L’Essentiel : La société [Adresse 1] possède un appartement au 6ème étage d’un immeuble à [Localité 4]. Le syndicat des copropriétaires a constaté l’installation d’un bloc de climatisation sur le balcon, sans autorisation. Après des mises en demeure infructueuses, le syndicat a assigné la société devant le tribunal, demandant le retrait du bloc et une indemnisation de 2.000 euros. La société a contesté, invoquant la prescription quinquennale. Cependant, le tribunal a constaté que l’installation affectait l’aspect extérieur de l’immeuble et a ordonné le retrait du bloc, ainsi qu’une indemnisation au syndicat pour les frais de justice.
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Propriété et ContexteLa société [Adresse 1] est propriétaire d’un appartement situé au 6ème étage d’un immeuble en copropriété à [Localité 4]. Le syndicat des copropriétaires a constaté l’installation d’un bloc de climatisation sur le balcon de cet appartement, effectuée sans l’autorisation requise de l’assemblée générale. Actions du Syndicat des CopropriétairesAprès plusieurs mises en demeure restées sans réponse, le syndicat des copropriétaires a assigné la société [Adresse 1] devant le tribunal judiciaire de Paris. Il a demandé le retrait du bloc de climatisation et la remise en état de la façade, ainsi qu’une indemnisation de 2.000 euros pour couvrir ses frais de justice. Réponse de la Société [Adresse 1]La société [Adresse 1] a contesté les demandes du syndicat, invoquant la prescription quinquennale pour justifier son installation. Elle a également demandé le renvoi des parties à se pourvoir au fond et a sollicité une indemnisation de 2.000 euros pour ses propres frais. Réglementation ApplicableSelon le code de procédure civile et la loi sur la copropriété, toute modification affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble nécessite une autorisation préalable de l’assemblée générale. L’absence de cette autorisation constitue un trouble manifestement illicite. Constatations et Décision du TribunalUn constat a révélé que le bloc de climatisation avait été installé de manière à affecter l’aspect extérieur de l’immeuble, avec des trous percés dans la façade. La société [Adresse 1] n’a pas pu prouver que l’installation avait été réalisée plus de cinq ans avant l’assignation, ce qui a conduit le tribunal à conclure que la prescription n’était pas acquise. Conclusion et OrdonnanceLe tribunal a ordonné à la société [Adresse 1] de retirer le bloc de climatisation et de remettre la façade en état dans un délai de deux mois, sous peine d’astreinte de 50 euros par jour de retard. La société a également été condamnée à payer 2.000 euros au syndicat des copropriétaires pour couvrir ses frais de justice. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article 835 du code de procédure civile dans le cadre de la demande de retrait du bloc de climatisation ?L’article 835 du code de procédure civile stipule que : « Le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. » Dans le cas présent, le syndicat des copropriétaires a invoqué cet article pour demander le retrait du bloc de climatisation installé sans autorisation. Il est établi que l’installation de ce bloc constitue un trouble manifestement illicite, car elle affecte l’aspect extérieur de l’immeuble et les parties communes, ce qui justifie l’intervention du juge des référés. Ainsi, le président du tribunal a le pouvoir d’ordonner des mesures de remise en état, même en présence d’une contestation, afin de protéger l’intégrité de l’immeuble et de faire cesser le trouble. Quelles sont les implications de l’article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 concernant les travaux affectant les parties communes ?L’article 25 b) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précise que : « Ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant l’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble. » Cet article impose une obligation d’autorisation préalable pour tout travail qui pourrait affecter les parties communes ou l’apparence de l’immeuble. Dans le cas présent, la société [Adresse 1] a installé un bloc de climatisation sans obtenir cette autorisation, ce qui constitue une violation des dispositions légales. Cette absence d’autorisation rend l’installation illicite et justifie la demande de remise en état formulée par le syndicat des copropriétaires. Comment l’article 2224 du code civil s’applique-t-il à la question de la prescription dans cette affaire ?L’article 2224 du code civil dispose que : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. » La société [Adresse 1] a soutenu que la demande du syndicat des copropriétaires était prescrite, arguant que l’installation du climatiseur avait eu lieu plus de cinq ans avant l’assignation. Cependant, le tribunal a constaté que la seule déclaration du vendeur dans l’acte de vente ne suffisait pas à prouver que l’installation avait été réalisée plus de cinq ans auparavant. De plus, le syndicat des copropriétaires n’avait pas connaissance de l’installation avant la mise en demeure, ce qui signifie que le point de départ de la prescription n’était pas établi. Ainsi, l’action du syndicat n’était pas prescrite, et le trouble causé par l’installation illicite du climatiseur justifiait l’intervention du tribunal. Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal sur la société [Adresse 1] ?La décision du tribunal a plusieurs conséquences pour la société [Adresse 1]. Premièrement, elle est condamnée à retirer le bloc de climatisation et à remettre la façade de l’immeuble dans son état antérieur, sous astreinte de 50 euros par jour de retard après un délai de deux mois. Cela signifie que si la société ne se conforme pas à cette ordonnance, elle devra payer une somme significative pour chaque jour de retard. Deuxièmement, la société [Adresse 1] est également condamnée à payer 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ce qui vise à indemniser le syndicat des copropriétaires pour les frais engagés dans cette procédure. Enfin, elle devra supporter les dépens de l’instance, ce qui représente un coût supplémentaire pour la société. Ces conséquences soulignent l’importance de respecter les règles de la copropriété et d’obtenir les autorisations nécessaires avant d’entreprendre des travaux affectant les parties communes. |
JUDICIAIRE
DE PARIS
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N° RG 24/56625
N° Portalis 352J-W-B7I-C5Z4V
N° : 12
Assignation du :
26 septembre 2024
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[1] 2 copies exécutoires
délivrées le :
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 08 janvier 2025
par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Arnaud FUZAT, Greffier.
DEMANDEUR
Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] – [Localité 4], agissant poursuites et diligences de son syndic en exercice, la S.A.S. GRIFFATON & CO, dont le siège social est sis
[Adresse 2]
[Localité 5]
représenté par Maître Eric FORESTIER de la SELEURL FORESTIER AVOCATS, avocats au barreau de PARIS – #R0197
DEFENDERESSE
La S.A.S. [Adresse 1]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Maître Warren SESHIE, avocat au barreau de PARIS – #C0700
DÉBATS
A l’audience du 04 décembre 2024, tenue publiquement, présidée par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente, assistée de Arnaud FUZAT, Greffier,
Après avoir entendu les conseils des parties,
La société [Adresse 1] est propriétaire du lot n° 21 dans l’immeuble en copropriété situé [Adresse 1] à [Localité 4], correspondant à un appartement situé au 6ème étage.
Reprochant à cette dernière l’installation d’un bloc de climatisation sur le balcon de son appartement sans autorisation de l’assemblée générale, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 1] à [Localité 4], après vaines mises en demeure, l’a, par acte du 27 septembre 2024, assignée devant le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, sollicitant, au visa des articles 835 du code de procédure civile et 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, de :
ordonner à la société [Adresse 1] le retrait du bloc de climatisation installé sur son balcon et la remise en état de la façade de l’immeuble dans son état antérieur et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter d’un délai d’un mois après la signification de l’ordonnance à intervenir ;condamner la société [Adresse 1] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;la condamner aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience, le syndicat des copropriétaires maintient ses demandes dans les termes de son assignation.
Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience, la société [Adresse 1] demande au juge des référés de :
A titre principal,
débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes en raison de la prescription ;A titre subsidiaire, considérant, qu’il n’y a lieu à référé en raison de la prescription et du conflit de voisinage sous-jacent aux demandes du syndicat des copropriétaires,
renvoyer les parties à se pourvoir au fond ;En tout état de cause,
condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, somme pour laquelle les tantièmes correspondant à son lot devront être exclus du paiement, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens.
Selon l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Aux termes de l’article 25 b) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant « l’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble », et conformes à la destination de celui-ci.
En application de ces textes, la réalisation, sans autorisation de l’assemblée générale, de travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble est constitutive d’un trouble manifestement illicite justifiant la remise en état des lieux.
Il est constant que cette autorisation doit être donnée préalablement à la réalisation des travaux.
