L’Essentiel : Mme [H], propriétaire d’un local commercial loué à Edostar Kura, a été assignée en justice par le syndicat de copropriété pour l’installation d’une terrasse sans autorisation. Après une médiation infructueuse, le tribunal a constaté que ces actions constituaient un trouble illicite. Bien que Mme [H] ait nié avoir donné son accord, elle est tenue responsable des actes de sa locataire. Le tribunal a ordonné la libération des parties communes sous astreinte de 150 euros par jour et a condamné Edostar Kura à garantir Mme [H] contre toute condamnation. Les deux parties doivent également verser 2.000 euros au syndicat.
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Contexte de l’affaireMme [H] est propriétaire d’un local commercial dans un immeuble en copropriété, loué à la société Edostar Kura, qui y exerce une activité de restauration et d’épicerie. Le syndicat de copropriétaires a assigné Mme [H] et Edostar Kura en justice, reprochant l’installation d’une terrasse et l’appropriation d’une partie de la galerie d’accès sans autorisation. Procédure judiciaireAprès une mise en demeure infructueuse, le syndicat a assigné les deux parties devant le tribunal judiciaire de Paris le 18 juillet 2023. Lors de l’audience du 8 août 2023, l’affaire a été renvoyée pour médiation, qui a échoué. Le syndicat a maintenu ses demandes lors de l’audience du 2 janvier 2025. Demandes de Mme [H]Lors de cette audience, Mme [H] a demandé au juge de débouter le syndicat de ses demandes, de limiter l’astreinte à 100 euros par jour après un délai de deux mois, et de condamner Edostar Kura à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre. Motifs de la décisionLe tribunal a constaté que la société Edostar Kura avait installé une terrasse et s’était approprié une partie des parties communes sans autorisation, ce qui constitue un trouble manifestement illicite. Bien que Mme [H] ait affirmé ne pas avoir autorisé ces actions, elle est responsable des agissements de sa locataire en tant que copropriétaire. Condamnations prononcéesLe tribunal a ordonné à Mme [H] et à Edostar Kura de libérer les parties communes sous astreinte de 150 euros par jour après un délai de deux mois. Edostar Kura a également été condamnée à garantir Mme [H] de toute condamnation prononcée contre elle. Les deux parties ont été condamnées aux dépens et à verser 2.000 euros au syndicat des copropriétaires au titre de l’article 700 du code de procédure civile. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article 835 du code de procédure civile dans le cadre de la demande de libération des parties communes ?L’article 835 du code de procédure civile stipule que : « Le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. » Dans le cas présent, le syndicat des copropriétaires a sollicité la libération des parties communes occupées par Mme [H] et la société Edostar Kura, en raison de l’installation d’une terrasse et de l’appropriation d’une partie de la galerie d’accès sans autorisation. Le président du tribunal judiciaire a donc le pouvoir d’ordonner des mesures conservatoires pour faire cesser ce trouble manifestement illicite, même si Mme [H] conteste les faits. Cette disposition permet d’agir rapidement pour protéger les droits des copropriétaires et maintenir l’intégrité des parties communes, ce qui est essentiel dans le cadre d’une copropriété. Quelles sont les implications de l’article 25 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 concernant les travaux affectant les parties communes ?L’article 25 b) de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 précise que : « Ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant l’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble. » Dans cette affaire, l’installation de la terrasse par la société Edostar Kura constitue un travail affectant les parties communes, ce qui nécessite l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires. Le fait que cette autorisation n’ait pas été obtenue rend l’occupation des parties communes par la société Edostar Kura illicite. Ainsi, le syndicat des copropriétaires est en droit de demander la cessation de cette occupation non autorisée, renforçant ainsi la nécessité de respecter les règles de la copropriété pour préserver l’harmonie entre les copropriétaires. Comment le règlement de copropriété influence-t-il la responsabilité de Mme [H] dans cette affaire ?Le règlement de copropriété stipule que : « Nul ne pourra, même temporairement, encombrer les parties communes, ni y déposer quoi que ce soit, ni les utiliser pour son