Conflit sur la prise en charge des dispositifs médicaux en EHPAD : enjeux de facturation et de remboursement.

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Conflit sur la prise en charge des dispositifs médicaux en EHPAD : enjeux de facturation et de remboursement.

L’Essentiel : La CPAM de la Vienne a contrôlé la consommation médicale de l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL pour 2021, révélant des anomalies de facturation et un indu financier de 15.676,21 €. Après notification d’un indu réduit à 11.652,29 €, l’EHPAD a contesté cette décision. La Commission de recours amiable a rejeté le recours, entraînant une saisine du tribunal judiciaire de Poitiers. Le tribunal a partiellement annulé l’indu, condamnant l’EHPAD à payer 19,94 € pour des chefs non contestés et la CPAM à verser 1.000 € pour les frais de justice, tout en déboutant les autres demandes.

Contrôle de la CPAM

La Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de la Vienne a effectué un contrôle sur la consommation médicale des résidents de l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL pour l’année 2021. Ce contrôle a mis en évidence des anomalies de facturation, entraînant un indu financier de 15.676,21 €.

Notification d’indu

Le 27 septembre 2022, la CPAM a notifié à l’EHPAD un indu réduit à 11.652,29 € suite aux observations du contrôle. L’EHPAD a contesté cette décision en saisissant la Commission de recours amiable (CRA) le 29 novembre 2022.

Rejet du recours

La CRA a rejeté le recours de l’EHPAD par décision du 23 février 2023, notifiée le 10 mars 2023. En réponse, l’EHPAD a saisi le tribunal judiciaire de Poitiers le 9 mai 2023 pour contester cette décision.

Procédure judiciaire

Le juge de la mise en état a établi un calendrier procédural, avec une clôture des débats prévue pour le 23 septembre 2024 et une audience fixée au 1er octobre 2024. Lors de cette audience, l’EHPAD a demandé l’annulation de la décision de la CPAM et la restitution des sommes retenues.

Arguments de la CPAM

La CPAM a demandé le débouté de l’EHPAD et a réclamé le paiement de l’indu notifié. Elle a justifié ses demandes par des anomalies de facturation, notamment des dispositifs de perfusion à domicile déjà pris en charge par l’assurance maladie.

Analyse des dispositifs médicaux

Le tribunal a examiné la législation concernant la prise en charge des dispositifs médicaux. Il a conclu que certains dispositifs de perfusion à domicile ne pouvaient pas être inclus dans le forfait de soins alloué à l’EHPAD, entraînant une double facturation.

Décision du tribunal

Le tribunal a partiellement annulé l’indu notifié à l’EHPAD, condamnant ce dernier à payer 19,94 € pour les chefs non contestés. La CPAM a été condamnée à verser 1.000 € à l’EHPAD pour couvrir ses frais de justice, tandis que les autres demandes des parties ont été déboutées.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la base légale pour contester un indu notifié par la CPAM ?

La contestation d’un indu notifié par la CPAM repose sur plusieurs articles du Code de la sécurité sociale. En particulier, l’article L. 165-1 stipule que « le remboursement par l’assurance maladie des dispositifs médicaux à usage individuel […] est subordonné à leur inscription sur une liste établie après avis d’une commission de la Haute Autorité de santé ».

Cela signifie que pour qu’un dispositif médical soit remboursé, il doit être inscrit sur cette liste. Si un établissement, comme l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL, conteste un indu, il doit prouver que les dispositifs en question sont bien remboursables selon les critères établis.

De plus, l’article L. 133-4-4 précise que « les sommes en cause, y compris lorsque celles-ci ont été prises en charge dans le cadre de la dispense d’avance des frais, sont déduites par la caisse […] sous réserve que l’établissement n’en conteste pas le caractère indu ». Cela implique que l’établissement doit démontrer que les sommes réclamées ne sont pas dues.

