Revendication de nationalité française : enjeux de preuve et validité des actes d’état civil

·

·

Revendication de nationalité française : enjeux de preuve et validité des actes d’état civil

L’Essentiel : L’affaire concerne la demande de nationalité française de Mme [H] [O], représentée par sa mère, suite à un refus de certificat de nationalité. Bien que son acte de naissance ait été authentifié par le consulat général de France, des doutes subsistent quant à sa validité, notamment en raison d’une signature a posteriori. La demanderesse revendique la nationalité par filiation paternelle, mais la charge de la preuve lui incombe. En l’absence d’un état civil fiable, sa demande est rejetée, et elle est condamnée aux dépens, sans possibilité d’indemnisation.

Contexte de l’affaire

L’affaire concerne une demande de nationalité française formulée par Mme [H] [O], représentée par sa mère, suite à un refus de délivrance d’un certificat de nationalité française. L’assignation a été délivrée le 4 avril 2022, et la procédure a été clôturée par ordonnance le 29 août 2024, avant d’être révoquée le 21 novembre 2024.

Identité de la demanderesse

La demanderesse est désignée sous le nom de [H] [D] [Y] [O] dans l’assignation, mais ses conclusions la désignent comme [N] [H] [D] [Y] [O]. Selon son acte de naissance, son nom de famille est « [O] » et ses prénoms sont « [N] [H] [D] [Y] ».

Reprise d’instance

Mme [H] [O] a été reçue en sa reprise d’instance, étant devenue majeure durant la procédure, conformément aux articles 373 et suivants du code de procédure civile.

Procédure de nationalité

La procédure a respecté les dispositions de l’article 1043 du code de procédure civile, avec un récépissé délivré par le ministère de la justice le 13 juillet 2022, confirmant la régularité de la procédure.

Revendiquer la nationalité française

Mme [H] [O] revendique la nationalité française par filiation paternelle, affirmant que son père, [W] [O], a conservé cette nationalité lors de l’indépendance du Sénégal. Son action fait suite à un refus de certificat de nationalité en raison d’un acte de naissance jugé non probant.

Charge de la preuve

La charge de la preuve incombe à la demanderesse, qui doit démontrer la nationalité française de son père et établir un lien de filiation légalement reconnu, conformément aux articles 30 et 17-1 du code civil.

Authenticité de l’acte de naissance

L’acte de naissance de Mme [H] [O] a été authentifié par le consulat général de France, mais il a été signé a posteriori par un maire, ce qui soulève des doutes sur sa force probante. Le ministère public conteste la validité de cet acte.

Décision judiciaire ivoirienne

La demanderesse invoque une décision de justice ivoirienne qui aurait validé son acte de naissance, mais cette décision n’est pas présentée sous forme certifiée conforme, ce qui remet en question son authenticité.

Conclusion sur la nationalité

En l’absence d’un état civil fiable, la demanderesse ne peut revendiquer la nationalité française. Par conséquent, sa demande est rejetée, et il est jugé qu’elle n’est pas de nationalité française.

Mentions et dépens

Une mention sera portée en marge de l’acte de naissance concernant la décision de nationalité. La demanderesse, ayant succombé, est condamnée aux dépens, et sa demande d’indemnisation au titre de l’article 700 du code de procédure civile est également rejetée.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de la reprise d’instance selon le code de procédure civile ?

La reprise d’instance est régie par les articles 373 et suivants du code de procédure civile.

Ces articles stipulent que lorsqu’une partie devient majeure en cours de procédure, elle peut demander à reprendre l’instance.

L’article 373 précise que :

« La reprise d’instance est possible lorsque la partie qui a été représentée devient majeure ou lorsque la cause de l’instance a disparu. »

Dans le cas présent, Mme [H] [O] a été reçue en sa reprise d’instance car elle est devenue majeure durant la procédure.

Ainsi, la condition de l’article 373 est remplie, permettant à la demanderesse de continuer son action en justice.

