Nouvel équilibre en faveur de la protection des droits
Il est acquis que la simple fourniture d’installations destinées à permettre ou à réaliser une communication de données (œuvres protégées incluses), ne constitue pas en soi une communication au publique au sens de la directive droit d’auteur et des droits voisins n°2001/29 du 22 mai 2001 (DADV). Toutefois, l’équilibre semble avoir changé à la lumière de l’évolution de la jurisprudence de la CJUE qui tend i) à conforter les actions préventives des titulaires de droits et ii) confirme que les plateformes telles que « The Pirate Bay » procèdent bien à une communication au public des œuvres. A l’origine, la DADV prévoyait déjà que l’harmonisation du droit d’auteur et des droits voisins doit se fonder sur un niveau de protection élevé, car ces droits sont essentiels à la création intellectuelle. Leur protection contribue au maintien et au développement de la créativité dans l’intérêt des auteurs, des interprètes ou exécutants, des producteurs, des consommateurs, de la culture, des entreprises et du public en général.
Affaire The Pirate Bay
La CJUE a considéré que la fourniture et la gestion d’une plateforme de partage en ligne d’œuvres protégées telle que « The Pirate Bay » peut constituer une violation du droit d’auteur même si les œuvres concernées sont mises en ligne par les utilisateurs de la plateforme de partage, ses administrateurs jouant un rôle incontournable dans la mise à disposition de ces œuvres.
La plateforme « The Pirate Bay » permet aux utilisateurs de partager et de télécharger, par fragments (« torrents »), des œuvres qui se trouvent sur leurs propres ordinateurs. Les fichiers en question sont, dans leur grande majorité, des œuvres protégées par le droit d’auteur, sans que les titulaires du droit n’aient autorisé les administrateurs et les utilisateurs de cette plateforme à effectuer des actes de partage.
Responsabilité des administrateurs
Il était déjà possible aux juridictions d’ordonner aux FAI de bloquer les noms de domaines et les adresses IP de toute plateforme telle que « The Pirate Bay ». Les juridictions peuvent également adresser des injonctions aux administrateurs de ces plateformes qui jouent un rôle incontournable dans la mise à disposition des œuvres et notamment par : i) l’indexation des fichiers torrents ; ii) la gestion d’un moteur de recherche par catégories, iii) la suppression des fichiers torrents obsolètes ou erronés et qui filtrent de manière active certains contenus. Enfin et surtout, la mise à disposition et la gestion d’une plateforme, telle que « The Pirate Bay », est réalisée dans le but d’en retirer un bénéfice, cette plateforme générant des recettes publicitaires considérables.
Communication au public d’œuvres protégées
Les auteurs disposent d’un droit de nature préventive leur permettant de s’interposer entre d’éventuels utilisateurs de leur œuvre et la communication au public que ces utilisateurs pourraient envisager d’effectuer, et ce afin d’interdire celle-ci (CJUE, 26 avril 2017, Stichting Brein, C‑527/15). Afin d’apprécier si un utilisateur réalise un acte de « communication au public », il importe de tenir compte de plusieurs critères complémentaires, de nature non autonome et interdépendants les uns par rapport aux autres. Parmi ces critères, figurent désormais : i) le rôle incontournable joué par l’utilisateur et le caractère délibéré de son intervention ; ii) la notion de « public » vise un nombre indéterminé de destinataires potentiels et implique, par ailleurs, un nombre de personnes assez important (CJUE, 26 avril 2017, Stichting Brein, C‑527/15) ; iii) pour être qualifiée de « communication au public », une œuvre protégée doit être communiquée selon un mode technique spécifique, différent de ceux jusqu’alors utilisés ou, à défaut, auprès d’un « public nouveau », c’est-à-dire un public n’ayant pas été déjà pris en compte par les titulaires du droit d’auteur lorsqu’ils ont autorisé la communication initiale de leur œuvre au public ; iv) le caractère lucratif d’une communication. |
→ Questions / Réponses juridiques
Quel est l’impact de la jurisprudence de la CJUE sur la protection des droits d’auteur ?La jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a significativement influencé l’équilibre en faveur de la protection des droits d’auteur. Elle a renforcé les actions préventives des titulaires de droits, ce qui signifie que ces derniers peuvent désormais agir plus efficacement pour protéger leurs œuvres. En particulier, la CJUE a établi que des plateformes comme « The Pirate Bay » sont responsables de la communication au public des œuvres protégées. Cela signifie que même si les utilisateurs mettent en ligne les œuvres, les administrateurs de la plateforme ont un rôle déterminant dans leur mise à disposition, ce qui les rend également responsables des violations potentielles des droits d’auteur. Quelles sont les responsabilités des administrateurs de plateformes comme The Pirate Bay ?Les administrateurs de plateformes telles que « The Pirate Bay » ont des responsabilités importantes en matière de droit d’auteur. Ils jouent un rôle incontournable dans la mise à disposition des œuvres protégées, ce qui les expose à des actions en justice. Les juridictions peuvent ordonner aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) de bloquer l’accès à ces plateformes. De plus, les administrateurs peuvent recevoir des injonctions pour des actions spécifiques, telles que l’indexation des fichiers torrents, la gestion d’un moteur de recherche par catégories, et la suppression de fichiers obsolètes. Il est également important de noter que ces plateformes génèrent des revenus publicitaires considérables, ce qui renforce leur responsabilité dans la protection des droits d’auteur. Comment la CJUE définit-elle la communication au public d’œuvres protégées ?La CJUE a établi des critères précis pour déterminer si un acte constitue une « communication au public » d’œuvres protégées. Ces critères sont interdépendants et doivent être évalués ensemble. Premièrement, le rôle de l’utilisateur est déterminant ; il doit jouer un rôle incontournable et délibéré dans la communication. Deuxièmement, la notion de « public » implique un nombre indéterminé de destinataires, ce qui signifie que l’œuvre doit atteindre un public assez large. Troisièmement, pour qu’une œuvre soit considérée comme communiquée au public, elle doit être diffusée par un mode technique spécifique ou à un « public nouveau » qui n’a pas été pris en compte lors de la communication initiale. Enfin, le caractère lucratif de la communication est également un facteur déterminant dans cette évaluation. Pourquoi la protection des droits d’auteur est-elle essentielle selon la DADV ?La directive sur le droit d’auteur et les droits voisins (DADV) souligne l’importance d’une protection élevée des droits d’auteur. Ces droits sont fondamentaux pour la création intellectuelle et leur protection est essentielle pour encourager la créativité. En protégeant les droits des auteurs, interprètes, producteurs et autres parties prenantes, la DADV vise à maintenir et à développer la créativité. Cela profite non seulement aux créateurs, mais également aux consommateurs, à la culture, aux entreprises et au public en général. La protection des droits d’auteur contribue à un écosystème culturel dynamique, où les œuvres peuvent être créées, partagées et appréciées, tout en garantissant que les créateurs reçoivent une compensation équitable pour leur travail. |
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