Enfin, l’article R. 314-166 du Code de l’action sociale et des familles précise que « les produits de la part du forfait global relatif aux soins […] ne peuvent être employés qu’à couvrir les charges […] ». Cela renforce l’argument selon lequel les dispositifs médicaux facturés ne doivent pas être inclus dans le forfait de soins si ceux-ci sont déjà pris en charge.

Quelles sont les conséquences d’une double facturation dans le cadre des soins en EHPAD ?

La double facturation dans le cadre des soins en EHPAD peut entraîner des conséquences financières significatives pour l’établissement. Selon l’article L. 165-1 du Code de la sécurité sociale, le remboursement des dispositifs médicaux est strictement encadré. Si un EHPAD facture des dispositifs médicaux qui sont déjà inclus dans le forfait de soins, cela constitue une double facturation.

L’article L. 133-4-4 stipule que les sommes indûment perçues peuvent être déduites des versements ultérieurs que la caisse alloue à l’établissement. Cela signifie que l’EHPAD pourrait se voir réduire ses futurs remboursements, ce qui pourrait affecter sa trésorerie.

De plus, l’article R. 314-167 du Code de l’action sociale et des familles précise que certains dispositifs médicaux ne relèvent pas d’une prise en charge par les produits du forfait global. Cela signifie que si l’EHPAD a facturé des dispositifs qui ne sont pas remboursables, il devra rembourser ces sommes à la CPAM.

En conséquence, l’EHPAD doit être vigilant dans sa facturation pour éviter des indues et des conséquences financières négatives.

Comment se déroule la procédure de contestation d’un indu devant la CRA ?

La procédure de contestation d’un indu devant la Commission de recours amiable (CRA) est régie par le Code de la sécurité sociale et le Code de procédure civile. Selon l’article L. 133-4-4, l’établissement doit saisir la CRA dans un délai de deux mois suivant la notification de l’indu.

La CRA examine alors le recours et rend une décision. Si le recours est rejeté, comme dans le cas de l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL, l’établissement peut saisir le tribunal judiciaire, comme le prévoit l’article 455 du Code de procédure civile, qui stipule que « les conclusions doivent exposer les moyens de fait et de droit ».

Le tribunal judiciaire examinera alors les arguments des deux parties. L’article 700 du Code de procédure civile permet également à la partie gagnante de demander le remboursement de ses frais de justice, ce qui a été accordé à l’EHPAD dans cette affaire.

Il est donc crucial pour l’établissement de bien préparer son dossier et de fournir toutes les preuves nécessaires pour soutenir sa contestation.

Quelles sont les implications de l’arrêté du 30 mai 2008 sur la prise en charge des dispositifs médicaux ?

L’arrêté du 30 mai 2008 a des implications significatives sur la prise en charge des dispositifs médicaux dans les EHPAD. Cet arrêté précise que « le tarif journalier afférent aux soins […] comprend les charges suivantes : […] le petit matériel médical dont la liste figure en annexe ».

Cela signifie que certains dispositifs médicaux, comme les matériels de perfusion, peuvent être inclus dans le forfait de soins, mais uniquement s’ils sont réutilisables et amortissables. L’article R. 314-166 du Code de l’action sociale et des familles précise que les produits du forfait ne peuvent être employés qu’à couvrir les charges relatives aux prestations de services à caractère médical.

En revanche, les dispositifs médicaux à usage unique, comme les consommables de perfusion, ne sont pas couverts par le forfait et doivent être facturés séparément. L’arrêté indique également que « les dispositifs médicaux cités dans la présente annexe […] doivent respecter les spécifications techniques prévues ».

Ainsi, l’EHPAD doit s’assurer que les dispositifs qu’il facture sont conformes aux exigences de l’arrêté pour éviter des indues. Dans le cas présent, la CPAM a justifié l’indu en démontrant que les dispositifs de perfusion facturés étaient déjà pris en charge dans le cadre du forfait de soins, entraînant une double facturation.

Quels sont les critères pour qu’un dispositif médical soit considéré comme amortissable ?

