Obligations de restitution et frais de gardiennage : enjeux d’exécution et de contestation.

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Obligations de restitution et frais de gardiennage : enjeux d’exécution et de contestation.

L’Essentiel : La SARL CASINO GARAGE a assigné Monsieur [S] [T] en référé pour obtenir le retrait d’un véhicule « Porsche » et le paiement de frais de gardiennage. Après une expertise concluant à l’irréparabilité du véhicule, plusieurs mises en demeure ont été adressées à Monsieur [S] [T], restées sans réponse. Le tribunal a finalement ordonné à Monsieur [S] [T] de retirer son véhicule sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et de régler 19 488 euros pour les frais de gardiennage, ainsi que 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Contexte de l’affaire

La SARL CASINO GARAGE a assigné Monsieur [S] [T] en référé devant le tribunal judiciaire de Nice le 7 octobre 2024. Cette action vise à obtenir le retrait d’un véhicule de marque « Porsche », ainsi que le paiement de frais de gardiennage et d’une astreinte en cas de retard.

Déposition du véhicule

Monsieur [S] [T] a déposé son véhicule endommagé le 21 mai 2024 dans l’atelier de la SARL CASINO GARAGE pour une expertise par son assureur. Un ordre de réparation a été émis, mais il ne s’agissait pas d’un engagement à réparer le véhicule. Un devis a été établi le 11 juin 2024, mais Monsieur [S] [T] a ensuite changé d’avis.

Expertise et constatations

L’expertise réalisée le 9 juillet 2024 a conclu que le véhicule était économiquement irréparable, avec des réparations estimées à 51 112,05 euros. L’expert a recommandé de retirer le véhicule pour éviter des frais de gardiennage.

Mises en demeure

La SARL CASINO GARAGE a envoyé plusieurs lettres recommandées à Monsieur [S] [T] pour lui demander de récupérer son véhicule et de payer les frais de gardiennage, qui ont commencé à courir le 12 juin 2024. Ces mises en demeure sont restées sans réponse.

Décision du tribunal

Le tribunal a ordonné à Monsieur [S] [T] de retirer son véhicule sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à compter d’un mois après la signification de l’ordonnance. Il a également été condamné à payer 19 488 euros pour les frais de gardiennage et 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Conclusion

Monsieur [S] [T] a été condamné à régler les sommes dues et à retirer son véhicule, tandis que la SARL CASINO GARAGE a obtenu gain de cause sur l’ensemble de ses demandes.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 835 du code de procédure civile dans le cadre d’une demande en référé ?

L’article 835 du code de procédure civile stipule que :

« Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire. »

Dans le cas présent, la SARL CASINO GARAGE a utilisé cet article pour demander le retrait de son véhicule, en arguant que l’existence de l’obligation de Monsieur [S] [T] à récupérer son véhicule n’était pas sérieusement contestable.

En effet, le tribunal a constaté que Monsieur [S] [T] avait accepté le dépôt de son véhicule et avait été informé des frais de gardiennage, ce qui a permis au juge d’ordonner le retrait du véhicule sous astreinte.

Ainsi, l’article 835 permet au juge de prendre des mesures rapides pour protéger les droits d’une partie, même en cas de contestation, tant que l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Quelles sont les conséquences de l’absence de réaction de Monsieur [S] [T] face aux mises en demeure ?

L’absence de réaction de Monsieur [S] [T] face aux mises en demeure a des conséquences significatives sur la décision du tribunal. En effet, selon les faits, la SARL CASINO GARAGE a adressé plusieurs mises en demeure à Monsieur [S] [T] pour qu’il récupère son véhicule et s’acquitte des frais de gardiennage.

Ces mises en demeure, datées des 26 juin et 5 juillet 2024, ainsi qu’une nouvelle le 3 septembre 2024, ont été laissées sans réponse. Cela a conduit le tribunal à considérer que Monsieur [S] [T] n’avait pas contesté les obligations qui lui incombaient, ce qui a renforcé la position de la SARL CASINO GARAGE.