Comment se déroule la procédure en matière de contestation de nationalité selon le code de procédure civile ?

L’article 1043 du code de procédure civile est particulièrement pertinent dans les cas de contestation de nationalité.

Il stipule que :

« Dans toutes les instances où s’élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l’assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé. »

Dans cette affaire, le ministère de la justice a délivré le récépissé le 13 juillet 2022, confirmant que la procédure respecte les exigences de l’article 1043.

Cela signifie que la procédure est régulière et conforme aux dispositions légales en vigueur.

Quelles sont les obligations de preuve en matière de nationalité selon le code civil ?

L’article 30 alinéa 1 du code civil impose une charge de la preuve à celui qui revendique la nationalité française.

Il dispose que :

« La charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité. »

Dans le cas de Mme [H] [O], elle doit prouver la nationalité française de son père et établir un lien de filiation légalement reconnu.

Cela implique de fournir des actes d’état civil probants, conformément à l’article 47 du code civil, qui précise que :

« Tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces établissent que cet acte est irrégulier. »

Quels sont les effets de l’indépendance des anciens territoires d’outre-mer sur la nationalité française ?

Les effets de l’indépendance des anciens territoires d’outre-mer sont régis par la loi n°60-752 du 28 juillet 1960 et par les articles 32 à 32-5 du code civil.

Ces textes stipulent que seuls conservent la nationalité française :

– Les originaires du territoire de la République française qui étaient domiciliés au jour de l’indépendance sur le territoire d’un État ayant eu le statut de territoire d’outre-mer.
– Les personnes ayant souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française.
– Celles qui n’ont pas reçu la nationalité d’un nouvel État.
– Les enfants mineurs de 18 ans suivant la condition parentale.

Ainsi, pour Mme [H] [O], il est crucial de démontrer que son père a conservé la nationalité française lors de l’indépendance du Sénégal.

Quelles sont les conditions de force probante d’un acte d’état civil selon le code civil ?

L’article 47 du code civil définit les conditions de force probante des actes d’état civil.

Il énonce que :

« Tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces établissent que cet acte est irrégulier. »

Dans le cas de Mme [H] [O], son acte de naissance, bien qu’authentifié, a été signé a posteriori par un officier d’état civil, ce qui remet en question sa force probante.

Le ministère public a souligné que cet acte, en raison de sa signature tardive, ne répond pas aux exigences de l’article 47, le rendant dépourvu de force probante.

Quelles sont les implications de l’article 28 du code civil concernant la nationalité ?

L’article 28 du code civil stipule que :

« Mention sera portée, en marge de l’acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l’acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. »

Dans cette affaire, il a été ordonné que la mention relative à la nationalité de Mme [H] [O] soit portée en marge de son acte de naissance.

Cela signifie que toute décision concernant sa nationalité sera officiellement enregistrée, garantissant ainsi la transparence et la traçabilité des changements d’état civil liés à la nationalité.

Cette mention est essentielle pour toute future référence à son statut de nationalité.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/1 nationalité A

N° RG 22/04363
N° Portalis 352J-W-B7G-CWROT

N° PARQUET : 22/363

N° MINUTE :

Assignation du :
04 Avril 2022

AJ du TJ DE PARIS
du 7 avril 2021
N° 2021/04640

M.M.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 16 Janvier 2025

DEMANDERESSE

Madame [N] [H] [D] [Y] [O]
[Adresse 1]
[Localité 3] – CÔTE D’IVOIRE

représentée par Me Julie MADRE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #A0688

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/04640 du 07/04/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Paris)

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 4]
[Localité 2]

Madame Sophie BOURLA OHNONA, vice-procureure
Décision du 16 janvier 2025
Chambre du contentieux
de la nationalité Section A
RG n° 22/04363

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Maryam Mehrabi, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente
Madame Victoria Bouzon, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Christine Kermorvant, Greffière

DEBATS

A l’audience du 21 Novembre 2024 tenue publiquement sans opposition des représentants des parties, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile par Madame Maryam Mehrabi et Madame Victoria Bouzon, magistrates rapporteures, qui ont entendu les plaidoiries et en ont rendu compte au tribunal dans leur délibéré.