Pour qu’un dispositif médical soit considéré comme amortissable, plusieurs critères doivent être respectés, conformément à la définition économique de l’amortissement. Selon l’arrêté du 30 mai 2008, un matériel est amortissable s’il s’agit d’un bien dont la durée d’utilisation est limitée dans le temps, généralement d’au moins un an, et dont la valeur est supérieure ou égale à 500 € hors taxes.

L’article R. 314-166 du Code de l’action sociale et des familles précise que les produits du forfait global relatif aux soins ne peuvent être employés qu’à couvrir les charges relatives aux prestations de services à caractère médical, au petit matériel médical et aux fournitures médicales.

En outre, l’annexe de l’arrêté du 30 mai 2008 établit une distinction entre le « petit matériel et fournitures médicales » et le « matériel médical amortissable ». Les dispositifs médicaux qui ne sont pas réutilisables, comme les consommables, ne peuvent pas être considérés comme amortissables.

Ainsi, pour qu’un dispositif soit amortissable, il doit être réutilisable, avoir une durée de vie d’au moins un an et répondre aux critères de coût établis par la réglementation. Dans le cas de l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL, les dispositifs de perfusion à domicile n’étaient pas considérés comme amortissables, justifiant ainsi l’indu notifié par la CPAM.

MINUTE N°24/411
JUGEMENT DU 19 NOVEMBRE 2024
N° RG 23/00151 – N° Portalis DB3J-W-B7H-GAJC
AFFAIRE : EHPAD LE CHAMP DU CHAIL C/ CPAM de la Vienne

TRIBUNAL JUDICIAIRE de POITIERS

PÔLE SOCIAL

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 19 NOVEMBRE 2024

DEMANDEUR

EHPAD LE CHAMP DU CHAIL, sis 48 rue de la Morliane – 86700 VALENCE EN POITOU,
exploité par le C.I.A.S. de la Communauté de Communes du Civraisien en Poitou,

représenté par Maître François REYE, avocat au barreau de POITIERS ;

DÉFENDERESSE

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA VIENNE, dont le siège est sis 41 rue du Touffenet – 86043 POITIERS CEDEX 9,

représentée par Madame [U] [N], munie d’un pouvoir ;

DÉBATS

A l’issue des débats en audience publique le 1er octobre 2024, le tribunal a indiqué que le jugement sera prononcé par mise à disposition au Greffe le 19 novembre 2024.

COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRÉSIDENTE : Nicole BRIAL,
ASSESSEUR : Céline SCHWEBEL, représentant les employeurs,
ASSESSEUR : Catherine LEFEVRE, représentant les salariés,
GREFFIER, lors des débats et de la mise à disposition au greffe : Olivier PETIT.

LE : 19/11/2024

Notifications à :
– EHPAD LE CHAMP DU CHAIL
– CPAM de la Vienne
Copie à :
– Me François REYE

EXPOSE DU LITIGE :

La Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de la Vienne a procédé à un contrôle du suivi de la consommation médicale des résidents de l’Etablissement d’hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD) LE CHAMP DU CHAIL sur la période du 1er janvier au 31 décembre 2021. A ce titre, elle a relevé plusieurs anomalies de facturation sur l’enveloppe soins de ville pour une incidence financière de 15.676,21 €.

Par décision du 27 septembre 2022, la CPAM de la Vienne a adressé à l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL une notification d’indu ramené à un montant de 11.652,29 € suites aux observations produites à l’issue du contrôle.

Le 29 novembre 2022, l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL a saisi la Commission de recours amiable (CRA) en contestation de la décision d’indu.

Par décision du 23 février 2023, notifiée le 10 mars suivant, la CRA a rejeté le recours de l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL.

Par requête déposée au greffe le 9 mai 2023, l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL a saisi le tribunal judiciaire de Poitiers en contestation de la décision de rejet de la CRA.

Par une ordonnance du 21 mars 2024, le juge de la mise en état a fixé : un calendrier procédural d’échange des écritures et pièces entre les parties, la clôture des débats au 23 septembre 2024 et la date d’audience au 1er octobre 2024.

