Obligations de paiement et gestion des créances dans le secteur de l’eau

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Obligations de paiement et gestion des créances dans le secteur de l’eau

L’Essentiel : Le 4 juillet 2024, VEOLIA a assigné le Syndicat des copropriétaires devant le Tribunal judiciaire de Nanterre pour obtenir le paiement d’une provision de 63.626,95 euros pour des factures d’eau impayées. Lors de l’audience du 25 novembre 2024, le Syndicat n’a pas comparu. Le juge a ordonné le versement de 14.639,01 euros à VEOLIA, avec intérêts de retard à partir du 9 avril 2024. La demande de dommages et intérêts pour résistance abusive a été rejetée, et le Syndicat a été condamné à payer les dépens ainsi qu’une somme de 1200 euros à VEOLIA.

Contexte de l’affaire

La distribution d’eau potable dans la ville de [Localité 7] est gérée par le SEDIF, qui a transféré cette responsabilité à VEOLIA EAU ILE DE FRANCE. Un contrat de fourniture d’eau a été établi entre VEOLIA et le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé à [Adresse 3] et [Adresse 4].

Assignation en justice

Le 4 juillet 2024, VEOLIA a assigné le Syndicat des copropriétaires devant le Tribunal judiciaire de Nanterre, demandant le paiement d’une provision de 63.626,95 euros pour des factures d’eau impayées, ainsi que d’autres demandes, y compris des dommages et intérêts pour résistance abusive et la communication de documents relatifs aux copropriétaires.

Demandes de VEOLIA

VEOLIA a également demandé, par conclusions écrites, le paiement d’une provision de 14.639,01 euros TTC pour des factures impayées, des dommages et intérêts de 2000 euros, et une somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi que le remboursement des dépens.

Audience et absence du défendeur

Lors de l’audience du 25 novembre 2024, VEOLIA a maintenu ses demandes, tandis que le Syndicat des copropriétaires, assigné en tant que personne morale, n’a pas comparu.

Décision du juge

Le juge a statué sur le fond, considérant que le Syndicat des copropriétaires devait verser à VEOLIA la somme de 14.639,01 euros à titre de provision, avec intérêts de retard à compter du 9 avril 2024. La demande de dommages et intérêts pour résistance abusive a été rejetée, faute de preuve de préjudice distinct et de mauvaise foi.

Condamnations et frais

Le Syndicat des copropriétaires a été condamné à payer les entiers dépens de l’instance et une somme de 1200 euros à VEOLIA sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile. L’ordonnance est exécutoire par provision.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure applicable en cas de non-comparution du défendeur ?

Selon l’article 472 du Code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, le juge statue néanmoins sur le fond.

Il est précisé que le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Ainsi, même en l’absence du défendeur, le juge doit examiner la demande et s’assurer qu’elle respecte les conditions de recevabilité et de fond.

Cette disposition permet d’éviter des retards dans le traitement des affaires et assure une certaine efficacité dans la justice.

En l’espèce, le juge a pu statuer sur les demandes de VEOLIA EAU ILE DE FRANCE malgré la non-comparution du Syndicat des copropriétaires.

Quelles sont les conditions pour obtenir une provision en référé ?

L’article 835 alinéa 2 du Code de procédure civile stipule que le juge des référés peut allouer une provision au créancier lorsque l’obligation invoquée ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

Le juge doit donc apprécier si le créancier justifie de l’existence d’une obligation de paiement non sérieusement contestable.

Dans ce cas, il peut fixer le montant de la provision dans la limite de ce qu’il juge non contestable, pouvant même correspondre à la totalité de la créance.

Il est également important de noter que c’est au défendeur de prouver que la créance est sérieusement contestable.

Dans cette affaire, le juge a reconnu que la créance de VEOLIA était non contestable à hauteur de 14.639,01 euros.

Comment se calcule la majoration de la redevance en cas de non-paiement ?

L’article R.2224-19-9 du Code général des collectivités territoriales prévoit qu’en cas de non-paiement dans un délai de trois mois à compter de la présentation de la quittance, et dans les quinze jours suivant une mise en demeure, la redevance est majorée de 25 %.

Cette majoration est appliquée automatiquement si les conditions sont remplies, ce qui incite les débiteurs à respecter leurs obligations de paiement.

Dans le cas présent, VEOLIA EAU ILE DE FRANCE a notifié une mise en demeure au Syndicat des copropriétaires, ce qui a permis de justifier la demande de majoration.

Cependant, le juge a considéré que la demande de majoration des intérêts était sérieusement contestable et a donc rejeté cette partie de la demande.