En l’espèce, le règlement de copropriété précise que sont parties communes, notamment, « les gros murs de façade sur rue et sur cour, les pignons, les mitoyennetés […] » et que « les choses communes et tout ce qui concerne l’harmonie de l’immeuble et notamment toutes les parties visibles, soit de la rue, soit de la cour, soit des passages communs, de circulations, ne pourront être modifiés que par décision de l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble, votant dans les conditions qui seront indiquées plus loin ».
Or, il résulte du procès-verbal de constat établi le 29 mai 2024 par Maître [M], commissaire de justice, qu’un bloc de climatisation a été installé sur le balcon du lot appartenant à la société [Adresse 1] surplombant la [Adresse 1]. Ce bloc de climatisation a été fixé par des supports métalliques vissés à la façade et des tuyaux longent la façade sous la fenêtre avant de s’insérer dans le mur en partie supérieure par un orifice d’environ 10 à 20 centimètres de diamètre.
Cette installation porte à l’évidence atteinte à l’aspect extérieur de l’immeuble et affecte les parties communes puisque des trous ont été percés sur le mur extérieur, à la fois pour fixer l’appareil et pour faire passer le tuyau d’évacuation de l’air.
La société [Adresse 1] soutient que la demande de remise en état se heurte à la prescription quinquennale prévue par l’article 2224 du code civil et produit son acte d’achat du 31 janvier 2024, aux termes duquel son vendeur a indiqué qu’il n’avait été réalisé dans les biens aucuns travaux en infraction avec le règlement de copropriété de l’immeuble ou avec la loi du 10 juillet 1965 « à l’exception de la pose d’un climatiseur sur le balcon il y a plus de dix ans ».
Cependant, selon l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
En l’espèce, la seule déclaration du vendeur de la société [Adresse 1] dans l’acte de vente ne suffit pas à établir, avec l’évidence requise en référé, la réalité de la pose du climatiseur plus de cinq ans avant l’assignation, aucune facture relative aux travaux n’étant produite.
De plus, l’acte de vente ne date que du 31 janvier 2024 et, le bloc de climatisation étant situé sur un balcon du 6ème étage, il n’est pas établi que le syndicat des copropriétaires ait eu connaissance de sa présence avant la mise en demeure du 16 mai 2024 adressée à la société [Adresse 1].
Aucun élément ne permettant de dater le point de départ de la prescription quinquennale de l’article 2224 du code civil précité, la prescription de l’action du syndicat des copropriétaires n’est pas acquise avec évidence alors qu’au contraire, l’illicéité du trouble constitué par l’installation du bloc de climatisation, sans autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires, est manifeste.
La défenderesse soutient également que l’action du syndicat des copropriétaires est le résultat d’un conflit de voisinage avec deux copropriétaires, qui se plaignent depuis l’acquisition de son bien de diverses nuisances qu’ils subiraient, en raison d’une location de l’appartement via la plate-forme Airbnb faite par sa locataire à son insu.
Cependant, le différend relatif aux troubles du voisinage dénoncés par des copropriétaires voisins du lot appartenant à la société [Adresse 1] est sans incidence sur l’existence d’un trouble manifestement illicite résultant de travaux sans autorisation de la copropriété.
Dès lors, il sera enjoint à la défenderesse de déposer l’installation de climatisation se trouvant sur son balcon et de remettre en état la façade de l’immeuble dans un délai de deux mois suivant la signification de la présente décision et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard.
La défenderesse, partie perdante, sera tenue aux dépens de l’instance en application de l’article 696 du code de procédure civile.
Elle sera par suite condamnée à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile afin de l’indemniser des frais non compris dans les dépens qu’il a été contraint d’exposer.
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance de référé contradictoire et en premier ressort,
Ordonnons à la société [Adresse 1] de retirer le bloc de climatisation installé sur son balcon et de remettre la façade de l’immeuble dans son état antérieur et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé un délai de deux mois après la signification de la présente ordonnance et pendant un délai de six mois ;
Condamnons la société [Adresse 1] aux dépens ;
La condamnons à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 1] à [Localité 4] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelons que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.
Ainsi fait à Paris, le 8 janvier 2025
Le Greffier, Le Président,
Arnaud FUZAT Rachel LE COTTY
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