L’affaire a été utilement appelée et plaidée à l’audience du 1er octobre 2024.

A cette audience, l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL, représenté par conseil, a demandé au tribunal de :
– annuler la décision de la CPAM de la Vienne lui notifiant un indu d’un montant de 11.652,29 € ;
– condamner la CPAM de la Vienne à lui restituer toute somme qui aurait été retenue pour couvrir le prétendu indu ;
– condamner la CPAM de la Vienne à lui verser la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il sera renvoyé à ses conclusions reçues au greffe le 23 septembre 2024, pour un plus ample exposé des moyens, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

En défense, la CPAM de la Vienne, valablement représentée, a conclu au débouté, et a sollicité la condamnation de l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL à lui payer la somme actualisée de 11.652,29 € au titre de l’indu notifié.

Il sera renvoyé à ses conclusions reçues au greffe le 23 septembre 2024, pour un plus ample exposé des moyens, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 19 novembre 2024, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur le bien-fondé de l’indu :

A titre liminaire, il convient de préciser que seule l’absence de prise en charge des dispositifs de perfusion à domicile par diffuseur par l’assurance maladie est contestée au titre de l’indu, de sorte que les autres chefs d’indu seront maintenus pour un montant de 19,94 €, selon le décompte produit par la CPAM de la Vienne.

Le premier alinéa de l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale indique: « Le remboursement par l’assurance maladie des dispositifs médicaux à usage individuel, des tissus et cellules issus du corps humain quel qu’en soit le degré de transformation et de leurs dérivés, des produits de santé autres que les médicaments visés à l’article L. 162-17 et des prestations de services et d’adaptation associées est subordonné à leur inscription sur une liste établie après avis d’une commission de la Haute Autorité de santé mentionnée à l’article L. 161-37. L’inscription est effectuée soit par la description générique de tout ou partie du produit concerné, soit sous forme de marque ou de nom commercial. L’inscription sur la liste peut elle-même être subordonnée au respect de spécifications techniques, d’indications thérapeutiques ou diagnostiques et de conditions particulières de prescription, d’utilisation et de distribution ».

L’article L. 133-4-4 du même code énonce : « Lorsqu’un organisme chargé de la gestion d’un régime obligatoire d’assurance maladie prend en charge, pour une personne résidant dans un établissement mentionné aux I, II et IV bis de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles, à titre individuel, des prestations d’assurance maladie qui relèvent des tarifs afférents aux soins fixés en application de l’article L. 314-2 du même code, les sommes en cause, y compris lorsque celles-ci ont été prises en charge dans le cadre de la dispense d’avance des frais, sont déduites par la caisse mentionnée à l’article L. 174-8 du présent code, sous réserve que l’établissement n’en conteste pas le caractère indu, des versements ultérieurs que la caisse alloue à l’établissement au titre du forfait de soins. Les modalités de reversement de ces sommes aux différents organismes d’assurance maladie concernés sont définies par décret.

L’action en recouvrement se prescrit par trois ans à compter de la date de paiement à la personne de la somme en cause. Elle s’ouvre par l’envoi à l’établissement d’une notification du montant réclamé ».

L’article R. 314-166 du code de l’action sociale et des familles dispose :  » I.- Les produits de la part du forfait global relatif aux soins prévue au 1° de l’article R. 314-159 et des tarifs journaliers relatifs aux soins ne peuvent être employés qu’à couvrir les charges suivantes : 1° Les charges relatives aux prestations de services à caractère médical, au petit matériel médical et aux fournitures médicales dont la liste est fixée par arrêté des ministres chargés des affaires sociales et de la sécurité sociale, dans les conditions prévues à l’article L. 314-8 ; […] « .

