L’Essentiel : M. [J] [Z] a déclaré une épicondylite droite comme maladie professionnelle, reconnue par la caisse en octobre 2012. Après une rechute en décembre 2014, il a bénéficié de rééducation fonctionnelle jusqu’en 2018. En septembre 2019, il a demandé une nouvelle rééducation, mais celle-ci a été rejetée par la caisse. Une expertise a confirmé la nécessité de la rééducation, mais la caisse a refusé la prise en charge. M. [Z] a contesté cette décision, et le tribunal a finalement statué en sa faveur en décembre 2023, ordonnant la prise en charge et une indemnisation. La caisse a interjeté appel.
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Déclaration de maladie professionnelleM. [J] [Z] a déclaré une maladie professionnelle, une épicondylite droite, sur la base d’un certificat médical daté du 30 avril 2012. Cette maladie a été reconnue et prise en charge par la caisse par une décision du 29 octobre 2012. Rechute et prise en chargeUne rechute a été signalée par M. [Z] avec un certificat médical du 4 décembre 2014, indiquant une ‘impotence fonctionnelle du membre supérieur droit’. Cette rechute a également été prise en charge par la caisse, par décision du 7 janvier 2015. M. [Z] a ensuite bénéficié de rééducation fonctionnelle à plusieurs reprises entre 2016 et 2018. Demande de rééducation fonctionnelleLe 30 septembre 2019, M. [Z] a demandé une nouvelle rééducation fonctionnelle pour une formation au centre de rééducation professionnelle de [Localité 8]. Cependant, la caisse a rejeté cette demande le 20 décembre 2019, après un avis défavorable du médecin-conseil. Expertise médicaleSuite à la demande de M. [Z], une expertise a été réalisée, concluant que la rééducation fonctionnelle était médicalement justifiée, mais non nécessaire en raison des conséquences de la maladie professionnelle initiale. En conséquence, la caisse a refusé la prise en charge le 20 avril 2020. Recours et décision du tribunalM. [Z] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable, qui a confirmé le refus le 31 juillet 2020. Il a ensuite formé un recours devant le tribunal judiciaire de Châteauroux, qui a rendu un jugement le 19 décembre 2023, en faveur de M. [Z], lui accordant la rééducation fonctionnelle demandée et condamnant la caisse à lui verser 800 euros. Appel de la caisseLa caisse a interjeté appel de cette décision le 16 janvier 2024, demandant l’infirmation du jugement et le rejet de la prise en charge de la rééducation fonctionnelle. Elle a également sollicité une expertise médicale subsidiaire. Arguments des partiesLa caisse soutient que M. [Z] a été consolidé de sa rechute et que sa demande de rééducation ne peut être prise en charge que si elle est imputable à la maladie professionnelle. M. [Z], de son côté, demande la confirmation du jugement et une indemnisation supplémentaire. Examen des conditions de prise en chargeLa cour a noté que la caisse ne conteste pas le droit de M. [Z] à une prise en charge de rééducation professionnelle, mais que celle-ci doit être justifiée par les séquelles de la maladie professionnelle. M. [Z] a été licencié pour inaptitude, ce qui renforce sa demande de rééducation. Renvoi devant la commission médicaleLa cour a décidé de renvoyer le dossier devant la commission médicale de recours amiable pour déterminer si les séquelles de M. [Z] nécessitaient une admission en rééducation professionnelle à partir du 30 septembre 2019, en se basant sur les dispositions du Code de la sécurité sociale. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article L. 432-9 du Code de la sécurité sociale concernant la rééducation professionnelle ?L’article L. 432-9 du Code de la sécurité sociale stipule : * »Si, à la suite d’un accident du travail, la victime devient inapte à exercer sa profession ou ne peut le faire qu’après une nouvelle adaptation, elle a le droit, qu’elle ait ou non bénéficié de la réadaptation fonctionnelle prévue au présent code, d’être admise gratuitement dans un établissement public ou privé de rééducation professionnelle ou d’être placée chez un employeur pour y apprendre l’exercice d’une profession de son choix, sous réserve de présenter les conditions d’aptitude requises. Elle subit à cet effet un examen psychotechnique préalable. »* Cet article établit le droit à la rééducation professionnelle pour les victimes d’accidents du travail, mais il est également applicable