Presse en difficulté : conditions du licenciement

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Presse en difficulté : conditions du licenciement

Externaliser la modération des commentaires

Une société de presse qui procède à l’externalisation de la fonction de modération de ses  commentaires la nuit et le week-end n’est pas en droit de licencier la salariée qui s’occupait antérieurement de cette fonction.

Sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise de presse

L’éditeur d’un magazine de presse a fait valoir, sans succès, dans la lettre de licenciement de la salariée, qu’une réorganisation de ce service de l’entreprise était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la société et du secteur média du groupe : « la modération représente un poste de charges extrêmement significatif difficilement maîtrisable compte tenu de la très forte croissance de la fréquentation du site, croissance de la fréquentation qui accroît le nombre de commentaires publiés. Les coûts de la modération annuelle s’élèvent à 400 Keuros, soit plus de 20 % de la perte d’exploitation du site. Le modèle de modération actuellement en vigueur est trop éloigné des pratiques actuelles des éditeurs de presse en ligne qui confient généralement la modération de leur site Internet à des prestataires extérieurs qui opèrent selon un cahier des charges beaucoup plus simple.[.] Après en avoir informé le comité d’entreprise ».

En dehors de l’évocation d’un contexte économique général touchant la presse magazine, qui ne peut en tant que tel justifier des menaces alléguées sur la compétitivité de l’entreprise, c’est à juste titre que les premiers juges ont relevé que la société de presse ne produisait qu’une note économique, à l’exclusion de tout document comptable, seul de nature à justifier la réalité des difficultés économiques invoquées, le coût annuel du service de modération, le résultat courant de l’entreprise, le lien entre les difficultés alléguées et la suppression du poste de la salariée.

Licenciement sans cause réelle et sérieuse

A noter qu’aux termes du procès-verbal du comité extraordinaire, le CE avait, au vu de la note invoquée, émis un avis défavorable estimant que les licenciements n’étaient pas justifiés au regard de la situation économique de la société. Le licenciement de la salariée modératrice était donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.

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Questions / Réponses juridiques

Quels types de sites la salariée a-t-elle consultés durant son temps de travail ?

La salariée a consulté plusieurs types de sites durant son temps de travail, notamment des sites de rencontre, des sites de chat et des sites de voyance.

Sur une période de six semaines, il a été établi qu’elle avait accédé à un site de rencontre pendant 17 jours, à un site de chat pendant 24 jours, et à un site de voyance également pendant 24 jours.

Cette fréquence d’accès à des sites non liés à ses fonctions professionnelles a été jugée excessive et inappropriée, excluant la possibilité que ces connexions soient dues à des actes malveillants d’autres personnes utilisant son poste.

Quelles mesures l’employeur a-t-il mises en place concernant l’utilisation de l’informatique ?

L’employeur a mis en place un Code de bon usage de l’informatique, qui stipule les règles à suivre pour l’utilisation des outils informatiques en entreprise.

Ce code prévoit également des sanctions disciplinaires en cas de manquements, qui doivent être déterminées en fonction de la gravité des faits.

Les critères de gravité incluent l’impact sur l’entreprise ou sur les autres employés, ainsi que la récurrence des manquements malgré des mises en garde.

Cependant, dans ce cas précis, il a été noté qu’aucun avertissement ou mise en garde n’avait été donné à la salariée avant la sanction.

Pourquoi la rétrogradation de la salariée a-t-elle été jugée disproportionnée ?

La rétrogradation de la salariée a été jugée disproportionnée car il n’y avait eu aucune mise en garde préalable concernant ses connexions à des sites non professionnels.

L’employeur n’a pas réussi à prouver que ces consultations avaient eu des conséquences nuisibles pour l’entreprise, en dehors de la simple violation du règlement.

Ainsi, la sanction appliquée ne correspondait pas à la gravité des faits, ce qui a conduit à la conclusion que la rétrogradation était injustifiée.

Quelles sont les conditions nécessaires pour modifier un contrat de travail ?

Selon les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, toute modification du contrat de travail par l’employeur nécessite l’accord exprès du salarié.

Cet accord ne peut pas être déduit du silence du salarié ou de la poursuite de son travail.

Cela signifie que pour qu’une sanction disciplinaire, comme une rétrogradation, soit valide, l’employeur doit obtenir le consentement clair et explicite de l’employé concerné.

Dans le cas présent, l’absence de mise en garde et de consentement a soulevé des questions sur la légitimité de la sanction appliquée.


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