Pas de droits d’auteur sur les connecteurs Wago 

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Pas de droits d’auteur sur les connecteurs Wago 
L’Essentiel : Dans l’affaire Wago c/ Miidex, la contrefaçon de droits d’auteur a été écartée. Les connecteurs WAGO, bien que présentant des caractéristiques esthétiques, n’ont pas été jugés originaux au sens du droit d’auteur. Selon le tribunal, l’originalité requiert une empreinte personnelle de l’auteur, ce qui n’est pas le cas ici. En revanche, la concurrence déloyale a été retenue, car Miidex a commercialisé des produits similaires, créant un risque de confusion avec les connecteurs WAGO. Les éléments de preuve ont montré que Miidex avait délibérément profité de la réputation et des investissements de WAGO, établissant ainsi des actes de parasitisme.

Le choix de boîtiers transparents et de leviers aux bords arrondis et de couleur vive ne peut cependant suffire à traduire l’empreinte de la personnalité d’un auteur qui rendrait des connecteurs originaux et protégeables par le droit d’auteur.

Wago c/ Miidex

Les sociétés WAGO, ayant appris que la société MIIDEX importait, offrait à la vente et vendait en France des connecteurs avec 2, 3 ou 5 entrées, reproduisant selon elles, les caractéristiques de leurs modèles, l’ont mise en demeure, le 8 novembre 2016, puis le 22 décembre 2016, de cesser ces agissements, de communiquer des informations commerciales afférentes à ces produits et de les indemniser de leur préjudice commercial et d’image, ce à quoi la société MIIDEX s’est opposée en contestant les droits des sociétés WAGO.

Les sociétés WAGO ont fait procéder les 1er et 15 mars 2017 à un procès-verbal de constat d’achat sur le site internet amazon.fr de deux produits, puis elles ont assigné la société MIIDEX devant le tribunal de grande instance de Paris, par acte du 17 mars 2017, en contrefaçon de droit d’auteur et de modèles communautaires ainsi qu’en concurrence déloyale et parasitaire.

Contrefaçon de droits d’auteur écartée

La contrefaçon de droits d’auteur n’a pas été retenue.

Conformément à l’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une ‘uvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial. En application de l’article L.112-1 du même code, ce droit appartient à l’auteur de toute ‘uvre de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination.

Il se déduit de ces dispositions le principe de la protection d’une oeuvre sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale en ce sens qu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et n’est pas la banale reprise d’un fonds commun non appropriable.

L’originalité d’une oeuvre de l’esprit

Néanmoins, lorsque l’originalité d’une oeuvre de l’esprit est contestée, il appartient à celui qui revendique la protection au titre du droit d’auteur de caractériser l’originalité de l’oeuvre revendiquée, c’est à dire de justifier de ce que cette oeuvre présente une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l’empreinte de la personnalité de son auteur.

En l’espèce, les sociétés WAGO définissent ainsi qu’il suit la combinaison des caractéristiques originales des connecteurs revendiqués :

« – le boitier isolant est transparent et plat, rectangulaire et a des bords arrondis, en particulier dans la zone supérieure,

– les leviers d’actionnements larges, plats et colorés sont montés affleurant à la partie supérieure du boîtier isolant et recouvrent la partie avant de la partie supérieure du boîtier isolant,

– le levier arrondi sur l’avant, se dresse vers l’avant légèrement au-delà du boitier d’isolation,

– les leviers d’actionnements présentent globalement une forme en U, dans laquelle une partie du boîtier isolant s’insère, créant l’impression de « petites fenêtres » entre les pattes des leviers d’actionnement,

– les boîtiers présentent chacun, sur leurs faces arrière et avant des ouvertures d’insertion pour conducteur/câble et pour vérification, qui sont chacune de forme rectangulaire avec des bords arrondis ».

Si l’esthétique n’est pas absente des connecteurs WAGO, ainsi qu’il est relevé dans l’article extrait du site www.filiere-3e.fr fourni par les appelantes, le choix de boîtiers transparents et de leviers aux bords arrondis et de couleur vive ne peut cependant suffire à traduire l’empreinte de la personnalité d’un auteur qui rendrait ces connecteurs originaux et protégeables par le droit d’auteur. La circonstance qu’un créateur aurait réalisé un luminaire avec des pièces industrielles, dont des connecteurs électriques, à supposer qu’il s’agisse des connecteurs WAGO revendiqués, ce que la pièce 31 produite ne permet pas de vérifier, ne peut suffire à caractériser l’originalité alléguée.

Le jugement a été confirmé en ce qu’il a dit que les connecteurs WAGO ne sont pas protégeables par le droit d’auteur et débouté la société WAGO Holding de ses prétentions présentées à ce titre.

La concurrence déloyale : l’alternative

Toutefois, la concurrence déloyale reste applicable.

Alors qu’il existe une grande liberté de forme dans le design des connecteurs électriques, le fait pour la société MIIDEX (aujourd’hui POLYNIX) de commercialiser des connecteurs présentant les mêmes caractéristiques essentielles que les connecteurs WAGO ‘ à savoir un boîtier isolant transparent et plat, rectangulaire, des leviers d’actionnement larges, plats, en forme de U légèrement arrondis et colorés, affleurant à la partie supérieure du boîtier et dépassant légèrement de ce boîtier, entre les pattes desquels apparaissent de petites ouvertures rectangulaires d’insertion pour permettre de passer les fils électriques ‘, le même agencement des éléments et quasiment les mêmes dimensions, dans une couleur très vive (rose) tout aussi inhabituelle pour ce type de produits que celle adoptée par les appelantes (orange), caractérise la création fautive d’un risque de confusion, constitutive d’actes de concurrence déloyale.