usage personnel, en dehors de leur destination normale. » Il précise également que : « Tout copropriétaire sera responsable, à l’égard de tout autre copropriétaire de l’immeuble, des troubles de jouissance, des fautes ou négligences et des infractions aux dispositions du présent chapitre dont lui-même, ses préposés, ses visiteurs, les locataires ou occupants quelconques de ces locaux seraient directement ou indirectement les auteurs. » Dans ce contexte, Mme [H], en tant que copropriétaire, est responsable des actions de sa locataire, la société Edostar Kura. Bien qu’elle n’ait pas directement autorisé l’occupation des parties communes, elle doit répondre des infractions commises par sa locataire. Cette responsabilité est essentielle pour garantir que tous les copropriétaires respectent les règles établies, et pour éviter que des comportements illicites ne nuisent à la jouissance des parties communes par les autres copropriétaires. Quelles sont les conséquences financières pour Mme [H] et la société Edostar Kura en vertu de l’article 700 du code de procédure civile ?L’article 700 du code de procédure civile dispose que : « La partie qui perd le procès peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. » Dans cette affaire, Mme [H] et la société Edostar Kura, en tant que parties perdantes, sont condamnées in solidum à payer la somme de 2.000 euros au syndicat des copropriétaires. Cette condamnation vise à compenser les frais engagés par le syndicat pour faire valoir ses droits en raison des infractions commises. Il est important de noter que cette somme est distincte des dépens, qui couvrent les frais de justice, et vise à indemniser la partie gagnante pour les frais qu’elle a dû supporter dans le cadre du litige. Ainsi, cette disposition permet de dissuader les comportements illicites en rendant les parties responsables des conséquences financières de leurs actions. |
JUDICIAIRE
DE PARIS
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N° RG 23/55652
N° Portalis 352J-W-B7H-C2D7A
N° : 1
Assignation du :
5 et 18 juillet 2023
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[1] 3 copies exécutoires
délivrées le :
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 30 janvier 2025
par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Arnaud FUZAT, Greffier.
DEMANDEUR
Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2], agissant poursuites et diligences de son syndic en exercice, le Cabinet STARES COPROPRIETE, dont le siège social est sis
[Adresse 3]
[Localité 4]
représenté par Maître Marie-Charlotte TOUZET de la SELARL MCT AVOCAT, avocats au barreau de PARIS – #D961
DEFENDERESSES
Madame [D] [H]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Maître Marc LADREIT DE LACHARRIERE de l’AARPI LLA AVOCATS, avocats au barreau de PARIS – #D0785,
La S.A.S. EDOSTAR KURA
[Adresse 2]
[Localité 4]
ayant pour avocat Maître Margot DESPINS, avocat au barreau de PARIS – #E0452, non-comparante,
DÉBATS
A l’audience du 02 janvier 2025, tenue publiquement, présidée par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente, assistée de Arnaud FUZAT, Greffier,
Après avoir entendu les conseils des parties,
Mme [H] est propriétaire du lot n°234 à usage commercial dans l’immeuble en copropriété situé [Adresse 2] à [Localité 4].
Le local commercial est loué à la société Edostar Kura, qui y exerce une activité de restauration et d’épicerie.
Reprochant à Mme [H] et à la société Edostar Kura l’installation d’une terrasse et l’appropriation d’une partie de la galerie d’accès sans autorisation de l’assemblée générale, le syndicat de copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 4], après vaine mise en demeure, les a, par acte du 18 juillet 2023, assignées devant le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, sollicitant, au visa des articles 835 du code de procédure civile et 25 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, de :
condamner solidairement Mme [H] et la société Edostar Kura à libérer les parties communes occupées de tout mobilier et équipement, sous astreinte de 150 euros par jour et par infraction constatée à compter de la notification de la décision à intervenir à défaut d’exécution ; condamner solidairement Mme [H] et la société Edostar Kura à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les condamner solidairement aux dépens.
A l’audience du 8 août 2023, l’affaire a été renvoyée, avec délivrance d’une injonction de rencontrer un médiateur.
Les parties ont accepté la médiation et l’affaire a fait l’objet de plusieurs renvois à la demande des parties.
