Auteur présumé des infractions de droits d’auteur
A l’image des amendes d’infractions routières, la désignation de l’auteur d’une contrefaçon à domicile sera-t-elle bientôt obligatoire ? La CJUE a considéré que le détenteur d’une connexion à Internet, par laquelle des atteintes aux droits d’auteur ont été commises au moyen d’un partage de fichiers, ne peut pas s’exonérer de sa responsabilité en désignant simplement un membre de sa famille qui avait la possibilité d’accéder à cette connexion. Le détenteur d’une connexion à Internet, au moyen de laquelle une atteinte aux droits d’auteur a été commise, est présumé être l’auteur de cette atteinte, dès lors qu’il a été identifié avec exactitude par son adresse IP et qu’aucune autre personne n’avait la possibilité d’accéder à cette connexion au moment où cette atteinte a eu lieu.
Selon la CJUE, il convient de trouver un juste équilibre entre différents droits fondamentaux, à savoir le droit à un recours effectif et le droit de propriété intellectuelle, d’une part, et le droit au respect de la vie privée et familiale, d’autre part. Un tel équilibre fait défaut lorsqu’il est accordé une protection quasi absolue aux membres de la famille du titulaire d’une connexion à Internet, par laquelle des atteintes aux droits d’auteur ont été commises au moyen d’un partage de fichiers.
Une présomption simple
Toutefois, cette présomption peut être renversée dans le cas où d’autres personnes avaient la possibilité d’accéder à cette connexion. Par ailleurs, si un membre de la famille de ce détenteur bénéficiait de cette possibilité, ce dernier est susceptible d’échapper à sa responsabilité, eu égard au droit fondamental à la protection de la vie familiale, par la seule désignation du membre de sa famille, sans qu’il soit tenu de fournir des précisions supplémentaires quant au moment où la connexion à Internet a été utilisée par ledit membre de sa famille et à la nature de l’utilisation qui a été faite de celle-ci par ce dernier.
Droit au recours effectif
Il s’agit de l‘un des principes clefs de la directive du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle : les titulaires de droits doivent disposer d’une forme de recours effectif ou de moyens permettant aux autorités judiciaires compétentes d’ordonner la communication des renseignements nécessaires à la réparation de leur préjudice en cas de contrefaçon présumée.
Dans l’affaire jugée par la CJUE, une société d’édition allemande a sollicité une indemnisation pécuniaire au titre de la mise à disposition publique par un internaute, d’un livre audio sur lequel elle détient des droits d’auteur et droits voisins.
Système de défense basé sur la vie privée
En défense, l’internaute (contrat de FAI à son nom) a fait valoir que ses parents, qui vivent sous le même toit que lui, avaient également accès à cette connexion, sans donner toutefois davantage de précisions quant au moment où ladite connexion a été utilisée par ses parents et à la nature de cette utilisation. Il ressort de la jurisprudence du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) que, eu égard au droit fondamental à la protection de la vie familiale, une telle défense suffit en droit allemand pour exclure la responsabilité du détenteur de la connexion à Internet.
Preuve et contrefaçon
Cette solution est conforme à l’esprit de la Directive : la preuve est un élément capital pour l’établissement de l’atteinte aux droits de propriété intellectuelle, il convient de veiller à ce que des moyens de présenter, d’obtenir et de conserver les éléments de preuve existent effectivement. Les procédures devraient respecter les droits de la défense et être assorties des garanties nécessaires, y compris la protection des renseignements confidentiels.
Aux termes de l’article 6 de la directive : « Les États membres veillent à ce que, sur requête d’une partie qui a présenté des éléments de preuve raisonnablement accessibles et suffisants pour étayer ses allégations et précisé les éléments de preuve à l’appui de ses allégations qui se trouvent sous le contrôle de la partie adverse, les autorités judiciaires compétentes puissent ordonner que ces éléments de preuve soient produits par la partie adverse, sous réserve que la protection des renseignements confidentiels soit assurée. Aux fins du présent paragraphe, les États membres peuvent prévoir qu’un échantillon raisonnable d’un nombre substantiel de copies d’une œuvre ou de tout autre objet protégé est considéré par les autorités judiciaires compétentes comme constituant des éléments de preuve suffisants. »
L’article 8 énonce également que « Les États membres veillent à ce que, dans le cadre d’une action relative à une atteinte à un droit de propriété intellectuelle et en réponse à une demande justifiée et proportionnée du requérant, les autorités judiciaires compétentes puissent ordonner que des informations sur l’origine et les réseaux de distribution des marchandises ou des services qui portent atteinte à un droit de propriété intellectuelle soient fournies par le contrevenant et/ou toute autre personne qui : a) a été trouvée en possession des marchandises contrefaisantes à l’échelle commerciale ; b) a été trouvée en train d’utiliser des services contrefaisants à l’échelle commerciale ; c) a été trouvée en train de fournir, à l’échelle commerciale, des services utilisés dans des activités contrefaisantes, ou d) a été signalée, par la personne visée au point a), b) ou c), comme intervenant dans la production, la fabrication ou la distribution des marchandises ou la fourniture des services ».
