Limitation de la prise en charge des frais de transport en raison de l’absence de spécialités en kinésithérapie.

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Limitation de la prise en charge des frais de transport en raison de l’absence de spécialités en kinésithérapie.

L’Essentiel : Madame [V] [Z] épouse [O] a contesté la décision de la CPAM du Puy-de-Dôme, qui a limité la prise en charge de ses frais de transport pour des soins de kinésithérapie. Elle soutient souffrir d’une affection longue durée et avoir besoin d’un kinésithérapeute spécialisé. La CPAM, quant à elle, se base sur l’avis du médecin conseil, affirmant que le remboursement est limité aux soins du praticien le plus proche. Le Tribunal, après évaluation, conclut que le kinésithérapeute désigné est compétent, déboutant ainsi Madame [V] [Z] et la condamnant aux dépens, tout en lui laissant la possibilité de se pourvoir en cassation.

Contexte de l’affaire

Madame [V] [Z] épouse [O] a introduit un recours devant le Tribunal contre la décision de rejet de la Commission de Recours Amiable (CRA) de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) du Puy-de-Dôme. Cette décision confirmait la limitation de la prise en charge des frais de transport pour des soins de kinésithérapie entre le 16 mars et le 8 juin 2023.

Demande de Madame [V] [Z] épouse [O]

Dans sa requête, Madame [V] [Z] épouse [O] demande l’annulation de la décision de la CPAM et de la CRA, ainsi que la prise en charge des frais de transport liés à ses soins. Elle fait valoir qu’elle souffre d’une affection longue durée et qu’elle a été orientée vers un kinésithérapeute spécialisé en maxillofacial après un suivi jugé insuffisant par son premier praticien.

Position de la CPAM

La CPAM du Puy-de-Dôme a rejeté le recours, arguant qu’elle est tenue par l’avis du médecin conseil qui a limité la prise en charge aux frais de transport vers le praticien le plus proche. Elle souligne qu’il n’existe pas de spécialités reconnues en kinésithérapie et se réfère à une décision antérieure du Tribunal Judiciaire concernant Madame [V] [Z] épouse [O].

Cadre juridique

Le Tribunal rappelle qu’il n’a pas compétence pour annuler les décisions de la CPAM et de la CRA. Selon l’article R322-10 du code de la sécurité sociale, les frais de transport pour les malades atteints d’une affection de longue durée sont pris en charge, mais l’article R322-10-5 précise que le remboursement est basé sur la distance au praticien le plus proche.

Évaluation de la situation médicale

Madame [V] [Z] épouse [O] a été diagnostiquée avec une paralysie faciale périphérique nécessitant des séances de rééducation. Les attestations des kinésithérapeutes impliqués indiquent que le premier praticien a reconnu ses limites et a recommandé une consultation avec un spécialiste en rééducation maxillo-faciale.

Analyse du Tribunal

Le Tribunal examine si le cabinet du kinésithérapeute de [Localité 3] est la structure de soins appropriée la plus proche. Il conclut que le kinésithérapeute de [Localité 4] est habilité à réaliser les soins nécessaires et a effectivement pratiqué des manœuvres conformes à la prescription médicale.

Décision du Tribunal

En conséquence, le Tribunal déboute Madame [V] [Z] épouse [O] de son recours et la condamne aux dépens. Il rappelle également que les parties peuvent se pourvoir en cassation dans un délai de deux mois suivant la notification de la décision.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de prise en charge des frais de transport pour les malades atteints d’une affection de longue durée ?

La prise en charge des frais de transport pour les malades atteints d’une affection de longue durée est régie par l’article R322-10 du Code de la sécurité sociale. Cet article stipule que :

« Les frais de transport liés aux traitements ou examens prescrits pour les malades reconnus atteints d’une affection de longue durée prescrits à un assuré se trouvant dans l’obligation de se déplacer pour recevoir ces soins sont pris en charge. »

Il est donc essentiel que le transport soit directement lié à des soins médicaux prescrits pour une affection de longue durée.

En outre, l’article R322-10-5 précise que :

« Le remboursement de ces frais de transport est calculé sur la base de la distance séparant le point de prise en charge du malade de la structure de soins prescrite appropriée la plus proche. »

Cela signifie que la prise en charge est limitée à la structure de soins la plus proche, ce qui peut poser des questions lorsque plusieurs options de soins existent.