L’article R. 314-167 dudit code énonce : « Ne relèvent pas d’une prise en charge par les produits du forfait global relatif aux soins et sont à la charge des régimes obligatoires de base de l’assurance maladie, dans les conditions prévues par le code de la sécurité sociale, ou de l’aide médicale d’Etat, les prestations suivantes : […] 8° Pour les établissements ne disposant pas d’une pharmacie à usage intérieur, les dispositifs médicaux qui ne sont pas inclus dans la liste prévue au septième alinéa de l’article L. 314-8 ».

L’article L. 314-8 du même code, septième alinéa, prévoit : « Dans les établissements et services mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 qui ne disposent pas de pharmacie à usage intérieur qui ne sont pas membres d’un groupement de coopération sanitaire ou d’un groupement de coopération sociale et médico-sociale disposant d’une pharmacie à usage intérieur, les prestations de soins mentionnées au 1° du I de l’article L. 314-2 ne comprennent pas l’achat, la fourniture, la prise en charge et l’utilisation de médicaments inscrits sur la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables mentionnées à l’article, L. 162-17 du code de la sécurité sociale, ni ceux des produits et prestations mentionnés à l’article L. 165-1 du même code, à l’exception de certains dispositifs médicaux dont la liste est fixée par arrêté. Ces dispositions s’appliquent à compter du 1er janvier 2008. Elles sont applicables aux contrats mentionnés au IV ter de l’article L. 313-12 en cours à cette date ».

L’arrêté du 26 avril 1999, dans sa version modifiée par l’arrêté du 30 mai 2008, prévoit en son article 1er que « le tarif journalier afférent aux soins, dénommé partiel, en application de l’article 9 du décret du 26 avril 1999 susvisé comprend les charges suivantes : […]
5° Le petit matériel médical dont la liste figure en annexe I du présent arrêté et les fournitures médicales ;
6° L’amortissement du matériel médical dont la liste figure en annexe II du présent arrêté  »

L’article 2 de ce même arrêté énonce que  » Le tarif journalier afférent aux soins, dénommé global, en application de l’article 9 du décret susvisé, inclut, outre les charges prévues à l’article 1er :
1° Les charges correspondant aux dépenses de rémunération et de prescriptions des médecins généralistes libéraux intervenant dans l’établissement ;
2° Les charges correspondant aux dépenses de rémunération des auxiliaires médicaux libéraux ;
3° Les examens de biologie et de radiologie autres que ceux inclus dans les dispositions prévues à la rubrique f de l’annexe III du décret précité ».

Il ressort de l’arrêté du 30 mai 2008 fixant la liste du petit matériel médical et des fournitures médicales ainsi que la liste du matériel médical amortissable compris dans le tarif journalier afférent aux soins, que celui-ci vise, outre les petits matériels, le matériel médical amortissable. L’acception économique de l’épithète  » amortissable  » implique qu’il s’agit de matériel médical d’un coût nécessairement plus élevé, qui ne peut faire l’objet d’une prise en charge comptable par le mouvement d’un simple compte « achat », mais devant au contraire être comptabilisé par l’intermédiaire d’un compte « amortissement » qui a vocation à étaler la charge comptable de ces types de matériels sur plusieurs exercices. En effet, les biens amortissables sont par nature des  » immobilisations  » dont la durée d’utilisation est limitée dans le temps, mais qui doit être a minima d’un an et dont la valeur est, généralement, supérieure ou égale à 500 € hors taxes.

L’annexe de l’arrêté du 30 mai 2008, se substituant à celle de l’arrêté du 26 avril 1999, établit ainsi la liste des dispositifs médicaux compris dans le tarif afférent aux soins prévu par l’article R 314-161 du code de l’action sociale et des familles en application de l’article R 314-162 de ce code. Si en toute logique on peut trouver dans son paragraphe I relatif au « petit matériel et fournitures médicales » l’abaisse-langue, le doigtier, le gant stérile, les articles pour pansements, les sondes (naso-gastriques, naso-entérale, vésicale), la seringue et l’aiguille ainsi que d’autres matériels faisant à l’évidence l’objet

d’une consommation finale, au sens économique du terme, le paragraphe II consacré au « matériel médical amortissable » comprend pour sa part le chariot de soins, l’électrocardiographe, le stérilisateur, le fauteuil roulant, le lit médicalisé ainsi que d’autres matériels d’un coût justifiant un amortissement comptable.