Ces informations comprennent, selon les cas : a) les noms et adresses des producteurs, fabricants, distributeurs, fournisseurs et autres détenteurs antérieurs des marchandises ou des services, ainsi que des grossistes destinataires et des détaillants ; b) des renseignements sur les quantités produites, fabriquées, livrées, reçues ou commandées, ainsi que sur le prix obtenu pour les marchandises ou services en question. |
→ Questions / Réponses juridiques
Quelle est la position de la CJUE concernant la responsabilité des détenteurs de connexions Internet en matière de droits d’auteur ?La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a établi que le détenteur d’une connexion Internet est présumé responsable des atteintes aux droits d’auteur commises via cette connexion. Cette présomption s’applique lorsque le détenteur a été identifié avec précision par son adresse IP et qu’aucune autre personne n’avait accès à la connexion au moment de l’infraction. Ainsi, le simple fait de désigner un membre de la famille n’est pas suffisant pour exonérer le détenteur de sa responsabilité. La CJUE souligne l’importance de trouver un équilibre entre le droit à un recours effectif et le droit au respect de la vie privée. Quelles sont les conditions pour renverser la présomption de responsabilité du détenteur de la connexion ?La présomption de responsabilité du détenteur de la connexion peut être renversée si d’autres personnes avaient la possibilité d’accéder à cette connexion. Si un membre de la famille avait effectivement accès à la connexion, le détenteur peut échapper à sa responsabilité en désignant ce membre. Cependant, il n’est pas nécessaire de fournir des précisions supplémentaires sur l’utilisation de la connexion par ce membre de la famille. Cela est en accord avec le droit fondamental à la protection de la vie familiale, qui est pris en compte dans la jurisprudence. Quel est le principe du droit au recours effectif dans le cadre des droits de propriété intellectuelle ?Le droit au recours effectif est un principe fondamental inscrit dans la directive du 29 avril 2004 sur le respect des droits de propriété intellectuelle. Il stipule que les titulaires de droits doivent avoir accès à des moyens permettant aux autorités judiciaires d’ordonner la communication des informations nécessaires pour réparer un préjudice en cas de contrefaçon. Dans une affaire jugée par la CJUE, une société d’édition a demandé une indemnisation pour la mise à disposition non autorisée d’un livre audio. Ce principe vise à garantir que les titulaires de droits puissent défendre efficacement leurs intérêts face aux atteintes à leurs droits. Comment la vie privée est-elle prise en compte dans les défenses contre les accusations de contrefaçon ?Dans le cadre d’une défense contre des accusations de contrefaçon, l’internaute a fait valoir que ses parents avaient également accès à la connexion Internet. Cette défense, bien que sans précisions sur l’utilisation de la connexion par ses parents, est jugée suffisante en droit allemand pour exclure la responsabilité du détenteur. Cela illustre l’importance accordée au droit fondamental à la protection de la vie familiale dans le cadre des litiges liés aux droits d’auteur. Ainsi, la jurisprudence permet à un détenteur de se défendre en invoquant la vie privée, même sans fournir de détails supplémentaires. Quelle est l’importance de la preuve dans les affaires de contrefaçon de droits d’auteur ?La preuve est un élément déterminant dans l’établissement d’une atteinte aux droits de propriété intellectuelle. Il est essentiel que des moyens existent pour présenter, obtenir et conserver les éléments de preuve nécessaires. Les procédures judiciaires doivent respecter les droits de la défense et garantir la protection des renseignements confidentiels. La directive stipule que les États membres doivent permettre aux autorités judiciaires d’ordonner la production d’éléments de preuve par la partie adverse, sous certaines conditions. Cela inclut la possibilité de demander des informations sur l’origine et les réseaux de distribution des marchandises ou services contrefaisants. Ces mesures visent à assurer une protection adéquate des droits de propriété intellectuelle tout en respectant les droits des parties impliquées. |
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