Marques Eva c/ Eve & Co : pas de risque de confusion

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Marques Eva c/ Eve & Co : pas de risque de confusion
L’Essentiel : Il n’existe pas de risque de confusion entre les marques EVE AND CO et EVA, bien qu’elles désignent des produits de lingerie. Les signes, bien que partageant les lettres « EV », diffèrent visuellement, phonétiquement et intellectuellement. EVE AND CO, composé de trois mots et huit lettres, présente un rythme en trois temps, tandis qu’EVA, un mot unique de trois lettres, se prononce en deux temps. De plus, EVE évoque un personnage biblique, alors qu’EVA est un prénom courant. Ces différences substantielles suffisent à écarter tout risque de confusion dans l’esprit du public, malgré la similarité des produits.

Il n’existe pas de risque de confusion entre les signes EVE AND CO et EVA désignant tous deux des produits de lingerie.

Risque de confusion pour les marques non identiques

En présence de signes non identiques mais présentant des similarités, il convient de rechercher s’il existe entre les signes en présence un risque de confusion, lequel doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce.

L’appréciation globale du risque de confusion

L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en présence, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci en tenant compte de leurs éléments dominants et distinctifs.

Caractère distinctif élevé

Un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de la marque sur le marché, confère à celle-ci une protection plus étendue.

En l’espèce, les deux signes ont en commun les deux premières lettres EV. Sur le plan visuel les signes en cause ne sont pas de même longueur, trois mots et huit lettres pour le signe contesté, un seul mot de trois lettres pour la marque antérieure.

Phonétiquement, il en découle des rythmes différents en trois temps pour la marque contestée et en deux temps pour la marque première. La séquence d’attaque de la marque contestée est EVE alors que l’unique terme constituant la marque seconde est EVA se différenciant nettement de EVE par la présence du A et la nécessité de le prononcer en deux temps.

Intellectuellement, la marque seconde EVE renvoie au personnage biblique féminin à l’origine de l’humanité alors que EVA est un prénom féminin usuel sans référence nécessaire à la bible et notamment à la figure de EVE, première femme.

Différences substantielles

En conséquence, les signes en présence sont différents au plan visuel, au plan auditif et au plan intellectuel et la seule présence de l’attaque EV dans les deux signes ne suffit pas à rattacher les signes à une origine commune ou à créer un risque de confusion dans l’esprit du public, ce malgré l’identité ou la similarité des produits en présence. Le recours contre la décision du directeur général de l’INPI a été accueilli.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
 
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 2
ARRÊT DU 24 JUIN 2022
 
Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 21/16352 – n° Portalis 35L7-V-B7F-CEKYZ
 
Décision déférée à la Cour : décision du 06 août 2021 – Institut National de la Propriété Industrielle – Numéro national et référence : OP 20-1324 / 4611906 / CAR
 
DECLARANTE AU RECOURS
 
S.A.S. LEVEL UP, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé
 
[Adresse 2]
 
[Localité 3]
 
Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 831 746 821
 
Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, toque L 0056
 
Assistée de Me Aurélie WAGNER, avocate au barreau de PARIS, toque T 01
 
EN PRESENCE DE
 
MONSIEUR LE DIRECTEUR GENERAL DE L’INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE (INPI)
 
[Adresse 1]
 
[Adresse 5]
 
[Localité 4]
 
Représenté par Mme Caroline LE PELTIER, Chargée de Mission
 
APPELEE EN CAUSE
 
Société NATURANA CARL DOLKER GMBH & CO KG, société de droit allemand, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
 
3 hinterweilerstraße
 
[Adresse 6]
 
ALLEMAGNE
 
Assignée par remise de l’acte à l’entité territorialement compétente et n’ayant pas constitué avocat
 
COMPOSITION DE LA COUR :
 
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Laurence LEHMANN, Conseillère
 