Ce même paragraphe II fait également référence aux « Matériels de perfusion périphérique et leurs accessoires (pied à sérum, potence, panier de perfusion) ». Il convient ainsi de comprendre que ces matériels de perfusion sont réutilisables, et donc amortissables au sens de l’acception précitée.

En outre, si cette annexe précise en introduction que « Les dispositifs médicaux cités dans la présente annexe et inscrits en outre sur la liste des produits et prestations remboursables mentionnée à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale doivent respecter les spécifications techniques prévues, le cas échéant, par ladite liste « , cette précision n’a pas d’autre portée que de rappeler que les matériels qui sont inscrits sur la liste des produits et prestations (LPP) doivent en respecter les spécifications techniques.

L’arrêté du 12 avril 2016, portant modification des modalités de prise en charge de dispositifs médicaux de perfusion à domicile et prestations associées visées sur la liste des produits et prestations prévue à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, rectifié par un arrêté du 28 avril 2016, vient uniquement créer, au sein de la LPP, une nouvelle sous-section 1 intitulée  » Dispositifs médicaux et prestations associées de perfusion à domicile (hors insulinothérapie)  » au sein de la section 2 relative aux  » Dispositifs médicaux pour perfusion à domicile ».

En l’espèce, il n’est pas contesté que l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL a opté pour un forfait partiel de soins versé par l’assurance maladie et qu’il ne dispose pas d’une pharmacie à usage intérieur.

La CPAM de la Vienne a relevé plusieurs anomalies de facturation sur l’enveloppe soins de ville à hauteur de 11.652,29 €, au motif que les dispositifs de perfusion à domicile qui lui ont été facturés par le fournisseur de l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL, la société LG POITOU SERVICES, étaient déjà pris en charge par l’assurance maladie au titre du forfait partiel de soins alloué à l’EHPAD, occasionnant ainsi une double facturation de ces dispositifs médicaux au regard de l’arrêté du 30 mai 2008.

La caisse indique avoir adressé un rappel réglementaire à certains fournisseurs d’EHPAD en matière d’appareillages médicaux, notamment à la société LG POITOU SERVICES, par courrier du 8 septembre 2022, qui indique : « La CPAM a été sollicitée à de nombreuses reprises par des EHPAD suite à la proposition de contractualisation réalisée par des entreprises fournisseurs d’appareillages.
Dans ce contexte, nous souhaitons vous rappeler le périmètre de prise en charge des dispositifs médicaux dans les EHPAD (conformément à l’article 314-8 du CASF).
Pour les EHPAD sans pharmacie à usage interne, tous les dispositifs médicaux remboursables sont pris en charge en sus du forfait de soins à l’exception de la liste du petit matériel médical, des fournitures médicales et du matériel médical amortissable annexée à l’arrêté du 30/05/2008 (Voir Liste des dispositifs médicaux en document en pièce jointe) qui sont inclus dans le forfait de soin.
Pour les EHPAD avec pharmacie à usage interne, tous les dispositifs médicaux remboursables sont inclus dans le forfait de soins quelle que soit l’option tarifaire choisie par l’EHPAD y compris la liste du petit matériel médical, des fournitures médicales et du matériel médical amortissable annexée à l’arrêté du 30/05/2008 (Voir Liste des dispositifs médicaux en document en pièce jointe).
Nous vous remercions de prendre en compte ce rappel réglementaire ».

Or, dans ce courrier la CPAM se borne à rappeler des textes avec des indications de portée générale qui, au demeurant, ne permettent pas à son destinataire de comprendre précisément en quoi les dispositifs de perfusion à domicile qu’il a facturés à l’assurance maladie ne peuvent être pris en charge en sus du forfait de soins déjà alloué aux EHPAD qu’il fournit.