Quelles sont les conditions pour obtenir des dommages et intérêts pour résistance abusive ?

L’article 1231-6 du Code civil stipule que le créancier doit prouver l’existence d’un préjudice distinct de celui du retard dans le paiement de sa créance, ainsi que la mauvaise foi du débiteur.

Cela signifie que pour obtenir des dommages et intérêts, le créancier doit démontrer que le débiteur a agi de manière délibérée ou malveillante.

Dans cette affaire, la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE n’a pas réussi à prouver la mauvaise foi du Syndicat des copropriétaires.

Par conséquent, la demande de provision à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive a été rejetée par le juge.

Quelles sont les conséquences financières pour le Syndicat des copropriétaires ?

En application de l’article 696 du Code de procédure civile, le Syndicat des copropriétaires a été condamné aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL KAPRIME, société d’avocats, conformément à l’article 699 du même code.

Cela signifie que le Syndicat devra couvrir tous les frais liés à la procédure, ce qui inclut les honoraires d’avocat.

De plus, le juge a accordé à VEOLIA EAU ILE DE FRANCE une somme de 1200 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, pour compenser les frais non compris dans les dépens.

Ces décisions financières visent à garantir que la partie succombante ne puisse pas échapper à ses obligations financières résultant de la procédure judiciaire.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE

RÉFÉRÉS

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ RENDUE LE 13 JANVIER 2025

N° RG 24/01641 – N° Portalis DB3R-W-B7I-ZSX2

N° de minute :

S.N.C. VEOLIA EAU ILE DE FRANCE

c/

Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 3] et [Adresse 4] est représenté par son Syndic, le Cabinet FONCIA COLBERT

DEMANDERESSE

S.N.C. VEOLIA EAU ILE DE FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 6]

représentée par Maître Catherine BONNEAU de la SELARL KAPRIME SOCIETE D’AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : C 800

DEFENDERESSE

Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 3] et [Adresse 4] est représenté par son Syndic, le Cabinet FONCIA COLBERT
[Adresse 2]
[Localité 5]

non comparante

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président : François PRADIER, 1er Vice-président, tenant l’audience des référés par délégation du Président du Tribunal,

Greffière : Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière,

Statuant publiquement en premier ressort par ordonnance réputée contradictoire mise à disposition au greffe du tribunal, conformément à l’avis donné à l’issue des débats.

Nous, Président , après avoir entendu les parties présentes ou leurs conseils, à l’audience du 25 novembre 2024, avons mis l’affaire en délibéré à ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE

La distribution d’eau potable de la ville de [Localité 7] est rattachée au SEDIF (Syndicat des Eaux d’Île de France), transférant la gestion du service public de distribution de l’eau potable à VEOLIA EAU ILE DE FRANCE.

Un contrat de fourniture d’eau a été régularisé entre cette dernière et le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] à [Localité 7]), enregistré sous le n°8668595.

Par acte en date du 04 juillet 2024, la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE a assigné le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4]) représenté par son syndic le Cabinet FONCIA COLBERT, devant le juge des référés auprès du Tribunal judiciaire de Nanterre, aux fins de voir :

– condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] au paiement d’une provision de 63.626,95 euros, avec intérêts équivalent à 3 fois le taux légal à compter du 08 décembre 2023, représentant des factures d’eau impayées,

– condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] au paiement d’une provision de 2000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

– ordonner au Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] à lui communiquer la liste de ses copropriétaires avec l’indication de leur état civil, des lots et des tantièmes détenus, la liste de tous les titulaires des droits réels sur ces lots, ainsi que l’état financier en fin d’exercice (annexe 1) établi après répartition certifiée conforme, et ce sous astreinte provisoire de 100 € par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance pendant un mois,

– dire que le juge des référés se réservera la liquidation de l’astreinte,

– condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

– condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] aux entiers de l’instance, conformément à l’article 699 du code de procédure civile, qui pourront être directement recouvrés par la SELARL KAPRIME, société d’avocats.

Aux termes de conclusions écrites signifiées au défendeur, la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE a demandé de :

– condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] au paiement d’une provision de 14.639,01 euros TTC, avec intérêts équivalent à 3 fois le taux légal à compter du 08 décembre 2023, représentant des factures d’eau impayées,

– condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] au paiement d’une provision de 2000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

– condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

– condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4]) aux entiers de l’instance, conformément à l’article 699 du code de procédure civile, qui pourront être directement recouvrés par la SELARL KAPRIME, société d’avocats.

