Conflit sur les modalités de partage successoral et la recevabilité des demandes en matière de succession.

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Conflit sur les modalités de partage successoral et la recevabilité des demandes en matière de succession.

L’Essentiel : Madame [P] [M] et Monsieur [F] [M], héritiers de leurs parents décédés en 2020, se retrouvent en conflit concernant le partage de la succession. Le 10 février 2023, Monsieur [F] [M] a assigné sa sœur pour demander la vente d’un bien immobilier. Madame [P] [M] conteste cette demande, affirmant qu’un accord avait été établi avec un notaire. Cependant, Monsieur [F] [M] soutient que le projet de partage n’est pas définitif et conteste la valeur des biens. Lors de l’audience du 3 décembre 2024, le juge a jugé recevable la demande de Monsieur [F] [M], renvoyant l’affaire à mars 2025.

Contexte familial

Madame [R] [T] et Monsieur [U] [M] se sont mariés en 1958 et ont eu deux enfants, [P] [M] et [F] [M]. Les deux parents sont décédés en 2020, laissant leurs enfants comme héritiers.

Demande de partage de succession

Le 10 février 2023, Monsieur [F] [M] a assigné Madame [P] [M] devant le tribunal judiciaire d’Evry pour demander le partage de la succession de leurs parents et la vente par licitation d’un bien immobilier situé à [Localité 12].

Arguments de Madame [P] [M]

Dans ses conclusions du 20 juin 2024, Madame [P] [M] conteste la demande de son frère, affirmant qu’un notaire avait été mandaté pour établir un acte de partage et que les parties avaient convenu des modalités de partage. Elle soutient que l’assignation de Monsieur [F] [M] est irrecevable, car un accord avait déjà été atteint.

Réponse de Monsieur [F] [M]

En réponse, Monsieur [F] [M] a déposé des conclusions le 13 septembre 2024, arguant que le projet d’acte de partage établi par le notaire n’était pas définitif et qu’il avait contesté la valeur des biens. Il affirme que son assignation respecte les exigences légales.

Audiences et délibérations

Les parties ont été entendues lors de l’audience du 3 décembre 2024, avec un délibéré prévu pour le 30 décembre 2024.

Recevabilité de la demande en partage

Le juge a examiné la recevabilité de la demande en partage, notant que les documents présentés ne prouvaient pas un accord entre les parties sur les modalités de partage, ce qui a conduit à rejeter la fin de non-recevoir soulevée par Madame [P] [M].

Respect des dispositions légales

Concernant l’article 1360 du code de procédure civile, le juge a constaté que l’assignation contenait un descriptif sommaire du patrimoine à partager et précisait les intentions de Monsieur [F] [M] quant à la répartition des biens, ainsi que les diligences entreprises pour parvenir à un partage amiable.

Décision finale

Le juge a déclaré recevables les demandes de Monsieur [F] [M], rejeté les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile, réservé les dépens, et renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état du 4 mars 2025 pour les conclusions au fond de Madame [P] [M].

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de la demande en partage

La recevabilité de la demande en partage est régie par l’article 789 6° du code de procédure civile, qui stipule que « le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour : (…) Statuer sur les fins de non-recevoir ».

Cet article établit clairement que le juge de la mise en état a la compétence exclusive pour examiner les fins de non-recevoir, ce qui inclut les questions de recevabilité des demandes en partage.

De plus, l’article 31 du même code précise que « L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ».

Dans cette affaire, Monsieur [F] [M] a contesté la valeur des biens dans le projet d’acte de partage proposé par le notaire.

Il n’est pas démontré que les parties se soient mises d’accord sur les modalités d’un partage amiable, ce qui justifie la décision du juge de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par Madame [P] [M].

Sur le respect des dispositions de l’article 1360 du code de procédure civile

L’article 1360 du code de procédure civile stipule que « À peine d’irrecevabilité, l’assignation en partage contient un descriptif sommaire du patrimoine à partager et précise les intentions du demandeur quant à la répartition des biens ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable ».

Dans le cas présent, l’assignation de Monsieur [F] [M] mentionne effectivement un descriptif sommaire des biens à partager, en indiquant les immeubles indivis et en demandant leur licitation.

Les intentions du demandeur concernant la répartition des biens sont également clairement exprimées, puisqu’il demande un partage par moitié de l’actif successoral.

Concernant les diligences entreprises pour parvenir à un partage amiable, l’assignation indique que « les discussions n’ont pu aboutir à un accord amiable de la succession », ce qui démontre que des efforts ont été faits pour parvenir à un accord.

Ainsi, le juge a considéré que les conditions posées par l’article 1360 étaient remplies, rendant la demande recevable.

Sur les autres demandes

Les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qui prévoit que « la partie qui succombe peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens », ont été rejetées par le juge.

Le juge a estimé qu’il n’y avait pas lieu à une telle condamnation, ce qui signifie que les circonstances de l’affaire ne justifiaient pas l’octroi d’une indemnité au titre de l’article 700.

Les dépens, quant à eux, ont été réservés, ce qui signifie que la question de leur répartition sera tranchée ultérieurement, lors du jugement au fond de l’affaire.

