L’Essentiel : Monsieur [P] [R], propriétaire de deux lots dans la résidence [4] à [Localité 5], fait face à une action en justice du syndicat des copropriétaires pour recouvrer des arriérés de charges. Le 21 février 2024, le syndicat a assigné Monsieur [R] pour un montant total de 20 518,40 euros. L’Association NOUVELLES VOIES, tutrice de Monsieur [R], a contesté cette demande, arguant que la mise en demeure n’avait pas été notifiée à sa tutrice et que certaines créances étaient prescrites. Le tribunal a rejeté la nullité de l’assignation, mais a déclaré le syndicat irrecevable en raison d’une mise en demeure insuffisante.
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Contexte de l’affaireMonsieur [P] [R] est propriétaire de deux lots dans la résidence [4] à [Localité 5]. Le syndicat des copropriétaires a engagé une procédure judiciaire contre lui pour recouvrer des arriérés de charges de copropriété, ainsi que des frais de recouvrement et des dommages-intérêts. Assignation et demandes du syndicatLe 21 février 2024, le syndicat des copropriétaires a assigné Monsieur [P] [R] devant le tribunal judiciaire d’Évry, demandant le paiement de 15 177,76 euros pour des arriérés de charges, 1 541,64 euros pour des frais de recouvrement, 1 300 euros de dommages-intérêts, et 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, en plus des intérêts et dépens. Intervention de l’Association NOUVELLES VOIESL’Association NOUVELLES VOIES, tutrice de Monsieur [R], a été assignée en intervention forcée le 23 mai 2024. Elle a contesté les demandes du syndicat, demandant notamment le déboutement de toutes les demandes et le paiement de sommes dues par Monsieur [R]. Arguments de l’Association NOUVELLES VOIESL’Association a soutenu que la mise en demeure adressée à Monsieur [R] n’était pas valable, car elle n’avait pas été notifiée à sa tutrice. Elle a également invoqué la prescription des créances antérieures à 2019 et contesté le montant des charges réclamées. Réponse du syndicat des copropriétairesLe syndicat a répliqué que la mise en demeure avait été correctement adressée et que les créances n’étaient pas prescrites. Il a également affirmé que l’Association avait reçu tous les documents nécessaires et ne pouvait pas contester leur validité. Décision du tribunalLe tribunal a rejeté la nullité de l’assignation, ainsi que la demande de prescription des créances. Cependant, il a déclaré le syndicat des copropriétaires irrecevable dans son action sur le fondement de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965, en raison d’une mise en demeure insuffisante. Conséquences financièresLe syndicat des copropriétaires a été condamné aux dépens et à verser 1 200 euros à l’Association NOUVELLES VOIES au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. L’exécution de la décision a été déclarée provisoire. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la nullité de l’assignationL’article 117 du Code de procédure civile dispose que : “Constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte : Monsieur [R] conteste la validité de l’assignation du 21 février 2024, arguant qu’elle n’a pas été signifiée à sa tutrice, l’Association NOUVELLES VOIES. Le syndicat des copropriétaires a reconnu que l’assignation visait Monsieur [R] mais a été délivrée à Madame [O] avec la mention “sous curatelle renforcée de l’association NOUVELLES VOIES”. Il est établi que le syndicat aurait dû notifier l’assignation à l’association, car il avait connaissance de la mesure de protection. Ainsi, bien que l’assignation ait été délivrée à une personne mentionnée, elle n’a pas été signifiée à la tutrice, ce qui constitue une irrégularité de fond. Cependant, l’assignation a été régularisée par une nouvelle assignation en intervention forcée le 23 mai 2024, ce qui a permis de lever la cause de nullité. En conséquence, la nullité de l’assignation sera rejetée. Sur la prescription de l’action en recouvrementL’article 42 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, dans sa version antérieure à la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018, stipule que : “Les actions personnelles nées de l’application de la présente loi entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans.” La loi n°2018-1021 a modifié cet article pour appliquer les dispositions de l’article 2224 du Code civil, qui dispose que : “Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.” Dans cette affaire, le syndicat des copropriétaires a agi dans les délais, ayant mis en demeure Monsieur [R] le 13 octobre 2023, ce qui a relancé la prescription. Ainsi, le tribunal