 du code de procédure civile, soit à juge unique.
Or, la nationalité étant l’une des composantes de l’état des personnes, les affaires relevant de ce contentieux doivent être soumises à la juriction statuant en formation collégiale.
En conséquence, le jugement contesté sera annulé.
Sur l’effet dévolutif de l’appel
L’article 562 al.2 du code de procédure civile, dans sa version applicable à la présente affaire, dispose que ‘ La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.’
L’appel tendant à l’annulation du jugement, il incombe donc à la cour de statuer sur l’entier litige.
Sur le fond
L’intimé a souscrit le 9 août 2019, une déclaration de nationalité française sur le fondement de l’article 21-12 du code civil en tant que mineur confié au service de l’Aide sociale à l’enfance.
Ce texte dispose que ‘ L’enfant qui a fait l’objet d’une adoption simple par une personne de nationalité francaise peut, jusqu’à sa majorité, déclarer, dans les conditions prévues aux articles 26 et suivants, qu’il réclame la qualité de Francais, pourvu qu’à l’époque de sa déclaration il réside en France.
Toutefois, l’obligation de résidence est supprimée lorsque l’enfant a été adopté par une personne de nationalité francaise n’ayant pas sa résidence habituelle en France.
Peut, dans les mêmes conditions, réclamer la nationalité francaise :
1° L’enfant qui, depuis au moins trois années, est recueilli sur décision de justice et élevé par une personne de nationalité française ou est confié au service de l’aide sociale à l’enfance ;
2° L’enfant recueilli en France et élevé dans des conditions lui ayant permis de recevoir, pendant cinq années au moins, une formation francaise, soit par un organisme public, soit par un organisme privé présentant les caractères déterminés par un décret en Conseil d’Etat ‘ ;
En l’absence de possession d’un certificat de nationalité française, la charge de la preuve incombe à celui dont la nationalité est en cause ainsi qu’en dispose l’article 30 du code civil.
D’autre part, nul ne peut se voir reconnaître la nationalité française, à quelque titre et sur quelque fondement que ce soit, s’il ne justifie pas de façon certaine de son état civil par la production d’un acte de naissance répondant aux exigences de l’article 47 du même code selon lequel ‘ Tout acte de l’état civil des français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.’.
En l’espèce, pour justifier de son état civil, Monsieur [S] a produit la copie d’un acte de naissance en langue anglaise, ‘ certificate of birth’, en date 8 mai 2002 n° 0069980 duquel il résulte que l’intéressé, dénommé [S] [U] [X] est né le 10 février 2002 à [Localité 3], état de [Localité 4], de [S] [Z] et de [S] [W].
Contrairement à ce qui est soutenu par l’appelant, aucune des copies de ce document (pièce 9 de l’intimé et pièce 12 de l’appelant) ne porte une quelconque mention de légalisation de la signature de l’officier d’état civil qui a établi l’acte en cause, alors même que pour être reconnus en France, qui n’est liée par aucune convention avec le Nigéria, les actes émanant de cet Etat doivent être légalisés, ce qui n’est pas discuté.
Cet acte ne peut donc être tenu pour recevable dans le cadre de la présente procédure, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’examiner s’il est ou non conforme à la loi et au décret de 1992 régissant les actes d’état civil au Nigéria.
Monsieur [S] produit en second lieu la copie d’une attestation de naissance en date du 3 mai 2019 (pièce 8 de l’intimé et 13 de l’appelant), émanant de la Commission Démographique Nationale, qui a été régulièrement traduite et comporte un tampon de certification conforme émanant de l’Ambassade du Nigéria à [Localité 6] en date du 8 août 2019.
Cependant, ce document ne constitue pas un acte de naissance, ce qui est clairement précisé dans le dernier paragraphe ainsi formulé: ‘Ceci ne relève pas de la loi n° 69 de décembre 1992 sur la délivrance des certificats de naissance.’
La cour ne peut dès lors, que constater que l’intimé n’a pas justifié d’un état civil certain au sens de l’article 47 du code civil à l’appui de sa déclaration de nationalité. C’est donc à bon droit que l’enregistrement de celle-ci a été refusé.
La demande de jugement supplétif d’acte de naissance n’a pas été maintenue à hauteur de cour.
En conséquence, il y a lieu de dire que Monsieur [S] n’est pas de nationalité française et d’ordonner la mention prévue à l’article 28 du code civil.
Monsieur [S] sera condamné aux dépens de la procédure d’appel.
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Constate que le récépissé prévu par l’artice 1040 du code de procédure civile a été délivré le 23 octobre 2023 ;
Annule en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 septembre 2023 par le tribunal judiciaire de Nancy,
Statuant à nouveau,
Dit que Monsieur [U] [S] se disant né le 10 février 2002 à [Localité 4] (Nigéria) n’est pas de nationalité française,
Ordonne la mention prévue à l’article 28 du code civil,
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [U] [S] aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Madame CUNIN-WEBER, Présidente de la première chambre civile de la Cour d’Appel de NANCY, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Signé : C. PERRIN.- Signé : N. CUNIN-WEBER.-
Minute en sept pages.
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