Mme Laurence LEHMANN a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
 
Mme Brigitte CHOKRON, Présidente
 
Mme Laurence LEHMANN, Conseillère
 
Mme Agnès MARCADE, Conseillère
 
Greffière lors des débats : Mme Karine ABELKALON
 
Le dossier a préalablement été transmis au Ministère Public, représenté par Mme Monica d’ONOFRIO, Avocate Générale
 
ARRET :
 
Par défaut
 
Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
 
Signé par Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente, en remplacement de Mme Brigitte CHOKRON, Présidente, empêchée, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
 
Vu la demande d’enregistrement n° 20 4611906 déposée le 6 janvier 2020 par la société Level Up portant sur le signe verbal EVE AND CO destiné à distinguer les produits suivants en classe 25 «vêtements, sous-vêtements ; lingerie menstruelle».
 
Vu l’opposition à l’enregistrement de cette marque pour tous les produits ci-dessus énoncés formée le 31 mars 2020 par la société de droit allemand Naturana Carl Dölker GMBH & CO KG sur la base de sa marque verbale antérieure de l’Union européenne, EVA, déposée le 29 mai 2002 sous le n° 002718963, régulièrement renouvelée, destinée notamment à distinguer en classe 25 les «sous-vêtements pour dames, à savoir soutien-gorge, bustiers, corselets, slips, strings, tangas, bodies, panties ; costumes de bain et tous vêtements de plage».
 
Vu la décision du directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) du 6 août 2021 faisant droit à l’opposition et rejetant de la demande d’enregistrement,
 
Vu le recours contre cette décision remis au greffe par la société Level Up, le 6 septembre 2021,
 
Vu les conclusions à l’appui de ce recours de la société Level Up remises au greffe le 3 décembre 2021 et transmises par huissier de justice aux autorités allemandes pour notification à la société Naturana Carl Dölker GMBH & CO KG le 27 décembre 2021, cette société n’ayant pas constitué d’avocat,
 
Vu les observations écrites du directeur général de l’INPI reçues au greffe le 1er mars 2022,
 
Le Ministère public ayant été avisé de l’audience du 21 avril 2022.
 
SUR CE,
 
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties et du directeur général de l’INPI.
 
La décision critiquée a retenu que les produits visés sont identiques ou similaires et que les signes présentent des similitudes suffisantes pour caractériser un risque de confusion entre les marques en cause.
 
La société Level Up critique la décision du directeur général de l’INPI tant sur la comparaison des produits, s’agissant de la «lingerie menstruelle» de la marque seconde, que sur celle des signes et l’appréciation du risque de confusion.
 
Sur la comparaison des produits
 
L’identité ou la similarité des «vêtements» et «sous-vêtements» de la marque seconde avec les «sous-vêtements pour dames, à savoir soutiens-gorge, bustiers, corselets, slips, strings, tangas, bodies, panties ; Costumes de bain et tous vêtements de plage» de la marque antérieure n’est pas contestée par la société Level Up.
 
En revanche, elle fait valoir que la «lingerie menstruelle» qui ne se porte que quelques jours par mois a une fonction de confort et d’hygiène, alors que les sous-vêtements de l’opposant ont une fonction esthétique, de lingerie fine et s’adressent à un public différent.
 
Pour autant, si la «lingerie menstruelle» a une fonction supplémentaire, elle conserve la même nature de sous-vêtements, la même fonction première de protection intime, la même destination à savoir le corps humain, la même clientèle féminine que les produits de la marque antérieure et les mêmes circuits de distribution puisqu’ils peuvent notamment être acquis dans un magasin de lingerie ou dans une grande surface.
 
C’est ainsi à juste titre que le directeur général de l’INPI a retenu comme similaires la «lingerie menstruelle»et les «sous-vêtements pour dames» de la marque première.
 
Sur la comparaison des signes
 
Le signe verbal EVE AND CO de la demande d’enregistrement n’étant pas identique à la marque verbale EVA qu’elle ne reproduit pas sans modification ni ajout en tous les éléments la composant, il convient de rechercher s’il existe entre les signes en présence un risque de confusion, lequel doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce ; l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne le similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en présence, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci en tenant compte de leurs éléments dominants et distinctifs ; un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de la marque sur le marché, confère à celle-ci une protection plus étendue.
 