JUGEMENT

Contradictoire
en premier ressort
Rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Maryam Mehrabi, vice-présidente et par Madame Christine Kermorvant, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l’assignation délivrée le 4 avril 2022 par Mme [H] [D] [Y] [O] [N], représentée par sa mère Mme [X] [P], au procureur de la République,

Vu les dernières conclusions en reprise d’instance de Mme [N] [H] [D] [Y] [O] notifiées par la voie électronique le 28 février 2024,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 29 août 2024 ayant fixé l’affaire à l’audience de plaidoiries du 21 novembre 2024,

Vu les conclusions aux fins de révocation de l’ordonnance de clôture et les conclusions au fond du ministère public notifiées par la voie électronique le 15 novembre 2024,

Décision du 16 janvier 2025
Chambre du contentieux
de la nationalité Section A
RG n° 22/04363

Vu la révocation de l’ordonnance de clôture le 21 novembre 2024,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 21 novembre 2024,

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de relever que dans l’assignation, la demanderesse, représentée par sa mère, est désignée sous l’identité [H] [D] [Y] [O] [N], tandis qu’aux termes de ses conclusions elle est désignée comme [N] [H] [D] [Y] [O].

Il résulte de l’acte de naissance versé aux débats que le nom de famille de la demanderesse est « [O] » et ses prénoms sont « [N] [H] [D] [Y] ». Elle sera donc désignée sous cette identité dans le présent jugement.

Sur la reprise d’instance

Par application des dispositions des articles 373 et suivants du code de procédure civile, il y a lieu de recevoir Mme [H] [O], devenue majeure en cours de procédure, en sa reprise d’instance.

Sur la procédure

Aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, applicable à la date de l’assignation, dans toutes les instances où s’élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l’assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 13 juillet 2022. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. Il y a donc lieu de dire que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Sur l’action déclaratoire de nationalité française

Mme [H] [O], se disant née le 5 juillet 2004 à [Localité 6] (Côte d’Ivoire), revendique la nationalité française par filiation paternelle, sur le fondement de l’article 18 du code civil. Elle fait valoir que son père, [W] [O], né le 13 janvier 1949 à [Localité 5] (Sénégal), a conservé la nationalité française lors de l’indépendance du Sénégal car il était le descendant par sa branche maternelle d’un originaire du territoire de la République française.

Son action fait suite à la décision de refus de délivrance d’un certificat de nationalité française qui lui a été opposée le 23 décembre 2008 par le greffier en chef du service de la nationalité des Français nés et établis hors de France au motif que la signature de l’officier d’état civil faisait défaut sur son acte de naissance qui, dès lors, était dépourvu de force probante au sens de l’article 47 du code civil (pièce n°2 de la demanderesse).

Sur le fond

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.

Conformément à l’article 17-1 du code civil, compte tenu de la date de naissance revendiquée pour la demanderesse, l’action relève des dispositions de l’article 18 du code civil aux termes duquel est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français.

Il doit être également rappelé que les effets sur la nationalité de l’accession à l’indépendance des anciens territoires d’outre-mer d’Afrique (hors Algérie, Comores et Djibouti) sont régis par la loi n°60-752 du 28 juillet 1960 et par le chapitre VII du titre 1er bis du livre premier du code civil (soit ses articles 32 à 32-5), qui s’est substitué au titre VII du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973, qui s’est lui-même substitué aux articles 13 et 152 à 156 du même code dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 19 octobre 1945 et modifiée par la loi du 28 juillet 1960.