Comment la CPAM détermine-t-elle la structure de soins appropriée pour un patient ?

La CPAM se base sur l’avis du médecin conseil pour déterminer la structure de soins appropriée. Dans le cas présent, la CPAM a conclu que la prise en charge des frais de transport devait être limitée au praticien le plus proche, en se fondant sur l’absence de spécialités reconnues en kinésithérapie.

La jurisprudence, notamment celle citée dans le jugement, indique que :

« Les juges du fond doivent rechercher si, en l’absence de spécialité en kinésithérapie, le cabinet du masseur-kinésithérapeute consulté ne constitue pas la structure de soins appropriée à l’état de l’assuré la plus proche du domicile de ce dernier. »

Cela implique que la CPAM doit évaluer si le kinésithérapeute consulté est réellement le plus proche et s’il est capable de fournir les soins nécessaires.

Quelles sont les implications de l’absence de spécialités en kinésithérapie pour la prise en charge des soins ?

L’absence de spécialités reconnues en kinésithérapie a des conséquences directes sur la prise en charge des soins. Comme mentionné dans le jugement, la jurisprudence a établi qu’il n’existe pas de spécialité en kinésithérapie, ce qui signifie que tous les kinésithérapeutes sont considérés comme ayant des compétences similaires.

L’article R4321-5 3° a) du Code de la santé publique précise que :

« Sur prescription médicale, le masseur-kinésithérapeute est habilité à participer aux traitements de rééducation d’une fonction particulière. »

Cela inclut la rééducation de la mobilité faciale, ce qui signifie qu’un kinésithérapeute, même sans spécialisation, peut être compétent pour traiter des affections faciales.

Ainsi, la CPAM ne peut pas justifier une limitation de prise en charge uniquement sur la base de l’absence de spécialité, car tous les kinésithérapeutes sont habilités à réaliser des soins de rééducation, y compris ceux nécessaires pour des affections spécifiques comme la paralysie faciale.

Quels recours sont possibles après une décision de la CPAM concernant la prise en charge des frais de transport ?

Après une décision de la CPAM, les assurés ont la possibilité de contester cette décision devant le Tribunal Judiciaire, comme l’indique l’article R142-15 du Code de la sécurité sociale :

« Dans les deux mois de réception de la présente notification, chacune des parties peut se pourvoir en cassation contre la décision du Tribunal Judiciaire – Pôle Social et que ce pourvoi est exclusivement formé par ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation. »

Cela signifie que les assurés doivent agir rapidement pour contester une décision, et ils doivent être représentés par un avocat pour les procédures de cassation.

En conclusion, les assurés doivent être conscients de leurs droits et des procédures à suivre pour contester les décisions de la CPAM concernant la prise en charge des frais de transport liés à des soins médicaux.

Jugement du : 09/01/2025

N° RG 24/00113 –
N° Portalis DBZ5-W-B7I-JNKS

CPS

MINUTE N° :

Mme [V] [Z] épouse [O]

CONTRE

CPAM DU PUY-DE-DOME

Copies :

Dossier
[V] [Z] épouse [O]
CPAM DU PUY-DE-DOME
la SCP TREINS-POULET-VIAN
ET ASSOCIÉS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CLERMONT-FERRAND
Pôle Social
Contentieux Général

LE NEUF JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ

dans le litige opposant :

Madame [V] [Z] épouse [O]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Fabienne SERTILLANGE de la SCP TREINS-POULET-VIAN ET ASSOCIÉS, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND,

DEMANDERESSE

ET :

CPAM DU PUY-DE-DOME
[Localité 2]
représentée par Mme [K] [R], munie d’un pouvoir,

DEFENDERESSE

LE TRIBUNAL,

composé de :

Cécile CHERRIOT, Vice-Présidente près le Tribunal judiciaire de CLERMONT- FERRAND, chargée du Pôle Social,
Françoise GARCIN-LEFEBVRE, Assesseur représentant les employeurs,
Mickaël ATTOU, Assesseur représentant les salariés,

assistés de Marie-Lynda KELLER, greffière, lors des débats et lors de la mise à disposition de la présente décision.

***

Après avoir entendu les conseils des parties à l’audience publique du 7 novembre 2024 et les avoir avisés que le jugement serait rendu ce jour par mise à disposition au greffe, le tribunal prononce le jugement suivant : 

EXPOSE DU LITIGE

Par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 14 février 2024, Madame [V] [Z] épouse [O] a saisi le présent Tribunal d’un recours contre la décision explicite de rejet de la Commission de Recours Amiable (CRA) de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) du Puy-de-Dôme confirmant la décision de la caisse de limiter la prise en charge des frais de transports effectués sur la période du 16 mars au 8 juin 2023.

Madame [V] [Z] épouse [O] demande au Tribunal :
– d’annuler la décision de rejet rendue par la CPAM du Puy-de-Dôme ainsi que la décision de la CRA,
– d’ordonner la prise en charge des frais de transport litigieux.

Elle expose qu’elle bénéficie d’une affection longue durée depuis décembre 2021 et qu’à ce titre, elle dispose de bons de transports pour se rendre chez le kinésithérapeute. Elle précise qu’elle a été suivie pendant quatre séances par un masseur kinésithérapeute situé à [Localité 4], lequel a estimé que les soins prodigués étaient insuffisants et que la situation dépassait ses compétences professionnelles ; de ce fait, il l’a orientée vers un kinésithérapeute formé en maxillofacial. Elle s’est donc rapprochée de Madame [X], masseur kinésithérapeute formée en rééducation maxillo-faciale située à [Localité 3]. Elle estime alors qu’au vu des certificats médicaux qu’elle produit, la particularité de son état de santé doit amener le Tribunal à considérer que l’établissement de santé approprié le plus proche était bel et bien le masseur kinésithérapeute de [Localité 3].

La CPAM du Puy-de-Dôme conclut au rejet du recours.

Elle rappelle qu’elle est liée par l’avis du médecin conseil, lequel a considéré que la prise en charge des frais de transport devait être limitée au praticien le plus proche dans la mesure où il n’existe pas, pour les kinésithérapeutes, de spécialités en tant que telles. Elle ajoute qu’elle ne peut déroger à cette règle du praticien le plus proche. Elle fait également observer que le Pôle social du Tribunal Judiciaire de Clermont-Ferrand a statué en ce sens lors d’une précédente contestation de Madame [V] [Z] épouse [O]. Elle en déduit que c’est à bon droit qu’elle a notifié une limitation de prise en charge.

MOTIFS

Il convient de rappeler, à titre liminaire, que le présent Tribunal n’est pas compétent pour annuler les décisions rendues par la CPAM du Puy-de-Dôme et par la CRA, ces décisions n’ayant aucun caractère juridictionnel.

Il résulte, par ailleurs, de l’article R322-10 du code de la sécurité sociale que les frais de transport liés aux traitements ou examens prescrits pour les malades reconnus atteints d’une affection de longue durée prescrits à un assuré se trouvant dans l’obligation de se déplacer pour recevoir ces soins sont pris en charge.

Toutefois, l’article R322-10-5 du même code prévoit que le remboursement de ces frais de transport est calculé sur la base de la distance séparant le point de prise en charge du malade de la structure de soins prescrite appropriée la plus proche.

En l’espèce, Madame [V] [Z] épouse [O] a sollicité la prise en charge des frais de transports effectués sur la période du 16 mars au 8 juin 2023 pour se rendre auprès du masseur-kinésithérapeute de [Localité 3] (63); ces transports étant prescrits dans le cadre d’une affection de longue durée.

Conformément à l’avis de son médecin conseil, la CPAM du Puy-de-Dôme a estimé que la prise en charge de ces frais de transport devait être limitée en application des dispositions de l’article R322-10-5 précité au motif qu’il n’existe pas, dans la profession des kinésithérapeutes, de notion de spécialités reconnues par l’assurance maladie.

Il est de jurisprudence constante en la matière (notamment chambre sociale du 10 octobre 1996, pourvoi n°94-18.799 et du 27 mars 1997, pourvoi n°95-17.395) que les juges du fond doivent rechercher si, en l’absence de spécialité en kinésithérapie, le cabinet du masseur-kinésithérapeute consulté ne constitue pas la structure de soins appropriée à l’état de l’assuré la plus proche du domicile de ce dernier.

Certes, cette jurisprudence a précisé que cette recherche devait s’effectuer, “au besoin après mise en oeuvre d’une expertise médicale dans les formes de l’article L141-1 du code de la sécurité sociale”. Il s’avère, toutefois, que les dispositions de cet article L141-1 ont été abrogées par la loi n°2019-1446 du 24 décembre 2019, de sorte que l’expertise technique visée par cette jurisprudence n’existe plus.

Dès lors, il appartient au présent Tribunal de rechercher, par tout autre moyen que l’expertise technique et, notamment, au regard des pièces qui lui sont produites par les parties, si, en l’absence de spécialité en kinésithérapie reconnue par l’assurance maladie, le cabinet du kinésithérapeute situé à [Localité 3] (63) constitue, ou non, la structure de soins appropriée à l’état de Madame [V] [Z] épouse [O] la plus proche du domicile de cette dernière.

Il s’avère, en l’occurrence, que Madame [V] [Z] épouse [O] présente une paralysie faciale périphérique (PFP) gauche de stade IV pour laquelle des séances de rééducation ont été prescrites. Le médecin prescripteur indique que ces séances de rééducation doivent comporter des “manoeuvres endo et exo buccale”.

Par attestation établie le 5 mai 2023, Madame [T] [M] [I], masseur-kinésithérapeute, situé à [Localité 4] (63), lieu du domicile de Madame [V] [Z] épouse [O] , a indiqué avoir tenté une rééducation mais avoir constaté, au regard de “l’ampleur de (la) paralysie”, que ses soins étaient insuffisants et que cela dépassait ses compétences professionnelles. Elle a donc conseillé à Madame [V] [Z] épouse [O] “d’aller voir un kinésithérapeute formé en maxillo-facial, un professionnel qui pourrait mieux l’aider”.

Par attestation du 18 septembre 2024, Madame [I] a confirmé avoir suivi Madame [V] [Z] épouse [O] pendant quatre séances et avoir “effectué des massages et des étirements faciales associées à des exercices doux”. Toutefois, compte tenu de

l’ampleur de la paralysie elle s’est “rendu compte (qu’elle) n’était pas formée pour prendre en
charge ces soins ainsi que ses collègues” de sorte qu’elle a conseillé à Madame [V] [Z] épouse [O] “d’aller voir un kinésithérapeute formé en rééducation maxillo-faciale”.

Il ressort donc de ces attestations que le kinésithérapeute de [Localité 4] a pratiqué des manoeuvres endo et exo buccales telles que prescrites ; ce qui démontre qu’il s’est, initialement, estimé suffisamment formé et compétent pour effectuer de telles manoeuvres. Ce n’est que parce que ce dernier a considéré que sa prise en charge était insuffisante et qu’il n’était pas assez formé que Madame [V] [Z] épouse [O] a été invitée à consulter un masseur kinésithérapeute ayant validé une formation en rééducation maxillo-faciale. Or, la jurisprudence précitée a reconnu qu’il n’existe pas de spécialité en kinésithérapie.

Il ressort, en outre, de l’article R4321-5 3° a) du code de la santé publique que : “Sur prescription médicale, le masseur-kinésithérapeute est habilité à participer aux traitements de rééducation d’une fonction particulière” et notamment aux traitements de “Rééducation de la mobilité faciale et de la mastication” ; ce qui démontre que n’importe quel masseur-kinésithérapeute peut pratiquer une rééducation de la mobilité faciale.

Dès lors, il résulte de ces éléments que le cabinet de kinésithérapie situé à [Localité 3] n’est pas la structure de soins appropriée à l’état de Madame [V] [Z] épouse [O] la plus proche du domicile de cette dernière puisque le kinésithérapeute de [Localité 4] est habtilité à réaliser des manoeuvres endo et exo buccales et a reconnu avoir réalisé de telles manoeuvres, conformément à la prescription médicale.

Il conviendra, par conséquent, de débouter Madame [V] [Z] épouse [O] de son recours et de la condamner aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant après débats publics, par jugement contradictoire, en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

DÉBOUTE Madame [V] [Z] épouse [O] de son recours,

CONDAMNE Madame [V] [Z] épouse [O] aux dépens,

RAPPELLE que dans les deux mois de réception de la présente notification, chacune des parties peut se pourvoir en cassation contre la décision du Tribunal Judiciaire – Pôle Social et que ce pourvoi est exclusivement formé par ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation (article R142-15 du code de la sécurité sociale).

En foi de quoi le présent jugement a été signé par la Présidente et la Greffière,

La Greffière La Présidente


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