Ainsi, le juge a statué de manière à préserver les droits des parties tout en respectant les dispositions légales applicables.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’EVRY

3ème Chambre

N° RG 23/01199 – N° Portalis DB3Q-W-B7H-PCVO
NAC : 28A

CCC délivrées le :
à
Maître Rémy BARADEZ
Maître Vanessa BOISSEAU
ORDONNANCE

Ordonnance rendue le trente Décembre deux mil vingt quatre par Laure BOUCHARD, assistée de Tiphaine MONTAUBAN, Greffière dans l’instance N° RG 23/01199 – N° Portalis DB3Q-W-B7H-PCVO ;

ENTRE :

Monsieur [F] [M] né le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 11],
demeurant Madame [X] [J] [Adresse 6]
[Localité 9]

représenté par Maître Rémy BARADEZ de la SELARL BREMARD-BARADEZ & ASSOCIÉS, avocats au barreau d’ESSONNE plaidant

DEMANDEUR

ET :

Madame [P] [M]
née le [Date naissance 7] 1960 à [Localité 10],
demeurant [Adresse 4]

représentée par Maître Vanessa BOISSEAU de la SELAS OBADIA & ASSOCIE, avocats au barreau d’ESSONNE plaidant

DEFENDERESSE

EXPOSE DU LITIGE :

Madame [R] [T] et Monsieur [U] [M] se sont mariés le [Date mariage 5] 1958.

De leur union sont nés deux enfants :
-[P] [M], – [F] [M].

Madame [R] [T] est décédée le [Date décès 8] 2020 et Monsieur [U] [M] est décédé le [Date décès 1] 2020, laissant pour leur succéder leurs deux enfants.

Par acte du 10 février 2023, Monsieur [F] [M] a fait assigner Madame [P] [M] devant le tribunal judiciaire d’Evry, aux fins de partage de la succession de leurs parents, et de vente par licitation du bien sis [Adresse 3] et [Adresse 4] à [Localité 12] (91).

Par conclusions d’incident régularisées par voie électronique le 20 juin 2024, Madame [P] [M] demande au juge de la mise en état de :
– Juger les demandes de [F] [M] irrecevables,
– Les rejeter,
– Condamner [F] [M] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.

Madame [M] fait valoir qu’un notaire avait été mandaté pour établir un acte de partage, et que les parties étaient tombées d’accord sur les modalités de partage. Elle souligne qu’un rendez-vous de signature de l’acte de partage avait été fixé par le notaire, avant que Monsieur [F] [M] ne vienne remettre en cause les valeurs des biens à partager, et refuse de se rendre au rendez-vous de signature.

Elle soutient que ses demandes en partage sont irrecevables, les parties ayant déjà échangé leur consentement sur les termes du partage, de sorte qu’il y a lieu de considérer que le partage est déjà intervenu et que Monsieur [F] [M] est dépourvu d’intérêt à agir. Elle rappelle que le partage est consensuel et résulte du simple échange de volontés des parties.

À titre subsidiaire, elle relève, sur le fondement de l’article 1360 du code de procédure civile, que l’assignation ne décrit pas le patrimoine à partager, ne comporte aucune proposition de répartition des biens, et n’expose pas les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable.

Par conclusions d’incident régularisées par voie électronique le 13 septembre 2024, Monsieur [F] [M] demande au juge de la mise en état de :
– Débouter la défenderesse de son incident,
– La condamner à lui verser la somme de 2.000 Euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Monsieur [M] soutient que le notaire avait établi unilatéralement un projet sur lequel il avait demandé aux parties de lui faire leurs observations, et qu’il ne s’agissait donc pas d’un acte définitif, ni d’un acte reprenant un accord antérieur entre les parties. Il souligne que les courriers versés aux débats démontrent qu’il n’était pas d’accord avec ce projet et qu’il a notamment contesté la valeur des biens immobiliers retenus.

Il fait valoir que son assignation respecte les dispositions de l’article 1360 du code de procédure civile.

Les parties ont été entendues sur l’incident à l’audience du 3 décembre 2024, avec un délibéré fixé au 30 décembre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur la recevabilité de la demande en partage

Aux termes de l’article 789 6° du code procédure civile, « le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
(…) Statuer sur les fins de non-recevoir ».

L’article 31 du code de procédure civile prévoit par ailleurs que « L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ».

En l’espèce, est produit aux débats un courriel adressé par le notaire aux parties, leur adressant un « projet d’acte de partage » et sollicitant leurs observations éventuelles.

Monsieur [F] [M] a contesté immédiatement la valeur des immeubles retenus au sein de ce projet.

Madame [P] [M] ne produit pas de documents démontrant l’accord de son frère sur la valeur retenue dans le projet du notaire.

Il n’est pas suffisamment démontré que les parties se seraient entendues sur les modalités d’un partage amiable, les documents produits démontrant au contraire l’existence d’un désaccord.

La fin de non-recevoir sera rejetée.

2. Sur le respect des dispositions de l’article 1360 du code de procédure civile

Aux termes de l’article 1360 du code de procédure civile, « À peine d’irrecevabilité, l’assignation en partage contient un descriptif sommaire du patrimoine à partager et précise les intentions du demandeur quant à la répartition des biens ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable ».

En l’espèce, l’assignation contient bien un descriptif sommaire du patrimoine à partager, puisqu’il y est fait mention des immeubles indivis. Leur licitation étant demandé, avec demande de partage par moitié de l’actif successoral, il y a lieu de considérer que les intentions du demandeur quant à la répartition des biens sont précisées.

S’agissant des diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable, le demandeur indique dans son assignation que « les discussions n’ont pu aboutir à un accord amiable de la succession. »

Sont également visées dans l’assignation des courriers échangés entre les héritiers, témoignant de l’existence de discussions, et de désaccord sur certains points concernant la succession.

Il y a lieu de considérer au vu de ces éléments que les conditions posées par l’article 1360 du code de procédure civile sont remplies.

3. Sur les autres demandes

Les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile sont rejetées.

Les dépens sont réservés.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe :

– Déclare recevables les demandes de Monsieur [F] [M],
– Dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Réserve les dépens,
– Renvoie l’affaire à l’audience de mise en état du 4 mars 2025 à 9h30 pour conclusions au fond de Madame [P] [M].

Fait à EVRY, le 30 Décembre 2024

LE GREFFIER, LE JUGE DE LA MISE EN ETAT


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