aux victimes de maladies professionnelles, comme dans le cas de M. [Z]. Il est important de noter que la prise en charge de la rééducation professionnelle est conditionnée par la nécessité de cette rééducation en lien avec les séquelles de la maladie professionnelle. Dans le cas de M. [Z], bien qu’il ait été consolidé, il a affirmé que son licenciement pour inaptitude nécessitait une rééducation professionnelle, ce qui a été corroboré par l’expert médical. Ainsi, la question de l’imputabilité de la rééducation à la maladie professionnelle est centrale pour déterminer si M. [Z] peut bénéficier de cette prise en charge. Quelles sont les implications de l’article L. 141-2 du Code de la sécurité sociale sur l’avis de l’expert ?L’article L. 141-2 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose que : * »L’avis technique de l’expert désigné dans le cadre de la procédure instituée par l’article L. 141-1 s’impose à l’assuré comme à la caisse, mais autorise le juge, sur demande de l’une des parties, à ordonner une nouvelle expertise au vu de l’avis technique rendu par l’expert désigné, lorsque cet avis ne présente pas un caractère suffisamment clair et précis pour s’imposer aux parties et au juge. »* Cet article souligne que l’avis de l’expert est contraignant, mais il offre également la possibilité de demander une nouvelle expertise si l’avis initial est jugé flou ou imprécis. Dans le cas de M. [Z], l’expert a conclu que la rééducation fonctionnelle n’était pas nécessaire en raison des conséquences de la maladie professionnelle. Cependant, les éléments du dossier, notamment le licenciement pour inaptitude et les précédentes rééducations, soulèvent des doutes sur cette conclusion. La cour a donc décidé de renvoyer le dossier à la commission médicale de recours amiable pour évaluer si les séquelles de M. [Z] justifiaient une rééducation professionnelle, ce qui pourrait remettre en question l’avis de l’expert. Comment la décision de la commission de recours amiable peut-elle influencer le cas de M. [Z] ?La décision de la commission médicale de recours amiable, prévue par l’article R. 142-8 du Code de la sécurité sociale, est cruciale car elle déterminera si les séquelles de M. [Z] nécessitent une rééducation professionnelle. Cette commission a pour mission d’examiner les cas de contestation concernant les décisions des caisses d’assurance maladie. Elle doit évaluer si les séquelles constatées lors de la consolidation de M. [Z] à la suite de sa maladie professionnelle justifient une admission dans un établissement de rééducation professionnelle. Si la commission conclut que la rééducation est nécessaire, cela pourrait entraîner une prise en charge par la caisse, conformément à l’article L. 432-9. En revanche, si la commission confirme l’avis de l’expert, M. [Z] pourrait se voir refuser cette prise en charge, ce qui aurait des conséquences significatives sur sa réinsertion professionnelle et son bien-être. Ainsi, la décision de la commission est déterminante pour l’avenir professionnel de M. [Z] et pour l’éventuelle reconnaissance de ses droits à la rééducation. |
CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE
GROSSE à :
CPAM DE L'[Localité 7]
SELARL AVELIA AVOCATS
EXPÉDITION à :
[J] [Z]
Pôle social du Tribunal judiciaire de CHATEAUROUX
ARRÊT DU : 14 JANVIER 2025
Minute n°7/2025
N° RG 24/00276 – N° Portalis DBVN-V-B7I-G5Y6
Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire de CHATEAUROUX en date du 19 Décembre 2023
ENTRE
APPELANTE :
CPAM DE L'[Localité 7]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Mme [L] [K], en vertu d’un pouvoir spécial
D’UNE PART,
ET
INTIMÉ :
Monsieur [J] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Maria DE SOUSA de la SELARL AVELIA AVOCATS, avocat au barreau de CHATEAUROUX
Dispensé de comparution à l’audience du 12 novembre 2024
D’AUTRE PART,
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats :
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 NOVEMBRE 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Xavier AUGIRON, Conseiller, chargé du rapport.
Lors du délibéré :
Madame Nathalie LAUER, Président de chambre,
Madame Ferréole DELONS, Conseiller,
Monsieur Xavier AUGIRON, Conseiller.
Greffier :
Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l’arrêt.
DÉBATS :
A l’audience publique le 12 NOVEMBRE 2024.
ARRÊT :
– Contradictoire, en dernier ressort.