Ce risque de confusion est renforcé par le fait que les produits litigieux comportent, inscrite sur les leviers de couleur, une référence « C2221 » qui reproduit astucieusement le numéro « 221 » apposé pareillement sur les leviers colorés des connecteurs de la gamme WAGO et que la gamme proposée par la société POLYNIX reprend les solutions à 2, 3 ou 5 entrées adoptées par WAGO. Il doit être retenu que le risque de confusion s’est en outre réalisé dès lors que, comme le montre le constat d’achat sur internet précité, les produits litigieux sont présentés expressément par l’annonceur Amazon, qui a été manifestement abusé, comme des produits WAGO (ex. « Lot de 5 Wago 2 bornes »).

Les appelantes produisent par ailleurs un extrait du site www.wago.fr/actualités indiquant que la série WAGO 221 a obtenu le trophée du meilleur produit électricité lors de la neuvième édition des trophées du Négoce en 2016, et un article du site www.innocom.fr de juillet 2017 présentant WAGO comme « la PME avec toujours un train d’avance », la marque comme « visionnaire de la connexion électrique » et la borne WAGO comme « l’atout majeur » et « le composant phare » de la marque. La société WAGO fournit en outre l’attestation d’un « juriste d’entreprise » qui fait état d’investissements engagés pour la recherche et le développement de la série 221 à hauteur de plus de 10 millions d’euros (pièce 68.1) et une autre du directeur général et du directeur financier et administratif de la société WAGO CONTACT qui mentionne des frais de promotion de ces mêmes produits de 220 000 € pour les années 2019 à 2021 . Ces éléments établissent la réalité d’une valeur économique individualisée, du succès de connecteurs WAGO de la gamme 221 et d’efforts d’investissements que la société POLYNIX a délibérément détournés à son avantage en s’inscrivant dans le sillage des sociétés WAGO. Les faits de parasitisme sont ainsi également établis.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le contexte du litige entre WAGO et MIIDEX ?

Le litige entre les sociétés WAGO et MIIDEX concerne des connecteurs électriques. WAGO a accusé MIIDEX d’importer et de vendre en France des connecteurs qui reproduisent les caractéristiques de ses modèles. WAGO a donc mis MIIDEX en demeure à deux reprises, en novembre et décembre 2016, pour cesser ces agissements, fournir des informations commerciales et indemniser WAGO pour le préjudice commercial et d’image. MIIDEX a contesté les droits de WAGO, ce qui a conduit WAGO à assigner MIIDEX devant le tribunal de grande instance de Paris en mars 2017 pour contrefaçon de droits d’auteur, de modèles communautaires, ainsi qu’en concurrence déloyale et parasitaire.

Pourquoi la contrefaçon de droits d’auteur a-t-elle été écartée ?

La contrefaçon de droits d’auteur n’a pas été retenue dans cette affaire. Selon l’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre jouit d’un droit de propriété incorporelle exclusif sur celle-ci, sans formalité, dès sa création. Pour qu’une œuvre soit protégée, elle doit présenter une originalité qui reflète l’empreinte de la personnalité de son auteur. Dans le cas des connecteurs WAGO, le tribunal a jugé que le choix de boîtiers transparents et de leviers colorés ne suffisait pas à établir cette originalité. Le jugement a confirmé que les connecteurs WAGO ne sont pas protégeables par le droit d’auteur, déboutant ainsi WAGO de ses prétentions.

Quelles sont les caractéristiques des connecteurs WAGO revendiquées par la société ?

Les sociétés WAGO ont défini plusieurs caractéristiques originales de leurs connecteurs. Parmi celles-ci, on trouve : – Un boîtier isolant transparent, plat, rectangulaire avec des bords arrondis, notamment en haut. – Des leviers d’actionnement larges, plats, colorés, montés affleurant à la partie supérieure du boîtier et recouvrant la partie avant de celui-ci. – Un levier arrondi à l’avant qui dépasse légèrement du boîtier d’isolation. – Une forme en U des leviers d’actionnement, créant des petites ouvertures rectangulaires entre les pattes des leviers. – Des ouvertures d’insertion pour conducteur/câble sur les faces arrière et avant des boîtiers, de forme rectangulaire avec des bords arrondis. Ces éléments étaient censés démontrer l’originalité des connecteurs, mais le tribunal a jugé qu’ils ne suffisaient pas à établir une empreinte de personnalité.

Quelles sont les conclusions concernant la concurrence déloyale ?

Malgré le rejet de la contrefaçon de droits d’auteur, la concurrence déloyale a été reconnue. Le tribunal a noté que MIIDEX (aujourd’hui POLYNIX) commercialisait des connecteurs présentant des caractéristiques essentielles similaires à celles des connecteurs WAGO. Ces similitudes incluent un boîtier isolant transparent et plat, des leviers d’actionnement en forme de U, et un agencement des éléments presque identique. Le tribunal a également souligné que le risque de confusion était renforcé par des éléments tels que la référence « C2221 » sur les produits de MIIDEX, qui imite le numéro « 221 » des connecteurs WAGO. De plus, les produits litigieux étaient présentés sur Amazon comme étant des produits WAGO, ce qui a contribué à établir un risque de confusion. Les efforts de WAGO en matière de recherche et développement, ainsi que les investissements significatifs dans la promotion de leurs produits, ont également été pris en compte pour établir la réalité d’une valeur économique individualisée et le parasitisme de la société POLYNIX.

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