Cet arrêté du 30 mai 2008, détaille la liste des dispositifs médicaux concernés par la réintégration budgétaire au sein des  » forfaits soins  » des établissements sans pharmacie à usage interne. Il n’est toutefois pas contesté par les parties que cet arrêté n’a pas été modifié par l’arrêté du 12 avril 2016 qui a seulement créé une nouvelle nomenclature des dispositifs de perfusion à domicile.

Au soutien de ses prétentions, la CPAM de la Vienne produit un listing faisant apparaître le nom de chaque résident intéressé, la prestation, le produit ou le matériel payé, leur date, le montant de la dépense et du remboursement, ainsi que le nom de l’exécutant et soutient que ces prestations et soins ont été pris en charge à tort par l’assurance maladie au titre des soins de ville comme étant inclus dans le forfait soins versé directement à l’établissement, justifiant un indu total de 11.652,29 €.

Elle relève ainsi plusieurs codes issus de la LPP qui ne pourraient pas faire l’objet d’une prise en charge en sus du forfait de soins déjà alloué à l’EHPAD:
– 1107250 : PERFADOM36-C-DIFF=4A6/S – Forfait hebdomadaire de consommables et d’accessoires de la perfusion à domicile par diffuseur pour la prescription de quatre à six perfusions par semaine. La prise en charge est assurée pour les patients répondant aux conditions générales d’attribution de la perfusion à domicile, définies au point I de la présente sous-section, pour un des modes d’administration de la perfusion listés au point III.1.3 relatif aux diffuseurs. Ce forfait comprend un ou plusieurs des 9 types d’ensembles de consommables et d’accessoires décrits au point II.3.2 ;
– 1179165 : PERFADOM8-S-DIFF – Forfait hebdomadaire de suivi de la perfusion à domicile par diffuseur. La prise en charge est assurée pour les patients répondant aux conditions générales d’attribution de la perfusion à domicile, définies au point I de la présente sous-section, pour un mode d’administration de la perfusion listé au point III.1.3, relatif aux diffuseurs ;
– 1101648 : PERFADOM35-C-DIFF=2A3/S – Forfait hebdomadaire de consommables et d’accessoires de la perfusion à domicile par diffuseur pour la prescription de deux à trois perfusions par semaine. La prise en charge est assurée pour les patients répondant aux conditions générales d’attribution de la perfusion à domicile, définies au point I de la présente sous-section, pour un des modes d’administration de la perfusion listés au point III.1.3 relatif aux diffuseurs. Ce forfait comprend un ou plusieurs des 9 types d’ensembles de consommables et d’accessoires décrits au point II.3.2 ;
– 1164778 : PERFADOM4-I1-DIFF – Forfait de première installation de la perfusion à domicile par diffuseur. La prise en charge est assurée pour les patients répondant aux conditions générales d’attribution de la perfusion à domicile, définies au point I de la présente sous-section, pour un mode d’administration de la perfusion défini au point III.1.3 relatif aux diffuseurs ;

– 1154018 : PERFADOM37-C-DIFF=1/J – Forfait hebdomadaire de consommables et d’accessoires de la perfusion à domicile par diffuseur, pour la prescription d’une perfusion par jour ou 7 perfusions sur 7 jours. La prise en charge est assurée pour les patients répondant aux conditions générales d’attribution de la perfusion à domicile, définies au point I de la présente sous-section, pour un des modes d’administration de la perfusion listés au point III.1.3 relatif aux diffuseurs. Ce forfait comprend un ou plusieurs des 9 types d’ensembles de consommables et d’accessoires décrits au point II.3.2;
– 1191108 : PERFADOM5-I2-DIFF – Forfait de seconde installation d’un diffuseur à compter du 5ème jour (à partir de J+4) après une première installation de perfusion à domicile par système actif ou de nutrition parentérale à domicile ;
– 1131030 : PERFADOM38-C-DIFF=2/J – Forfait hebdomadaire de consommables et d’accessoires de la perfusion à domicile par diffuseur pour la prescription de deux perfusions par jour ou 14 perfusions sur 7 jours. La prise en charge est assurée pour les patients répondant aux conditions générales d’attribution de la perfusion à domicile, définies au point I de la présente sous-section, pour un des modes d’administration de la perfusion listés au point III.1.3 relatif aux diffuseurs. Ce forfait comprend un ou plusieurs des 9 types d’ensembles de consommables et d’accessoires décrits au point II.3.2 ;