– Prononcé le 14 JANVIER 2025 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
– Signé par Madame Nathalie LAUER, Président de chambre et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le Magistrat signataire.
M. [J] [Z] a déclaré une maladie professionnelle sur la base d’un certificat médical établi le 30 avril 2012 mentionnant une épicondylite droite, prise en charge comme telle par décision de la [6] du 29 octobre 2012.
Une rechute a été déclarée par M. [Z], sur la base d’un certificat médical du 4 décembre 2014 mentionnant une ‘impotence fonctionnelle du membre supérieur droit’, prise en charge par la caisse au titre de la maladie initiale, par décision du 7 janvier 2015.
M. [Z] a alors également bénéficié de la prise en charge de la rééducation fonctionnelle du 1er septembre 2016 au 14 novembre 2016, puis du 1er juin 2017 au 31 mars 2018.
M. [Z] a demandé à bénéficier à nouveau d’une rééducation fonctionnelle à compter du 30 septembre 2019, pour une formation de ‘maîtrise des savoirs de base’ au centre de rééducation professionnelle de [Localité 8] (41), ce que la caisse, par décision du 20 décembre 2019, a rejeté après avis négatif du médecin-conseil.
La [5] a diligenté sur demande de M. [Z] un expert, dans le cadre de l’article L. 141-1 du Code de la sécurité sociale alors applicable, qui a considéré que si la rééducation fonctionnelle était médicalement justifiée, elle n’était pas nécessitée par les conséquences de la maladie professionnelle du 30 avril 2012.
Par décision 20 avril 2020, la [6] a refusé d’accorder à M. [Z] la prise en charge de la rééducation fonctionnelle au titre de la législation relative aux risques professionnels.
M. [Z] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable qui, par décision du 31 juillet 2020, notifiée par courrier du 4 août 2020, a confirmé la décision de la caisse.
M. [Z] a formé le 31 août 2020 un recours devant le tribunal judiciaire de Châteauroux, qui, par jugement du 19 décembre 2023, a :
– débouté la [6] de l’ensemble de ses demandes,
– dit que M.[Z] doit bénéficier de la rééducation fonctionnelle prévue à compter du 30 septembre 2019, dans les conditions de l’article L. 432-9 du Code de la sécurité sociale conformément à sa demande,
– condamné la [6] à payer à M.[Z] la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamné la [6] aux dépens.
La [6] a relevé appel de cette décision, par lettre recommandée avec accusé de réception adressée au greffe de la Cour le 16 janvier 2024.
La [6] demande à la Cour de :
– infirmer le jugement entrepris,
– refuser la prise en charge de la rééducation fonctionnelle,
– débouter M.[Z] de ses demandes dont la condamnation de la caisse à lui payer 800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
– ordonner la mise en ‘uvre une expertise médicale.
La [5] soutient que M. [Z] ayant été consolidé de sa rechute le 11 octobre 2015 avec retour de l’état antérieur, sa demande de rééducation fonctionnelle ne peut être prise en charge que si elle est imputable à la maladie professionnelle, ce à quoi l’expert désigné dans le cadre de l’article R. 141-1 du Code de la sécurité sociale a répondu par la négative de façon claire et précise, et ce qui s’impose à la caisse et à l’intéressé. Elle souligne que M. [Z] n’apporte aucun élément médical susceptible de contredire ses conclusions. Elle demande qu’une expertise soit éventuellement ordonnée.
M. [Z] demande à la Cour de :
– confirmer le jugement entrepris,
– condamner la [5] à lui payer 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamner la [5] aux dépens.
M. [Z] relève qu’il a fait l’objet d’un licenciement pour inaptitude à tout poste à la suite de sa maladie professionnelle, ce qui rendait nécessaire son orientation vers un centre de rééducation professionnelle, soulignant que les précédentes rééducations dont il a bénéficié lui ont permis de bénéficier d’un stage de réorientation puis de deux stages de français langue-étrangère.
Pour un plus ample exposé des moyens et arguments des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures, comme le permet l’article 455 du Code de procédure civile.
Il convient, en application des dispositions de l’article 446-1 alinéa 2 du Code de procédure civile, auquel renvoie l’article 946 du Code de procédure civile, d’autoriser le conseil de M. [Z], comme il l’a sollicité, à formuler ses observations par écrit sans se présenter à l’audience. La décision rendue dans ces conditions est contradictoire.