conclut que le syndicat a respecté les délais de prescription et que la demande d’irrecevabilité tirée de la prescription sera rejetée. Sur l’inopposabilité des créancesL’association NOUVELLES VOIES soutient que les documents relatifs à la copropriété envoyés à Monsieur [R] ne lui sont pas opposables, car ils ont été adressés à lui en C/O de l’association. Cependant, selon l’article 65 du décret du 17 mars 1967, le syndic a l’obligation d’adresser les documents à l’adresse déclarée. Il est prouvé que toutes les correspondances ont été envoyées à l’association, qui a pu les apprécier pour le majeur protégé. De plus, l’association n’a pas prouvé avoir notifié au syndic la modification de la mesure de protection. Ainsi, les documents relatifs à la copropriété sont opposables à Monsieur [R], et l’inopposabilité invoquée sera rejetée. Sur la demande en paiement des charges de copropriétéL’article 10 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 stipule que : “Les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun en fonction de l’utilité objective que ces services et éléments représentent à l’égard de chaque lot.” L’article 19-2 de la même loi précise que : “À défaut du versement à sa date d’exigibilité d’une provision due au titre de l’article 14-1 ou du I de l’article 14-2, et après mise en demeure restée infructueuse passé un délai de trente jours, les autres provisions non encore échues ainsi que les sommes restant dues deviennent immédiatement exigibles.” En l’espèce, la mise en demeure du 13 octobre 2023 ne précise pas les provisions exigibles, ce qui empêche Monsieur [R] de comprendre ses obligations. Par conséquent, le syndicat des copropriétaires sera déclaré irrecevable en son action selon la procédure accélérée au fond sur le fondement de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965. Sur les dépens, les frais irrépétibles et l’exécution provisoireLe syndicat des copropriétaires, ayant succombé, sera condamné aux dépens de l’instance. Il sera également condamné à verser 1 200 euros à l’association NOUVELLES VOIES, conformément aux dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile. Enfin, la décision sera exécutoire à titre provisoire en vertu de l’article 481-1-6° du Code de procédure civile. |
JUDICIAIRE D’EVRY-COURCOURONNES
8ème Chambre
MINUTE N°
DU : 21 Novembre 2024
AFFAIRE N° RG 24/01391 – N° Portalis DB3Q-W-B7I-P4KE
NAC : 72I
Jugement Rendu le 21 Novembre 2024
FE Délivrées le :
__________________
ENTRE :
Syndicat des copropriétaires de la résidence [4], situé [Adresse 1], représenté par la SOCIETE [S] [Y] ALIREZAI, société à responsabilité limitée, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés sous le numéro 908 201 3002, prise en la personne de Maître [G] [S] [Y], Administrateur Judiciaire, ayant son siège social [Adresse 6], agissant en qualité d’Administrateur Provisoire de la copropriété en difficulté avec tous les pouvoirs de l’assemblée générale des copropriétaires à l’exception de ceux du conseil syndical et de ceux prévus aux articles 26 a et 26 b de la loi du 10 juillet 1965, ayant pour Syndic Assistant, la société coopérative de banque populaire COOPEXIA, dont le siège social est sis [Adresse 3]
Représenté par Maître Priscillia MIORINI de la SELAS AVOCATS ASSOCIES MIORINI, avocats au barreau de l’ESSONNE plaidant,
DEMANDEUR
ET :
Monsieur [P] [R], venant au droit de Madame [H] [R] décédée le 20 aout 2016, sous curatelle renforcée de l’Association NOUVELLES VOIES, domicilié chez Association NOUVELLES VOIES, [Adresse 2]
Défaillant,
DEFENDEUR
Association VOIES NOUVELLES, assignée en intervention forcée du 22 mai 2024, en qualité de tuteur de Monsieur [P] [R], association loi de 1901, dont le siège social est sis [Adresse 2]
Représentée par Maître Emily MENGELLE, avocat au barreau de l’ESSONNE plaidant
PARTIE INTERVENANTE
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : Anne-Simone CHRISTAU, Juge, statuant selon la procédure accélérée au fond conformément aux dispositions de l’article 481-1 du code de procédure civile selon délégation du Président du tribunal judiciaire
Assistée de Madame Sarah TREBOSC, greffier lors des débats et de la mise à disposition au greffe
DEBATS :
Vu l’assignation selon procédure accélérée au fond du 21 Février 2024,
L’affaire a été plaidée à l’audience du 19 Septembre 2024 et mise en délibéré au 21 Novembre 2024
JUGEMENT : Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe,
Contradictoire et en premier ressort.
Monsieur [P] [R] est propriétaire des lots n°572 et 417, au sein de la résidence [4] sise [Adresse 1] à [Localité 5].