L’affaire étant venue à l’audience du 25 novembre 2024, la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE a maintenu ses demandes

Le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4], assigné à personne morale, n’a pas comparu.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande en paiement de la provision au titre des factures d’eau

Aux termes de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge des référés peut allouer une provision au créancier dans le cas où l’obligation invoquée par celui-ci ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

Au regard de cette disposition, le juge des référés doit apprécier préalablement si le créancier justifie de l’existence d’une obligation de paiement en sa faveur non sérieusement contestable. Dans cette hypothèse, il lui appartient de fixer souverainement le montant de la provision dans la limite du montant qu’il juge non sérieusement contestable, étant précisé néanmoins que ce montant peut correspondre à la totalité de la créance.

En second lieu, s’il appartient au demandeur à une provision d’établir l’existence de la créance qu’il invoque, c’est au défendeur de prouver que cette créance est sérieusement contestable.

Suivant l’article 1342 alinéa 1er du code civil, le paiement est l’exécution volontaire de la prestation due.

L’article R.2224-19-9 du code général des collectivités territoriales prévoit qu’ à défaut de paiement dans un délai de trois mois à compter de la présentation de la quittance et dans les quinze jours d’une mise en demeure par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, la redevance est majorée de 25 %.

En l’espèce, la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE produit aux débats plusieurs factures de consommation d’eau visant le contrat n° 8668592, se décomposant comme suit :

– n°27140909 émise le 27/02/2023 pour un montant de 31.148,19 €
– n°28245775 émise le 29/08/2023 pour un montant de 65.881,95 €
– n°29345351 émise le 27/02/2024 pour un montant de 20.317,11 €
– n°29824638 émise le 27/05/2024 pour un montant de 19.145,54 €

Suivant un courrier en date du 04 avril 2024, elle a notifié au syndicat des copropriétaires une mise en demeure pour le paiement de la somme de 54.940,99 euros.

Au regard de ses dernières conclusions écrites, la créance de la demanderesse a été ramenée à un montant de 60,38 euros, au vu des derniers versements effectués le 24 juillet 2024 par le syndicat des copropriétaires, ainsi que cela résulte du décompte produit aux débats.

Toutefois, la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE est fondée à réclamer la majoration à hauteur de 25 % de la redevance d’assainissement à hauteur de la somme de 14.578,63 euros.

Ces éléments établissent que la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE est créancière à l’encontre du Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] d’une obligation de paiement non sérieusement contestable, à hauteur de la somme de 14639,01 euros TTC.

En revanche, la majoration des intérêts s’analyse en une clause pénale que le juge des référés n’a pas le pouvoir d’apprécier, de sorte qu’une telle demande en paiement formée à ce titre est sérieusement contestable. Elle sera en conséquence rejetée.

Par conséquent, il convient de condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] à verser à la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE ladite somme à titre de provision, avec intérêts de retard au taux légal à compter du 09 avril 2024, date de réception de la mise en demeure.

Sur la demande de provision à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive

Les dommages et intérêts complémentaires sont sollicités pour un préjudice résultant directement du défaut de paiement de la créance réclamée par la société VEOLIA.

A cet égard, en vertu de l’article 1231-6 du code civil, le créancier doit non seulement prouver l’existence d’un préjudice distinct de celui du retard dans le paiement de sa créance réparé par le versement des intérêts au taux légal, mais également la mauvaise foi du débiteur.

En l’occurrence, cette preuve n’est nullement rapportée par la société demanderesse.

Dès lors, il convient de rejeter sa demande de provision à ce titre.

Sur les demandes accessoires

En application de l’article 696 du code de procédure civile, il convient de condamner le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4], partie succombante, aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL KAPRIME, société d’avocats en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties, il est inéquitable de laisser à la charge de la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE la totalité des frais exposés pour agir en justice et non compris dans les dépens, ce qui commande l’octroi de la somme de 1200 euros au bénéfice de cette dernière sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il convient de rappeler que la présente ordonnance est exécutoire par provision.

PAR CES MOTIFS

Le Juge des référés statuant par décision mise à disposition au greffe, réputée contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4]) à payer à la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE la somme de 14639,01 euros à titre de provision, avec intérêts de retard au taux légal à compter du 09 avril 2024,

DEBOUTE la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE de sa demande en paiement d’une provision à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

CONDAMNE le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] au paiement des entiers dépens de l’instance,

CONDAMNE le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 3] et [Adresse 4] à payer à la société VEOLIA EAU ILE DE FRANCE la somme de 1200 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

RAPPELLE que la présente ordonnance est exécutoire par provision,

FAIT À NANTERRE, le 13 janvier 2025.

LA GREFFIÈRE

Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière

LE PRÉSIDENT

François PRADIER, 1er Vice-président


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