L’article 1353 du code civil précise que « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit prouver l’existence de celle-ci ». Cependant, en l’absence de contestation de la part de Monsieur [S] [T], le tribunal a pu conclure que la créance de la SARL CASINO GARAGE était fondée et non contestable.

Ainsi, l’absence de réaction a permis au tribunal de statuer en faveur de la SARL CASINO GARAGE, en ordonnant le retrait du véhicule et en condamnant Monsieur [S] [T] à payer les frais de gardiennage.

Comment le tribunal a-t-il justifié le montant de l’astreinte et des frais de gardiennage ?

Le tribunal a justifié le montant de l’astreinte et des frais de gardiennage en se basant sur les éléments de preuve fournis par la SARL CASINO GARAGE.

Concernant l’astreinte, le tribunal a décidé d’une astreinte de 200 euros par jour de retard, qui courra passé un délai d’un mois à compter de la signification de l’ordonnance. Cette décision est conforme à l’article 809 du code de procédure civile, qui permet d’assortir une décision d’une astreinte pour garantir son exécution.

Pour ce qui est des frais de gardiennage, la SARL CASINO GARAGE a présenté un tarif journalier de 174 euros TTC, qui a été communiqué à Monsieur [S] [T] dans les mises en demeure. Le tribunal a constaté que ce tarif avait été accepté par Monsieur [S] [T] lors de la signature du devis et qu’il avait été informé des frais à compter du 12 juin 2024.

Ainsi, le tribunal a condamné Monsieur [S] [T] à payer la somme de 19 488 euros pour la période du 12 juin au 1er octobre 2024, en se basant sur le décompte des frais de gardiennage dûment justifié par la SARL CASINO GARAGE.

Cette décision s’inscrit dans le cadre des obligations contractuelles et des engagements pris par Monsieur [S] [T], renforçant ainsi la légitimité des demandes de la SARL CASINO GARAGE.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NICE
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

N° RG 24/01815 – N° Portalis DBWR-W-B7I-P7GU
du 07 Janvier 2025

N° de minute 25/

affaire : S.A.R.L. CASINO GARAGE
c/ [S] [T]

Grosse délivrée

à Me Nicolas HENNEQUIN

Expédition délivrée

à M. [S] [T]

le
L’AN DEUX MIL VINGT CINQ ET LE SEPT JANVIER À 14 H 00

Nous, Céline POLOU, Vice-Présidente, Juge des référés, assistée de Monsieur Thibaut LLEU, Greffier, avons rendu l’ordonnance suivante :

Vu l’assignation délivrée par exploit en date du 07 Octobre 2024 déposé par Commissaire de justice.

A la requête de :

S.A.R.L. CASINO GARAGE
[Adresse 4]
[Localité 2]
Rep/assistant : Me Nicolas HENNEQUIN, avocat au barreau de GRASSE

DEMANDERESSE

Contre :

M. [S] [T]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Non comparant, non représenté

DÉFENDEUR

Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience du 19 Novembre 2024 au cours de laquelle l’affaire a été mise en délibéré au 07 Janvier 2025

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte du commissaire de justice du 7 octobre 2024, la SARL CASINO GARAGE a fait assigner en référé par-devant le président du tribunal judiciaire de Nice, Monsieur [S] [T] sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile, aux fins de voir :