Il résulte de l’application combinée de ces textes que seuls ont conservé la nationalité française :
– les originaires du territoire de la République française (et leur conjoint, veuf ou descendant) tel que constitué le 28 juillet 1960, et qui étaient domiciliés au jour de son accession à l’indépendance sur le territoire d’un Etat qui avait eu antérieurement le statut de territoire d’outre-mer de la République française
– les personnes qui ont souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française,
– celles qui ne se sont pas vu conférer la nationalité de l’un des nouveaux Etats anciennement sous souveraineté française,
– enfin, celles, originaires de ces territoires, qui avaient établi leur domicile hors de l’un des Etats de la Communauté lorsqu’ils sont devenus indépendants,
– les enfants mineurs de 18 ans suivant la condition parentale selon les modalités prévues à l’article 153 du code de la nationalité française de 1945 dans sa version issue de l’ordonnance du 19 octobre 1945 telle que modifiée par la loi du 28 juillet 1960.

Il appartient ainsi à Mme [H] [O], qui n’est pas titulaire d’un certificat de nationalité française, de démontrer, d’une part, la nationalité française de son père revendiqué et, d’autre part, un lien de filiation légalement établi a l’égard de celui-ci, au moyen d’actes d’état civil probants au sens de l’article 47 du code civil, étant précisé qu’afin de satisfaire aux exigences de l’article 20-1 du code civil, cet établissement doit être intervenu pendant sa minorité pour avoir des effets sur la nationalité.

Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.

Il est précisé à ce titre que dans les rapports entre la France et la Côte d’Ivoire, les actes d’état civil sont dispensés de légalisation par l’article 21 de l’accord de coopération en matière de justice signé le 24 avril 1961 et publié le 10 février 1982 ; il suffit que ces actes soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l’autorité ayant qualité pour les délivrer et, s’il s’agit d’expéditions, certifiés conformes à l’original par ladite autorité.

Enfin, nul ne peut revendiquer à quelque titre que ce soit, la nationalité française, s’il ne dispose d’un état civil fiable et certain.

En l’espèce, Mme [H] [O] produit une copie, délivrée le 11 août 2021, de son acte de naissance mentionnant qu’elle est née le 5 juillet 2004 à [Localité 6] (Côte d’Ivoire), de [W] [O], né le 13 janvier 1949 à [Localité 5], et de [X] [P], née le 26 novembre 1976 à [Localité 6], la naissance ayant été déclarée par le père (pièce n°4 de la demanderesse).

Il résulte du rapport d’authentification de cet acte par le consulat général de France à [Localité 3] (Côte d’Ivoire) que la souche n’a pas été signée par l’officier d’état civil ayant reçu la déclaration de naissance (pièces n°1 et 2 du ministère public).

Suite à cette procédure de vérification, l’acte de naissance a été signé par le nouveau maire de la commune de naissance (pièce n°6 de la demanderesse).

Le ministère public soutient que l’acte de naissance de la demanderesse ayant été signé a posteriori, par le maire en fonction au moment de la vérification, ne saurait faire foi.

La demanderesse expose que suite à un procès-verbal d’enquête et sur requête du procureur de la République, par ordonnance du 16 juillet 2021, le président de la section du tribunal de Toumodi (Côte d’Ivoire) a ordonné que « cet acte fera foi malgré le fait qu’il ait été signé par l’officier d’état civil en méconnaissance de la procédure légale » (pièces n°5 à 8 de la demanderesse).

Elle soutient que cette décision de justice, qui a, de plein droit, autorité de la chose jugée en vertu de l’article 36 de la convention de coopération en matière de justice entre la République française et la République de Côte d’Ivoire, a donné force et vie à son acte de naissance lequel fait donc foi.