Par exploit de commissaires de Justice du 21 février 2024, le syndicat des copropriétaires de la résidence [4], représenté par la SELARL [S] [Y] ALIREZAI, pris en la personne de Me [G] [S] [Y] a fait assigner Monsieur [P] [R] selon la procédure accélérée au fond telle que prévue par l’article que prévue par l’article 481-1 du Code de procédure civile, devant le président du tribunal judiciaire d’ÉVRY, aux fins de le condamner à payer la somme de 15 177,76 euros à titre d’arriérés de charges de copropriété, 1541,64 de frais de recouvrement, 1 300 euros de dommages et intérets, 2 500 euros au tiTre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les intérets et dépens.
Il a ensuite fait assigner en intervention forcée le 23 mai 2024, l’Association NOUVELLES VOIES tutrice de Monsieur [R].
Par conclusions en réponse n°1 régulièrement notifiées le 11 septembre 2024 par voie électronique, il sollicite de:
– Débouter purement et simplement l’Association NOUVELLES VOIES représentant Monsieur [P] [R] de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions.
– Condamner l’Association NOUVELLES VOIES représentant Monsieur [R] à lui payer les sommes de :
• 15 177,76 € à titre d’arriéré de charges de copropriété charges du 2ème trimestre 2018 jusqu’au 1er trimestre 2024 inclus avec intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 13/10/2023
• 1541,64 euros au titre des frais de recouvrement
• 1300 € à titre de dommages intérêts en application de l’article 1231-1 du code civil.
• 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– Ordonner la capitalisation des intérets dus conformément à l’article 1343-2 du code civil ;
– Condamner le défendeur en tous les dépens;
– Maintenir l’exécution provisoire de la décision à intervenir en application de l’article 515 du code de procédure civile.
Au soutien, il explique que Monsieur [R] ne peut lui reprocher de ne pas avoir reçu la mise en demeure puisqu’elle a été adressée à sa tutrice qui y a répondu. De même, pour s’opposer à la prescription soulevée par le défendeur, il explique que le délai de prescription court à compter de la date d’approbation des comptes et non des demandes de provision si bien que les charges 2018 et 2019 (approuvées le 26/09/2019 et 1/10/2020) ne sont pas prescrites.
De même pour s’opposer à la demande de nullité de l’assignation, il explique que l’association VOIES NOUVELLES ne justifie pas avoir notifié au syndic la mise sous tutelle.
L’Association VOIES NOUVELLES a bien réceptionné tous les documents et mise en demeure et ne peut le contester.
Il s’oppose à la demande de délai de paiement au regard de la carence de Monsieur [R] depuis de longues années, de sa mauvaise foi, et de l’absence de justificatif de sa situation financière.
Par conclusions n°3 régulièrement notifiées par RPVA le 16 septembre 2024, l’association NOUVELLES VOIES représentant Monsieur [R], sollicite :
In limine litis,
-Annuler l’assignation délivrée le 20 février 2024 par le syndicat des copropriétaires de la résidence [4] à Monsieur [P] [R],
À titre subsidiaire,
– Juger irrecevable comme prescrite l’action engagée par le syndicat des copropriétaires de la résidence [4] à l’encontre de l’association NOUVELLES VOIES ès. qual. de tuteur de Monsieur [P] [R] à hauteur de 2 970,58 €,
À titre subsidiaire,
– Débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence [4] de l’ensemble de sa demande de condamnation de la somme de 15 523,68 € au titre des charges impayées,
-Débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence [4] de sa demande de condamnation à la somme de 1 541,64 € à titre des frais exposés,
– Débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence [4] de sa demande de condamnation à la somme de 1 300 € à titre de dommages-intérêts,
À titre très subsidiaire,
– Octroyer 24 mois de délais de paiement à l’association NOUVELLES VOIES ès. qual. de tuteur de Monsieur [P] [R],
En tout état de cause,
– Débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence [4] de sa demande d’article 700 du code de procédure civile,
– Exonérer, l’association NOUVELLES VOIES ès. qual. de tuteur de Monsieur [P] [R] des frais de procédure engagés par le SDC dans le cadre de la présente instance conformément aux dispositions de l’article 10-1 de la loi du 9 juillet 1965,
-Condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence [4] à verser à l’association NOUVELLES VOIES ès. qual. de tuteur de Monsieur [P] [R] la somme de 3 600 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence [4] aux entiers dépens,
– Ecarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Monsieur [R] representé par sa tutrice sollicite la nullité de l’assignation au motif que le syndicat des copropriétaire avait connaissance de la mesure de curatelle lors de la délivrance de l’assignation et qu’il aurait du la faire délivrer à l’Association NOUVELLES VOIES et non à Monsieur [R]. En conséquence, il demande la nullité de l’assignation du 21 février 2024.
A titre subsidiaire, il invoque la prescription des créances antérieures au 23 mai 2019 soit pour la somme de 2970,58 euros.
Il explique que les créances demandées sont inopposables en ce que les documents n’ont pas été adressés à l’organisme en charge de la tutelle.
A titre très subsidiaire, il indique que la mise en demeure du 13 octobre 2023 a été adressée à Monsieur [R] et non l’Association NOUVELLES VOIES si bien qu’elle n’est pas valable qu’ainsi le syndicat des copropriétaires doit étre débouté de ses demandes.
De même, pour la mise en demeure du 28 février 2020, l’association NOUVELLES VOIES n’a pas été avisée de la somme dont elle devait s’acquitter dans le délai de 30 jours. Ainsi le syndicat des copropriétaires ne peut se prévaloir de la procédure accélérée au fond 4 ans après.
Les provisions mentionnées dans la mise en demeure ne constituent plus des provisions en 2024 dés lors que les comptes de l’exercice 2020 ont été approuvés. De plus, la réponse du curateur le 11 mars 2020 fait perdre son caractère infructueux à la mise en demeure.
Enfin, il conteste le montant de la créance et explique que le syndicat des copropriétaires n’en justifie pas le quantum si bien qu’il doit être débouté.
Il sollicite des délais de paiement en ce que le bien va être vendu.
A l’audience du 19 septembre 2024, le syndicat des copropriétaires [4] a comparu par avocat et a maintenu l’intégralité des demandes figurant dans son assignation introductive d’instance.
L’association NOUVELLES VOIES a comparu en personne à l’audience et s’est reportée à ses conclusions.
Pour un exposé exhaustif des prétentions des parties, le tribunal se réfère expressément aux dernières écritures telles que reprises oralement à l’audience, par application de l’article 455 du code de procédure civile.
L’affaire a été mise en délibéré et les parties ont été avisées de la date à laquelle la décision sera rendue par mise à disposition au greffe.
Sur la nullité de l’assignation
L’article 117 du code de procédure civile dispose que “Constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte :
Le défaut de capacité d’ester en justice ;
Le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne atteinte d’une incapacité d’exercice ;
Le défaut de capacité ou de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice.”
Monsieur [R] invoque la nullité de l’assignation du 21 février 2024 au motif qu’elle n’a pas été signifiée à sa tutrice. En réponse le syndicat des copropriétaires explique que l’assignation visait Monsieur [R] mais a été délivrée à Madame [O] sous la mention “sous curatelle renforcée de l’association NOUVELLES VOIES”, qu’il a été contacté la veille de l’audience par ladite association qui lui a précisé que la mesure était désormaisune tutelle. Que ce fait il a fait assigner en intervention forcée le 23 mai 2024 l’association NOUVELLES VOIES.
Il résulte qu’au moment de l’assignation initiale le syndicat des copropriétaires aurait du notifier cette assignation au curateur dont il avait connaissance soit l’association NOUVELLES VOIES, la simple mention “sous curatelle de l’association NOUVELLES VOIES” ne suffisant pas.
De plus cette assignation n’a pas été délivrée à Monsieur [R] mais à Madame [O] selon les diligences du commissaire de justice mentionnées sur l’acte si bien que cette assignation encourrait la nullité, s’agissant d’une nullité de fond.
Cependant, le syndicat des copropriétaires a ensuite fait assigner en intervention forcée le 23 mai 2024, l’association NOUVELLE VOIES en qualité de tutrice, suite à cette nouvelle information, qui manifestement ne lui avait pas été notifiée. En conséquence, dès lors que le juge n’a pas encore statué, la cause de cette nullité n’existant plus à ce jour du fait de cette régularisation, il n’y aura pas lieu à prononcer cette nullité.
La nullité de l’assignation sera donc rejetée.
Sur la prescription del’action en recouvrement du syndicat des copropriétaires
L’association NOUVELLES VOIES soulève la prescription des créances antérieures au 23 mai 2019 soit pour un montant de 2 970,58 euros l’assignation en date du 24 mai 2024 précisant qu’au 1er avril 2019, la créance est de cette somme.