Ces codes LPP concernent ainsi, soit des forfaits hebdomadaires de consommables et d’accessoires de la perfusion à domicile par diffuseur, soit des forfaits d’installation ou de suivi de la perfusion à domicile par diffuseur.

A ce titre, la LPP indique expressément qu’un « diffuseur portable est un dispositif médical stérile externe non implantable, à usage unique, qui permet la diffusion en ambulatoire de médicaments par un mécanisme utilisant une énergie autre que l’électricité, la gravité ou le corps humain et fournie par le dispositif ».

Il résulte de tout ce qui précède, qu’au regard du contenu limitatif des matériels compris dans le forfait au sens de l’arrêté du 30 mai 2008 et des listes annexées à cet arrêté, le matériel de perfusion par diffuseur n’est pas compris dans le forfait de soins puis qu’il n’est pas réutilisable et donc pas « amortissable ». Il en va de même pour les accessoires autres que ceux expressément mentionnés par ledit arrêté « pied à sérum, potence, panier de perfusion », ainsi que pour les consommables qui sont par définition à usage unique.

En outre, si l’annexe I dudit arrêté prévoit que les seringues et aiguilles sont comprises dans le forfait de soin, elle précise « sauf si le matériel est compris dans la rémunération de l’acte ». Les petits matériels compris dans les forfaits de perfusion à domicile par diffuseur, ne rentrent donc pas dans le forfait de soin.

Il ressort également de cet arrêté que l’installation et le suivi des dispositifs de perfusion par diffuseur n’y sont pas expressément mentionnés, de sorte qu’ils ne sont pas compris dans le forfait de soin.

En conséquence, il convient d’annuler partiellement l’indu réclamé à l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL dès lors que l’ensemble des dispositifs médicaux de perfusions à domicile par diffuseur devait être pris en charge par l’assurance maladie en sus du forfait partiel de soins alloué à l’EHPAD. Toutefois, l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL sera condamné à payer à la CPAM de la Vienne la part non contestée de l’indu, pour un montant de 19,94 €.

L’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL, ne rapportant pas la preuve d’éventuelles retenues opérées par la CPAM de la Vienne pour couvrir l’indu, sera débouté de sa demande de restitution.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Il serait inéquitable de laisser à l’EHPAD LE CHAMP DU CHAIL l’entière charge de ses frais de justice. Aussi, la CPAM de la Vienne sera condamnée à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal judiciaire, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

ANNULE partiellement l’indu notifié à l’Etablissement d’hébergement des personnes âgées dépendantes LE CHAMP DU CHAIL le 27 septembre 2022, pour un montant de 11.632,35 euros ;

CONDAMNE l’Etablissement d’hébergement des personnes âgées dépendantes LE CHAMP DU CHAIL à payer à la Caisse primaire d’assurance maladie de la Vienne, en deniers ou quittances, la somme de 19,94 euros au titre des chefs non contestés de l’indu notifié le 27 septembre 2022 ;

CONDAMNE la Caisse primaire d’assurance maladie de la Vienne à verser à la l’Etablissement d’hébergement des personnes âgées dépendantes LE CHAMP DU CHAIL une somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes ;

CONDAMNE la Caisse primaire d’assurance maladie de la Vienne aux dépens.

Ainsi dit et jugé les jour, mois et an susdits.

Le Greffier, La Présidente,
O. PETIT N. BRIAL


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