Les deux signes ont en commun les deux premières lettres EV.
 
Sur le plan visuel les signes en cause ne sont pas de même longueur, trois mots et huit lettres pour le signe contesté, un seul mot de trois lettres pour la marque antérieure.
 
Phonétiquement, il en découle des rythmes différents en trois temps pour la marque contestée et en deux temps pour la marque première. La séquence d’attaque de la marque contestée est EVE alors que l’unique terme constituant la marque seconde est EVA se différenciant nettement de EVE par la présence du A et la nécessité de le prononcer en deux temps.
 
Intellectuellement, la marque seconde EVE renvoie au personnage biblique féminin à l’origine de l’humanité alors que EVA est un prénom féminin usuel sans référence nécessaire à la bible et notamment à la figure de EVE, première femme.
 
En conséquence, les signes en présence sont différents au plan visuel, au plan auditif et au plan intellectuel et la seule présence de l’attaque EV dans les deux signes ne suffit pas à rattacher les signes à une origine commune ou à créer un risque de confusion dans l’esprit du public, ce malgré l’identité ou la similarité des produits en présence.
 
Le recours contre la décision du directeur général de l’INPI doit en conséquence être accueilli.
 
PAR CES MOTIFS
 
Fait droit au recours formé par la société Level Up et annule la décision du directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle du 6 août 2021,
 
Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre recommandée avec avis de réception par les
 
soins du greffier aux parties et au directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle.
 
La Greffière La Conseillère, Faisant Fonction de Présidente
Q/R juridiques soulevées :

Quel est le risque de confusion entre les marques EVE AND CO et EVA ?

Il n’existe pas de risque de confusion entre les signes EVE AND CO et EVA, bien qu’ils désignent tous deux des produits de lingerie. Cette absence de confusion est fondée sur l’analyse des similarités et des différences entre les deux marques. En effet, même si les deux marques partagent les deux premières lettres « EV », elles diffèrent significativement sur plusieurs aspects, notamment visuellement, phonétiquement et intellectuellement.

Comment est évalué le risque de confusion entre des marques non identiques ?

L’évaluation du risque de confusion entre des marques non identiques repose sur une appréciation globale qui prend en compte tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cela inclut la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en présence. L’impression d’ensemble produite par les marques est essentielle, en tenant compte de leurs éléments dominants et distinctifs.

Quels sont les critères de l’appréciation globale du risque de confusion ?

L’appréciation globale du risque de confusion doit se fonder sur la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes. Il est crucial de considérer l’impression d’ensemble que ces signes produisent, en mettant l’accent sur leurs éléments dominants et distinctifs. Un caractère distinctif élevé, qu’il soit intrinsèque ou dû à la notoriété de la marque, offre une protection plus étendue.

Quelles sont les différences entre les marques EVE AND CO et EVA ?

Les marques EVE AND CO et EVA présentent des différences notables. Visuellement, EVE AND CO est plus long, avec trois mots et huit lettres, tandis qu’EVA est un mot unique de trois lettres. Phonétiquement, EVE AND CO se prononce en trois temps, alors qu’EVA se prononce en deux temps. Intellectuellement, EVE évoque le personnage biblique, tandis qu’EVA est un prénom féminin courant, sans lien direct avec la figure de la première femme.

Pourquoi la présence de « EV » ne crée-t-elle pas un risque de confusion ?

La seule présence de l’attaque « EV » dans les deux marques ne suffit pas à établir un lien d’origine commune ou à créer un risque de confusion dans l’esprit du public. Les différences visuelles, auditives et intellectuelles entre les marques sont suffisamment marquées pour dissiper toute ambiguïté. Ainsi, malgré l’identité ou la similarité des produits, le recours contre la décision du directeur général de l’INPI a été accueilli.

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