Aux termes de l’article 42 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, dans sa version antérieure à la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018, sans préjudice de l’application des textes spéciaux fixant des délais plus courts, les actions personnelles nées de l’application de la présente loi entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans.
La loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018, entrée en vigueur le 25 novembre courant, a modifié l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, en ce que les dispositions de l’article 2224 du code civil relatives au délai de prescription et à son point de départ sont désormais applicables aux actions personnelles relatives à la copropriété entre copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat.
L’article 2224 du code civil, dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
L’article 2222 alinéa 2 du même code précise, qu’en cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
Il en résulte, en application de l’article 42, dans sa version antérieure à la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018, que les actions personnelles entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans et, à compter de l’entrée en rigueur de la loi du 23 novembre 2018, soit le 25 novembre 2018, que la prescription applicable aux actions personnelles relatives à la copropriété se prescrivent par un délai de cinq ans.
En outre, en application de l’article 2222 alinéa 2, le point de départ de la prescription quinquennale des créances antérieures au 25 novembre 2018, commence à courir à compter de cette date, sans que son délai ne puisse excéder un délai de 10 ans.
Dans ces conditions, s’agissant des charges les plus anciennes, datant du 1/04/2018, le syndicat des copropriétaires disposait d’un délai de 5 ans pour agir à compter du 25 novembre 2018, sans que ce délai ne puisse dépasser une durée totale de 10 ans à compter de la mise en recouvrement, de sorte que le syndicat des copropriétaires était fondée à agir en recouvrement le 23 octobre 2023 lors de sa mise en demeure puis le 24 mai 2024 par assignation, cette mise en demeure ayant relancé la prescription pour les créances antérieures au 25 novembre 2018.
En conséquence le syndicat des copropriétaires a agi dans les délais et peut prétendre aux condamnations sur la période qu’il vise.
La demande d’irrecevabilité tirée de la prescription sera rejetée.
Sur l’inopposabilité des créances
L’association NOUVELLES VOIES considère que les documents relatifs à la copropriété envoyés à Monsieur [R] lui sont inopposables car ils ont été adressés à Monsieur [R] C/O association NOUVELLES VOIES, ce qui ne signifie pas qu’ils ont été transmis à l’association.
Le syndicat des copropriétaires rétorque que ce sont les éléments déclarés au syndic et que conformément à l’article 65 du décret du 17 mars 1967, cette adresse étant celle déclarée au syndic, il a rempli sa mission.
Il ressort que tous les appels de fonds, mise en demeure et correspondances sont adressées à Monsieur [R] représenté par l’association NOUVELLES VOIES, à l’adresse de l’association. Par conséquent, celle-ci a reçu les documents et pu les apprécier pour le majeur protégé dont elle a la charge. Par ailleurs l’association ne prouve pas avoir signifié au syndic la modification de la mesure de protection de Monsieur [R] et de l’adresse à apposer. Enfin, les correspondances versées aux débats démontrent que l’association reçoit les documents et converse avec le syndicat des copropriétaires. Par conséquent, les documents relatifs à la copropriété sont opposables à Monsieur [R].
L’inopposabilité invoquée sera rejetée.
Sur la demande en paiement des charges de copropriété :
Selon l’article 10 de la Loi n 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, les copropriétaires sont tenus de participer :
– aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun en fonction de l’utilité objective que ces services et éléments représentent l’égard de chaque lot, dès lors que ces charges ne sont pas individualisées ;
– aux charges relatives la conservation, l’entretien et l’administration des parties communes, générales et spéciales ;
et de verser au fonds de travaux mentionné l’article 14-2 la cotisation prévue au même article, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l’article 5.
Aux termes de l’article 14-1 de la Loi n 65-557 du 10 juillet 1965, pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d’administration des parties communes et équipements communs de l’immeuble, le syndicat des copropriétaires vote, chaque année, un budget prévisionnel. L’assemblée générale des copropriétaires appelée à voter le budget prévisionnel est réunie dans un délai de six mois à compter du dernier jour de l’exercice comptable précédent. Les copropriétaires versent au syndicat des provisions égales au quart du budget voté. Toutefois, l’assemblée générale peut fixer des modalités différentes.
La provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l’assemblée générale.
L’article 14-2 de la Loi n 65-557 du 10 juillet 1965 dispose que :
« I- Ne sont pas comprises dans le budget prévisionnel les dépenses pour travaux dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.
Les sommes afférentes à ces dépenses sont exigibles selon les modalités votées par l’assemblée générale.