Ordonner à Monsieur [S] [T] de procéder au retrait de son véhicule de marque « Porsche », type 996 cabriolet, n° de châssis WP0ZZZ99Z1S642264, immatriculé le 7 mai 2001 sous le n° [Immatriculation 5] situé au [Adresse 4] ;
Condamner Monsieur [S] [T] :
Au versement d’une astreinte de 500 euros par jour de retard jusqu’à l’enlèvement définitif de son véhicule de l’atelier de la société « CASINO GARAGE » sis au [Adresse 4] ;
A titre provisionnel, au versement d’une somme de 19 488 euros au titre de frais de gardiennage pour la période afférente du 12 juin 2024 jusqu’au 1er octobre 2024 ;
Au versement d’une somme de 2500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.
Elle fait valoir que Monsieur [S] [T] a, par l’intermédiaire d’un transporteur, déposé le 21 mai 2024 son véhicule endommagé par les intempéries au sein de l’atelier qu’elle exploite afin qu’une expertise soit organisée par son assureur, qu’un ordre de réparation a été émis afin d’officialiser l’entrée du véhicule dans ses ateliers dans l’attente de l’expertise, qu’il ne s’agissait pas d’un engagement à procéder à une quelconque réparation sur le véhicule, qu’un devis a été établi le 11 juin 2024 par la SARL CASINO GARAGE à la demande de Monsieur [S] [T] insatisfait du manque de réactivité de son assureur et qu’elle lui a bien précisé que le diagnostic ne pourrait être effectué que postérieurement à l’expertise. Elle précise qu’après avoir accepté le devis, Monsieur [S] [T] a changé d’avis, qu’elle l’a informé du tarif journalier des frais de gardiennage sans opposition de sa part, que l’expertise a déterminé que le véhicule était économiquement irréparable, que la reprise de son véhicule par épaviste et le versement d’une indemnité lui ont été proposées, que Monsieur [S] [T] a contesté le rapport d’expertise et lui a demandé un diagnostic, qu’elle n’a pas donné suite à cette demande, et qu’elle l’a mis en demeure de reprendre possession de son véhicule et de s’acquitter des frais de gardiennage, en vain.

Monsieur [S] [T], régulièrement assigné par dépôt de l’acte en l’étude du commissaire de justice n’a pas constitué avocat.

L’affaire a été mise en délibéré au 7 janvier 2025.

MOTIFS ET DECISION

Sur la demande de récupération du véhicule sous astreinte

Selon l’article 835 du code de procédure civile,  Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire .

En l’espèce, la SARL CASINO GARAGE verse aux débats un devis du 21 mai 2024 signé par Monsieur [S] [T] portant sur le dépôt de son véhicule Porshe dans son atelier dans l’attente d’une expertise suite aux intempéries ayant endommagé ce dernier ainsi qu’une estimation du 11 juin 2024 d’un montant de 1858.32 euros portant sur le nettoyage des moquettes, la dépose des garnitures intérieures et un contrôle général, signée par Monsieur [S] [T] précisant que cette estimation de réparation est effectuée sans démontage, qu’elle ne constitue pas un engagement ferme et définitif et qu’elle est réalisée dans l’attente de l’expertise.

Il est également produit le rapport d’expertise amiable du 9 juillet 2024, effectué à la requête de l’assureur de Monsieur [S] [T], selon lequel le véhicule est économiquement irréparable car de l’eau s’est infiltrée dans l’habitacle, il ne démarre plus, les moquettes sont imbibées et la sellerie a moisi, le véhicule ayant été stationné pendant sept mois en extérieur sans entretien et que le coût des réparations s’élèvant à la somme de 51 112,05 euros TTC.

L’expert préconise de faire procéder à l’enlèvement de son véhicule pour éviter les frais de gardiennage qui pourraient être à sa charge, ainsi que de le négocier auprès du récupérateur de son choix, ou bien encore de le conserver pour pièces.

Par lettres recommandées des 26 juin 2024 et du 5 juillet 2024 avec avis de réception, la SARL CASINO GARAGE a indiqué à Monsieur [S] [T] que son véhicule était dans leur atelier depuis le 21 mai 2024, que des frais de gardiennage étaient dus à compter du 12 juin 2024 pour un tarif journalier de 174 euros TTC et lui a demandé de le récupérer dans les meilleurs délais, l’assureur de Monsieur [S] [T] n’ayant pas donné son accord à la réparation du véhicule.

Ces deux mises en demeure sont demeurées infructueuses à défaut d’éléments contraires portés à la connaissance du juge par la partie défenderesse, non comparante.

En conséquence, afin de mettre fin au trouble subi par la société défenderesse par la présence du véhicule irréparable dans son atelier depuis de nombreux mois, Monsieur [S] [T] sera condamné à procéder au retrait de son véhicule de marque « Porsche », type 996 cabriolet, n° de châssis WP0ZZZ99Z1S642264, immatriculé le 7 mai 2001 sous le n° [Immatriculation 5] situé au [Adresse 4].

Compte tenu de la carence du défendeur face à la demande de la SARL CASINO GARAGE en dépit de ses demandes, il y a lieu d’assortir cette condamnation, afin de garantir son exécution, d’une astreinte provisoire de 200 euros par jour de retard, qui courra passé le délai d’un mois à compter de la signification de la présente ordonnance, et pendant une durée de trois mois.

Sur la demande de provision

Aux termes de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, « Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire ».

En l’espèce, il ressort des pièces produites et notamment du devis signé du 21 mai 2024 et des courriers recommandés des 26 juin et 5 juillet 2024, que Monsieur [S] [T] a accepté le dépôt de son véhicule dans l’atelier de la SARL CASINO GARAGE, qu’il a été informé du tarif journalier de gardiennage de 174 euros TTC à compter du 12 juin 2024 et qu’il lui a été demandé à plusieurs reprises de récupérer son véhicule en vain et de payer la somme due au titre des frais soit 2610 euros le 26 juin puis 4176 euros le 5 juillet 2024.

Une nouvelle mise en demeure lui a été adressée par le conseil de la SARL CASINO GARAGE le 3 septembre 2024 aux fins de paiement de la somme de 14 616 euros au titre des frais de gardiennage dus à cette date, en vain.

M.[S] [T] qui n’a pas comparu n’a fait valoir aucun moyen contraire.

La créance de la SARL CASINO GARAGE chez laquelle le véhicule de M.[T] est stationné depuis le 21 mai 2024 et pour lequel des frais de gardiennage sont réclamés depuis le 12 juin 2024, n’est donc pas sérieusement contestable, ce dernier n’ayant pas récupéré ni fait enlever son véhicule en dépit des conclusions de l’expert établissant qu’il est irréparable, des préconisations données et des mises en demeure qui lui ont été adressées, et ce alors qu’il a été informé des frais journaliers appliqués.

Dès lors, au vu du décompte versé, M.[T] sera condamné au paiement de la somme provisionnelle de 19 488 euros au titre des frais de gardiennage pour la période du 12 juin au 1er octobre 2024.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Au vu de l’issue du litige, sera alloué à la SARL CASINO GARAGE la somme de 1200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [S] [T], qui succombe sera condamné à son paiement ainsi qu’aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Nous Céline POLOU, juge des référés, statuant par ordonnance réputée contradictoire, en premier ressort, mise à disposition au greffe,

Tous droits et moyens des parties demeurant réservés, au principal renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais d’ores et déjà, en application de l’article 835 du nouveau code de procédure civile,

CONDAMNONS Monsieur [S] [T] à procéder au retrait de son véhicule de marque « Porsche », type 996 cabriolet, immatriculé [Immatriculation 5], qui a été déposé au garage de la SARL CASINO GARAGE situé au [Adresse 4] et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard qui courra passé un délai d’un mois à compter de la signification de la présente ordonnance, et ce pendant une durée de trois mois,

CONDAMNONS Monsieur [S] [T] à payer à la SARL CASINO GARAGE, à titre de provision, la somme de 19 488 euros au titre des frais de gardiennage pour la période du 12 juin au 1er octobre 2024 ;

CONDAMNONS Monsieur [S] [T] à payer à la SARL CASINO GARAGE la somme de 1200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETONS les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNONS Monsieur [S] [T] aux entiers dépens ;

RAPPELONS que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.

Ainsi ordonné et prononcé au tribunal judiciaire de Nice

LE GREFFIER LE JUGE DES REFERES


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