Comme l’indique la demanderesse, l’article 36 de l’accord de coopération entre la République française et la République de Côte d’Ivoire précise que les décisions gracieuses rendues par les juridictions siégeant sur le territoire de la république de Côte d’Ivoire ont de plein droit l’autorité de la chose jugée sur le territoire français, si elles réunissent les conditions suivantes :
a) la décision émane d’une juridiction compétente selon les règles concernant les conflits de compétence admises dans l’État où la décision est exécutée,
b) la décision est, d’après la loi de l’État ou elle a été rendue, passée en force de chose jugée et susceptible d’exécution,
c) les parties ont été régulièrement citées, représentées ou déclarées défaillantes,
d) la décision ne contient rien de contraire à l’ordre public de l’État où elle est invoquée ou aux principes de droit public applicables dans cet État. Elle ne doit pas non plus être contraire à une décision judiciaire prononcée dans cet État et possédant à son égard l’autorité de la chose jugée.
Enfin, il est spécifié qu’aucune transcription n’est possible temps que la décision n’a pas été déclarée exécutoire par les autorités de l’autre État.

Toutefois, comme précédemment indiqué, l’article 21 de ce même accord prévoit que sont admis sur les territoires respectifs des deux Etats « les expéditions des décisions, ordonnances, jugements, arrêts et autres actes judiciaires » lesquelles doivent être revêtues de la signature et du sceau officiel de l’autorité ayant qualité pour les délivrer et être certifiées conformes à l’original par ladite autorité et qu’en tout état de cause, elles doivent être établies matériellement de manière à faire apparaître leur authenticité.

Or, en l’espèce, comme le relève le ministère public, l’ordonnance invoquée par la demanderesse ne consiste pas en une copie certifiée conforme mais présente l’apparence d’une ordonnance originale (pièce n°5 de la demanderesse). L’autorité ayant délivré cette copie de l’ordonnance n’est donc pas mentionnée.

La demanderesse n’a formulé aucune observation sur ce point.

Ainsi, en l’absence de production d’une expédition certifiée conforme, de nature à en garantir l’authenticité, et ce conformément aux dispositions de l’article 21 de l’accord de coopération franco-ivoirien, l’ordonnance versée aux débats est inopérante.

Il est donc rappelé avec le ministère public qu’un acte d’état civil est un écrit dans lequel l’autorité publique constate, d’une manière authentique, un événement – en l’espèce la naissance – dont dépend l’état d’une personne.

L’acte de naissance de la demanderesse, signé a posteriori par un officier d’état civil, ne répond donc pas à la qualification d’acte état civil. Il est dès lors dépourvu de force probante.

Ne justifiant pas d’un état civil fiable et certain, Mme [H] [O] ne peut revendiquer la nationalité française à quelque titre que ce soit.

En conséquence, Mme [H] [O] sera déboutée de sa demande tendant à se voir reconnaître la nationalité française par filiation paternelle. En outre, dès lors qu’elle ne peut revendiquer la nationalité française à aucun titre, il sera jugé, conformément à la demande reconventionnelle du ministère public, qu’elle n’est pas de nationalité française.

Sur la mention prévue à l’article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l’acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l’acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

En application de l’article 696 du code de procédure civile, la demanderesse, qui succombe, sera condamnée aux dépens.

Sur l’article 700 2° du code de procédure civile

La demanderesse ayant été condamnée aux dépens, sa demande au titre des dispositions de l’article 37 de la la loi du 10 juillet 1991, au profit de Maître Julie Madre ne peut qu’être rejetée.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

Reçoit Mme [N] [H] [D] [Y] [O] en sa reprise d’instance ;

Dit la procédure régulière au regard des dispositions de l’article 1043 du code de procédure civile ;

Déboute Mme [N] [H] [D] [Y] [O], de sa demande tendant à voir juger qu’elle est de nationalité française ;

Juge que Mme [N] [H] [D] [Y] [O], se disant née le 5 juillet 2004 à [Localité 6] (Côte d’Ivoire), n’est pas de nationalité française ;

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

Rejette la demande de Mme [N] [H] [D] [Y] [O] au titre des dispositions de l’article 700 2° du code de procédure civile ;

Condamne Mme [N] [H] [D] [Y] [O] aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 16 Janvier 2025

La Greffière La Présidente
C. Kermorvant M. Mehrabi


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon