L’Essentiel : La marque VIP Room, bien que distinctive par sa combinaison de termes, a été annulée en raison d’un défaut d’usage sérieux. L’acronyme « VIP » et le mot « room » sont compréhensibles et évoquent un service de qualité, mais leur association ne constitue pas une désignation usuelle des services de restauration. Selon le code de la propriété intellectuelle, une marque doit être utilisée pour maintenir ses droits. Dans ce cas, le déposant n’a pas prouvé un usage suffisant de la marque, entraînant ainsi la perte de ses droits sur celle-ci pour les services concernés.
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Importance de l’usage de la marqueUne société a tenté sans succès d’obtenir la nullité de la marque VIP Room aux motifs que l’acronyme « VIP » (Very Important Persons), d’usage fréquent dans le langage courant, renvoie à un concept anglo-saxon de traitement des clients comme des hôtes importants et que « VIP ROOM », qui évoque un lieu non nécessairement permanent où les personnes importantes se retrouvent ou sont accueillies, ne fait que décrire la qualité du service de l’endroit. La marque VIP Room aurait pu être, s’agissant de l’activité de restauration, descriptive et utilisée dans un sens laudatif mais c’était sans compter sur la force de l’usage. Conformément à l’article L 714-3 du code de la propriété intellectuelle, est déclaré nul par décision de justice l’enregistrement d’une marque qui n’est pas conforme aux dispositions des articles L 711-1 et à L 711-4, la décision d’annulation ayant un effet absolu. Et, en vertu de l’article L 711-2 du code de la propriété intellectuelle, le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés. Sont dépourvus de caractère distinctif: a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ; b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ; c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle. Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c), être acquis par l’usage. Ainsi que l’a précisé la cour de justice de l’union européenne (CJUE) dans un arrêt Von Colson et Kamann c. Land Nordhein-Westfalen du 10 avril 1984, le juge judiciaire, juge communautaire de droit commun, est tenu d’interpréter dans toute la mesure du possible les dispositions internes conformément au texte des directives communautaires transposées ou non pour atteindre le résultat qu’elles visent. Dans ses arrêts Loendersloot du 11 novembre 1997 et Canon du 29 septembre 1998 la CJUE a dit pour droit que la fonction essentielle de la marque est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou service de ceux qui ont une autre provenance, et que, pour que la marque puisse jouer son rôle d’élément essentiel du système de concurrence non faussé que le traité entend établir, elle doit constituer la garantie que tous les produits ou services qu’elle désigne ont été fabriqués ou fournis sous le contrôle d’une entreprise unique à laquelle peut être attribuée la responsabilité de leur qualité. Aussi, pour remplir sa fonction essentielle d’identification, une marque doit être distinctive, caractère indépendant de l’originalité ou de la nouveauté qui suppose que les éléments entrant dans sa composition soient arbitraires par rapport aux produits ou services qu’elle désigne et soient perçus par le consommateur comme pouvant identifier l’origine du produit en le rattachant à une entreprise spécifique. La réalité du caractère distinctif doit être appréciée par principe au jour du dépôt de la marque. VIP Room : marque valide mais défaut d’usageDans l’affaire soumise, la marque VIP Room est composée de l’acronyme anglais « VIP » de very important person ainsi que du terme « room » qui peuvent respectivement se traduire par « personne très importante » ou « personnalité de marque » et par « chambre » ou « pièce ». Ces mots sont immédiatement compréhensibles par le public français en raison de l’utilisation usuelle dans le langage courant du premier et de l’évidence du second. En revanche, leur combinaison est, au jour du dépôt, arbitraire en elle-même puisqu’elle est constitutive d’un néologisme dont rien ne démontre qu’il fût employé ou qu’il renvoyât à une réalité précise en novembre 2001. Et, si le terme VIP évoque le niveau de gamme d’une prestation, il ne décrit pas la qualité intrinsèque des services de discothèques, de bars, de restauration et de restaurant à service rapide et permanent et n’est pas leur désignation usuelle, générique ou nécessaire. Aussi, le signe « VIP ROOM » ne décrit pas ces services l’égard desquels il est également arbitraire et, susceptible d’être d’emblée perçu par le consommateur moyen comme garantissant leur origine commerciale, est distinctif. En revanche, en raison du défaut de preuve d’un usage sérieux de sa marque, le déposant de la marque VIP Room a été déchu de ses droits sur sa marque verbale française pour les services de restauration et de restaurant à service rapide (classe 43). |
Q/R juridiques soulevées :
Pourquoi la marque VIP Room a-t-elle été contestée ?La marque VIP Room a été contestée par une société qui a tenté d’obtenir sa nullité en arguant que l’acronyme « VIP » est d’usage courant et renvoie à un concept de traitement des clients comme des hôtes importants. Cette société soutenait que l’expression « VIP ROOM » ne faisait que décrire la qualité du service proposé, ce qui pourrait la rendre descriptive et donc non protégeable. Cependant, la force de l’usage de la marque a été un facteur déterminant dans la décision de justice, qui a reconnu que la combinaison des termes était arbitraire et distinctive. Quels articles du code de la propriété intellectuelle sont pertinents dans cette affaire ?Les articles L 714-3 et L 711-2 du code de la propriété intellectuelle sont particulièrement pertinents. L’article L 714-3 stipule que l’enregistrement d’une marque peut être déclaré nul si elle ne respecte pas les dispositions des articles L 711-1 et L 711-4. Cela signifie que si une marque est jugée non distinctive ou descriptive, elle peut être annulée. L’article L 711-2 précise que le caractère distinctif d’une marque doit être évalué par rapport aux produits ou services qu’elle désigne. Les signes qui sont uniquement descriptifs ou génériques ne peuvent pas être protégés. Quel est le rôle de la CJUE dans l’évaluation des marques ?La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) joue un rôle crucial dans l’interprétation des lois sur les marques. Dans l’arrêt Von Colson et Kamann, la CJUE a affirmé que les juges nationaux doivent interpréter les lois internes en conformité avec les directives communautaires. Dans d’autres arrêts, comme ceux de Loendersloot et Canon, la CJUE a souligné que la fonction essentielle d’une marque est de garantir l’identité d’origine des produits ou services. Cela permet aux consommateurs de distinguer les produits d’une entreprise de ceux d’une autre, ce qui est fondamental pour un système de concurrence non faussé. Pourquoi la marque VIP Room a-t-elle été considérée comme distinctive ?La marque VIP Room a été jugée distinctive car, bien que les termes « VIP » et « room » soient compréhensibles, leur combinaison crée un néologisme qui n’était pas utilisé couramment au moment du dépôt. Le terme « VIP » évoque un niveau de gamme, mais ne décrit pas les services de discothèques ou de restauration de manière générique. Ainsi, le signe « VIP ROOM » a été perçu par le consommateur comme garantissant l’origine commerciale des services, ce qui lui confère un caractère distinctif. Quelles ont été les conséquences du défaut d’usage de la marque VIP Room ?Malgré la reconnaissance de la marque VIP Room comme valide et distinctive, le déposant a été déchu de ses droits sur la marque en raison d’un défaut de preuve d’un usage sérieux. Cela signifie que, même si la marque était considérée comme valide, l’absence d’utilisation effective dans le commerce a conduit à sa perte de protection. Cette situation souligne l’importance de l’usage d’une marque pour maintenir ses droits et sa validité sur le marché. |
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