Respect des normes légales dans l’application des mesures de contrainte en milieu hospitalier

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Respect des normes légales dans l’application des mesures de contrainte en milieu hospitalier

L’Essentiel : L’article L3222-5-1 du code de la santé publique stipule que l’isolement et la contention doivent être des mesures de dernier recours, réservées aux patients hospitalisés sans consentement. Ces mesures, décidées par un psychiatre, doivent être adaptées et proportionnées au risque. Leur mise en œuvre nécessite une surveillance stricte et des évaluations régulières. En cas de renouvellement, le médecin doit informer un membre de la famille et notifier le magistrat compétent. Dans le cas de M. [N] [C], l’absence de décision d’hospitalisation complète a conduit à une non-conformité légale, entraînant la mainlevée de la mesure d’isolement par le juge.

Cadre Légal de l’Isolement et de la Contention

L’article L3222-5-1 du code de la santé publique stipule que l’isolement et la contention doivent être des mesures de dernier recours, réservées aux patients en hospitalisation complète sans consentement. Ces mesures ne peuvent être appliquées que pour prévenir un danger immédiat pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre, et doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées au risque évalué. De plus, leur mise en œuvre doit être strictement surveillée par des professionnels de santé, avec des évaluations régulières consignées dans le dossier médical.

Conditions de Renouvellement des Mesures

Le même article précise que, dans des cas exceptionnels, un médecin peut renouveler les mesures d’isolement ou de contention au-delà des durées initiales de 48 heures et 24 heures, respectivement. Ce renouvellement doit être accompagné de l’information d’un membre de la famille du patient et d’une notification au magistrat compétent, qui doit statuer sur la nécessité de prolonger la mesure avant l’expiration des délais fixés.

Définitions et Modalités d’Information

Il est également précisé qu’une nouvelle mesure d’isolement ou de contention est considérée comme telle si elle est prise plus de 48 heures après la précédente. En cas de mesures cumulées, les mêmes obligations d’information et de saisine du juge s’appliquent. L’article R3211-31-1 stipule que l’information sur le renouvellement doit être communiquée à un membre de la famille ou à une personne pouvant agir dans l’intérêt du patient, qui a le droit de demander la mainlevée de la mesure.

Contrôle Judiciaire des Mesures

Le juge, dans le cadre de son contrôle, ne peut pas se substituer à l’autorité médicale pour évaluer le consentement du patient ou le diagnostic. Son rôle se limite à vérifier la conformité des motifs de la mesure avec les critères établis par la loi.

Situation du Patient M. [N] [C]

Dans cette affaire, il est noté que M. [N] [C] a été placé en isolement depuis le 7 janvier 2025, suivi d’une mesure de contention à partir du 8 janvier 2025. Cependant, le Directeur du CH n’a pas pris de décision d’hospitalisation complète pour M. [N], qui était en attente de transfert vers une autre structure. Cela a conduit à une non-conformité avec les prescriptions légales, rendant la mesure entachée d’un vice initial.

Conclusion de la Décision Judiciaire

En raison de l’irrégularité de la procédure, le juge a ordonné la mainlevée de la mesure d’isolement de M. [N] [C]. Cette décision a été notifiée au Directeur du Centre Hospitalier et au procureur de la République le 10 janvier 2025.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de mise en œuvre de l’isolement et de la contention selon l’article L3222-5-1 du code de la santé publique ?

L’article L3222-5-1 du code de la santé publique précise que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours.

Ces mesures ne peuvent être appliquées qu’à des patients en hospitalisation complète sans consentement.

Elles ne peuvent être mises en œuvre que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui.

La décision doit être motivée par un psychiatre et doit être adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient.

De plus, la mise en œuvre de ces mesures doit faire l’objet d’une surveillance stricte, tant somatique que psychiatrique,

qui est confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cet effet.

Cette surveillance doit être tracée dans le dossier médical, incluant notamment deux évaluations par 24 heures pour l’isolement et 12 heures pour la contention.

Quelles sont les obligations d’information relatives au renouvellement des mesures d’isolement et de contention ?

Le paragraphe II de l’article L3222-5-1 stipule que, dans des cas exceptionnels, le médecin peut renouveler les mesures d’isolement ou de contention au-delà des durées initiales de 48 heures pour l’isolement et de 24 heures pour la contention.

Ce renouvellement doit être effectué sous les mêmes conditions que celles initialement établies.

Il est impératif d’informer au moins un membre de la famille du patient ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt concernant le renouvellement envisagé.

En outre, le directeur de l’établissement doit informer le magistrat du siège du Tribunal judiciaire compétent.

Ce dernier doit être saisi d’une demande de maintien de la mesure avant l’expiration de la soixante-douzième heure pour l’isolement et de la quarante-huitième heure pour la contention.

Le juge doit statuer avant l’expiration de la quatre-vingt seizième heure pour l’isolement ou de la soixante-douzième heure pour la contention.

Quel est le rôle du juge dans le contrôle des mesures d’isolement et de contention ?

L’article R3211-31-1 précise que l’information relative au renouvellement de la mesure d’isolement ou de contention doit être délivrée à un membre de la famille du patient ou à une personne susceptible d’agir dans son intérêt.

Cette personne a le droit de saisir le juge pour demander la mainlevée de la mesure.

Cependant, dans le cadre de son contrôle, le juge ne peut pas se substituer à l’autorité médicale concernant l’évaluation du consentement du patient, le diagnostic posé ou les soins.

Le rôle du juge n’est pas d’apprécier l’opportunité médicale de la mesure, mais de vérifier si les motifs de la mesure respectent les critères établis par l’article L3222-5-1.

Ainsi, le juge doit s’assurer que les conditions de mise en œuvre de l’isolement et de la contention ont été respectées.

Quelles conséquences en cas de non-respect des prescriptions de l’article L3222-5-1 ?

Dans le cas présent, il a été constaté que le Directeur du CH n’a pas pris de décision d’admission en hospitalisation complète pour M. [C] [N].

Cela signifie que les prescriptions impératives de l’article L3222-5-1 n’ont pas été respectées.

En conséquence, la mesure d’isolement et de contention est entachée d’un vice initial qui ne peut être régularisé, peu importe l’opportunité médicale des motifs ayant conduit au renouvellement de cette mesure.

Cela entraîne une irrégularité de la procédure, justifiant ainsi l’ordonnance de mainlevée de la mesure d’isolement.

Il est donc essentiel que toutes les conditions légales soient respectées pour garantir la légalité des mesures d’isolement et de contention.

COUR D’APPEL DE LYON
Tribunal judiciaire de Lyon
Cabinet de Daphné BOULOC

N°RG 25/00100 – JLD hospitalisation
Mme [N] [C] née le 28/10/1989

ORDONNANCE RELATIVE A UNE MESURE D’ISOLEMENT
(1e demande)

rendue le 10 janvier 2025 à 16H15

Par, Daphné BOULOC, juge des libertés et de la détention au Tribunal judiciaire de Lyon, statuant sans audience selon la procédure écrite de principe prévue aux articles L3211-12-2 et L3222-5-1 du Code de la santé publique ;

Vu les articles L3211-1 et suivants, L.3212-1 et suivants, L3222-5-1, R3211-34 et suivants du Code de la santé publique ;

Vu les pièces du dossier relatif à la mesure d’isolement dont Mme [N] [C] fait l’objet depuis le 7 janvier 2025 à 13h ;

Vu les informations délivrées aux tiers en application du premier alinéa du II de de l’article L3222-5-1 du code de la santé publique ;

Vu la saisine du juge par le Directeur du CH [1] le 10 janvier 2025, enregistrée le même jour à 8h53, aux fins de maintien de la mesure d’isolement sans demande de comparution du patient,

Vu l’avis du Ministère public ;

MOTIFS DE LA DECISION :

L’article L3222-5-1 du code de la santé publique dispose, dans son premier alinéa, que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement ; qu’il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient ; qu’enfin, leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical, comportant notamment deux évaluations par 24 heures (isolement)/12heures(contention);

Il dispose aussi, dans son paragraphe II, qu’à titre exceptionnel, le médecin peut renouveler sous les mêmes conditions, au delà des durées totales de 48 heures pour la mesure d’isolement et de 24 heures pour la mesure de contention, la mesure d’isolement ou de contention avec l’obligation d’informer au moins un membre de la famille du patient ou une personne susceptible d’agir dans l’intérêt de celui-ci, du renouvellement qui est envisagé ; que cette même information doit être délivrée par le directeur d’établissement au magistrat du siège du Tribunal judiciaire compétent, ce dernier devant être saisi d’une demande de maintien de la mesure avant l’expiration de la soixante-douzième heure d’isolement et de la quarante-huitième heure de contention si l’état de santé du patient rend le renouvellement de la mesure nécessaire au delà de ces durées, et statuer avant l’expiration de la quatre-vingt seizième heure d’isolement ou la soixante-douzième heure de contention.

Il est aussi précisé à cet article qu’une mesure d’isolement ou de contention est regardée comme une nouvelle mesure lorsqu’elle est prise au moins quarante-huit heures après une précédente mesure d’isolement ou de contention et qu’en-deçà de ce délai, sa durée s’ajoute à celle des mesures d’isolement et de contention qui la précèdent et qu’en outre, l’information susvisée et la saisine du juge doivent être effectuées selon les mêmes modalités lorsque le médecin prend plusieurs mesures d’une durée cumulée de quarante-huit heures pour l’isolement et de vingt-quatre heures pour la contention sur une période de quinze jours.

L’article R3211-31-1 dispose que l’information relative au renouvellement de la mesure d’isolement ou de contentionest délivrée par tout moyen à au moins un membre de la famille du patient, ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt. Cette personne a le droit de saisir le juge aux fins de mainlevée d’une mesure d’isolement ou de contention.

Dans le cadre de son contrôle, le juge ne peut se substituer à l’autorité médicale s’agissant de l’évaluation du consentement du patient, du diagnostic posé ou des soins. Il n’opère pas une appréciation de l’opportunité médicale de la mesure mais un contrôle de ses motifs au regard des critères posés au paragraphe I de l’article L3222-5-1 susvisé.

Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L3222-5-1 du code de la santé publique que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours qui ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète ;

Qu’il convient en l’espèce de relever que le patient a fait l’objet d’une mesure d’isolement depuis le 7 janvier 2025 à 13 h puis d’une mesure de contention à compter du 8 janvier 2025 à 16h ;

Que cependant, le Directeur du CH [1] n’a pris aucune décision portant admissision en hospitalisation complète de M. [C] [N], indiquant qu’il était en attente de transfert dans une autre structure hospitalière ;

Qu’il en résulte que les prescriptions impératives posées par l’article susmentionné n’ont pas été respectées, de sorte que la présente mesure est entachée d’un vice initial non susceptible de régularisation, quelle que soit par ailleurs l’opportunité médicale, par la suite avérée, des motifs ayant présidé au renouvellement de cette mesure ;

Qu’il résulte de ces développements que la procédure est irrégulière.

Qu’en conséquence, il y a lieu d’ordonner la mainlevée de la mesure d’isolement de M. [N] [C] ;

PAR CES MOTIFS 

Ordonnons la mainlevée de la mesure d’isolement concernant M. [N] [C] ;

LE PRESIDENT
Daphné BOULOC

– Copie de l’ordonnance notifiée par courriel au Directeur du Centre Hospitalier [1] pour notification à Mme [N] [C] le 10 janvier 2025,
Le Greffier,

– Copie de l’ordonnance notifiée par courriel au directeur du Centre Hospitalier [1] le 10 janvier 2025,
Le Greffier,

– Avis de la présente ordonnance a été donné au procureur de la République le 10 janvier 2025
Le Greffier,


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