La médiation ayant échoué, le syndicat des copropriétaires a maintenu ses demandes à l’audience du 2 janvier 2025 dans les termes de son assignation.
Aux termes de ses conclusions déposées et développées oralement à l’audience du 2 janvier 2025, Mme [H] demande au juge des référés de :
débouter le syndicat des copropriétaires de toutes ses demandes à son encontre ;à titre subsidiaire, limiter l’astreinte à 100 euros par jour et à compter d’un délai de deux mois à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir ; en tout état de cause, condamner la société Edostar Kura à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre.
Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens, il est renvoyé aux écritures des parties.
Sur la demande principale tendant à la libération des parties occupées
Selon l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Aux termes de l’article 25 b) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant « l’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble ».
En l’espèce, le règlement de copropriété rappelle que les parties communes de l’immeuble comprennent « les fondations, les gros murs (façades, pignons et refends), en un mot, tous les murs et éléments constituant l’ossature de l’immeuble, éventuellement les mitoyennetés correspondantes » (p. 52) et prévoit que l’aspect des choses et parties communes ne peut être modifié que par décision de l’assemblée générale, précisant que « nul ne pourra, même temporairement, encombrer les parties communes, ni y déposer quoi que ce soit, ni les utiliser pour son usage personnel, en dehors de leur destination normale (…) » (p. 54).
Il ajoute que « tout copropriétaire sera responsable, à l’égard de tout autre copropriétaire de l’immeuble, des troubles de jouissance, des fautes ou négligences et des infractions aux dispositions du présent chapitre dont lui-même, ses préposés, ses visiteurs, les locataires ou occupants quelconques de ces locaux seraient directement ou indirectement les auteurs » (p. 53).
Or, il ressort du procès-verbal de constat établi le 4 octobre 2022 à 12h30 que la société Edostar Kura a fait installer une terrasse abritée par des panneaux de bois le long de la clôture du [Adresse 2] et qu’elle s’est appropriée une partie de la galerie d’accès aux commerces pour en faire un débarras.
Elle encombre ainsi sans autorisation les parties communes de l’immeuble et les utilise pour son usage personnel.
Le trouble manifestement illicite est donc caractérisé, la violation du règlement de copropriété étant établie.
Mme [H] fait valoir que, n’ayant pas autorisé l’occupation des parties communes par sa locataire, elle n’a pas commis les infractions qui lui sont reprochées.
Cependant, en sa qualité de copropriétaire, elle doit répondre des agissements de sa locataire envers le syndicat des copropriétaires, ainsi que le rappellent le règlement de copropriété précité et le bail liant les parties, sauf à être garantie par sa locataire en l’absence d’autorisation sollicitée par celle-ci, comme tel est le cas en l’espèce.
La demande de libération des lieux formée par le syndicat des copropriétaires sera dès lors accueillie, tant à l’égard de la propriétaire que de la locataire, sous astreinte, dans les conditions précisées au dispositif.
La société Edostar Kura, qui a agi sans l’autorisation de son bailleur, sera condamnée à garantir Mme [H] de toute condamnation prononcée à son encontre.
Sur les frais et dépens
Mme [H] et la société Edostar Kura, parties perdantes, sont tenues in solidum aux dépens, et, par suite, au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance de référé réputée contradictoire et en premier ressort,
Condamnons in solidum Mme [H] et la société Edostar Kura à libérer de tout mobilier et équipement les parties communes occupées, à savoir la partie commune devant le restaurant Kura et la galerie d’accès aux commerces au 1er étage sur la [Adresse 6] et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision et pendant un délai de quatre mois ;
Condamnons la société Edostar Kura à garantir Mme [H] de toutes condamnations prononcées à son encontre ;
Condamnons Mme [H] et la société Edostar Kura in solidum aux entiers dépens ;
Condamnons Mme [H] et la société Edostar Kura in solidum à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 4] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et rejetons les autres demandes ;
Rappelons que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.
Ainsi fait à Paris, le 30 janvier 2025
Le Greffier, Le Président,
Arnaud FUZAT Rachel LE COTTY
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