L’article L. 432-9 du Code de la sécurité sociale prévoit : ‘Si, à la suite d’un accident du travail, la victime devient inapte à exercer sa profession ou ne peut le faire qu’après une nouvelle adaptation, elle a le droit, qu’elle ait ou non bénéficié de la réadaptation fonctionnelle prévue au présent code, d’être admise gratuitement dans un établissement public ou privé de rééducation professionnelle ou d’être placée chez un employeur pour y apprendre l’exercice d’une profession de son choix, sous réserve de présenter les conditions d’aptitude requises. Elle subit à cet effet un examen psychotechnique préalable’.
Il convient en premier lieu de faire remarquer qu’en l’espèce, la [5] ne conteste pas à M. [Z] le droit de bénéficier d’une prise en charge d’une rééducation professionnelle au seul motif qu’il a été victime d’une maladie professionnelle et non d’un accident du travail, seul visé par le texte précité, sachant que M. [Z] a déjà bénéficié d’une telle prise en charge avant la demande litigieuse.
Par ailleurs, il résulte de ce texte que la prise en charge de la rééducation professionnelle est soumise à la condition qu’elle soit rendue nécessaire par les séquelles de la maladie professionnelle dont M. [Z] a été victime.
A cet égard, M. [Z] affirme avoir été licencié pour inaptitude de son ancien emploi de maçon en raison de la maladie professionnelle dont il a été victime, et devoir dès lors apprendre un nouveau métier, ce que ne conteste pas la [5] ni d’ailleurs le docteur [X], médecin expert, qui a relevé dans les conclusions de son expertise que la rééducation professionnelle de M. [Z] était médicalement justifiée.
C’est l’imputabilité de la nécessité d’une rééducation professionnelle à la maladie professionnelle du 30 avril 2012 et à sa rechute du 4 décembre 2014 qui fait débat, l’expert ayant répondu par la négative à cette question.
Pourtant, aucun élément médical ne permet de laisser supposer que M. [Z] ait été victime d’une pathologie autre que celle résultant de la maladie professionnelle, qui serait survenue indépendamment, alors qu’il a déjà bénéficié de la prise en charge d’une rééducation professionnelle au titre de cette maladie et qu’il a bénéficié de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, pour un taux supérieur ou égal à 50 %, et inférieur à 80 %.
L’article L. 141-2 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose que l’avis technique de l’expert désigné dans le cadre de la procédure instituée par l’article L. 141-1 s’impose à l’assuré comme à la caisse, mais autorise le juge, sur demande de l’une des parties, à ordonner une nouvelle expertise au vu de l’avis technique rendu par l’expert désigné, lorsque cet avis ne présente pas un caractère suffisamment clair et précis pour s’imposer aux parties et au juge.
En l’espèce, les éléments du dossier précités sont manifestement susceptibles de remettre en cause l’avis rendu par le médecin expert.
Compte tenu de l’abrogation de l’article L. 141-2 du Code de la sécurité sociale à effet au 1er janvier 2022, il convient en application des nouveaux textes applicables, et avant dire-droit, de renvoyer le dossier devant la commission médicale de recours amiable prévue par l’article R. 142-8 du Code de la sécurité sociale, aux fins que soit déterminé si les séquelles constatées chez M. [Z] lors de sa consolidation à la suite de la maladie professionnelle dont il a été victime nécessitaient ou non qu’il soit admis dans un établissement public ou privé de rééducation professionnelle dans les conditions posées par l’article L. 432-9 du Code de la sécurité sociale, à partir du 30 septembre 2019.
Statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et avant dire-droit,
Ordonne la saisine par la [6] de la commission médicale de recours amiable prévue par l’article R. 142-8 du Code de la sécurité sociale, aux fins que soit déterminé si les séquelles constatées chez M. [Z] lors de sa consolidation à la suite de la maladie professionnelle dont il a été victime nécessitaient ou non qu’il soit admis dans un établissement public ou privé de rééducation professionnelle dans les conditions posées par l’article L. 432-9 du Code de la sécurité sociale, à partir du 30 septembre 2019 ;
Réserve les demandes de M. [Z] ;
Ordonne le retrait du rôle et dit que l’affaire sera rappelée à l’audience sur demande de la partie la plus diligente ;
Réserve les dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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