II. – Dans les immeubles à destination partielle ou totale d’habitation soumis à la présente loi, le syndicat des copropriétaires constitue un fonds de travaux à l’issue d’une période de cinq ans suivant la date de la réception des travaux pour faire face aux dépenses résultant:
1) Des travaux prescrits par les lois et règlements;
2) Des travaux décidés par l’assemblée générale des copropriétaires au titre du I du présent article.
Ce fonds de travaux est alimenté par une cotisation annuelle obligatoire versée par les copropriétaires selon les mêmes modalités que celles décidées par l’assemblée générale pour le versement des provisions du budget prévisionnel. »
L’article 19-2 de la Loi n 65-557 du 10 juillet 1965 dispose que « à défaut du versement à sa date d’exigibilité d’une provision due au titre de l’article 14-1 ou du I de l’article 14-2, et après mise en demeure restée infructueuse passé un délai de trente jours, les autres provisions non encore échues en application des mêmes articles 14-1 ou 14-2 ainsi que les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent immédiatement exigibles.
Le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, après avoir constaté, selon le cas, l’approbation par l’assemblée générale des copropriétaires du budget prévisionnel, des travaux ou des comptes annuels, ainsi que la défaillance du copropriétaire, condamne ce dernier au paiement des provisions ou sommes exigibles. Le présent article est applicable aux cotisations du fonds de travaux mentionné à l’article 14-2. »
En l’espèce, le syndicat des copropriétaires verse aux débats la lettre de mise en demeure datée du 13 octobre 2023 distribuée en recommandé avec avis de réception le 16 octobre 2024 à l’association NOUVELLES VOIES, l’avis de réception portant la signature du représentant. Cette mise en demeure est valable pour les mêmes raisons développées au titre de l’inopposabilité des créances.
Aux termes de cette lettre, le syndicat des copropriétaires sollicite le paiement de 20983,77 euros au titre de “l’arriéré des charges de copropriété non comprises les intérets au titre du jugement 31/01/2019”.
Monsieur [R] via l’association NOUVELLES VOIES explique qu’il n’a pas été avisé de la somme dont il devait s’acquitter dans le délai de 30 jours pour éviter l’exigibilité immédiate des provisions non encore échues et sommes dues appelées au titre des années précédentes et qu’il ne disposait d’aucun moyen de déterminer à partir du seul montant énoncé les provisions impayées.
Il ressort que cette mise ne demeure vise un arriéré de charges de copropriété impayées dont serait redevable le défendeur sans expressément mentionner la provision exigible qui serait due et qui n’a pas été versée. Il est indiqué ensuite “faute de paiement dans un délai de 30 jours”, sans mentionner quelle provision doit être payée dans ce délai.
Cette mise en demeure ne permet pas au copropriétaire débiteur de comprendre que s’il paie une seule provision, il ne pourra pas être poursuivi sur le fondement de l’article 19-2 pour le paiement de l’intégralité de son arriéré de charges ainsi que des provisions non encore échues au titre de l’exercice en cours comme l’exige l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965.
Par conséquent, le syndicat des copropriétaires doit donc être déclaré irrecevable en son action selon la procédure accélérée au fond sur le fondement de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965.
Sur les dépens, les frais irrépétibles et l’exécution provisoire :
Le syndicat des copropriétaires, qui succombe sera condamné aux dépens de l’instance.
Il sera par ailleurs condamné à payer une somme de 1 200,00 euros à l’association NOUVELLES VOIES es qualité de tuteur de Monsieur [R], par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire en application des dispositions de l’article 481-1-6° du code de procédure civile.
Le tribunal, statuant publiquement selon la procédure accélérée au fond, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe, et en premier ressort
REJETTE la nullité de l’assignation du 21 février 2024;
REJETTE la demande d’irrecevabilité tirée de la prescription de l’action en recouvrement des charges de copropriété ;
REJETTE l’inopposabilité des créances invoquée;
DÉCLARE le syndicat des copropriétaires de la RESIDENCE [4] irrecevable en son action selon la procédure accélérée au fond sur le fondement de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965;
LAISSE les dépens à la charge du syndicat des copropriétaires RESIDENCE [4]
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de la RESIDENCE [4] à payer à l’association NOUVELLES VOIES es qualité de tuteur de Monsieur [R] la somme de 1.200 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.
Ainsi fait et rendu le VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE, par Anne-Simone CHRISTAU, Juge, assistée de Sarah TREBOSC, Greffier, lesquelles ont signé la minute du présent Jugement.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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