Logo diffamatoire : affaire UFC Que choisir

·

·

Logo diffamatoire : affaire UFC Que choisir

L’Essentiel : L’affaire UFC Que Choisir illustre comment un logo peut être utilisé de manière diffamatoire. Un militant anti-nucléaire a publié un article accusant l’association d’avoir organisé sa propre corruption, accompagné d’un logo détourné. Ce logo, en remplaçant « Que Choisir » par « Que trahir », insinuait que l’association trahissait les consommateurs. La juridiction a jugé que ces imputations portaient atteinte à l’honneur de l’UFC, car elles remettaient en question son intégrité et sa mission. Bien que l’auteur ait tenté de se défendre en invoquant la bonne foi, les éléments factuels présentés étaient jugés insuffisants pour justifier ses accusations.

La diffamation n’est pas limitée par les supports, un logo peut parfaitement constituer une diffamation. L’auteur du logo diffamatoire peut se prévaloir de la bonne foi pour échapper à une condamnation pour diffamation.

Diffamation contre l’UFC Que Choisir

Un conseiller municipal et militant associatif anti-nucléaire a publié sur son blog un article intitulé « Linky : l’UFC Que Choisir a organisé sa propre corruption et trahit les consommateurs » accompagné d’un logo détourné.  Cet article dénonçait la campagne de l’UFC Que choisir intitulée ‘Energie moins chère ensemble’ afin de permettre au consommateur, adhérent ou non de l’association, de bénéficier d’un contrat de fourniture d’énergie à un prix intéressant et selon un contrat expurgé de clauses abusives.  Dans ce but, l’association avait organisé des enchères auxquelles ont participé plusieurs fournisseurs d’énergie, dont Direct Energie, Engie, Ekwateur et Lampiris.

L’article du militant associatif a par la suite, fait l’objet d’une plainte avec constitution de partie civile déposée par une journaliste de l’association l’UFC Que Choisir devant le doyen des juges d’instruction (diffamation). Le consommateur a également publié sur son compte Twitter les propos suivants : « Encore un article trompeur et mensonger d’@UFCquechoisir (séide d’#Enedis) en faveur du compteur malfaisant Linky ».

Assignation régulière

La juridiction a considéré que l’assignation répondait aux exigences de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, que les tweets comportant les images et propos contestés étaient accessibles en tous points du territoire français de sorte que l’association UFC pouvait attraire le défendeur devant le tribunal de grande instance de Paris.

Logo et Tweets diffamatoires

S’agissant de l’image réalisée à partir du logo de l’association UFC, en reprenant la forme, les couleurs et la police de caractères et en remplaçant le terme ‘Que Choisir’ par le terme ‘Que trahir’, son caractère diffamatoire a été apprécié au regard des éléments extrinsèques qui l’entouraient et tout spécialement des commentaires l’accompagnant. Le logo imputait à l’association de trahir le consommateur en relayant les mensonges d’Enedis sur le compteur Linky. Il s’agissait de faits précis, susceptibles de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de leur vérité. Ils étaient bien attentatoires à l’honneur et à la considération de l’UFC dès lors qu’il était reproché à l’association de ne pas remplir ses missions telles que définies dans ses statuts, d’adopter un comportement moralement répréhensible en relayant des mensonges et d’agir en contradiction avec l’éthique d’une association de consommateurs laquelle a pour vocation d’informer ces derniers en toute indépendance, notamment en analysant pour eux les offres commerciales et en leur donnant les éléments de jugement utiles.  Dans ces conditions, les images et propos poursuivis présentaient bien un caractère diffamatoire.

Bonne foi exclue

Les imputations diffamatoires sont réputées, de droit, faites avec intention de nuire, mais elles peuvent être justifiées lorsque leur auteur établit sa bonne foi, en prouvant qu’il a poursuivi un but légitime, étranger à toute animosité personnelle, et qu’il s’est conformé à un certain nombre d’exigences, en particulier de sérieux de l’enquête, ainsi que de prudence dans l’expression, étant précisé que la bonne foi ne peut être déduite de faits postérieurs à la diffusion des propos. Ces critères s’apprécient différemment selon le genre de l’écrit en cause et la qualité de la personne qui s’y exprime et, notamment, avec une moindre rigueur lorsque l’auteur des propos diffamatoires n’est pas un journaliste qui fait profession d’informer, mais une personne elle-même impliquée dans les faits dont elle témoigne. Lorsque les propos incriminés concernent un sujet d’intérêt général, leur auteur doit établir qu’ils reposent sur une base factuelle suffisante.

En l’espèce, les propos litigieux constituaient une réaction aux poursuites engagées par la journaliste de l’association à l’encontre du consommateur et s’inscrivaient dans un but légitime d’expression. Proférés dans un contexte de mise en cause personnelle et dans son domaine de militantisme, une certaine virulence dans l’expression était donc acceptable. Les juges ont retenu l’absence d’animosité personnelle.

Cependant, les éléments factuels détenus par le militant étaient insuffisants. S’il est constant que les conditions générales de vente d’électricité par la société Lampiris attribuaient à l’association UFC un rôle d’information pendant la première année du contrat et prévoyaient l’accord du consommateur, client de Lampiris, pour transférer ses données personnelles à UFC Que choisir en vue d’assurer le suivi du contrat et des réclamations, ces dispositions contractuelles ne constituaient pas une entente entre d’une part la société Lampiris, et moins encore la société Enedis, et d’autre part l’association UFC Que Choisir.

Par ailleurs, aucun élément ne permettait d’affirmer qu’UFC Que Choisir était intervenue, à quelque titre que ce soit, dans l’implantation des compteurs Linky qui ressortait du seul domaine d’intervention d’Enedis. Dans ces conditions, le militant ne disposait pas d’éléments factuels suffisants pour tenir les propos retenus comme ayant un caractère diffamatoire.

Périmètre de la diffamation

L’article 29 al. 1 de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé. Il doit s’agir d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de sa vérité, ce qui distingue ainsi la diffamation, d’une part, de l’injure -caractérisée, selon le deuxième alinéa de l’article 29, par toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait – et, d’autre part, de l’expression subjective d’une opinion ou d’un jugement de valeur, dont la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées mais dont la vérité ne saurait être prouvée.

L’honneur et la considération de la personne ne doivent pas s’apprécier selon les conceptions personnelles et subjectives de celle-ci, mais en fonction de critères objectifs et de la réprobation générale provoquée par l’allégation litigieuse, que le fait imputé soit pénalement répréhensible ou manifestement contraire aux règles morales communément admises. La diffamation, qui peut se présenter sous forme d’allusion ou d’insinuation, doit être appréciée en tenant compte des éléments intrinsèques et extrinsèques au support en cause, à savoir tant du contenu même des propos que du contexte dans lequel ils s’inscrivent. Enfin, les juges ne sont pas tenus par l’interprétation de la signification diffamatoire des propos incriminés proposée par l’assignation et il leur appartient de rechercher si ceux-ci contiennent l’imputation formulée par la partie civile ou celle d’un autre fait contenu dans les propos en question.

Télécharger la décision

Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce que la diffamation selon la loi française ?

La diffamation, selon l’article 29 al. 1 de la loi du 29 juillet 1881, est définie comme toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne ou d’un corps.

Pour qu’une déclaration soit considérée comme diffamatoire, elle doit être précise et susceptible d’être prouvée. Cela signifie qu’il doit exister un débat contradictoire sur la véracité de l’allégation.

Cette définition distingue la diffamation de l’injure, qui est caractérisée par des expressions outrageantes sans imputation de faits, et de l’expression subjective d’opinions, qui ne peut être prouvée.

Quels sont les éléments constitutifs de la diffamation ?

Les éléments constitutifs de la diffamation incluent l’allégation d’un fait précis, l’atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne visée, et la possibilité d’un débat contradictoire sur la véracité de l’allégation.

L’honneur et la considération ne doivent pas être évalués selon des critères subjectifs, mais plutôt selon des critères objectifs et la réprobation générale que l’allégation pourrait susciter.

De plus, la diffamation peut se manifester sous forme d’allusion ou d’insinuation, et doit être appréciée en tenant compte du contexte dans lequel elle s’inscrit.

Comment la bonne foi peut-elle être invoquée en cas de diffamation ?

La bonne foi peut être invoquée par l’auteur d’une allégation diffamatoire pour échapper à une condamnation. Pour cela, il doit prouver qu’il a agi avec un but légitime, sans animosité personnelle, et qu’il a respecté certaines exigences, notamment en matière de sérieux de l’enquête et de prudence dans l’expression.

Il est important de noter que la bonne foi ne peut pas être déduite de faits survenus après la diffusion des propos.

Les juges évaluent la bonne foi en tenant compte du genre de l’écrit et de la qualité de l’auteur, avec une rigueur moindre pour les personnes non professionnelles de l’information.

Quel est le cas de diffamation impliquant l’UFC Que Choisir ?

Dans le cas de l’UFC Que Choisir, un conseiller municipal a publié un article sur son blog accusant l’association d’organiser sa propre corruption. Cet article était accompagné d’un logo détourné, insinuant que l’association trahissait les consommateurs.

L’article a conduit à une plainte pour diffamation déposée par une journaliste de l’association. De plus, des tweets ont été publiés, qualifiant l’association de « séide d’#Enedis » et accusant ses articles d’être trompeurs.

La juridiction a jugé que l’assignation était régulière et que les propos diffamatoires étaient accessibles sur tout le territoire français.

Comment le logo détourné a-t-il été jugé diffamatoire ?

Le logo détourné de l’UFC Que Choisir, qui remplaçait « Que Choisir » par « Que trahir », a été jugé diffamatoire en raison du contexte et des commentaires qui l’accompagnaient.

Il imputait à l’association des mensonges sur le compteur Linky, ce qui était susceptible de nuire à son honneur et à sa considération.

Les juges ont considéré que les allégations portées contre l’association étaient précises et pouvaient faire l’objet d’un débat contradictoire, ce qui a renforcé le caractère diffamatoire des propos.

Quelles étaient les insuffisances des éléments factuels présentés par le militant ?

Les éléments factuels présentés par le militant étaient jugés insuffisants pour justifier ses accusations. Bien que les conditions générales de vente de Lampiris mentionnaient un rôle d’information pour l’UFC Que Choisir, cela ne prouvait pas une entente entre l’association et Enedis.

Aucun élément ne démontrait que l’UFC Que Choisir avait joué un rôle dans l’implantation des compteurs Linky, qui relevait uniquement de la responsabilité d’Enedis.

Ainsi, le militant n’avait pas de base factuelle suffisante pour soutenir ses propos, qui ont été considérés comme diffamatoires.

Comment les juges évaluent-ils la diffamation dans un contexte de débat d’idées ?

Les juges évaluent la diffamation en tenant compte du contenu des propos et du contexte dans lequel ils sont exprimés. Dans un débat d’idées, la pertinence des opinions peut être discutée, mais cela ne doit pas inclure des allégations diffamatoires.

Les juges ne sont pas tenus par l’interprétation de la signification diffamatoire proposée par l’assignation et doivent rechercher si les propos contiennent effectivement l’imputation formulée.

Cette évaluation prend en compte la nature des propos, leur impact sur l’honneur et la considération de la personne visée, ainsi que les éléments extrinsèques qui peuvent influencer la perception de la diffamation.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon